LA COUR DE CASSATION, DEUXIÈME CHAMBRE CIVILE, a rendu l'arrêt suivant :
Sur le premier moyen :
Attendu, selon l'arrêt attaqué (Aix-en-Provence, 8 février 2018) et les productions, que par un jugement du 1er juillet 2011, un juge de l'exécution a ordonné la vente forcée des biens immobiliers appartenant à Mme A... sur un premier commandement de payer valant saisie immobilière délivré le 19 octobre 2010 par le Crédit foncier de France (la banque) en vertu d'un acte notarié de prêt du 30 mars 2004 et rejeté les demandes de Mme A..., laquelle avait notamment demandé la déchéance du droit aux intérêts contractuels ; qu'après avoir interjeté appel de ce jugement, Mme A... s'en est désisté à la suite d'un accord intervenu entre les parties ; que par un jugement du 18 novembre 2011, le juge de l'exécution a constaté la caducité du commandement valant saisie immobilière ; que le 30 juin 2016, la banque a fait délivrer à l'encontre de Mme A... un nouveau commandement emportant saisie des mêmes biens et droits immobiliers en vertu du même acte notarié ; que ce commandement, resté sans effet, a été publié le 26 août 2016 ; que par jugement du 16 juin 2017, un juge de l'exécution a notamment déclaré irrecevable le moyen tendant à la déchéance du droit aux intérêts, fixé la créance et ordonné la vente forcée ; que Mme A... en a interjeté appel ;
Attendu que Mme A... fait grief à l'arrêt de déclarer irrecevable le moyen tendant à la déchéance du droit aux intérêts, de constater que la banque poursuit la saisie immobilière pour une créance liquide et exigible d'un montant de 82 775,49 euros arrêté au 15 mai 2016 avec intérêts contractuels au taux de 1,70 % l'an sur la somme de 80 479,19 euros jusqu'à parfait paiement, et d'ordonner la vente forcée des biens saisis et désignés dans le cahier des conditions de vente alors, selon le moyen :
1°/ que la caducité qui frappe un commandement de payer valant saisie immobilière le prive rétroactivement de tous ses effets et atteint tous les actes de la procédure qu'il engage ; qu'en l'espèce, un jugement du 18 novembre 2011 du juge de l'exécution du tribunal de grande instance de Draguignan a constaté la caducité du commandement valant saisie délivré le 3 décembre 2010, entraînant ainsi l'anéantissement de toute la procédure de saisie immobilière de sorte que le jugement du juge de l'exécution du 1er juillet 2011 rendu au cours de cette procédure a perdu son fondement juridique et ne pouvait plus produire d'effet ; qu'en opposant à Mme A... la chose jugée par ce jugement, la cour d'appel a violé les articles L. 311-1, L. 321-1, R. 321-1 et R. 322-27 du code des procédures civiles d'exécution ;
2°/ que la banque qui a demandé que soit constatée la caducité du commandement, sollicité la radiation de la procédure de saisie immobilière et celle du commandement aux fins de saisie immobilière, qui n'a pas requis la vente forcée le jour de l'audience d'orientation, accepté une reprise de l'échéancier et obtenu de Mme A... qu'elle se désiste de l'appel formé contre le jugement du 1er juillet 2011 rendu dans le cadre de cette procédure, a ainsi clairement renoncé à se prévaloir de la chose jugée par ce jugement du 1er juillet 2011 ; qu'en énonçant que la banque n'aurait renoncé à rien d'autre qu'à la poursuite de la vente forcée, la cour d'appel a violé les articles 1134 ancien, 2044, 2048 et 2049 du code civil ;
Mais attendu, d'une part, que le prononcé de la caducité du commandement valant saisie immobilière, qui anéantit la mesure d'exécution, ne fait pas perdre son fondement juridique à la disposition d'un jugement, précédemment rendu au cours de cette procédure de saisie immobilière, ayant statué sur une demande de déchéance des intérêts contractuels ;
