La jurisprudence francophone des Cours suprêmes


recherche avancée

03/10/2019 | FRANCE | N°18-18507

France | France, Cour de cassation, Chambre civile 2, 03 octobre 2019, 18-18507


LA COUR DE CASSATION, DEUXIÈME CHAMBRE CIVILE, a rendu l'arrêt suivant :

Attendu, selon l'arrêt attaqué (Versailles, 29 mars 2018), que la société de développement et de gestion hôtelière de Paris-Roissy- SDGH, gestionnaire d'un hôtel, a conclu avec la société Gaz de France, devenue Engie, un contrat pour la fourniture de gaz ; qu'en juillet 2012, la société GRDF, chargée de gérer le réseau de distribution de gaz, a décelé une erreur dans le calcul des consommations de la société SDGH pour la période du 30 août 2007 au 27 juillet 2012 ; qu'elle en a informé cett

e dernière et la société Engie, laquelle a rectifié sa facturation puis, aprè...

LA COUR DE CASSATION, DEUXIÈME CHAMBRE CIVILE, a rendu l'arrêt suivant :

Attendu, selon l'arrêt attaqué (Versailles, 29 mars 2018), que la société de développement et de gestion hôtelière de Paris-Roissy- SDGH, gestionnaire d'un hôtel, a conclu avec la société Gaz de France, devenue Engie, un contrat pour la fourniture de gaz ; qu'en juillet 2012, la société GRDF, chargée de gérer le réseau de distribution de gaz, a décelé une erreur dans le calcul des consommations de la société SDGH pour la période du 30 août 2007 au 27 juillet 2012 ; qu'elle en a informé cette dernière et la société Engie, laquelle a rectifié sa facturation puis, après avoir vainement réclamé à la société SDGH le règlement de la somme de 110 791,74 euros restant due à ce titre, a assigné celle-ci en paiement et la société GRDF en garantie de ce paiement ;

Sur le moyen unique du pourvoi incident, qui est préalable :

Attendu que la société GRDF fait grief à l'arrêt de la condamner à payer à la société Engie une somme de 104 193,26 euros TTC, alors, selon le moyen, que l'erreur commise par le distributeur d'énergie ayant conduit le fournisseur d'énergie à minorer le montant des factures dues par le client ne cause un dommage au fournisseur qu'à la condition que celui-ci se trouve dans l'impossibilité d'obtenir le paiement du solde dû auprès du client ; qu'en l'espèce, la société GRDF soulignait dans ses conclusions que l'erreur qu'elle avait commise n'avait causé aucun préjudice à la société Engie dans la mesure où elle disposait d'une action en paiement à l'encontre de la société SDGH qui demeurait débitrice des factures rectificatives ; que pour condamner la société SDGH au paiement d'une somme correspondant au montant des factures impayées, la cour d'appel a retenu que l'erreur commise « a d'évidence occasionné un préjudice à la société Engie qui s'est ainsi vue privée du paiement de la facture correspondante par la société SDGH » ; qu'en statuant ainsi, sans rechercher si la société Engie se trouvait dans l'impossibilité définitive de recouvrer sa créance auprès de sa débitrice, la société SDGH, la cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard de l'article 1147 du code civil ;

Mais attendu que la cour d'appel n'avait pas à procéder à une recherche qui ne lui était pas demandée ;

D'où il suit que le moyen n'est pas fondé ;

Et sur le moyen unique du pourvoi principal :

Attendu que la société SDGH fait grief à l'arrêt de la condamner à garantir la société GRDF des condamnations prononcées contre elle en faveur de la société Engie alors, selon le moyen :

1°/ que la responsabilité délictuelle d'une personne ne peut être engagée que si une faute de sa part est la cause directe et certaine du préjudice subi par un tiers ; qu'en condamnant la société SDGH à garantir la société GRDF des condamnations prononcées contre elle au visa de l'article 1382, devenu 1240, du code civil, sans caractériser aucune faute de sa part qui serait à l'origine d'un préjudice subi par la société GRDF, dont elle n'a pas plus relevé l'existence, et après avoir constaté que la société Engie ne formait plus aucune demande de paiement contre la société SDGH, la cour d'appel n'a pas donné de base légale à sa décision au regard de cette disposition ;

