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03/10/2019 | FRANCE | N°18-19818

France | France, Cour de cassation, Chambre civile 1, 03 octobre 2019, 18-19818


LA COUR DE CASSATION, PREMIÈRE CHAMBRE CIVILE, a rendu l'arrêt suivant :

Sur le moyen unique, pris en sa première branche :

Vu l'article 16 du code de procédure civile ;

Attendu, selon l'arrêt attaqué, qu'un jugement a prononcé, sur leur requête conjointe, le divorce de M. L... et de Mme I... et homologué la convention portant règlement de ses conséquences ; que M. L... ayant saisi le juge aux affaires familiales du tribunal de grande instance de Paris d'une demande tendant à voir notamment supprimer la prestation compensatoire allouée sous forme de rente et

fixer avec exactitude le montant restant dû de la prestation compensatoire ver...

LA COUR DE CASSATION, PREMIÈRE CHAMBRE CIVILE, a rendu l'arrêt suivant :

Sur le moyen unique, pris en sa première branche :

Vu l'article 16 du code de procédure civile ;

Attendu, selon l'arrêt attaqué, qu'un jugement a prononcé, sur leur requête conjointe, le divorce de M. L... et de Mme I... et homologué la convention portant règlement de ses conséquences ; que M. L... ayant saisi le juge aux affaires familiales du tribunal de grande instance de Paris d'une demande tendant à voir notamment supprimer la prestation compensatoire allouée sous forme de rente et fixer avec exactitude le montant restant dû de la prestation compensatoire versée en capital, Mme I... a décliné la compétence de la juridiction française, en application de l'article 3 du règlement (CE) n° 4/2009 du Conseil du 18 décembre 2008 relatif à la compétence, la loi applicable, la reconnaissance et l'exécution des décisions et la coopération en matière d'obligations alimentaires ;

Attendu que, pour rejeter l'exception d'incompétence, l'arrêt retient que cette demande, qui s'analyse en une interprétation de la convention intégrée au jugement de divorce, n'entre pas dans le champ d'application du règlement n° 4/2009 et relève de la compétence du juge l'ayant prononcé ;

Qu'en relevant ainsi d'office le moyen tiré de l'absence d'application de l'article 3 dudit règlement du fait de la qualification de cette demande, alors que l'application de ce texte était revendiquée par les deux parties, sans inviter celles-ci à présenter leurs observations sur ce point, la cour d'appel a violé le texte susvisé ;

PAR CES MOTIFS et sans qu'il y ait lieu de statuer sur les autres branches du moyen :

CASSE ET ANNULE, mais seulement en ce qu'il infirme partiellement le jugement prononcé le 5 octobre 2017 par le juge aux affaires familiales du tribunal de grande instance de Paris en ce qu'il s'est déclaré incompétent pour statuer sur la demande de M. L... visant à voir fixer avec exactitude le montant restant dû de la prestation compensatoire versée en capital par lui, soit la somme globale de 750 000 livres sterling, et, statuant à nouveau, déclare le juge français compétent pour statuer sur la demande de M. L... visant à voir fixer avec exactitude le montant restant dû de la prestation compensatoire versée en capital par lui, soit la somme globale de 750 000 livres sterling et dit n'y avoir lieu à évocation de l'affaire sur ce chef de demande et renvoie l'affaire devant le premier juge pour la poursuite de l'instance sur celui-ci, l'arrêt rendu le 31 mai 2018, entre les parties, par la cour d'appel de Paris ; remet, en conséquence, sur ces points, la cause et les parties dans l'état où elles se trouvaient avant ledit arrêt et, pour être fait droit, les renvoie devant la cour d'appel de Paris, autrement composée ;

Laisse à chacune des parties la charge de ses dépens ;

Vu l'article 700 du code de procédure civile, rejette les demandes ;

Dit que sur les diligences du procureur général près la Cour de cassation, le présent arrêt sera transmis pour être transcrit en marge ou à la suite de l'arrêt partiellement cassé ;

Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, première chambre civile, et prononcé par le président en son audience publique du trois octobre deux mille dix-neuf.