Et attendu, d'autre part, qu'ayant relevé que l'accord intervenu entre les parties ne portait que sur l'acceptation de la banque de ne pas requérir la vente forcée le jour de l'audience d'orientation et de reprendre un échéancier, la cour d'appel a pu retenir que Mme A... ne démontrait pas l'existence d'actes manifestant sans équivoque la volonté de la banque de renoncer à se prévaloir de l'autorité de la chose jugée du jugement du 1er juillet 2011 ;
D'où il suit que le moyen n'est pas fondé ;
Et attendu qu'il n'y a pas lieu de statuer par une décision spécialement motivée sur le second moyen, annexé, qui n'est manifestement pas de nature à entraîner la cassation ;
PAR CES MOTIFS :
REJETTE le pourvoi ;
Condamne Mme A... aux dépens ;
Vu l'article 700 du code de procédure civile, rejette sa demande et la condamne à payer au Crédit foncier de France la somme de 3 000 euros ;
Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, deuxième chambre civile, signé et prononcé en l'audience publique du vingt-six septembre deux mille dix-neuf par Mme Brouard-Gallet, conseiller doyen, en remplacement du président empêché, conformément aux dispositions des articles 452 et 456 du code de procédure civile et par Mme Rosette, greffier de chambre qui a assisté au prononcé de l'arrêt.
MOYENS ANNEXES au présent arrêt :
Moyens produits par la SCP Waquet, Farge et Hazan, avocat aux Conseils, pour Mme A...
PREMIER MOYEN DE CASSATION :
Il est fait grief à l'arrêt attaqué d'avoir déclaré irrecevable le moyen tendant à la déchéance du droit aux intérêts, constaté que le Crédit Foncier de France poursuit la saisie immobilière au préjudice de Mme X... A... pour une créance liquide et exigible d'un montant de 82.775,49 euros arrêté au 15 mai 2016 avec intérêts contractuels au taux de 1,70% l'an sur la somme de 80.479,19 euros jusqu'à parfait paiement, et d'avoir ordonné la vente forcée des biens saisis et désignés dans le cahier des conditions de vente ;
Aux motifs que suivant jugement d'orientation en date du 1er juillet 2011 prononcé suite au commandement de payer valant saisie immobilière délivré le 19 octobre 2010, le juge de l'exécution a rejeté les demandes de Mme A... au motif notamment que le TEG n'est pas erroné, le Crédit Foncier de France produisant une note établie par son service qui explique le calcul du TEG et que Mme A... a signé et paraphé toutes les pages de l'acte notarié du 30 mars 2004, ajoutant que le TEG est calculé au moment de l'émission de l'offre de prêt et que le TEG de l'acte de prêt est différent car le notaire intègre les frais de l'acte qui n'étaient pas tous connus au moment de l'offre ; Que ce jugement est définitif dans la mesure où Mme A... s'est désistée de son appel, sans que celle-ci démontre que le Crédit Foncier de France a renoncé, sans équivoque possible, à ce qui a été jugé à l'occasion des premières poursuites de saisie immobilière, renonciation qui ne peut s'induire du seul fait qu'en l'état d'un accord intervenu à ce moment-là entre les parties, le Crédit Foncier de France n'a pas requis la vente forcée le jour de l'audience d'orientation et a accepté une reprise de l'échéancier ; que le Crédit Foncier de France n'a renoncé à rien d'autre qu'à la poursuite de la vente forcée ; Que le jugement du 1er juillet 2011, aux termes duquel le juge de l'exécution a également rejeté la fin de non-recevoir tirée de la prescription de la contestation du TEG invoquée par le Crédit Foncier de France, bénéficiant de l'autorité de chose jugée, la contestation du TEG et la demande tendant à voir constater la déchéance des intérêts formées à nouveau devant le juge de l'exécution par Mme A... sont irrecevables ;