2°/ que si c'est au débiteur qui se prétend libéré de justifier de son paiement, il appartient d'abord à celui qui réclame l'exécution d'une obligation de la prouver ; qu'en reprochant à la société SDGH de ne pas démontrer l'absence de fiabilité des relevés de consommation ayant donné lieu aux factures sur la base desquelles la réclamation formée contre elle a été établie, pour la condamner à garantir la société GRDF des condamnations prononcées contre elle, sans constater au préalable que la société GRDF justifiait de la réalité de la correction ayant conduit à réclamer à la société SDGH le paiement d'une quantité de gaz plus importante que celle initialement facturée, ce qui était contesté, la cour d'appel qui a renversé la charge de la preuve a violé l'article 1315, devenu 1353, du code civil ;

3°/ que nul ne peut se constituer une preuve à lui-même ; qu'en se fondant, pour condamner la société SDGH à garantir la société GRDF des condamnations prononcées contre elle au profit de la société Engie, sur les relevés de consommation qui ont été établis unilatéralement par la société GRDF sur la base d'éléments définis par elle seule, la cour d'appel a violé l'article 1315, devenu 1353, du code civil ;

Mais attendu que, par des motifs vainement critiqués par le pourvoi incident, la cour d'appel a condamné la société GRDF à payer à la société Engie, au titre de la réparation de l'erreur qu'elle avait commise, la somme de 104 193,26 euros en retenant que les pièces produites établissaient la réalité de la créance alléguée par la société Engie, correspondant au montant des factures laissées impayées par la société SDGH ; que c'est sans encourir les griefs des deux dernières branches qu'elle a ensuite jugé que la société SDGH ne démontrait pas que le redressement effectué à la suite de la découverte de l'erreur précitée n'était pas fondé ; qu'elle a pu dès lors décider de condamner la société SDGH à garantir la société GRDF des condamnations prononcées contre elle, en raison de son refus de payer l'arriéré litigieux, en faisant ainsi ressortir le caractère fautif de ce refus ayant entraîné la condamnation de la société GRDF ;

D'où il suit que le moyen n'est pas fondé ;

PAR CES MOTIFS :

REJETTE les pourvois ;

Condamne la société de développement et de gestion hôtelière de Paris-Roissy aux dépens ;

Vu l'article 700 du code de procédure civile, rejette les demandes ;

Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, deuxième chambre civile, et prononcé par le président en son audience publique du trois octobre deux mille dix-neuf.

MOYENS ANNEXES au présent arrêt :

Moyen produit par la SCP Waquet, Farge et Hazan, avocat aux Conseils, pour la société Développement et gestion hôtelière de Paris-Roissy, demanderesse au pourvoi principal

IL EST FAIT GRIEF à l'arrêt infirmatif attaqué d'avoir condamné la société par actions simplifiée Développement et Gestion Hôtelière de Paris Roissy exerçant sous l'enseigne Best Western à garantir la société anonyme GrDF des condamnations prononcées contre elle en faveur de la société anonyme Engie, en ce compris les dispositions afférentes aux dépens de première et d'instance et d'appel ainsi que les frais irrépétibles d'appel ;

AUX MOTIFS QUE la Cour constate qu'ayant ab initio sollicité devant les premiers juges la condamnation in solidum des sociétés SDGH et GrDF, la société Engie sollicite à hauteur d'appel et à titre principal la seule condamnation de la société GrDF à qui elle impute à faute un manquement à ses obligations issues du contrat d'acheminement sur le réseau de gaz naturel régissant leurs relations (arrêt, p. 12, § n° 5) (
) Vu l'article 1382 du code civil dans da rédaction applicable à la présente cause, antérieure au 1er octobre 2016 ; S'étant refusée au paiement de l'arriéré de facturation dont le montant lui est aujourd'hui réclamé par la société GrDF sous forme d'un appel en garantie des condamnations prononcées contre elle, la société SDGH qui ne démontre pas davantage l'absence de fiabilité des relevés de consommation ayant donné lieu aux factures sur la base desquelles la réclamation formée contre elle a été établie ni la réalité d'un dysfonctionnement de son compteur ou encore celle d'une consommation disproportionnée au regard des consommations ultérieures, doit être condamnée dans les termes du dispositif de cette décision (arrêt, p. 14, § n°s 15 et 16) ;

