LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE SOCIALE, a rendu l'arrêt suivant :
Sur l'irrecevabilité du mémoire en défense déposé par la Confédération française démocratique du travail, soulevée d'office après avis donné aux parties :
Vu l'article 982 du code de procédure civile ;
Attendu que le mémoire en défense a été remis au greffe de la Cour de cassation par la Confédération française démocratique du travail le 21 février 2019, soit postérieurement au délai de deux mois à compter de la signification du mémoire ampliatif prévu par l'article 982 du code de procédure civile et courant à compter de la signification à partie du 8 novembre 2018 par application de l'article 980 du code de procédure civile ;
Qu'il s'ensuit que le mémoire en défense est irrecevable ;
Sur le moyen unique du pourvoi :
Attendu, selon l'arrêt attaqué (Paris, 5 avril 2018), que suite à la convention collective nationale de retraite de prévoyance des cadres du 14 mars 1947 instaurant un régime de retraite complémentaire pour les cadres confié à la gestion de l'Association générale des institutions de retraites des cadres (AGIRC) et à l'accord national interprofessionel du 8 décembre 1961 rendant obligatoire pour les salariés un régime de retraite
complémentaire confié ultérieurement à la gestion de l'Association pour le régime de retraite complémentaire des salariés (ARRCO), un accord interprofessionnel a été conclu le 18 mars 2011 entre les partenaires sociaux qui, par son article 7 applicable au 1er janvier 2012, harmonise et unifie entre les deux régimes de retraite complémentaire les majorations familiales des pensions de retraite, en prévoyant, d'une part, un taux fixe, unique de 10 %, de majoration à partir du troisième enfant quelque soit le nombre d'enfants élevés alors qu'auparavant le régime AGIRC prévoyait un taux progressif en fonction du nombre d'enfants et que le régime ARRCO ne prévoyait qu'un taux de 5 % et en prévoyant, d'autre part, un plafonnement de ces majorations ; que les nouvelles dispositions ont été transposées par deux avenants du 8 juin 2011,l'avenant A-264 à la convention collective nationale de retraite de prévoyance des cadres pour le régime AGIRC et l'avenant n° 115 à l'accord national interprofessionnel du 8 décembre 1961 pour le régime ARRCO, ces avenants étant étendus et élargis par arrêtés du 27 juin 2011 ; que, les 13, 15 et 21 décembre 2011, l'Union des familles pour les retraites (UFP-retraites), M. J..., M. S..., M. O..., M. H..., Mme R..., Mme Q... , M. L..., Mme L..., Mme E... et Mme G... K... ont fait assigner devant le tribunal de grande instance les organismes gestionnaires et les partenaires sociaux : l'Association générale des institutions de retraite des cadres, l'Association pour le régime de retraite complémentaire des salariés, le Mouvement des entreprises de France, la Confédération générale des petites et moyennes entreprises désormais dénommée Confédération des petites et moyennes entreprises, l'Union professionnelle artisanale désormais dénommée l'Union des entreprises de proximité, la Confédération française démocratique du travail (CFDT), la Confédération française des travailleurs chrétiens ( CFTC), la Confédération générale du travail Force Ouvrière, FO-cadres, la CFDT Cadres et l'UGICA-CFTC aux fins d'annulation de certaines stipulations de l'article 7 de l'accord interprofessionnel du 18 mars 2011 ainsi que des avenants de transposition ; que parallèlement, ils ont contesté devant la juridiction administrative les arrêtés d'extension, leur recours en excès de pouvoir étant rejeté par arrêt du Conseil d'Etat du 17 avril 2013 ;
Attendu que l'UFP-retraites, M. J..., M. S..., M. O..., M. H..., Mme R..., Mme Q... , M. L..., Mme L..., Mme E... et Mme G... K... font grief à l'arrêt de rejeter la demande tendant à ce que soit jugé nul le paragraphe 1 et le troisième alinéa du paragraphe 2 de l'article 7 du chapitre 3 de l'accord portant sur les retraites complémentaires AGIRC-ARRCO-AGFF du 18 mars 2011, le 2) de l'avenant A-624 du 8 juin 2011 à la convention collective nationale de retraite et de prévoyance des cadres du 14 mars 1947, et l'avenant n° 115 du 8 juin 2011 à l'accord national interprofessionnel de retraite complémentaire du 8 décembre 1961 en ce qu'il introduit un dernier alinéa au 2° de l'article 17 de la convention nationale de retraite et de prévoyance des cadres du 14 mars 1947, alors selon le moyen :
