La jurisprudence francophone des Cours suprêmes


recherche avancée

19/09/2019 | FRANCE | N°18-20911

France | France, Cour de cassation, Chambre civile 2, 19 septembre 2019, 18-20911


LA COUR DE CASSATION, DEUXIÈME CHAMBRE CIVILE, a rendu l'arrêt suivant :

Sur le moyen unique, pris en sa quatrième branche :

Vu les articles L. 114-17 et R. 114-14 du code de la sécurité sociale, dans leur rédaction applicable au litige ;

Attendu, selon ces textes, que le montant de la pénalité qu'ils prévoient est fixé, dans la limite d'un plafond, en fonction de la gravité des faits reprochés, en tenant compte notamment de leur caractère intentionnel ou répété, du montant et de la durée du préjudice et des moyens et procédés utilisés ;

Attend

u, selon le jugement attaqué, rendu en dernier ressort, et les productions, que Mme H... aya...

LA COUR DE CASSATION, DEUXIÈME CHAMBRE CIVILE, a rendu l'arrêt suivant :

Sur le moyen unique, pris en sa quatrième branche :

Vu les articles L. 114-17 et R. 114-14 du code de la sécurité sociale, dans leur rédaction applicable au litige ;

Attendu, selon ces textes, que le montant de la pénalité qu'ils prévoient est fixé, dans la limite d'un plafond, en fonction de la gravité des faits reprochés, en tenant compte notamment de leur caractère intentionnel ou répété, du montant et de la durée du préjudice et des moyens et procédés utilisés ;

Attendu, selon le jugement attaqué, rendu en dernier ressort, et les productions, que Mme H... ayant omis par deux fois de signaler son remariage à la caisse d'assurance retraite et de la santé au travail Rhône-Alpes (la caisse) afin de continuer à bénéficier d'une pension de réversion, la caisse lui a notifié le 4 novembre 2016 une pénalité financière d'un montant de cinq cents euros que l'intéressée a contestée devant une juridiction de sécurité sociale ;

Attendu que pour accueillir pour partie le recours, le jugement énonce qu'au regard de sa situation financière et de la gravité des faits, il convient de réduire la pénalité due par Mme H... à la somme d'un euro ;

Qu'en se déterminant ainsi, sans s'expliquer sur la gravité des faits qu'il retenait pour fixer le montant de la pénalité, le tribunal, qui s'est également fondé sur un motif étranger à la règle de droit applicable, n'a pas donné de base légale à sa décision ;

PAR CES MOTIFS, et sans qu'il y ait lieu de statuer sur les autres branches du moyen :

CASSE ET ANNULE, en toutes ses dispositions, le jugement rendu le 24 mai 2018, entre les parties, par le tribunal des affaires de sécurité sociale de Roanne ; remet, en conséquence, la cause et les parties dans l'état où elles se trouvaient avant ledit jugement et, pour être fait droit, les renvoie devant le tribunal de grande instance de Saint-Etienne ;

Condamne Mme H... aux dépens ;

Vu l'article 700 du code de procédure civile, rejette la demande ;

Dit que sur les diligences du procureur général près la Cour de cassation, le présent arrêt sera transmis pour être transcrit en marge ou à la suite du jugement cassé ;

Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, deuxième chambre civile, signé par Mme Vieillard, conseiller faisant fonction de doyen, conformément aux dispositions des articles 456 et 1021 du code de procédure civile, en remplacement du conseiller rapporteur empêché et prononcé par le président en son audience publique du dix-neuf septembre deux mille dix-neuf, signé par Mme Rosette, greffier de chambre qui a assisté au prononcé de l'arrêt.

MOYEN ANNEXE au présent arrêt :

.

Moyen produit par la SCP Gatineau et Fattaccini, avocat aux Conseils, pour la caisse d'assurance retraite et de la santé au travail Rhône-Alpes.

IL EST FAIT GRIEF au jugement attaqué d'AVOIR fixé la pénalité financière due par Mme X... née H... à la Carsat Rhône Alpes, à la somme de 1 euro, de l'AVOIR en conséquence condamnée à payer la somme de 1 euro à la Carsat et d'AVOIR laissé à chaque partie la charge éventuelle des dépens par elles engagés.