ALORS D'UNE PART QUE la responsabilité délictuelle d'une personne ne peut être engagée que si une faute de sa part est la cause directe et certaine du préjudice subi par un tiers ; qu'en condamnant la société SDGH à garantir la société GrDF des condamnations prononcées contre elle au visa de l'article 1382, devenu 1240, du code civil, sans caractériser aucune faute de sa part qui serait à l'origine d'un préjudice subi par la société GrDF, dont elle n'a pas plus relevé l'existence, et après avoir constaté que la société Engie ne formait plus aucune demande de paiement contre la société SDGH, la cour d'appel n'a pas donné de base légale à sa décision au regard de cette disposition ;

ALORS D'AUTRE PART et subsidiairement QUE si c'est au débiteur qui se prétend libéré de justifier de son paiement, il appartient d'abord à celui qui réclame l'exécution d'une obligation de la prouver ; qu'en reprochant à la société SDGH de ne pas démontrer l'absence de fiabilité des relevés de consommation ayant donné lieu aux factures sur la base desquelles la réclamation formée contre elle a été établie, pour la condamner à garantir la société GrDF des condamnations prononcées contre elle, sans constater au préalable que la société GrDF justifiait de la réalité de la correction ayant conduit à réclamer à la société SDGH le paiement d'une quantité de gaz plus importante que celle initialement facturée, ce qui était contesté, la cour d'appel qui a renversé la charge de la preuve a violé l'article 1315, devenu 1353, du code civil ;

ALORS ENFIN QUE et subsidiairement nul ne peut se constituer une preuve à lui-même ; qu'en se fondant, pour condamner la société SDGH à garantir la société GrDF des condamnations prononcées contre elle au profit de la société Engie, sur les relevés de consommation qui ont été établis unilatéralement par la société GrDF sur la base d'éléments définis par elle seule, la cour d'appel a violé l'article 1315, devenu 1353, du code civil.
Moyen produit par la SCP Thouin-Palat et Boucard, avocat de la société GRDF, demanderesse au pourvoi incident

Il est fait grief à la décision attaquée d'avoir condamné la société GrDF à payer à la société ENGIE une somme de 104 193,26 euros TTC ;

