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02/10/2019 | FRANCE | N°18-14546

France | France, Cour de cassation, Chambre sociale, 02 octobre 2019, 18-14546


LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE SOCIALE, a rendu l'arrêt suivant :

Attendu, selon l'arrêt attaqué, que M. J... a été engagé en qualité de contrôleur opérationnel par la société Intervalles suivant plusieurs contrats à durée déterminée pour la période du 6 février au 31 octobre 2007 puis par contrat à durée indéterminée à effet du 5 novembre 2007 ; que le salarié a été placé en arrêt de travail du 20 août 2014 au 20 avril 2015 ; qu'il a été licencié pour insuffisance professionnelle le 14 avril 2015 ; que le 29 avril 2015, il a saisi la juridiction prud'homa

le de demandes relatives tant à l'exécution qu'à la rupture de son contrat de travai...

LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE SOCIALE, a rendu l'arrêt suivant :

Attendu, selon l'arrêt attaqué, que M. J... a été engagé en qualité de contrôleur opérationnel par la société Intervalles suivant plusieurs contrats à durée déterminée pour la période du 6 février au 31 octobre 2007 puis par contrat à durée indéterminée à effet du 5 novembre 2007 ; que le salarié a été placé en arrêt de travail du 20 août 2014 au 20 avril 2015 ; qu'il a été licencié pour insuffisance professionnelle le 14 avril 2015 ; que le 29 avril 2015, il a saisi la juridiction prud'homale de demandes relatives tant à l'exécution qu'à la rupture de son contrat de travail ;

Sur les premier et troisième moyens du pourvoi principal du salarié :

Attendu qu'il n'y a pas lieu de statuer par une décision spécialement motivée sur les moyens annexés qui ne sont manifestement pas de nature à entraîner la cassation ;

Sur le deuxième moyen du pourvoi principal du salarié :

Attendu que le salarié fait grief à l'arrêt de le débouter de ses demandes de nullité du licenciement pour discrimination en raison de son état de santé, de réintégration et de paiement des salaires afférents et de condamner l'employeur au paiement de dommages-intérêts pour licenciement sans cause réelle et sérieuse alors, selon le moyen :

1°/ qu'aucune personne ne peut être licenciée en raison de son état de santé, une telle mesure présentant un caractère discriminatoire ; qu'il appartient au salarié qui se prétend lésé par une mesure discriminatoire de soumettre au juge les éléments de fait laissant supposer l'existence d'une discrimination directe ou indirecte et il incombe à l'employeur de prouver que sa décision est justifiée par des éléments objectifs étrangers à toute discrimination ; que pour juger, en l'espèce, que le licenciement de M. J... n'avait pas été prononcé en raison de son état de santé, et qu'il n'était donc pas nul, la cour d'appel a affirmé que « la preuve n'est pas rapportée que le licenciement du salarié est fondé sur son état de santé » ; qu'en statuant de la sorte, la cour d'appel, qui a fait peser la charge de la preuve de la discrimination sur le salarié, a violé les articles L. 1132-1, L. 1134-1 et L. 1132-4 du code du travail ;

2°/ qu'en tout état de cause, une fois que le salarié a présenté des éléments de fait laissant supposer l'existence d'une discrimination, il incombe à l'employeur de prouver que sa décision est justifiée par des éléments objectifs étrangers à toute discrimination ; qu'en l'espèce, M. J... faisait valoir que les motifs de son licenciement n'étaient qu'un prétexte et qu'il avait, en réalité, été licencié en raison de son état de santé ; qu'après avoir elle-même constaté que le licenciement du salarié était intervenu durant une période d'arrêt de travail pour maladie de plusieurs mois et juste avant sa reprise de travail, et jugé que le licenciement prononcé à son encontre était dénué de cause réelle et sérieuse, car reposant sur des griefs peu précis et non datés insusceptibles d'objectiver le comportement de l'employeur, la cour d'appel a néanmoins débouté l'exposant de sa demande de nullité de son licenciement en affirmant que « la preuve n'est pas rapportée que le licenciement du salarié est fondé sur son état de santé » ; qu'en statuant ainsi, la cour d'appel n'a pas tiré les conséquences légales qui s'imposaient de ses propres constatations dont il s'évinçait que l'employeur était dans l'incapacité d'objectiver la mesure de licenciement prise à l'encontre du salarié, et a violé ce faisant les articles L. 1132-1 et L. 1134-1 du code du travail ;