MOYEN ANNEXE au présent arrêt :

Moyen produit par la SCP Meier-Bourdeau et Lécuyer, avocat aux Conseils, pour Mme I...

IL EST FAIT GRIEF à l'arrêt partiellement infirmatif attaqué d'avoir déclaré le juge français compétent pour statuer sur la demande de M. L... visant à voir fixer avec exactitude le montant restant dû de la prestation compensatoire versée en capital par lui, soit la somme globale de 750 000 £ ;

AUX MOTIFS QUE la demande de M. L... concerne les termes de la convention de divorce homologuée par le juge aux affaires familiales ayant prononcé le divorce ; qu'aux termes de cette convention : la contribution du père à l'éducation et à l'entretien des enfants était fixée à 1 388 £ par mois et par enfant, soit 4 164 £ au total, avec indexation sur le coût de la vie en Angleterre, cette somme étant « due jusqu'à la fin des études qui ne doivent normalement pas dépasser 26 ans chaque enfant devant, de l'accord des parents, être autonome à cet âge » ; qu'il était précisé que « dès la majorité, les enfants pourront demander à leur père de leur verser directement cette somme » ; que M. L... devait, en outre, régler tous les frais d'éducation des enfants, les frais d'assurance maladie ainsi que le loyer de l'appartement où habitaient Mme I... et les enfants directement au propriétaire ; que M. L... devait verser à Mme I... « une prestation compensatoire sous forme de rente de 4 166 livres sterling par mois pendant dix ans à compter du 1er octobre 2010 et cessant en cas de décès de Mme Q... . Cette somme n'est pas indexée. Il payera en outre l'assurance maladie », que M. L... devait payer également à Mme I..., « à titre de prestation compensatoire : a) le montant total séquestré au cabinet d'avocats anglais Payne Hicks Beach appartenant à Monsieur Q... (soit £ 310 832.00 selon le dernier décompte disponible (07/07/2010) (£ 310 159.00 principal + £673 intérêts) sera transféré à Mme Q... dès que le jugement de divorce sera définitif b) une somme de 750 000 £ (sept cent cinquante mille livres) au plus tard le 31 mars 2011 » ; que la demande de M. L... s'articule en deux points, d'une part, la suppression de sa contribution à l'éducation et à l'entretien des enfants sous forme de règlement de loyer, les modalités de versement de sa contribution à l'éducation et l'entretien des enfants majeurs et la suppression de la rente fixée à titre de prestation compensatoire, qui s'analysent en une demande de révision des obligations alimentaires mises à la charge de M. L... par le jugement de divorce, et, d'autre, la fixation du montant restant dû de la prestation compensatoire versée en capital ; qu'aucun texte ne prévoit et dont M. L... ne donne pas le fondement ; que la question de la compétence internationale pour statuer sur ce dernier point ne se pose pas, dès lors que si la prestation compensatoire a un caractère alimentaire, dont la fixation, la modification ou la suppression relève du règlement 4/2009, la demande telle qu'elle est formulée n'entre pas dans le champ d'application de ce règlement ; qu'en effet, cette demande, qui s'analyse en une interprétation de la convention intégrée au jugement de divorce, relève de la compétence du juge l'ayant prononcé ; que le juge français est compétent pour se prononcer sur cette demande ; qu'il y a lieu d'infirmer la décision dont appel sur ce point ;