aux motifs propres que « sur la responsabilité de la société GrDF, distributeur d'énergie : que la société GrDF explique au soutien de sa demande de réformation que le fournisseur ne saurait prétendre obtenir de sa part en tant que distributeur, le paiement de factures dont elle n'est pas contractuellement débitrice et que par ailleurs, l'allocation de dommages-intérêts au profit du fournisseur d'énergie ne peut se concevoir que dans l'hypothèse où ce dernier démontre, avoir subi un préjudice n'ayant pas déjà été indemnisé du fait des accords existant entre elles ; qu'elle précise que : - la réalité de l'erreur de paramétrage et le bien-fondé du redressement opéré par la société Engie, contesté par la société SDGH, sont en l'espèce établies par les factures rectificatives versées aux débats ainsi que par la copie écran du logiciel de facturation relatif à une relève du 30 août 2007 et deux photographies du compteur de la société SDGH - voir cotes 10 et 11; - ces documents, démontrent que 25 % de la consommation réelle de gaz de la société SDGH n'ont pas été facturés à cette société ; - bien que cette sous-évaluation ait perduré depuis le 27 mars 2002, le redressement ne porte que sur les consommations intervenues de septembre 2007 à juillet 2012, ce qui est favorable à la société débitrice qui, exploitant un hôtel, n'a pu que s'apercevoir que la consommation qui lui était facturée était nettement sous-évaluée ; - l'erreur commise n'exonère pas la société SDGH du paiement de la facture de redressement ; - il est en effet de jurisprudence établie, que la demande en paiement faite à un client ayant bénéficié par erreur d'une facturation minorée de ses consommations d'énergie, ne peut être rejetée au motif que cette erreur ne lui est pas imputable ; - il incombe donc à la société SGDH, tenue au paiement du redressement opéré par la société Engie à l'exclusion de toute autre partie, de rapporter la preuve de l'extinction de son obligation pour contester utilement la facture de redressement litigieuse ; - bien qu'elle n'ait pas apporté cette preuve, les premiers juges l'ont exonérée à tort de tout paiement ; qu'elle ajoute que : - seule, la société SDGH peut donc être condamnée au paiement des factures litigieuses dont elle n'est elle-même pas débitrice ; - la société Engie dispose au demeurant de moyens coercitifs pour obtenir le paiement de ses factures tels que, l'application d'intérêts ou encore, la suspension de la fourniture d'énergie ; - tout appel en garantie de la société Engie à son encontre est strictement encadré par le contrat d'acheminement passé entre elles et se conçoit par conséquent, dans la seule et unique hypothèse d'une action en dommages-intérêts formée contre elle par son propre client ; - si tant est qu'il soit démontré qu'elle ait commis un manquement à ses obligations contractuelles, elle ne pourrait être tenue que de garantir la société Engie du paiement d'éventuels dommages-intérêts au bénéfice de son client à l'exclusion de toute autre prétention ; - quoi qu'il en soit, si le contrat d'acheminement applicable prévoit que le fournisseur renonce à tout recours contre le distributeur, cette renonciation n'est pas exclusive de toute prise en charge de son préjudice dès lors que l'article 8.3 dudit contrat prévoit la prise en charge par la société GrDF, de l'impact des corrections effectuées par le distributeur notamment, par le redressement de la facture d'acheminement ainsi que par l'alimentation d'un compte spécifique appelé Compte d'Ecart ZET, liquidé mensuellement ; - il y a donc lieu de la mettre hors de cause, la société Engie devant pour sa part, être déboutée des demandes formées à son encontre ; que la société Engie répond que : - n'exerçant aujourd'hui plus aucun contrôle sur le réseau de distribution, elle ne saurait être à la fois distributeur et fournisseur sauf, à contrevenir aux normes européennes désormais applicables ; - seule responsable du réseau, la société GrDF était donc seule, en mesure de pouvoir détecter et signaler l'anomalie alléguée ; - la société GrDF est responsable de tout dysfonctionnement dans les opérations de comptage des consommations de gaz fournies au client ; - la faute que cette société a commise, est directement en lien avec le préjudice qu'elle a subi puisqu'elle n'a pas été réglée de l'intégralité des factures rectificatives émises après la découverte du dysfonctionnement litigieux ; - en l'absence de dysfonctionnement, elle n'aurait pas eu à émettre de factures rectificatives puisque, la société SDGH aurait réglé ses consommations sans difficultés ; - il ne saurait par ailleurs lui être reproché d'avoir maintenu la fourniture d'énergie d'une part, parce que le litige portait sur une période passée et que les factures en cours étaient réglées régulièrement et d'autre part, parce qu'à titre commercial, il était malvenu, alors que le redressement provenait d'une erreur extérieure au client, de suspendre toute fourniture d'énergie au bénéfice de celui-ci ; - au demeurant, selon les énonciations du contrat d'acheminement applicable signé avec la société GrDF, la responsabilité de ce distributeur est engagée en tant que fournisseur et/ou de ses assureurs, à raison des dommages matériels ou immatériels corrélatifs au manquement prouvé de ce distributeur à ses obligations nées de ce contrat ; que vu les articles 1134 et 1147 du code civil dans leur rédaction en vigueur avant le 1er octobre 2016 ; que la Cour constate qu'ayant ab initio sollicité devant les premiers juges, la condamnation in solidum des sociétés SDGH et GrDF, la société Engie sollicite à hauteur d'appel et à titre principal, la seule condamnation de la société GrDF à qui elle impute à faute, un manquement à ses obligations issues du contrat d'acheminement sur le réseau de distribution de gaz naturel régissant leurs relations ; que selon l'article L. 432-8, 7° du code de l'énergie, le gestionnaire de réseau de distribution de gaz naturel est notamment chargé « d'exercer les activités de comptage pour les utilisateurs raccordés à son réseau, en particulier la fourniture, la pose, le contrôle métrologique, l'entretien et le renouvellement des dispositifs de comptage et d'assurer la gestion des données et toutes missions afférentes à l'ensemble de ces activités » ; que l'article 5 des conditions standard de livraison applicables entre le client et le distributeur - voir cote 2 du dossier de la société GrDF, précise par ailleurs qu'il appartient au distributeur d'assurer l'exploitation, la maintenance, la vérification réglementaire et le remplacement du dispositif local de mesurage et enfin, l'article 20.3.2 du contrat d'acheminement précité ayant trait à la responsabilité du distributeur envers le fournisseur, retient que « la responsabilité du Distributeur est engagée à l'égard du Fournisseur et/ou des assureurs de ce dernier à raison des dommages matériels ou immatériels directs subis par ce dernier du fait d'un manquement prouvé du Distributeur à ses obligations au titre du contrat » - voir cote 8 du dossier de la société GrDF ; qu'il suit de là que l'erreur commise par la société GrDF dans le mesurage des consommations du client, non contestée par elle voir p. 8 des conclusions déposées devant les premiers juges : « S'il n'est pas contesté que la société SDGH a bénéficié d'une erreur commise par GrDF », a d'évidence occasionné un préjudice à la société Engie qui s'est ainsi vue privée du paiement de la facture correspondante par la société SDGH de sorte que cette erreur, a nécessairement engagé sa responsabilité contractuelle envers le fournisseur aujourd'hui fondé à obtenir, sous forme de dommages-intérêts, l'indemnisation de son préjudice corrélatif ; que le jugement entrepris sera confirmé en ce qu'il a condamné la société GrDF au paiement de dommages-intérêts équivalant au montant des factures de redressement laissées impayées par la société SGDH, en l'absence de faute établie de la société Engie, susceptible d'exonérer le distributeur de toute responsabilité ; que la clause de renonciation à tout recours insérée à l'article 20.3.4 au contrat d'acheminement dont la société GrDF se prévaut apparaît en effet ne pas être applicable à un préjudice tel que celui concerné par la présente cause se rapportant aux manquements du contrat litigieux et ce d'autant plus que, selon l'article 20.2 alinéa 2 du même acte « Le Distributeur est seul responsable des dommages causés au Client en cas de non-respect d'une ou plusieurs obligations mises à sa charge aux termes du contrat de Livraison Direct ou des Conditions Standard de Livraison » ; qu'ainsi que rappelé par la société Engie, il ne saurait de ce dernier point de vue, être imputé à faute du fournisseur, de ne pas avoir suspendu la fourniture d'énergie dès lors, que l'anomalie incriminée n'a été découverte que tardivement et que quoi qu'il en soit, il n'est nullement établi que le client utilisateur y a contribué ; qu'enfin, l'ensemble des factures rectificatives établies en vertu du redressement incriminé - voir cotes 3 du dossier Engie, confrontées à la copie écran du logiciel de facturation relative à une relève du mois d'août 2007 - voir cote 10 du dossier de la société GrDF, versées aux débats, est bien de nature à établir la réalité de la créance indemnitaire alléguée par la société Engie sur la base des données fournies par le distributeur fautif lui-même ; qu'il ressort des termes du débat que les factures des 4 et 24 septembre 2012 à partir desquelles la société Engie a fondé sa demande d'indemnisation - cote 3 du dossier de la société Engie, se rapportent à une période de consommation comprise entre novembre 2011 et juillet 2012 de sorte qu'il ne saurait y avoir lieu, de quelle que manière que ce soit, au jeu de la prescription extinctive au visa de l'article 2224 du code civil ayant pour point de départ le jour où la société GrDF a admis son erreur et partant, le 31 juillet 2012 » ;