Mais attendu qu'ayant relevé que les griefs mentionnés dans la lettre de licenciement étaient relatifs à une période antérieure à l'arrêt de travail du salarié, qu'ils avaient été évoqués lors d'un entretien avec son supérieur hiérarchique antérieurement à cet arrêt de travail et que le licenciement était intervenu plusieurs mois après le début de l'arrêt maladie et avant la reprise du travail, la cour d'appel a, sans inverser la charge de la preuve, fait ressortir que le salarié ne présentait pas d'éléments de fait laissant supposer l'existence d'une discrimination fondée sur son état de santé ; que le moyen n'est pas fondé ;

Et attendu que le rejet des premier et deuxième moyens du pourvoi principal du salarié prive de portée le second moyen du pourvoi incident de l'employeur qui invoque une cassation par voie de conséquence ;

Mais sur le premier moyen du pourvoi incident de l'employeur :

Vu les articles L. 1471-1 du code du travail dans sa rédaction issue de la loi n° 2013-504 du 14 juin 2013, 2222 et 2224 du code civil et 21-V de la loi n° 2013-504 du 14 juin 2013 ;

Attendu que pour rejeter la fin de non-recevoir tirée de la prescription de la demande en requalification de contrats à durée déterminée en un contrat à durée indéterminée et condamner l'employeur au paiement d'une indemnité de requalification, l'arrêt retient qu'il ressort des bulletins de paie et des contrats produits par le salarié qu'il a été engagé à compter du 6 février 2007 au 28 février 2007 sans contrat en qualité de chef d'équipe, qu'il ressort de ces éléments que faute de contrat écrit la relation contractuelle commencée le 6 février 2007 doit être requalifiée en contrat à durée indéterminée à partir de cette date, que le salarié est fondé à obtenir une indemnité de requalification, étant précisé que contrairement à ce qu'a jugé le premier juge, l'action en requalification n'était pas prescrite, qu'en effet, en application des dispositions de la loi du 14 juin 2013 et l'introduction de l'article L. 1471-1 du code du travail réduisant la prescription à deux ans et fixant le point de départ de ce nouveau délai à compter de l'entrée en vigueur de la loi, la demande en requalification des contrats à durée déterminée en contrat de travail à durée indéterminée formée par le salarié est recevable, dans la mesure où elle a été formée lors de la saisine du conseil des prud'hommes le 29 avril 2015, peu important la date des conclusions contenant cette demande ;

Attendu, cependant, qu'en cas de réduction de la durée du délai de prescription, le nouveau délai court à compter du jour de l'entrée en vigueur de la loi nouvelle sans que la durée totale puisse excéder la durée prévue par la loi antérieure ;

Qu'en statuant comme elle l'a fait, alors que la prescription biennale de l'article L. 1471-1, qui avait commencé à courir au jour de l'entrée en vigueur de la loi n° 2013-504 du 14 juin 2013, ne pouvait avoir pour effet de porter la durée totale de la prescription au-delà du délai de cinq ans prévu par la loi n° 2008-561 du 17 juin 2008, lequel avait commencé à courir le 19 juin 2008, date d'entrée en vigueur de cette loi, et était expiré au 29 avril 2015, date de la saisine de la juridiction prud'homale, la cour d'appel a violé les textes susvisés ;

Et vu l'article 627 du code de procédure civile, après avis donné aux parties en application de l'article 1015 du même code ;

PAR CES MOTIFS :

