LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE SOCIALE, a rendu l'arrêt suivant :
Sur le premier moyen :
Vu les articles 430, 447 et 458 du code de procédure civile, ensemble l'article L. 121-2 du code de l'organisation judiciaire ;
Attendu qu'à peine de nullité, les arrêts de cour d'appel sont rendus par des magistrats délibérant en nombre impair ;
Attendu, selon l'arrêt attaqué, que M. H..., engagé le 1er avril 1982 par la société EDF GDF, aux droits de laquelle viennent les sociétés GRDF et Enedis, a été mis en inactivité le 30 avril 2010 ;
Attendu que l'arrêt mentionne que la cour d'appel était composée, lors du délibéré, par un président et un conseiller ; que, par cette inobservation de l'imparité, révélée postérieurement aux débats, l'arrêt doit être annulé ;
PAR CES MOTIFS, et sans qu'il y ait lieu de statuer sur le second moyen :
ANNULE, en toutes ses dispositions, l'arrêt rendu le 5 avril 2018, entre les parties, par la cour d'appel de Paris ; remet, en conséquence, la cause et les parties dans l'état où elles se trouvaient avant ledit arrêt et, pour être fait droit, les renvoie devant la cour d'appel de Paris autrement composée ;
Condamne les sociétés GRDF et Enedis aux dépens ;
Vu l'article 700 du code de procédure civile, condamne les sociétés GRDF et Enedis à payer à M. H... la somme de 3 000 euros ;
Dit que sur les diligences du procureur général près la Cour de cassation, le présent arrêt sera transmis pour être transcrit en marge ou à la suite de l'arrêt annulé ;
Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, chambre sociale, et prononcé par le président en son audience publique du vingt-cinq septembre deux mille dix-neuf.
MOYENS ANNEXES au présent arrêt :
Moyens produits par Me Bertrand, avocat aux Conseils, pour M. H....
PREMIER MOYEN DE CASSATION :
Il est fait grief à l'arrêt attaqué d'AVOIR été rendu par deux magistrats devant lesquels l'affaire a été débattue et qui ont délibéré ;
ALORS QUE la juridiction est composée, à peine de nullité, conformément aux règles relatives à l'organisation judiciaire ; que sauf disposition particulière, les juges statuent en nombre impair ; que l'arrêt attaqué mentionne que l'affaire a été débattue devant un président et un conseiller, et que la cour d'appel était composée, lors du délibéré, de ces deux magistrats ; que du fait de cette méconnaissance de la règle de l'imparité, révélée postérieurement aux débats, la décision encourt l'annulation, en vertu des articles 430, 447 et 458 du code de procédure civile et L 121-2 du code de l'organisation judiciaire.
SECOND MOYEN DE CASSATION :
Il est fait grief à l'arrêt attaqué d'AVOIR débouté M. H... de sa demande tendant à ce qu'il soit jugé que la société ERDF et la société GRDF ont fait preuve d'une discrimination syndicale en lui conférant le classement NR 130 et à ce qu'elles soient condamnées à lui payer un rappel de salaire de 6761 € ;
AUX MOTIFS QUE sur les entretiens annuels d'évaluation : que M. H... reproche à son ancien employeur, en dépit de son obligation, de n'avoir procédé à aucun entretien annuel d'évaluation depuis qu'il exerce son activité syndicale ; que considérant que M. H... ne fait état d'aucune disposition précise imposant aux sociétés intimées la réalisation de cette évaluation, distincte de l'entretien d'évolution professionnelle ; que les intimées précisent que l'outil informatique mis au point pour procéder à l'entretien facultatif dont se prévaut M. H... n'a, d'ailleurs, été utilisé qu'à compter de 2009 ; page 7 ccl salarié ; qu'il s'ensuit que l'appelant ne peut qu'être débouté de sa demande formée au titre du manquement imputé pour absence d'entretien d'évaluation ; qu'il apparaît ainsi qu'à défaut d'obligation leur incombant en cette matière, les sociétés intimées ne sauraient être tenues pour responsables de la perte de chance professionnelle qu'allègue l'appelant, en relation avec ce prétendu manquement ; que pour le même motif, le défaut de perception de la prime PVA, liée selon l'appelant à l'entretien en cause, ne peut entraîner le paiement de l'indemnité qu'il sollicite de ce chef, étant observé par surcroît, que l'intéressé ne démontre nullement qu'il avait droit au versement de ladite prime ; sur le défaut de formation professionnelle : que l'appelant soutient qu'à compter de l'exercice de son activité syndicale, il n'a pas bénéficié, sinon à raison d'une demi-journée, des dispositions prévues en matière de formation professionnelle par l'accord d'entreprise « défi formation » ou encore l'accord « relatif à la formation tout au long de la vie professionnelle » ; que les sociétés intimées répondent justement que ces accords ont été signés les 10 et 22 septembre 2010, soit postérieurement à la mise en inactivité de l'appelant qui n'est dès lors pas fondé à tirer un quelconque indice de discrimination du défaut d'application de ces textes à son égard ; sur le NR 135 : que M. H... invoque à la fois les dispositions de l'accord d'entreprise du 8 octobre 2009 et les termes d'une PERS 245, établissant selon lui, en sa défaveur, une différenciation de traitement en matière salariale, pour motif syndical ; que l'appelant ne fournit cependant aucun élément ni démonstration quant au premier texte fondant la discrimination alléguée, alors que ce texte n'est applicable qu'aux salariés