1°- Alors que la caducité qui frappe un commandement de payer valant saisie immobilière le prive rétroactivement de tous ses effets et atteint tous les actes de la procédure qu'il engage ; qu'en l'espèce, un jugement du 18 novembre 2011 du juge de l'exécution du Tribunal de grande instance de Draguignan a constaté la caducité du commandement valant saisie délivré le 3 décembre 2010, entrainant ainsi l'anéantissement de toute la procédure de saisie immobilière de sorte que le jugement du juge de l'exécution du 1er juillet 2011 rendu au cours de cette procédure a perdu son fondement juridique et ne pouvait plus produire d'effet ; qu'en opposant à Mme A... la chose jugée par ce jugement, la Cour d'appel a violé les articles L. 311-1, L. 321-1, R. 321-1 et R. 322-27 du code des procédures civiles d'exécution ;
2°- Alors en tout état de cause, que le Crédit Foncier de France qui a demandé que soit constatée la caducité du commandement, sollicité la radiation de la procédure de saisie immobilière et celle du commandement aux fins de saisie immobilière, qui n'a pas requis la vente forcée le jour de l'audience d'orientation, accepté une reprise de l'échéancier et obtenu de Mme A... qu'elle se désiste de l'appel formé contre le jugement du 1er juillet 2011 rendu dans le cadre de cette procédure, a ainsi clairement renoncé à se prévaloir de la chose jugée par ce jugement du 1er juillet 2011; qu'en énonçant que le Crédit Foncier de France n'aurait renoncé à rien d'autre qu'à la poursuite de la vente forcée, la Cour d'appel a violé les articles 1134 ancien, 2044, 2048 et 2049 du code civil.
SECOND MOYEN DE CASSATION :
Il est fait grief à l'arrêt attaqué d'avoir rejeté les moyens soulevés par Mme A... tendant à la nullité du commandement valant saisie, constaté que le Crédit Foncier de France poursuit la saisie immobilière au préjudice de Mme X... A... pour une créance liquide et exigible d'un montant de 82.775,49 euros arrêté au 15 mai 2016 avec intérêts contractuels au taux de 1,70% l'an sur la somme de 80.479,19 euros jusqu'à parfait paiement, et d'avoir ordonné la vente forcée des biens saisis et désignés dans le cahier des conditions de vente ;
Aux motifs que Mme A... soutient qu'une mise en demeure non signée ne peut engager la banque au motif que l'absence de signature ne permet pas de connaître l'auteur réel du courrier ni son pouvoir au sein de la banque pour notifier un tel acte et donc la volonté réelle du Crédit Foncier de France de notifier cette mise en demeure ; Mais attendu que la mise en demeure du 9 juin 2015, dont la signature ne constitue pas en soi une condition d'existence, porte mention de la banque émettrice et des nom, prénom et qualité de l'auteur de l'acte, à savoir « Le chargé de clientèle - N... T... », autant d'éléments mettant la débitrice en mesure de vérifier auprès de la banque si l'auteur de la mise en demeure avait le pouvoir de la délivrer ; que les termes de l'acte sont par ailleurs sans équivoque possible sur la volonté ferme et réelle de la banque, comme celle-ci le soutient ; Et attendu que la poursuite pendant quelque temps de l'envoi automatique de relevés de situation est insuffisant accréditer la thèse de Mme A... selon laquelle le Crédit Foncier de France n'aurait lui-même accordé aucun effet à cette mise en demeure ; que la négligence de la banque, qui n'a pas interrompu à temps l'envoi automatique de ces relevés informatiques de situation, n'est pas créatrice de droit ; Attendu que Mme A... soutient qu'en tout état de cause, il résulte des termes de cet acte que le Crédit Foncier de France s'est réservé le droit de « prononcer » l'exigibilité de la totalité de sa créance, or aucun acte notifiant expressément la déchéance du terme n'a été adressé postérieurement à la débitrice, de sorte que la banque n'a pas prononcé cette déchéance, ce que confirme l'envoi, postérieurement à cette mise en demeure, des situations mensuelles du prêt ; Mais attendu qu'il résulte des termes de l'acte de prêt, que la déchéance du terme est acquise de plein droit après l'envoi