1°/ que la compétence des partenaires sociaux pour adopter les stipulations en litige n'est susceptible de trouver de fondement légal que dans les seules dispositions des articles L. 911-1 et L. 921-4 du code de la sécurité sociale, lesquels ont donné lieu par mémoire distinct à une question prioritaire de constitutionnalité portant sur leur conformité à l'article 34 de la Constitution et aux alinéas 10 et 11 du Préambule de la Constitution du 27 octobre 1946 ; que l'abrogation de ces dispositions par le Conseil constitutionnel privera de fondement juridique l'arrêt du 5 avril 2018, qui s'expose ainsi à une censure certaine ;
2°/ que les principes de confiance légitime et de sécurité juridique issus du droit de l'union européenne et applicables en droit interne à toutes les situations régies par le droit de l'union européenne et consacrés en droit interne, notamment par la jurisprudence du Conseil constitutionnel, font obstacle à ce que, sans motif d'intérêt général suffisant, il soit porté atteinte aux situations légalement acquises, ni remis en cause les effets qui peuvent légitimement être attendus de telles situations ; que ces principes s'imposent à toutes les normes législatives, réglementaires ou revêtues d'un effet obligatoire et à tout acte de portée générale ; que tel est le cas d'un accord interprofessionnel qui, dérogeant au principe de l'effet relatif des conventions, s'impose à des personnes qui n'en sont pas signataires et qui, non-syndiquées, ne sont pas individuellement représentées par les employeurs et syndicats signataires ; qu'en retenant néanmoins en l'espèce que le principe de confiance légitime et de sécurité juridiques ne sont applicables qu'aux dispositions législatives et non à des accords collectifs de nature contractuelle, la cour d'appel a commis une erreur de droit et méconnu lesdits principes par refus d'application ;
3°/ que le principe de proportionnalité, issu du droit de l'union européenne ainsi que de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme, et appliqué par les juridictions de droit interne, implique seulement que les moyens mis en oeuvre par une disposition normative soient aptes à réaliser les objectifs légitimes poursuivis par la norme concernée et n'aillent pas au-delà de ce qui est nécessaire pour les atteindre ; qu'en l'espèce, en énonçant que le principe de proportionnalité ne saurait s'appliquer, faute de conflit de droits en présence, étant rappelé que les majorations familiales ne constituent pas un droit, de créance ou de propriété, avant la liquidation de la pension de retraite complémentaire, et ce bien que la mise en oeuvre d'un contrôle de proportionnalité par le juge saisi de la validité de l'accord conclu entre les partenaires sociaux n'ait pas été subordonnée à l'existence d'un conflit de droits, les cotisants au régime de retraite complémentaire se trouvant en toute hypothèse dans une situation juridiquement protégée, la cour d'appel a commis une erreur de droit et méconnu le principe susvisé ;
4°/ qu'il incombe aux partenaires sociaux, chargés de la gestion des institutions de retraite complémentaire, d'assurer en permanence l'équilibre financier des régimes de retraite complémentaire en adoptant les mesures qui assurent la sauvegarde des droits de leurs adhérents, dans le respect des principes de solidarité, d'égalité et de proportionnalité ; qu'en l'espèce, les requérants faisaient valoir, de façon précise, étayée et illustrée par des études chiffrées, que plus les cotisants accomplissent d'efforts en faveur des régimes de retraite, moins ceux-ci leur versent de pension, d'une part, et que l'équilibre des régimes de retraite est conditionné par l'existence d'un rapport démographique suffisant entre actifs cotisants et inactifs retraités lui-même conditionné par le nombre de naissances, qui ne peut être atteint que grâce à l'existence d'avantages familiaux, présentant un caractère incitatif, ayant pour effet de compenser les charges liées à l'éducation des enfants et supportées par les parents durant leur vie active, d'autre part ; qu'en se bornant à énoncer que la modification des majorations familiales ne contrevient pas au principe d'égalité entre l'ensemble des cotisants et que la sauvegarde du régime, par le maintien d'un rapport démographique satisfaisant, n'apparaît pas liée exclusivement à l'existence des majorations familiales des pensions de retraite complémentaire, la cour d'appel, qui a statué par voie de simple affirmation, n'a pas mis la Cour de cassation en mesure d'exercer son contrôle, et a violé l'article 455 du code de procédure civile ;