CASSE ET ANNULE, mais seulement en ce qu'il requalifie les contrats à durée déterminée en un contrat de travail à durée indéterminée à compter du 6 février 2007 et condamne la société Intervalles à payer à M. J... la somme de 2 553 euros à titre d'indemnité de requalification, l'arrêt rendu le 30 janvier 2018, entre les parties, par la cour d'appel de Paris ;

DIT n'y avoir lieu à renvoi ;

Déclare irrecevables les demandes de M. J... en requalification des contrats à durée déterminée en contrat à durée indéterminée et en paiement d'une indemnité de requalification ;

Condamne M. J... aux dépens ;

Vu l'article 700 du code de procédure civile, rejette les demandes ;

Dit que sur les diligences du procureur général près la Cour de cassation, le présent arrêt sera transmis pour être transcrit en marge ou à la suite de l'arrêt partiellement cassé ;

Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, chambre sociale, et prononcé par le président en son audience publique du deux octobre deux mille dix-neuf.

MOYENS ANNEXES au présent arrêt :

Moyens produits au pourvoi principal par la SCP Garreau, Bauer-Violas et Feschotte-Desbois, avocat aux Conseils, pour M. J...

PREMIER MOYEN DE CASSATION :

Il est fait grief à l'arrêt confirmatif attaqué d'avoir débouté M. J... de sa demande tendant à obtenir la nullité de son licenciement et sa réintégration avec paiement des salaires afférents, et condamné la société Intervalles à lui payer la somme de 28 000 euros au titre des dommages intérêts pour licenciement sans cause réelle et sérieuse,

AUX MOTIFS PROPRES QUE

Sur la demande de nullité du licenciement

Qu'au visa de l'article L.1226-9 du code du travail, le salarié conclut à la nullité de son licenciement pour avoir été prononcé pendant une période de suspension du contrat de travail pour accident du travail sans que soit invoquée une faute grave ;

Que les règles protectrices applicables aux victimes d'un accident du travail ou d'une maladie professionnelle s'appliquent dès lors que l'employeur a connaissance de l'origine au moins professionnelle de la maladie ou de l'accident ; qu'au cours de la période de suspension du contrat de travail, l'employeur ne peut rompre le contrat que s'il justifie soit d'une faute grave du salarié, soit de son impossibilité de maintenir le contrat pour un motif étranger à l'accident ou à la maladie ; qu'il en est ainsi, alors même qu'au jour du licenciement, l'employeur a été informé d'un refus de prise en charge au titre du régime des accidents du travail ou des maladies professionnelles ;

Qu'en l'espèce, M. J... a été placé en arrêt de travail pour maladie début août 2014 pour quelques jours, puis après une période de travail, a été de nouveau placé en arrêt de travail à compter du 20 août 2014. Cet arrêt de travail initial pour maladie (et non pour accident du travail) a été ensuite prolongé jusqu'au terme de son contrat de travail, le dernier arrêt de travail courant jusqu'au 20 avril 2015 ;

Que M. J... a certes fait parvenir à la société Intervalles le 20 janvier 2015 un arrêt de travail pour accident du travail dit « duplicata rectificatif » daté du 20 août 2014 et visant l'unique période du 20 au 29 août 2014 ;

Mais que force est de constater que si le salarié appelant se prévaut de l'arrêt de travail pour accident du travail dit « duplicata rectificatif », la société produit un premier arrêt de travail pour maladie (et non AT), qui a été reconduit sur des formulaires d'arrêt de travail pour maladie non professionnelle jusqu'à la rupture du contrat de travail ;

Que M. J... verse au débat quelques certificats médicaux de médecins traitants qui rapportent les propos de leur patient lequel fait le lien entre son état de santé et ses conditions de travail ; mais ces documents sont inopérants dès lors que ces médecins ne sont pas témoins des conditions de travail ;

Que si l'on considère que la CPAM a mené son enquête et a rencontré M. J... et la société avant de conclure à l'absence d'accident du travail relativement à l'arrêt de travail du 20 au 29 août 2014, selon décision de refus de prise en charge de juillet 2015, et au vu de toutes les réserves émises par la société qui conteste que le salarié ait le 19 août 2014 fait l'objet d'un accident lors de l'entretien avec son supérieur hiérarchique, il apparaît que la preuve de l'origine partiellement professionnelle de la maladie de M. J... n'est pas établie ;