et aux motifs éventuellement adoptés que « sur la responsabilité de la société GrDF ; que l'article L. 432-8 du code de l'énergie dispose que : « sans préjudices des dispositions du septième alinéa du I de l'article L. 2224-31 du code général des collectivités territoriales, un gestionnaire de réseau de distribution de gaz naturel est notamment chargé, dans le cadre des cahiers des charges de concession et des règlements de service des régies mentionnés au I du même article L. 2224-31 : :
7° D'exercer les activités de comptage pour les utilisateurs raccordés à son réseau, en particulier la fourniture, la pose, le contrôle métrologique, l'entretien et le renouvellement des dispositifs de comptage et d'assurer la gestion des données et toutes missions afférentes à l'ensemble de ces activités » ; que par ailleurs l'article 5 des conditions Standard de Livraison de la société GrDF stipule qu'il appartient au distributeur d'assurer l'exploitation, la maintenance, la vérification réglementaire et le remplacement du dispositif local de mesurage ; qu'en l'espèce, il apparaît que la société GrDF n'a pas assuré correctement la gestion des données puisqu'elle admet s'être trompée dans son paramétrage des données issues du compteur de la société SDGH ; que le distributeur, la société GrDF a donc commis un manquement à ses obligations contractuelles ; que la société GrDF indique même dans les pièces produites qu' « il n'est pas contesté que la société SDGH a bénéficié d'une erreur commise par la société GrDF » ; que la responsabilité de la société GrDF au regard du dysfonctionnement du paramétrage PTA ne souffre donc d'aucune contestation ; que le reproche fait par la société GrDF à la société ENGIE d'être seule responsable de ne pas avoir été réglée par la société SDGH, pour ne pas avoir usé de moyens coercitifs (suspension de fourniture d'énergie, application d'intérêts..) ; qu'un tel reproche ne saurait être admis dans la mesure où le litige portait sur une période passée, que les factures en cours étaient réglées régulièrement d'une part et que d'autre part le redressement provenait d'une erreur extérieure au client ; que lui suspendre toute fourniture d'énergie n'aurait eu aucun fondement légitime ; qu'au surplus, en saisissant le tribunal pour obtenir le paiement de sa créance, la société ENGIE a fait le nécessaire pour obtenir le paiement de sa créance ; que les objections à cet égard de la société GrDF pour dénier sa responsabilité, et donc sa garantie, seront écartées ; que la société GrDF invoque encore les dispositions du contrat d'acheminement qui lie à chaque fournisseur, en l'espèce ici la société ENGIE ; que les dispositions de l'article 20.3.2 de ce contrat régissent la question de la responsabilité du distributeur à l'égard du fournisseur ; qu'elles sont parfaitement claires ; que « la responsabilité du Distributeur est engagée à l'égard du Fournisseur et/ou des assureurs de ce dernier à raison des dommages matériels ou immatériels subis par ce dernier du fait d'un manquement prouvé du Distributeur à ses obligations au titre du contrat » ; que cela est parfaitement le cas en l'espèce, puisque la société GrDF a manqué à ses obligations contractuelles de gestion des données ; que la société GrDF prétend également que la société ENGIE devrait renoncer à tout recours contre elle ; qu'en l'espèce, le manquement aux obligations contractuelles de la part de la société GrDF qui prévoit la renonciation à tout recours, n'a pas vocation à s'appliquer puisque justement cette renonciation ne s'applique qu'aux dommages « autres que ceux décrits ci-avant »que la société ENGIE n'a donc pas à renoncer à son action à l'encontre de la société GrDF ; qu'il conviendrait de tenir la société GrDF responsable, in solidum avec la société SDGH, puisque la société ENGIE souffre du refus de payer de la société SDGH du fait de l'erreur de la société GrDF » ;