d'une lettre recommandée AR de mise en demeure restée vaine, de sorte que sauf preuve d'une renonciation expresse qui n'est pas rapportée par Mme A..., la banque s'est simplement réservée le droit de se prévaloir de cette déchéance, ce qui n'impose la notification d'aucun autre acte, en utilisant certes le terme « prononcer » dont Mme A... tente de tirer argument du caractère peut-être ambigu pour donner à ce terme un sens qu'exclut totalement l'acquisition contractuelle de plein droit de la déchéance à défaut de régularisation de la situation du compte dans un délai de 30 jours ; Que comme déjà évoqué ci-avant, la poursuite pendant quelque temps de l'envoi automatique de relevés de situation est insuffisante à établir la preuve d'une renonciation de la banque à cette déchéance acquise de plein droit, pas plus que l'acceptation par la banque des versements postérieurs effectués par Mme A... à compter du 2 septembre 2015 ; Que Mme A... ne peut ainsi voir prospérer sa demande tendant à voir annuler les poursuites pour défaut de créance certaine et exigible ;
1°- Alors que la déchéance du terme ne peut sauf disposition expresse et non équivoque être déclarée acquise au créancier sans la délivrance d'une mise en demeure restée sans effet précisant le délai dont dispose le débiteur pour y faire obstacle ; que ne constitue pas la mise en demeure exigée par la loi, le courrier informatique du 9 juin 2015 qui ne comporte aucune signature ; qu'en décidant le contraire, la Cour d'appel a violé les articles 1134, 1184 et 1139 1134 du code civil, dans leur rédaction antérieure à celle issue de l'ordonnance du 10 février 2016 ;
2°- Alors que les juges du fond ont l'obligation de ne pas dénaturer les écrits qui leur sont soumis ; que le contrat de prêt qui stipule que la déchéance du terme sera « constatée » de plein droit un mois après la date d'envoi d'une lettre recommandée avec avis de réception valant mise en demeure, demeurée infructueuse exige ainsi clairement la notification par la banque de la constatation de cette déchéance de plein droit comme condition d'exigibilité du prêt ; qu'en décidant qu'aucune notification autre que la mise en demeure ne serait exigée, la Cour d'appel a dénaturé l'acte de prêt, violé le principe susvisé et l'article L 111-2 du code des procédures civiles d'exécution ;
3°- Alors que les juges du fond ont l'obligation de ne pas dénaturer les écrits qui leur sont soumis ; que le courrier du 9 juin 2015 précise qu'à défaut de paiement de la somme de 5.3011,09 euros dans un délai de trente jours, le Crédit Foncier « se réserve le droit de prononcer l'exigibilité de la totalité de la créance » subordonnant l'exigibilité du prêt à sa prononciation par la banque ; qu'en décidant qu'aucune notification autre que la mise en demeure ne serait exigée, la Cour d'appel a dénaturé ce courrier, violé le principe susvisé et l'article L 111-2 du code des procédures civiles d'exécution ;
4°- Alors en tout état de cause, que la banque qui sans jamais prononcer la déchéance du terme, a continué après l'expiration du délai d'un mois imparti par la lettre dite de mise en demeure du 9 juin 2015 et pendant une durée de 12 mois après cette lettre à adresser à Mme A... des relevés de situation du prêt avec appel des échéances contractuelles au taux applicable, qui a continué à créditer le compte de Mme A... des versements reçus sans mentionner qu'il s'agissait d'acomptes sur les sommes totales restant dues, et qui n'a exercé aucune poursuite contre Mme A... avant la délivrance du commandement aux fins de saisie du 30 juin 2016, a renoncé de façon non équivoque à se prévaloir de la déchéance du terme ; qu'en décidant le contraire, la Cour d'appel a violé l'article 1134 du code civil, dans sa rédaction antérieure à celle issue de l'ordonnance du 10 février 2016.