Que par suite, c'est à tort que M. J... se prévaut de la protection légale de l'article L. 1226-9 du code du travail et ne peut conclure de ce seul fait à la nullité du licenciement dès lors que la faute grave ne serait pas démontrée ;

Que le moyen de nullité du licenciement est rejeté de ce chef et le salarié est débouté de sa demande principale de réintégration et de paiement des salaires jusqu'à sa réintégration,

ET AUX MOTIFS EVENTUELLEMENT ADOPTES QUE

Sur la demande principale de nullité du licenciement

Que les arrêts de travail antérieurs et postérieurs à la demande tardive de déclaration d'accident du travail sont des arrêts de Maladie ordinaires ; que la CPAM a conclu à l'absence de fait accidentel légalement caractérisé tel que défini à l'article L. 411.1 du code de la sécurité sociale ; que M J... ne bénéficiait donc pas de la protection particulière prévue aux articles L1226-7 et -9 du code du travail ;

Que par ailleurs, il n'est pas établi que le motif du licenciement n'ait pas été constitué par les griefs formulés dans la lettre de licenciement ;

Qu'il n'y a donc pas lieu de donner suite à la demande de nullité de son licenciement formulée par M. J...,

1° ALORS QUE les règles protectrices applicables aux victimes d'accident du travail ou d'une maladie professionnelle, édictées par les dispositions combinées des articles L. 1226-9 et L. 1226-13 du code du travail, s'appliquent dès lors que l'employeur a connaissance de l'origine professionnelle de l'accident ou de la maladie, peu important qu'au jour du licenciement la CPAM ait refusé la prise en charge au titre du régime des accidents du travail et que l'employeur n'ait pas été informé du recours formé par le salarié contre cette décision ; qu'il en va a fortiori ainsi lorsque le licenciement intervient, cependant que la Caisse n'a pas encore rendu sa décision et que l'employeur a été informé de ce que la procédure d'instruction menée par celle-ci était toujours en cours ; qu'en l'espèce, il ressortait des propres constatations de l'arrêt que M. J... avait fait parvenir à la société Intervalles, le 20 janvier 2015, un arrêt de travail pour accident du travail dit « duplicata rectificatif » que cette dernière avait déclaré auprès de la Caisse le 22 janvier 2015 en émettant des réserves sur le caractère professionnel dudit accident puis, en notifiant, dès le 14 avril 2015, au salarié son licenciement durant son arrêt de travail et ce, avant même que la Caisse n'ait pu rendre sa décision de refus de prise en charge intervenue seulement le 13 juillet 2015 (arrêt, p. 5) ; qu'en rejetant la demande de nullité du licenciement de l'exposant quand il ressortait de ses propres constatations que la société Intervalles connaissait la volonté du salarié de faire reconnaître le caractère professionnel de son accident et que, avisée explicitement d'une procédure d'instruction en cours menée par la Caisse, elle avait pris la décision de licencier M. J... durant son arrêt de travail, la cour d'appel a, ce faisant, violé les articles L. 1226-9 et L. 1226-13 du code du travail,

2° ALORS QUE le défaut de réponse à conclusions équivaut au défaut de motifs ; qu'en l'espèce, M. J... faisait valoir que la société Intervalles avait parfaitement été informée de son accident de travail puisqu'il lui avait demandé, le 19 janvier 2015, de procéder à une déclaration d'accident du travail, en raison des faits survenus au cours de l'entretien qui s'était tenu le 19 août 2014 avec son supérieur hiérarchique, ce que la société avait fait dès le 22 janvier 2015 ; qu'il ajoutait qu'il avait pris le soin de rappeler à son employeur, lors de son entretien préalable au licenciement, que la procédure liée à sa déclaration d'accident du travail était toujours en cours d'instruction par la Caisse, tout comme il l'avait informée du lien existant entre ses arrêts de travail et ses conditions de travail ; qu'il rappelait, enfin, que « la protection accordée au salarié victime d'un accident du travail est indépendante de la législation de sécurité sociale, ce qui signifie que, quand bien même l'accident du travail n'aurait pas été reconnu, M. J... était à l'époque protégé contre le licenciement » (cf. conclusions d'appel de l'exposant, p.8 et 9) ; qu'en décidant le contraire, en rejetant la demande de nullité du licenciement du salarié (arrêt, p. 5), sans répondre à ce chef pertinent des conclusions de l'exposant, qui était pourtant de nature à influer sur la solution du litige, la cour d'appel a violé l'article 455 du code de procédure civile,