Mais attendu d'abord que par un arrêt du 23 janvier 2019 la chambre sociale de la Cour de cassation a dit n'y avoir lieu à renvoi de la question prioritaire de constitutionnalité présentée par les demandeurs au pourvoi ;
Attendu, ensuite, que la cour d'appel a retenu, à bon droit, d'une part, qu'en application de l'article L. 2261-8 du code du travail, l'avenant portant révision de tout ou partie d'une convention ou d'un accord se substitue de plein droit aux stipulations de la convention ou de l'accord qu'il modifie et est opposable, dans des conditions de dépôt prévues à l'article L. 2231-6, à l'ensemble des employeurs et des salariés liés par la convention ou l'accord et que, d'autre part, les dispositions critiquées n'étaient pas rétroactives puisque ne s'appliquant qu'aux pensions dont la liquidation doit prendre effet à compter du 1er janvier 2012 et uniquement au titre de la seule partie de carrière postérieure au 31 décembre 2011, de sorte qu'elles ne contreviennent ni au principe de non-rétroactivité ni au principe de sécurité juridique ;
Attendu, enfin, qu'il incombe aux partenaires sociaux, chargés de la gestion des institutions de retraite complémentaire, d'assurer en permanence l'équilibre financier des régimes de retraite complémentaire en adoptant les mesures qui assurent la sauvegarde des droits de leurs adhérents ; qu'il en résulte qu'après avoir fait ressortir que les modalités nouvelles de calcul des majorations ne remettaient pas en cause les points acquis des cotisants tout en maintenant le niveau des pensions, la cour d'appel a, par une décision motivée, sans être tenue de suivre les parties dans le détail de leur argumentation, exactement décidé que les mesures prises, qui garantissent les principes de solidarité, d'égalité et de proportionnalité, étaient conformes aux règles légales ;
D'où il suit que le moyen, sans portée en sa première branche, inopérant en ses deuxième et troisième branches en ce qu'il critique des motifs surabondants, n'est pas fondé pour le surplus ;
PAR CES MOTIFS :
Déclare irrecevable le mémoire en défense remis par la Confédération française démocratique du travail ;
REJETTE le pourvoi ;
Condamne l'UFP-retraites, M. J..., M. S..., M. O..., M. H..., Mme R..., Mme Q... , M. L..., Mme L..., Mme E... et Mme G... K... aux dépens ;
Vu l'article 700 du code de procédure civile, rejette les demandes ;
Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, chambre sociale, et prononcé par le président en son audience publique du neuf octobre deux mille dix-neuf.
MOYEN ANNEXE au présent arrêt :
Moyen produit par la SARL Cabinet Briard, avocat aux Conseils, pour MM. J..., S..., O..., L..., Mmes C... R..., Q... , E..., G... K..., M. et Mme L... et l'association Union des familles pour les retraites
Le moyen de cassation fait grief à l'arrêt confirmatif attaqué d'avoir rejeté la demande des exposants tendant à ce que soit jugé nul le paragraphe 1 et le 3ème alinéa du paragraphe 2 de l'article 7 du chapitre 3 de l'accord portant sur les retraites complémentaires AGIRC-ARRCOAGFF du 18 mars 2011, le 2) de l'avenant A-624 du 8 juin 2011 à la convention collective nationale de retraite et de prévoyance des cadres du 14 mars 1947, et l'avenant n°115 du 8 juin 2011 à l'accord national interprofessionnel de retraite complémentaire du 8 décembre 1961 en ce qu'il introduit un dernier alinéa au 2° de l'article 17 de la convention nationale de retraite et de prévoyance des cadres du 14 mars 1947,
Aux motifs propres qu'aux termes de l'article L. 911-1 du code de la sécurité sociale, à moins qu'elles ne soient instituées par des dispositions législatives ou réglementaires, les garanties collectives dont bénéficient les salariés, anciens salariés et ayants droit en complément de celles qui résultent de l'organisation de la sécurité sociale sont déterminées soit par voie de conventions ou d'accords collectifs, soit à la suite de la ratification à la majorité des intéressés d'un projet d'accord proposé par le chef d'entreprise, soit par une décision unilatérale du chef d'entreprise constatée dans un écrit remis par celui-ci à chaque intéressé ; que l'article L. 911-3 du même