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17/10/2019 | FRANCE | N°18-17058

France | France, Cour de cassation, Chambre civile 3, 17 octobre 2019, 18-17058


LA COUR DE CASSATION, TROISIÈME CHAMBRE CIVILE, a rendu l'arrêt suivant :

Attendu, selon l'arrêt attaqué (Montpellier, 25 janvier 2018), que Mme L... a fait construire, en qualité de maître de l'ouvrage, bénéficiant d'une assurance dommages-ouvrage souscrite auprès de la société Amtrust international underwriters, représentée en France par la société European Insurance services limited (la société EISL), un groupe d'immeubles par la société Cotebat, assurée auprès de la société Sagena, à laquelle a succédé la société SMA, sous la maîtrise d'oeuvre de la soc

iété J... C... architecte (la société J... C...), assurée auprès de la société Mut...

LA COUR DE CASSATION, TROISIÈME CHAMBRE CIVILE, a rendu l'arrêt suivant :

Attendu, selon l'arrêt attaqué (Montpellier, 25 janvier 2018), que Mme L... a fait construire, en qualité de maître de l'ouvrage, bénéficiant d'une assurance dommages-ouvrage souscrite auprès de la société Amtrust international underwriters, représentée en France par la société European Insurance services limited (la société EISL), un groupe d'immeubles par la société Cotebat, assurée auprès de la société Sagena, à laquelle a succédé la société SMA, sous la maîtrise d'oeuvre de la société J... C... architecte (la société J... C...), assurée auprès de la société Mutuelle des architectes français (la MAF) ; qu'elle a vendu en l'état futur d'achèvement une maison d'habitation à M. et Mme Q... et une autre maison à M. et Mme B... ; qu'après expertise, elle a assigné l'assureur dommages-ouvrage, l'architecte et son assureur, l'assureur de la société Cotebat, M. et Mme B... et M. et Mme Q... en indemnisation des différents préjudices subis pendant le chantier et en paiement de solde par les acquéreurs ;

Sur le premier moyen, ci-après annexé :

Attendu que Mme L... fait grief à l'arrêt de rejeter sa demande de condamnation de la société SMA à l'indemniser en sa qualité d'assureur de la société Cotebat et à la garantir des condamnations prononcées contre elle ;

Mais attendu qu'ayant retenu qu'en produisant au maître de l'ouvrage son attestation d'assurance comportant les mêmes références que les conditions particulières et les conditions générales, la société Cotebat avait manifesté sa volonté de souscrire cette police avec toutes ses conditions d'application, notamment les clauses d'exclusion et de limitation de garantie contenues dans les conditions générales, la cour d'appel a pu en déduire, abstraction faite d'un motif erroné mais surabondant sur la nature de l'assurance de responsabilité civile, que la SMA était bien fondée à opposer l'exclusion de garantie concernant les dommages affectant les ouvrages exécutés par son assuré et a légalement justifié sa décision de ce chef ;

Sur le second moyen, ci-après annexé :

Attendu que Mme L... fait grief à l'arrêt de décider que l'architecte et la MAF ne peuvent être condamnés in solidum avec le maître de l'ouvrage et les autres constructeurs à payer à M. et Mme B... et M. et Mme Q... des dommages-intérêts en réparation de leurs préjudices, et de déclarer sans objet son appel en garantie contre l'architecte ;

Mais attendu qu'ayant retenu, par une interprétation souveraine, exclusive de dénaturation, que l'imprécision des termes de la clause G 6.3.1 des conditions générales du contrat d'architecte rendait nécessaire, que l'application de cette clause d'exclusion de solidarité interdisait de retenir une responsabilité pour les dommages imputables aux autres intervenants et était opposable au maître de l'ouvrage et à ses ayants droit et qu'une telle clause était licite quand était recherchée la responsabilité contractuelle de l'architecte, la cour d'appel en a déduit à bon droit que le jugement devait être infirmé en ce qu'il avait prononcé des condamnations in solidum contre la société J... C... ;

D'où il suit que le moyen n'est pas fondé ;

PAR CES MOTIFS :

REJETTE le pourvoi ;

Condamne Mme L... aux dépens ;

Vu l'article 700 du code de procédure civile, rejette les demandes ;

Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, troisième chambre civile, et prononcé par le président en son audience publique du dix-sept octobre deux mille dix-neuf.

MOYENS ANNEXES au présent arrêt :

Moyens produits par la SCP Richard, avocat aux Conseils, pour Mme S... épouse L...