3° ALORS QUE les règles protectrices applicables aux victimes d'accident du travail ou d'une maladie professionnelle, édictées par les dispositions combinées des articles L. 1226-9 et L. 1226-13 du code du travail, s'appliquent dès lors que l'employeur a connaissance de l'origine professionnelle de l'accident ou de la maladie, peu important qu'au jour du licenciement la CPAM ait refusé la prise en charge au titre du régime des accidents du travail et que l'employeur n'ait pas été informé du recours formé par le salarié contre cette décision ; qu'il en va a fortiori ainsi lorsque le licenciement intervient cependant que la Caisse n'a pas encore rendu sa décision et que l'employeur a été informé de ce que la procédure d'instruction menée par celle-ci était toujours en cours ; qu'en jugeant que la demande de nullité du licenciement de M. J... devait être rejetée, au prétexte que « si le salarié appelant se prévaut de l'arrêt de travail pour accident du travail dit « duplicata rectificatif », la société produit un premier arrêt de travail pour maladie (et non AT), qui a été reconduit sur des formulaires d'arrêt de travail pour maladie non professionnelle jusqu'à la rupture du contrat de travail » (arrêt, p. 5), quand la protection du salarié n'est nullement subordonnée à l'accomplissement des formalités de déclaration de l'accident du travail à la Caisse primaire d'assurance maladie, la cour d'appel, qui a statué par des motifs inopérants impropres à justifier sa décision, a violé les articles L. 1226-9 et L. 1226-13 du code du travail,

4° ALORS QUE les règles protectrices applicables aux victimes d'accident du travail ou d'une maladie professionnelle, édictées par les dispositions combinées des articles L. 1226-9 et L. 1226-13 du code du travail, s'appliquent dès lors que l'employeur a connaissance de l'origine professionnelle de l'accident ou de la maladie, peu important qu'au jour du licenciement la CPAM ait refusé la prise en charge au titre du régime des accidents du travail et que l'employeur n'ait pas été informé du recours formé par le salarié contre cette décision ; qu'il en va a fortiori ainsi lorsque le licenciement intervient cependant que la Caisse n'a pas encore rendu sa décision et que l'employeur a été informé de ce que la procédure d'instruction menée par celle-ci était toujours en cours ; qu'en tout état de cause, en jugeant que la demande de nullité du licenciement de M. J... devait être rejetée, en raison de « toutes les réserves émises par la société qui conteste que le salarié ait le 19 août 2014 fait l'objet d'un accident lors de l'entretien avec son supérieur hiérarchique » (arrêt, p. 5), cependant que le seul fait pour l'employeur d'avoir émis des réserves lors de la déclaration de l'accident du travail à la CPAM, le 22 janvier 2015, ne pouvait suffire à écarter le caractère professionnel de l'accident, la cour d'appel, qui a statué par des motifs inopérants impropres à justifier sa décision, a de nouveau violé les articles L. 1226-9 et L. 1226-13 du code du travail,