élus ou désignés en qualité de délégués syndicaux et que M. H... ne conteste pas les conclusions des intimées selon lesquelles il était permanent syndical ; qu'en conséquence, et comme l'a justement fait le conseil de prud'homme, la cour n'examinera ci-après que les dispositions de la PERS 245, applicable aux salariés détachés permanents syndicaux ; que M. H... prétend qu'il a été classé NR 130 en janvier 2010 alors qu'il aurait dû atteindre celui-ci le 1er janvier 2008 et que de même le NR 135 aurait dû lui être attribué le 1er janvier 2010, de sorte que lors sa mis en inactivité il aurait dû être titulaire du NR 135 ; que par rapport à la moyenne des salariés de son groupe fonctionnel (GF) il a ainsi pris du retard ; que considérant que le tableau prétendument comparatif peu intelligible, produit par M. H... ne corroborait pas ces affirmations ; qu'en effet, ce tableau ne fait pas apparaître que l'ancienneté de M. H... dans sa fonction, depuis la date de son détachement syndical, était supérieure à celle de la moyenne des salariés ayant le même GF que lui ; que, de plus, les intimées objectent justement que le NR de l'appelant a été porté à 120 le 1Er janvier 2008 et à 130 le 1er janvier 2010 ; qu'en l'état, la cour ne trouve en la cause aucun élément laissant présumer que l'appelant ait souffert d'une discrimination salariale (arrêt p. 3 à 5) ;
ALORS, d'une part, QUE lorsque le salarié établit la matérialité de faits précis et concordants constituant selon lui une discrimination, il appartient au juge d'apprécier si ces éléments, pris dans leur ensemble, permettent de présumer l'existence d'une discrimination et, dans l'affirmative il incombe à l'employeur de prouver que ces agissements ne sont pas constitutifs d'une discrimination et que sa décision est justifiée par des éléments objectifs étrangers à une telle discrimination ; qu'en procédant à une appréciation séparée de chaque élément invoqué par le salarié, précisément l'absence d'entretien annuel d'évaluation, le défaut de formation professionnelle, et l'examen du NR 135, pour dire que M. H... n'apportait aucun élément laissant présumer qu'il avait été victime d'une discrimination, quand il lui appartenait d'appréciser si, pris dans leur ensemble, les éléments matériellement établis laissaient présumer l'existence d'une discrimination et dans l'affirmative, d'apprécier les éléments de preuve fournis par l'employeur pour démonter que les mesures en cause étaient étrangères à toute discrimination, la cour d'appel a violé les articles L1132-1 et L 1134-1 du code du travail ;
ALORS, d'autre part et subsidiairement, QUE lorsque le salarié établit la matérialité de faits précis et concordants constituant selon lui une discrimination, il appartient au juge d'apprécier si ces éléments, pris dans leur ensemble, permettent de présumer l'existence d'une discrimination et, dans l'affirmative il incombe à l'employeur de prouver que ces agissements ne sont pas constitutifs d'une discrimination et que sa décision est justifiée par des éléments objectifs étrangers à une telle discrimination ; qu'en affirmant que M. H... ne faisait état d'aucune disposition précise imposant aux sociétés ERDF et GRDF la réalisation de l'évaluation annuelle distincte de l'entretien d'évolution professionnelle et en ajoutant que les sociétés employeurs avaient précisé que l'outil informatique mis au point pour procéder à l'entretien facultatif n'avait été utilisé qu'à compter de 2009, quand M. H... se prévalait du fait qu'il n'avait bénéficié d'aucun entretien annuel d'évaluation depuis qu'il avait exercé son activité syndicale, ce dont il résultait que cette circonstance laissait présumer l'existence d'une discrimination syndicale et qu'il revenait à l'employeur de démontrer que ses décisions étaient justifiées par des éléments objectifs étrangers à toute discrimination, peu important que le salarié n'ait invoqué aucune disposition textuelle précise ni que l'outil informatique pour réaliser cet entretien n'ait été utilisé qu'à compter de 2009, la cour d'appel a violé les articles L1132-1 et L 1134-1 du code du travail ;
ALORS, de troisième part et encore plus subsidiairement, QUE lorsque le salarié établit la matérialité de faits précis et concordants constituant selon lui une discrimination, il appartient au juge d'apprécier si ces éléments, pris dans leur ensemble, permettent de présumer l'existence d'une discrimination et, dans l'affirmative, il incombe à l'employeur de prouver que ces agissements ne sont pas constitutifs d'une discrimination et que sa décision est justifiée par des éléments objectifs étrangers à une telle discrimination ; que l'existence d'une discrimination n'implique pas nécessairement une comparaison avec d'autres salariés ; que, s'agissant du NR 135, en retenant que le tableau comparatif, selon elle peu intelligible, produit par M. H... ne corroborait pas ses affirmations et en ajoutant que ce tableau ne faisait pas apparaître que l'ancienneté du salarié dans sa fonction, depuis la date de son détachement syndical, était supérieure à celle de la moyenne des salariés ayant le même GF que lui, quand l'existence d'une discrimination n'impliquait pas nécessairement une comparaison avec d'autres salariés, la cour d'appel a violé les articles L1132-1 et L 1134-1 du code du travail.