PREMIER MOYEN DE CASSATION :

IL EST FAIT GRIEF à l'arrêt attaqué d'avoir débouté Madame N... S... épouse L... de sa demande, tendant à voir condamner la Société SMA, anciennement dénommée SAGENA, à l'indemniser, en sa qualité d'assureur de la Société COTEBAT, des préjudices qu'elle a subi et à la garantir des condamnations prononcées à son encontre ;

AUX MOTIFS QUE la SMA, assureur de la Société COTEBAT, conclut à l'absence de garantie puisque les conditions particulières et générales de la police excluent la responsabilité civile de l'assuré pour les dommages matériels subis par les travaux et affectant l'ouvrage réalisé par ce dernier ; qu'en réponse Madame L... et les acquéreurs soulèvent l'absence de signature de ces conditions particulières et générales ainsi que la teneur de l'attestation d'assurance qui ne mentionne aucune restriction de garantie ; que l'attestation d'assurance délivrée le 26 novembre 2011 stipule que le contrat garantit la responsabilité civile encourue vis-à-vis des tiers par l'assuré du fait de ses activités professionnelles que ce soit en cours ou après exécution de ses travaux ; que cependant les conditions générales de cette police d'assurance précisent que les dommages matériels subis par les travaux, les ouvrages ou parties d'ouvrages exécutés par l'assuré ne sont pas garantis de même que les conséquences pécuniaires découlant d'un retard dans l'exécution du marché ou de réserves à la réception de l'ouvrage ; que la charge de la preuve d'une exclusion de garantie incombe à l'assureur ; que ce dernier produit la photocopie des conditions particulières qui portent le numéro de contrat figurant sur l'attestation ainsi que la référence des conditions générales versées également aux débats en photocopie ; que le contrat d'assurance est un contrat consensuel parfait dès la rencontre des volontés de l'assureur et de l'assuré ; que, la Société COTEBAT, en produisant au maître de l'ouvrage son attestation d'assurance comportant les mêmes références que les conditions particulières et générales, a bien manifesté sa volonté de souscrire cette police avec toutes ses conditions d'application ; que la SMA justifie donc de l'exclusion de garantie concernant les dommages affectant les ouvrages exécutés par son assuré ainsi que les conséquences pécuniaires découlant de l'exécution du chantier ; que si l'attestation d'assurance doit être fiable et apporter des informations sur la nature et l'étendue des garanties, elle ne reproduit pas toutes les clauses du contrat d'assurance, notamment les clauses d'exclusion et de limitation de garantie ; que l'attestation produite par la Société COTEBAT précisait d'ailleurs qu'elle ne pouvait engager l'assureur au-delà des clauses et conditions du contrat auquel elle se référait ; qu'enfin l'assurance de responsabilité civile est une assurance de dommages non obligatoire souscrite au bénéfice exclusif de l'entrepreneur et non une assurance de responsabilité pour le compte du maître de l'ouvrage ou de ses ayants droits ; qu'en conséquence la SMA est bien-fondée à opposer une absence de garantie des dommages intervenus avant toute réception des travaux et à demander sa mise hors de cause ; que toutes les condamnations de la SMA prononcées par le jugement entrepris seront infirmées ;

1°) ALORS QU'une clause d'exclusion de garantie doit avoir été portée à la connaissance de l'assuré au moment de l'adhésion à la police ou, tout au moins, antérieurement à la réalisation du sinistre, pour lui être opposable ; que si une clause d'exclusion de garantie peut valablement figurer dans les conditions générales de la police d'assurance, l'assureur ne peut s'en prévaloir qu'à la condition d'établir avoir porté ses conditions générales à la connaissance de l'assuré ; qu'en se bornant à affirmer, pour décider que la Société SMA établissait que la clause d'exclusion avait été portée à la connaissance de la Société COTEBAT, que le numéro des conditions générales figurait dans l'attestation d'assurance et dans une copie des conditions particulières, qui n'était pas signée par l'assuré, sans constater que ces conditions générales avaient été portées à la connaissance de la Société COTEBAT, la Cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard des articles L 112-2, dans sa rédaction antérieure à l'ordonnance n° 2015-1033 du 20 août 2015, et L 112-4 du Code des assurances, ensemble l'article L.124-3 du même code ;

2°) ALORS QUE le tiers lésé dispose d'un droit d'action directe à l'encontre de l'assureur garantissant la responsabilité civile de la personne responsable ; qu'en décidant néanmoins que Madame L... ne disposait pas, afin d'obtenir réparation de ses préjudices, d'un droit d'action directe à l'encontre de la Société SMA, fondée sur la police d'assurance souscrite par la Société COTEBAT auprès de cette dernière, la Cour d'appel a violé l'article L 124-3 du Code des assurances.