5° ALORS QUE les règles protectrices applicables aux victimes d'accident du travail ou d'une maladie professionnelle, édictées par les dispositions combinées des articles L. 1226-9 et L. 1226-13 du code du travail, s'appliquent dès lors que l'employeur a connaissance de l'origine professionnelle de l'accident ou de la maladie, peu important qu'au jour du licenciement la CPAM ait refusé la prise en charge au titre du régime des accidents du travail et que l'employeur n'ait pas été informé du recours formé par le salarié contre cette décision ; qu'il en va a fortiori ainsi lorsque le licenciement intervient cependant que la Caisse n'a pas encore rendu sa décision et que l'employeur a été informé de ce que la procédure d'instruction menée par celle-ci était toujours en cours ; qu'en toute hypothèse, M. J... faisait expressément valoir, en l'espèce, que « la seule possibilité pour l'employeur de justifier un licenciement intervenu au cours de cette période de suspension consiste à prouver qu'il n'avait pas connaissance du caractère professionnel de l'accident et de l'arrêt de travail à la date de notification de licenciement, ce qui n'était bien évidemment pas le cas en l'espèce » (cf. conclusions d'appel du salarié, p. 8) ; qu'en rejetant néanmoins sa demande tendant à obtenir la nullité de son licenciement, sans relever que la société Intervalles justifiait du fait qu'elle n'avait pas eu connaissance du caractère professionnel de l'accident de M. J... à la date de la notification du licenciement litigieux, la cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard des articles L. 1226-9 et L. 1226-13 du code du travail.

DEUXIEME MOYEN DE CASSATION :

Il est fait grief à l'arrêt confirmatif attaqué d'avoir débouté le M. J... de sa demande tendant à obtenir la nullité de son licenciement pour discrimination en raison de son état de santé et sa réintégration avec paiement des salaires afférents, et condamné la société Intervalles à lui payer à M. J... la somme de 28 000 euros au titre des dommages intérêts pour licenciement sans cause réelle et sérieuse,

AUX MOTIFS QUE

Sur la discrimination en raison de l'état de santé ;

Que le seul fait que le licenciement de M. J... est intervenu durant une période d'arrêt de travail n'est pas de nature à établir que cette décision est liée à son état de santé ; qu'en réalité, les griefs mentionnés sont relatifs à une période antérieure à son arrêt de travail qui a suivi son entretien avec son supérieur hiérarchique ;

Qu'au vu de cette considération et au regard de la date du licenciement qui intervient plusieurs mois après son arrêt maladie et antérieurement à sa reprise, la preuve n'est pas rapportée que le licenciement du salarié est fondé sur son état de santé ;

Que le moyen de nullité du licenciement est rejeté de ce chef et le salarié est débouté de sa demande principale de réintégration et de paiement des salaires jusqu'à sa réintégration,

1° ALORS QU'aucune personne ne peut être licenciée en raison de son état de santé, une telle mesure présentant un caractère discriminatoire ; qu'il appartient au salarié qui se prétend lésé par une mesure discriminatoire de soumettre au juge les éléments de fait laissant supposer l'existence d'une discrimination directe ou indirecte et il incombe à l'employeur de prouver que sa décision est justifiée par des éléments objectifs étrangers à toute discrimination ; que pour juger, en l'espèce, que le licenciement de M. J... n'avait pas été prononcé en raison de son état de santé, et qu'il n'était donc pas nul, la cour d'appel a affirmé que « la preuve n'est pas rapportée que le licenciement du salarié est fondé sur son état de santé » ; qu'en statuant de la sorte, la cour d'appel, qui a fait peser la charge de la preuve de la discrimination sur le salarié, a violé les articles L. 1132-1, L.1134-1 et L. 1132-4 du code du travail,