code dispose que Les dispositions du titre III du livre Ier du code du travail sont applicables aux conventions et accords collectifs mentionnés à l'article L. 911-1. Toutefois, lorsque les accords ont pour objet exclusif la détermination des garanties mentionnées à l'article L. 911-2, leur extension aux salariés, aux anciens salariés, à leurs ayants droit et aux employeurs compris dans leur champ d'application est décidée par arrêté du ministre chargé de la sécurité sociale et du ministre chargé du budget, après avis motivé d'une commission dont la composition est fixée par décret ; que selon l'article L. 921-4 du même code, les régimes de retraite complémentaire des salariés relevant du présent chapitre sont institués par des accords nationaux interprofessionnels étendus et élargis conformément aux dispositions du titre Ier du présent livre ; qu'ils sont mis en oeuvre par des institutions de retraite complémentaire et des fédérations regroupant ces institutions. Les fédérations assurent une compensation des opérations réalisées par les institutions de retraite complémentaire qui y adhèrent ; qu'en l'espèce, les modifications de l'accord du 18 mars 2011 dont la nullité est demandée figurent, en premier lieu à l'article 7 paragraphe 1, aux termes duquel Les participants au régime AGIRC qui ont eu ou justifient avoir élevé au moins trois enfants de moins de 16 ans pendant 9 ans, bénéficient d 'une majoration de leur allocation égal à 10% ; que cette disposition s'applique aux allocations liquidées au titre de la seule partie de carrière postérieure au 31 décembre 2011. Les droits inscrits aux comptes des participants pour les périodes antérieures au 1er janvier 2012 feront l'objet, lors de la liquidation, de l'application des majorations pour enfants telles que prévues par l'article 6 bis de l'annexe 1 à la Convention collective nationale de retraite et de prévoyance des cadres du 14 mars 1947 dans sa rédaction en vigueur à la veille du présent accord, sous réserve que les conditions d 'attribution de ces majorations aient été remplies le 31 décembre 2011 ; que l'ensemble des majorations pour enfants nés ou élevés servies par l 'AGIRC sera plafonné à 1000 euros par an pour toute liquidation d 'allocation prenant effet à compter du 1er janvier 2012 ; que ce plafond sera proratisé en fonction de la durée pendant laquelle le participant aura relevé du régime AGIRC ; qu'elles figurent à l'article 7 paragraphe 2 alinéa 3, selon lequel l'ensemble des majorations pour enfants nés ou élevés servies par l'ARRCO sera plafonné à 1000 euros par an pour toute liquidation d'allocation prenant effet à compter du 1er janvier 2012. Ce plafond sera proratisé en fonction de la durée pendant laquelle le participant aura relevé du régime ARRCO ; que, par voie de conséquence, est également recherchée la nullité des avenants de transposition, soit, pour l'AGIRC, l'avenant A-264 à la convention collective nationale de retraite et de prévoyance des cadres du 14 mars 1947, selon lequel Les dispositions de l 'article 6 bis de l'annexe I sont remplacées, pour les liquidations d 'allocations prenant effet à compter du 1er janvier 2012, par les dispositions suivantes : (...) 2) Le participant ayant eu ou élevé pendant 9 ans avant l 'âge de 16 ans au moins 3 enfants (au sens défini par la Commission paritaire), cette condition étant appréciée à la date d'effet de la retraite, peut, sous réserve des dispositions prévues au point 3 ci-dessous, bénéficier d'une majoration de son allocation calculée sur la base de taux différents en fonction des parties de carrière ; que pour les périodes antérieures au 1er janvier 2012, la majoration pour enfants nés ou élevés, est égale à 8% pour 3 enfants, 12% pour 4 enfants, 16%pour 5 enfants, 20% pour 6 enfants, 24% pour 7 enfants ou plus ; que pour les périodes à compter du 1er janvier 2012, majoration pour enfants nés ou élevés (3 ou plus), égale à 10% de l'allocation correspondant à cette partie de carrière ; que l'ensemble des majorations prévues au point 2 est plafonné à 1000 euros par an (montant revalorisé en fonction de la valeur du point), pour une liquidation prenant effet à compter du 1er janvier 2012 (sauf pour les participants nés avant le 2 août 1951) ; que pour l'ARRCO, l'avenant n°115 du 8 juin 2011à l'accord national interprofessionnel de retraite complémentaire du 8 décembre 1961, modifiant ainsi son