1°) ALORS QUE le juge doit, en toutes circonstances, faire observer et observer lui-même le principe de la contradiction ; qu'en relevant d'office le moyen selon lequel la demande de M. L... s'articule en deux points, d'une part, la suppression de sa contribution à l'éducation et à l'entretien des enfants sous forme de règlement du loyer, les modalités de sa contribution à l'éducation et l'entretien des enfants majeurs et la suppression de la rente fixée au titre de la prestation compensatoire, qui s'analysent en une demande de révision des obligations alimentaires mises à la charge de M. L... relevant du champ d'application du règlement (CE) n°4/2009 sur les obligations alimentaires et, d'autre part, la fixation du montant restant dû de la prestation compensatoire versée en capital qui s'analyse en une demande en interprétation de la convention de divorce homologuée par le jugement de divorce qui n'entre pas dans le champ d'application du règlement (CE) n°4/2009, sans avoir invité préalablement les parties à s'expliquer sur ce point, la cour d'appel a violé l'article 16 du code de procédure civile ;

2°) ALORS QUE le juge ne peut dénaturer les conclusions des parties ; qu'en retenant que la demande tendant à voir fixer le montant restant dû de la prestation compensatoire versée en capital était une demande pour laquelle M. L... ne donnait pas de fondement et devait s'analyser en une interprétation de la convention de divorce homologuée par le jugement de divorce, distincte de la demande tendant à voir supprimer la rente fixée au titre de la prestation compensatoire et, partant, qu'elle échappait au champ d'application du règlement (CE) n°4/2009 à la différence de la demande tendant à la suppression de la rente fixée au titre de la prestation compensatoire, quand il résultait des conclusions d'appel de M. L... qu'il faisait valoir que la demande relative à la prestation compensatoire tendait dans son ensemble à la révision de cette prestation, qu'elle soit versée en rente ou en capital, et qu'elle relevait dans les deux cas du champ d'application du règlement (CE) n°4/2009, M. L... ne faisant aucunement valoir que la demande tendant à la fixation du montant restant dû de la prestation compensatoire versée en capital était une demande distincte de la demande tendant à la suppression de la rente fixée au titre de la prestation compensatoire qui échapperait au champ d'application dudit règlement en ce qu'elle constituerait une demande en interprétation de la convention de divorce, la cour d'appel a violé l'article 4 du code de procédure civile ;

3°) ALORS QU'une demande tendant à la révision d'une prestation compensatoire relève, en raison du caractère alimentaire de cette prestation, du champ d'application du règlement (CE) n°4/2009 ; qu'en application de l'article 3 de ce règlement, en l'absence d'instance en cours relative à l'état des personnes, cette demande doit être portée devant la juridiction du lieu de la résidence habituelle du défendeur ou devant la juridiction du lieu de la résidence habituelle du créancier d'aliments ; qu'en retenant que le demande tendant à voir fixer le montant restant dû de la prestation compensatoire versée en capital était une demande en interprétation de la convention de divorce homologuée par le jugement de divorce, distincte de la demande tendant à voir supprimer la rente fixée au titre de la prestation compensatoire et partant, qu'elle échappait au champ d'application du règlement (CE) n°4/2009 à la différence de la demande tendant à la suppression de la rente fixée au titre de la prestation compensatoire, quand ces deux demandes, tendant à la révision de la prestation compensatoire dans son ensemble, étaient indivisibles et ne pouvaient traitées séparément de sorte que la détermination du juge compétent devait se faire pour les deux en application de l'article 3 du règlement (CE) n°4/2009, la cour d'appel a violé ce texte.


Synthèse
Formation : Chambre civile 1
Numéro d'arrêt : 18-19818
Date de la décision : 03/10/2019
Sens de l'arrêt : Cassation partielle
Type d'affaire : Civile

Références :

Décision attaquée : Cour d'appel de Paris, 31 mai 2018


Publications
Proposition de citation : Cass. Civ. 1re, 03 oct. 2019, pourvoi n°18-19818


Composition du Tribunal
Président : Mme Batut (président)
Avocat(s) : SARL Meier-Bourdeau, Lécuyer et associés, SCP Célice, Soltner, Texidor et Périer

Origine de la décision
Date de l'import : 15/09/2022
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CCASS:2019:18.19818
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