2° ALORS QUE, en tout état de cause, une fois que le salarié a présenté des éléments de fait laissant supposer l'existence d'une discrimination, il incombe à l'employeur de prouver que sa décision est justifiée par des éléments objectifs étrangers à toute discrimination ; qu'en l'espèce, M. J... faisait valoir que les motifs de son licenciement n'étaient qu'un prétexte et qu'il avait, en réalité, été licencié en raison de son état de santé ; qu'après avoir elle-même constaté que le licenciement du salarié était intervenu durant une période d'arrêt de travail pour maladie de plusieurs mois et juste avant sa reprise de travail (arrêt, p. 5), et jugé que le licenciement prononcé à son encontre était dénué de cause réelle et sérieuse, car reposant sur des griefs peu précis et non datés insusceptibles d'objectiver le comportement de l'employeur (arrêt, p. 6 et 7), la cour d'appel a néanmoins débouté l'exposant de sa demande de nullité de son licenciement en affirmant que « la preuve n'est pas rapportée que le licenciement du salarié est fondé sur son état de santé » (arrêt, p. 5) ; qu'en statuant ainsi, la cour d'appel n'a pas tiré les conséquences légales qui s'imposaient de ses propres constatations dont il s'évinçait que l'employeur était dans l'incapacité d'objectiver la mesure de licenciement prise à l'encontre du salarié, et a violé ce faisant les articles L. 1132-1 et L. 1134-1 du code du travail.

TROISIEME MOYEN DE CASSATION :

Il est fait grief à l'arrêt confirmatif attaqué d'avoir rejeté toute autre demande et débouté ainsi M. J... de sa demande d'indemnisation pour rupture vexatoire,

AUX MOTIFS QUE
Sur la demande d'indemnisation pour rupture vexatoire

Que si le licenciement du salarié est injustifié, M. J... ne démontre pas l'existence de circonstances vexatoires accompagnant le licenciement pas plus qu'il ne prouve un préjudice distinct de celui déjà réparé par le licenciement sans cause réelle et sérieuse après plus de huit ans d'ancienneté ;

Que le salarié est débouté de sa demande à ce titre,

1° ALORS QUE les juges ne peuvent écarter les prétentions d'une partie sans analyser l'ensemble des documents fournis par elle à l'appui de ses prétentions ; qu'au cas d'espèce, M. J... avait produit, au soutien de sa demande d'indemnisation pour rupture vexatoire, un certain nombre d'éléments de preuve attestant de la brutalité du licenciement et de son caractère inattendu à l'origine d'un véritable choc pour le salarié qui, à 64 ans, espérait légitimement terminer sa carrière au sein de la société où il travaillait depuis plus de 8 années sans avoir fait l'objet du moindre reproche ; qu'en retenant, néanmoins, que le salarié ne faisait pas la démonstration de son préjudice (arrêt, p. 7 et 8), sans analyser ni même examiner sommairement aucune des pièces régulièrement versées aux débats par l'exposant et potentiellement déterminantes, la cour d'appel a violé l'article 455 du code de procédure civile,

2° ALORS QUE les juges sont tenus de motiver leur décision et ne peuvent statuer par voie de simple affirmation ; qu'en se bornant, pour rejeter la demande d'indemnisation de M. J..., à relever que ce dernier « ne démontre pas l'existence de circonstances vexatoires accompagnant le licenciement pas plus qu'il ne prouve un préjudice distinct » (arrêt, p. 7), sans davantage s'expliquer, la cour d'appel a statué par voie de simple affirmation et violé, ce faisant, de nouveau l'article 455 du code de procédure civile.

Moyens produits au pourvoi incident par la SCP Célice, Soltner, Texidor et Périer, avocat aux Conseils, pour la société Intervalles

PREMIER MOYEN DE CASSATION :

Il est fait grief à l'arrêt infirmatif attaqué d'AVOIR rejeté la fin de nonrecevoir tirée de la prescription de la demande en requalification des contrats à durée déterminée conclus au cours de l'année 2007 en un contrat à durée indéterminée, et d'AVOIR, en conséquence, condamné la société INTERVALLES à payer à Monsieur J... la somme de 2.553 € à titre d'indemnité de requalification ;

AUX MOTIFS QUE « contrairement à ce qu'a jugé le premier juge, l'action en requalification n'était pas prescrite ; en effet, en application des dispositions de la loi du 14 juin 2013 et l'introduction de l'article L. 1471-1 du code du travail réduisant la prescription à deux ans et fixant le point de départ de ce nouveau délai à compter de l'entrée en vigueur de la loi, la demande en requalification des contrats à durée déterminée en contrat de travail à durée indéterminée formée par le salarié est recevable, dans la mesure où elle a été formée lors de la saisine du conseil des prud'hommes le 29 avril 2015, peu important la date des conclusions contenant cette demande » ;