alors que l'erreur commise par le distributeur d'énergie ayant conduit le fournisseur d'énergie à minorer le montant des factures dues par le client ne cause un dommage au fournisseur qu'à la condition que celui-ci se trouve dans l'impossibilité d'obtenir le paiement du solde dû auprès du client ; qu'en l'espèce, la société GrDF soulignait dans ses conclusions que l'erreur qu'elle avait commise n'avait causé aucun préjudice à la société ENGIE dans la mesure où elle disposait d'une action en paiement à l'encontre de la société SGDH qui demeurait débitrice des factures rectificatives (conclusions, p. 8 et s.) ; que pour condamner l'exposante au paiement d'une somme correspondant au montant des factures impayées, la cour d'appel a retenu que l'erreur commise « a d'évidence occasionné un préjudice à la société Engie qui s'est ainsi vue privée du paiement de la facture correspondante par la société SDGH » (arrêt, p. 12, n° 7) ; qu'en statuant ainsi, sans rechercher si la société ENGIE se trouvait dans l'impossibilité définitive de recouvrer sa créance auprès de sa débitrice, la société SDGH, la cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard de l'article 1147 du code civil.


Synthèse
Formation : Chambre civile 2
Numéro d'arrêt : 18-18507
Date de la décision : 03/10/2019
Sens de l'arrêt : Rejet
Type d'affaire : Civile

Références :

Décision attaquée : Cour d'appel de Versailles, 29 mars 2018


Publications
Proposition de citation : Cass. Civ. 2e, 03 oct. 2019, pourvoi n°18-18507


Composition du Tribunal
Président : Mme Gelbard-Le Dauphin (conseiller doyen faisant fonction de président)
Avocat(s) : SCP Boullez, SCP Thouin-Palat et Boucard, SCP Waquet, Farge et Hazan

Origine de la décision
Date de l'import : 15/09/2022
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CCASS:2019:18.18507
Association des cours judiciaires suprmes francophones
Organisation internationale de la francophonie
Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie. Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie.
Logo iall 2012 website award