article 17 - 2° Le participant ayant eu ou élevé pendant 9 ans avant l'âge de 16 ans, au moins 3 enfants (au sens défini par la Commission paritaire), cette condition étant appréciée à la date d'effet de la retraite, peut, sous réserve des dispositions prévues au point 3 ci-dessous, bénéficier d 'une majoration de son allocation calculée sur la base des taux et réglementations respectivement applicables aux différentes parties de carrière ; que pour les périodes antérieures au 1er janvier 1999, majorations pour enfants nés ou élevés, telles que prévues, le cas échéant, par les règlements des régimes ARRCO antérieurs au régime unique ; que pour les périodes entre le 1er janvier 1999 et le 31 décembre 2011, la majoration pour enfants nés ou élevés, égale à 5 % de l'allocation correspondant à cette partie de carrière ; que pour les périodes à compter du 1er janvier 2012, la majoration pour enfants nés ou élevés est égale à 10 % de l 'allocation correspondant à cette partie de carrière ; que l'ensemble des majorations prévues au point 2 est plafonné à 1 000 euros par an (montant revalorisé en fonction de la valeur du point), pour toute liquidation prenant effet à compter du 1er janvier 2012 (sauf pour les participants nés avant le 2 août 1951) ; que la nullité de l'accord et des avenants est demandée aux motifs qu'ils seraient contraires à la hiérarchie des normes, au principe de sécurité juridique et à l'intérêt général ; que, sous couvert de violation de la hiérarchie des normes, les appelants portent le débat sur la question de la conformité de la loi à la Constitution, objet de leur question prioritaire de constitutionnalité, laquelle a d'ores et déjà été rejetée ; que, si le principe de l'institution de régimes de retraite complémentaire ressort du domaine de la loi, il résulte de l'article L. 921-4 du code de la sécurité sociale que ses éléments, relevant des modalités de leur gestion financière et étant renvoyés à la négociation collective des partenaires sociaux, sont en conséquence de nature contractuelle et non des prestations de sécurité sociale, le pouvoir réglementaire n'intervenant que pour leur extension, sous conditions ; qu'il ne peut, dès lors, être reproché aux accord et avenants susvisés un empiétement sur le domaine de la loi ; qu'au demeurant, en ne faisant porter leurs prétentions que sur la validité de l'accord relatif aux retraites complémentaires AGIRC-ARRCO-AGFF du 18 mars 2011, ainsi que sur les avenants A-264 du 8 juin 2011 à la convention collective du 14 mars 1947 et n° 115 du 8 juin 2011 à l'accord national du 8 décembre1961, ils ne remettent pas en cause le système institué par l'article L. 921-4, mais la seule modification du régime de majoration des retraites en lien avec le nombre d'enfants, dont les limitations existaient antérieurement à l'accord contesté ; qu'ainsi, ils ne critiquent pas la validité de l'accord et de l'avenant n°115, en ce qu'ils augmentent de 5 à 10 % du pourcentage alloué par l'ARCCO aux parents non cadres de familles nombreuses ; que leur contestation est donc limitée à la baisse des majorations familiales des cadres et au plafonnement de l'ensemble des majorations familiales, ne relevant pas de principes fondamentaux de la sécurité sociale au sens de l'article 34 de la Constitution et privant ainsi d'effet leur démonstration reposant sur la violation de la hiérarchie des normes ; que sur la contrariété au principe de sécurité juridique, L. 911-3 du code de la sécurité sociale renvoie au livre II de la 2ème partie du code du travail et que les accords collectifs sont révisés en application de l'article L. 2261-8 du code du travail selon lequel, L'avenant portant révision de tout ou partie d'une convention ou d'un accord se substitue de plein droit aux stipulations de la convention ou de l'accord qu'il modifie, qu'il est opposable, dans des conditions de dépôt prévues à l'article L. 2231-6, à l'ensemble des employeurs et des salariés liés par la convention ou l'accord ; que l'accord du 8 juin 2011 et les avenants ne s'appliquent qu'aux pensions dont la liquidation doit prendre effet à compter du 1er janvier 2012 et uniquement au titre de la seule partie de carrière postérieure au 31 décembre 2011 ; qu'ils ne peuvent être qualifiés de rétroactifs ; que le fait générateur de la retraite complémentaire n'est constitué que par la liquidation de la pension, dont le calcul intervient