SECOND MOYEN DE CASSATION :

IL EST FAIT GRIEF à l'arrêt attaqué d'avoir décidé que la Société J... C... et la Société MUTUELLE DES ARCHITECTES FRANÇAIS (MAF) ne peuvent être condamnés in solidum avec le maître de l'ouvrage et les autres constructeurs à payer aux époux B... et aux époux Q... des dommages-intérêts en réparation de leurs préjudices, puis d'avoir en conséquence déclaré sans objet l'appel en garantie exercé par Madame N... H... à l'encontre de la Société J... C... et de la Société MAF ;

AUX MOTIFS QUE le contrat d'architecte dispose que "il ne peut être tenu responsable, de quelque manière que ce soit, et en particulier solidairement, des dommages imputables aux actions ou omissions du maître d'ouvrage ou des autres intervenants dans l'opération faisant l'objet du contrat" ; que si l'article L.111-20-1 du Code de la construction et de l'habitation répute non écrite toute clause d'un contrat ayant pour objet de limiter la responsabilité légale de l'architecte, en revanche une telle clause est licite dans le cas d'une responsabilité contractuelle comme tel est le cas en l'espèce ; que le juge est tenu de respecter les stipulations contractuelles excluant les conséquences d'une responsabilité in solidum et solidaire de l'architecte en raison de dommages imputables à d'autres intervenants à la construction comme tel est le cas de la clause insérée dans le contrat d'architecte signé par la SARL J... C... qui interdit de retenir une responsabilité, de quelque manière que ce soit, pour les dommages imputables aux autres intervenants ; que cette clause d'exclusion de solidarité est opposable au maître de l'ouvrage et à ses ayants droits agissant à l'encontre de la Société MAF qui n'est tenue de garantir son assuré que dans les limites du contrat d'architecte ; que le jugement sera donc infirmé en ce qu'il a prononcé des condamnations in solidum à l'encontre de la SARL J... C... ;

1°) ALORS QUE l'article G 6.3.1 du contrat d'architecte disposait que la Société J... C... ARCHITECTE ne pouvait être déclarée responsable « en particulier solidairement, des dommages imputables aux actions ou omissions du maître d'ouvrage ou des autres intervenants dans l'opération faisant l'objet du présent contrat », sans aucunement exclure une condamnation in solidum ; qu'en affirmant néanmoins que le contrat d'architecte excluait « les conséquences d'une responsabilité in solidum et solidaire de l'architecte », la Cour d'appel en a dénaturé les termes clairs et précis, en violation du principe de l'interdiction faite au juge de dénaturer les écrits versés aux débats ;

2°) ALORS QUE toute clause d'un contrat qui a pour objet d'exclure ou de limiter la responsabilité du constructeur est réputée non écrite ; qu'en conséquence, est réputée non écrite, la clause d'un contrat qui a pour objet d'exclure la responsabilité de l'architecte in solidum ou solidairement avec un ou plusieurs des intervenants à l'opération de construction ; qu'en décidant néanmoins que la clause du contrat d'architecte excluant la responsabilité de la Société J... C... ARCHITECTURE in solidum et solidaire avec d'autres intervenants à la construction était valable et devait être mise en oeuvre, la Cour d'appel a violé l'article 1792-5 du Code des assurances, ensemble, l'article 1134 du Code civil, dans sa rédaction antérieure à l'ordonnance n° 2016-131 du 10 février 2016.


Synthèse
Formation : Chambre civile 3
Numéro d'arrêt : 18-17058
Date de la décision : 17/10/2019
Sens de l'arrêt : Rejet
Type d'affaire : Civile

Références :

Décision attaquée : Cour d'appel de Montpellier, 25 janvier 2018


Publications
Proposition de citation : Cass. Civ. 3e, 17 oct. 2019, pourvoi n°18-17058


Composition du Tribunal
Président : M. Chauvin (président)
Avocat(s) : SCP Boulloche, SCP Delvolvé et Trichet, SCP Gadiou et Chevallier, SCP Richard, SCP Thouvenin, Coudray et Grévy

Origine de la décision
Date de l'import : 15/09/2022
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CCASS:2019:18.17058
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