ALORS QUE lorsque la loi nouvelle fixe un nouveau délai de prescription plus court, le nouveau délai court à compter de l'entrée en vigueur de la Loi nouvelle, sans que la durée totale de la prescription puisse excéder celle du délai de prescription qui courait antérieurement ; que la cour d'appel a constaté que les contrats de travail à durée déterminée dont Monsieur J... demandait la requalification en contrat à durée déterminée avaient été conclus et exécutés au cours de l'année 2007 ; qu'antérieurement à la loi n° 2013-504 du 14 juin 2013 qui a introduit l'article L. 1471-1 du Code du travail fixant le principe d'un délai de prescription de deux ans en droit du travail, l'action en requalification d'un contrat de travail à durée déterminée en contrat à durée indéterminée était soumise, depuis la loi n° 2008-561 du 17 juin 2008, entrée en vigueur le 19 juin 2018, au délai de prescription quinquennale de droit commun en matière contractuelle fixé par l'article 2224 du Code civil ; que ce délai, plus court que le délai trentenaire antérieurement applicable, commençait à courir à compter de l'entrée en vigueur de la loi nouvelle et expirait donc le 20 juin 2013 de telle sorte que l'action était prescrite à cette date ; qu'en rejetant néanmoins la fin de non-recevoir tirée de la prescription, au motif que le nouveau délai issu de l'article L. 1471-1 nouveau du Code du travail issu de la loi n° 2013-504 du 14 juin 2013 n'était pas expiré le 29 avril 2015, date de saisine de la juridiction prud'homale, cependant que ce nouveau délai ne pouvait avoir pour effet d'allonger la prescription en cours à la date de son entrée en vigueur, la cour d'appel a violé l'article L. 1471-1 du Code du travail, ensemble les articles 2222 et 2224 du Code civil dans leur rédaction issue de la loi n° 2008-561 du 17 juin 2008.

SECOND MOYEN DE CASSATION :

(EVENTUEL)

Il est fait grief à l'arrêt attaqué d'AVOIR ordonné à la société INTERVALLES de rembourser à PÔLE EMPLOI les indemnités de chômage perçues par Monsieur J..., dans la limite de trois mois d'indemnités ;

AUX MOTIFS QUE « les conditions de l'article L. 1235-4 du code du travail étant remplies, il convient d'ordonner à la société Intervalles de rembourser à Pôle Emploi les indemnités de chômage éventuellement versées au salarié dans la limite de trois mois » ;

ALORS QUE la cassation éventuellement à intervenir sur le premier ou le deuxième moyen de cassation du pourvoi principal, en ce que la cour d'appel a déclaré sans cause réelle ni sérieuse le licenciement de Monsieur J... devra s'étendre, conformément à l'article 624 du Code de procédure civile, à l'arrêt en ce qu'il a ordonné à la société INTERVALLES de rembourser à PÔLE EMPLOI les indemnités de chômage perçues par le salarié au regard du lien de dépendance nécessaire qui existe entre ces deux chefs du dispositif.


Synthèse
Formation : Chambre sociale
Numéro d'arrêt : 18-14546
Date de la décision : 02/10/2019
Sens de l'arrêt : Cassation partielle sans renvoi
Type d'affaire : Sociale

Références :

Décision attaquée : Cour d'appel de Paris, 30 janvier 2018


Publications
Proposition de citation : Cass. Soc., 02 oct. 2019, pourvoi n°18-14546


Composition du Tribunal
Président : M. Schamber (conseiller doyen faisant fonction de président)
Avocat(s) : SCP Célice, Soltner, Texidor et Périer, SCP Garreau, Bauer-Violas et Feschotte-Desbois

Origine de la décision
Date de l'import : 15/09/2022
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CCASS:2019:18.14546
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