en considération du nombre de points acquis et des majorations éventuelles, ces majorations ne constituant pas une créance distincte bien qu'ayant un fait générateur autonome, soit les naissances et l'éducation des enfants ; que ces majorations sont accordées indépendamment de l'acquisition de points et ne peuvent être l'objet, en conséquence, ni d'un droit acquis, ni d'un droit en cours d'acquisition ; que les premiers juges ont justement relevé que le principe d'attente légitime n'est applicable qu'aux dispositions législatives ; que le principe de prévisibilité de la règle de droit ne peut s'appliquer à des accords collectifs de nature contractuelle, alors, au surplus, que l'article L. 2261-8 du code du travail prévoit l'opposabilité de leur révision ; que, de même, le principe de proportionnalité ne saurait s'appliquer, faute de conflit de droits en présence, étant rappelé que les majorations familiales ne constituent pas un droit, de créance ou de propriété, avant la liquidation de la pension de retraite complémentaire ; qu'il revient au juge de contrôler la conformité de la mesure, non à l'intérêt général, mais aux principes de solidarité, d'égalité et de proportionnalité ; que ces principes sont respectés par le choix des partenaires sociaux, dont les nouvelles mesures permettent de maintenir le niveau des pensions, en ne diminuant pas la valeur du point ; que la modification des majorations familiales ne contrevient pas à au principe d'égalité entre l'ensemble des cotisants ;
Et aux motifs éventuellement adoptés que les arrêts Poucet et Pistre et Distribution Casino France SAS contre ORGANIC, rendus les 17 février 1993 et 27 octobre 2005 par la Cour de Justice de l'Union Européenne, ont pour unique vocation de rappeler que les organismes chargés de la gestion de régime de sécurité sociale ne sont pas des entreprises et n'exercent pas d'activités économiques au sens des dispositions du traité sur le fonctionnement de l'Union Européenne sur le droit de la concurrence puisque ce type d'organisme remplit une fonction à caractère exclusivement social dès lors qu'il opère dans un régime qui met en oeuvre le principe de solidarité et que ce régime est soumis au contrôle de l'Etat ; qu'en l'espèce, les litiges soumis à la CJUE portaient sur le régime de sécurité sociale de base géré par l'ORGANIC pour les commerçants et la CANCAVA pour les artisans, et non sur le régime complémentaire obligatoire de retraite ; que quand bien même les caisses ORGANIC et CANCAVA géraient, avant leur intégration au sein du RSI, le régime de base et les régimes complémentaires de retraite obligatoires, les demandeurs ne peuvent valablement exciper de ces deux arrêts de la CJUE qui ne sont pas pertinents en l'espèce, car concernant uniquement le régime de base ; qu'en effet, adopter l'argumentaire des demandeurs reviendrait en réalité à assimiler l'AGIRC et l'ARRCO, qui gèrent uniquement un régime complémentaire de retraite obligatoire, à un régime de sécurité sociale de base et à procéder ainsi par amalgame ; que quant au règlement CEE 1408/71, relatif à la coordination des régimes nationaux de sécurité sociale en vue de faciliter la libre circulation des travailleurs dans l'Union, le fait que par déclaration en date du 29 mars 1999, le gouvernement français ait entendu soumettre les régimes complémentaires de retraite AGIRC et ARRCO, à compter du 1er janvier 2000, audit règlement, ne leur confère pas pour autant, de manière automatique, la qualité de régime de "sécurité sociale", au sens de l'article 34 de la Constitution du 4 octobre 1958, selon lequel la loi détermine les principes fondamentaux du droit du travail, du droit syndical et de la sécurité sociale ; qu'il ressort de la loi du 8 août 1994, codifiée aux articles L. 911-1 et suivants du code de la sécurité sociale, notamment en son article L. 921-4, que le législateur a entendu entériner le pouvoir des partenaires sociaux à définir, par voie d'accords nationaux interprofessionnels étendus et élargis par arrêtés des ministres chargés de la sécurité sociale et du budget, l'intégralité des règles des régimes Cabinet complémentaires obligatoires de retraite, sous réserve de certaines clauses obligatoires ou prohibées qu'il a définies ; que ce texte législatif consacre le fait que les actes fondateurs des régimes AGIRC et ARRCO, évoqués précédemment, sont de nature contractuelle, ce qui les distinguent des régimes légaux de sécurité sociale ; qu'ainsi, les articles LO 111-3 et suivants du code de la sécurité sociale, qui définissent le contenu des lois de financement de la sécurité sociale, ne visent absolument pas les régimes de retraite complémentaire ; que dans ces conditions, les demandeurs ne sont pas fondés à soutenir que les partenaires sociaux auraient empiété sur la compétence du législateur en négociant et signant les accords et avenants critiqués, dont les stipulations affecteraient les principes fondamentaux de la sécurité sociale, du droit du travail ou des obligations civiles ; que de par l'application des dispositions de l'article L. 922-11 du code de la sécurité sociale, les institutions de retraite complémentaires, donc les partenaires sociaux, se doivent d'assurer en permanence l'équilibre financier de ces régimes de retraite en adoptant les mesures qui assurent la sauvegarde des droits de leurs participants ; qu'à cet effet, les partenaires sociaux peuvent, notamment, prévoir des dispositions transitoires et fixer une date à laquelle les participants aux régimes AGIRC et ARRCO seront soumis à une règle nouvelle, pour autant que les titulaires des droits acquis en conservent le bénéfice ; qu'en effet, les participants dont la retraite a déjà été liquidée, avant l'entrée en vigueur du nouveau dispositif, ne peuvent voir remettre en cause leurs droits acquis ; qu'en l'espèce, la stipulation relative au plafonnement n'a aucune incidence sur les pensions déjà liquidées, puisque cette mesure ne s'applique qu'aux pensions dont la liquidation doit prendre effet à compter du 1er janvier 2012 et uniquement au titre de la seule partie de carrière postérieure au 31 décembre 2011 ; qu'en outre, l'adhérent ne peut prétendre à aucun droit acquis, durant le déroulement de sa carrière professionnelle, dans la mesure où cette majoration ne peut être acquise tant qu'il n'a pas été procédé à la liquidation de sa pension ; que de surcroît, les majorations familiales étant accordées gratuitement, par rapport à la constitution de droits à retraite accordés en fonction des cotisations, l'argumentation fondée sur le fait générateur tenant au paiement de cotisations et/ou la naissance de 3 enfants au moins est inopérante ; qu'enfin, la loi prévoit elle-même, en son article L. 2261-8 du code du travail, un mécanisme de substitution de plein droit d'une révision d'un accord collectif aux stipulations de la convention ou de l'accord qu'il modifie et qu'adopter la position des demandeurs, qui impliquerait que la règle du plafonnement s'appliquerait uniquement aux participants dont la carrière professionnelle aurait débuté après le 1er janvier 2012, aurait pour effet d'empêcher, de fait, les partenaires sociaux de négocier et de conclure des avenants et/ou de nouveaux accords, en vue notamment de mettre en oeuvre les dispositions de l'article L. 922-11 susvisé ; qu'il s'en suit que les demandeurs ne peuvent valablement soutenir que les articles litigieux porteraient atteinte au principe de sécurité juridique pris en son aspect relatif à la non-rétroactivité des normes et à la prévisibilité de la règle nouvelle, et au droit de créance ; que les demandeurs considèrent que les cotisants au régime de retraite complémentaire sont fondés à se prévaloir du respect du principe de l'attente légitime, dégagé par le Conseil Constitutionnel dans une décision du 19 décembre 2013 ; que les modifications critiquées n'ayant pas été opérées par le législateur mais par les partenaires sociaux, les demandeurs ne peuvent utilement exciper de ce principe qui concerne, au regard de la décision alléguée, uniquement les textes législatifs ; quant à la prétendue atteinte à l'intérêt général, apprécié s'agissant du juge judiciaire au regard des principes de solidarité, d'égalité et de proportionnalité, il n'est pas établi que la fixation de règles de calcul de la majoration moins favorables pour les intéressés ayant un nombre important d'enfants serait à elle seule, comme il est soutenu, susceptible de nuire à l'objectif de maintien d'un rapport démographique satisfaisant entre cotisants et retraités au sein des régimes AGIRC/ARRCO et que le choix des mesures adoptées par les partenaires sociaux, tenant à la modification des majorations familiales aux lieu et place de la diminution de la valeur du point, porterait atteinte auxdits principes.
Alors d'une première part que la compétence des partenaires sociaux pour adopter les stipulations en litige n'est susceptible de trouver de fondement légal que dans les seules dispositions des articles L.911-1 et L.921-4 du code de la sécurité sociale, lesquels ont donné lieu par mémoire distinct à une question prioritaire de constitutionnalité portant sur leur conformité à l'article 34 de la Constitution et aux alinéas 10 et 11 du Préambule de la Constitution du 27 octobre 1946 ; que l'abrogation de ces dispositions par le Conseil constitutionnel privera de fondement juridique l'arrêt du 5 avril 2018, qui s'expose ainsi à une censure certaine ;
Alors d'une deuxième part que les principes de confiance légitime et de sécurité juridique issus du droit de l'union européenne et applicables en droit interne à toutes les situations régies par le droit de l'union européenne et consacrés en droit interne, notamment par la jurisprudence du Conseil constitutionnel, font obstacle à ce que, sans motif d'intérêt général suffisant, il soit porté atteinte aux situations légalement acquises, ni remis en cause les effets qui peuvent légitimement être attendus de telles situations ; que ces principes s'imposent à toutes les normes législatives, réglementaires ou revêtues d'un effet obligatoire et à tout acte de portée générale ; que tel est le cas d'un accord interprofessionnel qui, dérogeant au principe de l'effet relatif des conventions, s'impose à des personnes qui n'en sont pas signataires et qui, non-syndiquées, ne sont pas individuellement représentées par les employeurs et syndicats signataires ; qu'en retenant néanmoins en l'espèce que le principe de confiance légitime et de sécurité juridiques ne sont applicables qu'aux dispositions législatives et non à des accords collectifs de nature contractuelle, la Cour d'appel a commis une erreur de droit et méconnu lesdits principes par refus d'application ;
Alors de troisième part que le principe de proportionnalité, issu du droit de l'union européenne ainsi que de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme, et appliqué par les juridictions de droit interne, implique seulement que les moyens mis en oeuvre par une disposition normative soient aptes à réaliser les objectifs légitimes poursuivis par la norme concernée et n'aillent pas au-delà de ce qui est nécessaire pour les atteindre ; qu'en l'espèce, en énonçant que le principe de proportionnalité ne saurait s'appliquer, faute de conflit de droits en présence, étant rappelé que les majorations familiales ne constituent pas un droit, de créance ou de propriété, avant la liquidation de la pension de retraite complémentaire, et ce bien que la mise en oeuvre d'un contrôle de proportionnalité par le juge saisi de la validité de l'accord conclu entre les partenaires sociaux n'ait pas été subordonnée à l'existence d'un conflit de droits, les cotisants au régime de retraite complémentaire se trouvant en toute hypothèse dans une situation juridiquement protégée, la Cour d'appel a commis une erreur de droit et méconnu le principe susvisé ;
Alors de quatrième part qu'il incombe aux partenaires sociaux, chargés de la gestion des institutions de retraite complémentaire, d'assurer en permanence l'équilibre financier des régimes de retraite complémentaire en adoptant les mesures qui assurent la sauvegarde des droits de leurs adhérents, dans le respect des principes de solidarité, d'égalité et de proportionnalité ; qu'en l'espèce, les requérants faisaient valoir, de façon précise, étayée et illustrée par des études chiffrées, que plus les cotisants accomplissent d'efforts en faveur des régimes de retraite, moins ceux-ci leur versent de pension, d'une part, et que l'équilibre des régimes de retraite est conditionné par l'existence d'un rapport démographique suffisant entre actifs cotisants et inactifs retraités lui-même conditionné par le nombre de naissances, qui ne peut être atteint que grâce à l'existence d'avantages familiaux, présentant un caractère incitatif, ayant pour effet de compenser les charges liées à l'éducation des enfants et supportées par les parents durant leur vie active, d'autre part (conclusions, p. 50 et suiv.) ; qu'en se bornant à énoncer que la modification des majorations familiales ne contrevient pas à au principe d'égalité entre l'ensemble des cotisants et que la sauvegarde du régime, par le maintien d'un rapport démographique satisfaisant, n'apparaît pas liée exclusivement à l'existence des majorations familiales des pensions de retraite complémentaire, la cour d'appel, qui a statué par voie de simple affirmation, n'a pas mis la Cour de cassation en mesure d'exercer son contrôle, et a violé l'article 455 du code de procédure civile.