AUX MOTIFS QUE « il résulte de l'article L. 114-17 du code de la sécurité sociale que : ‘peuvent faire l'objet d'un avertissement ou d'une pénalité prononcée par le directeur de l'organisme chargé de la gestion des prestations familiales ou des prestations de l'assurance vieillesse, au titre de toute prestation servie par l'organisme concerné : 1° l'inexactitude ou le caractère incomplet des déclarations faites pour le service des prestations ; 2° l'absence de déclaration d'un changement dans la situation justifiant le service des prestations ; 3° l'exercice d'un travail dissimulé, constaté dans les conditions prévues à l'article L. 114-15, par le bénéficiaire des prestations versées sous conditions de ressources ou de cessation d'activité ; 4° les agissements visant à obtenir ou à tenter de faire obtenir le versement indu des prestations servies par un organisme mentionné au premier alinéa, même sans en être le bénéficiaire ; 5° les actions ou omissions ayant pour objet de faire obstacle ou de se soustraire aux opérations de contrôle exercées, en application de l'article L. 114-10 du présent code et de l'article L. 724-7 du code rural et de la pêche maritime, par les agents mentionnés au présent article, visant à refuser l'accès à une information formellement sollicitée, à ne pas répondre ou à ne pas apporter une réponse fausse, incomplète ou abusivement tardive à toute demande de pièces justificatives, d'information, d'accès à une information, ou à une convocation, émanant des organismes chargés de la gestion de prestations familiales et des prestations d'assurance vieillesse, dès lors que la demande est nécessaire à l'exercice du contrôle ou de l'enquête ; le montant de la pénalité est fixé en fonction de la gravité des faits, dans la limite de deux fois le plafond mensuel de la sécurité sociale ; tout fait ayant donné lieu à une sanction devenue définitive en application du présent article peut constituer le premier terme de récidive d'un manquement sanctionné par le présent article ; cette limite est doublée en cas de récidive fixée par voie réglementaire ; le directeur de l'organisme concerné notifie le montant envisagé de la pénalité et les faits reprochés à la personne en cause, afin qu'elle puisse présenter ses observations écrites ou orales dans un délai d'un mois ; à l'issue de ce délai, le directeur de l'organisme prononce, le cas échéant, la pénalité et la notifie à l'intéressé en lui indiquant le délai dans lequel il doit s'en acquitter ou les modalités selon lesquelles elle sera récupérée sur les prestations à venir ; la personne concernée peut former, dans un délai fixé par voie réglementaire, un recours gracieux contre cette décision auprès du directeur ; ce dernier statue après avis d'une commission composée et constituée au sein du conseil d'administration de l'organisme ; cette commission apprécie la responsabilité de la personne concernée dans la réalisation des faits reprochés ; si elle l'estime établie, elle propose le prononcé d'une pénalité dont elle évalue le montant ; l'avis de la commission est adressé simultanément au directeur de l'organisme et à l'intéressé ; la mesure prononcée est motivée et peut être contestée devant le tribunal des affaires de sécurité sociale ; la pénalité ne peut pas être prononcée s'il a été fait application, pour les mêmes faits, des articles L. 262-52 ou L. 262-53 du code de l'action sociale et des familles ; l'article R. 114-13 du même code précise que : « peuvent faire l'objet de la pénalité mentionnée à l'article R. 114-11 les personnes qui ont obtenu indûment ou qui ont agi dans le but d'obtenir ou de faire obtenir indûment à des tiers le versement de prestations servies par les organismes chargés de la gestion des prestations d'assurance vieillesse ou des prestations familiales : 1° en fournissant de fausses déclarations, accompagnées, le cas échéant de faux documents, relatives à l'état civil, à la résidence, à la composition de la famille, aux ressources ou à la durée de cotisation ou de période assimilées au titre de l'assurance vieillesse ; 2° ou en omettant de déclarer un changement de situation relatif à la résidence, à la qualité d'allocataire, de bénéficiaire ou d'ayant droit à la situation professionnelle, au logement, à la composition de la famille, aux ressources' ; en l'espèce, tant le caractère indu des prestations que l'omission de déclaration de changement de situation relatif à la composition de la famille et des ressources de Mme H... ne sont contestés par les parties ; il n'est toutefois pas démontré que Mme H... ait intentionnellement fraudé l'organisme chargé des prestations d'assurance vieillesse ; au regard de sa situation financière et de la gravité des faits, il convient de réduire la pénalité due par Mme H... à la somme de 1 euro ; en cette matière ou l'instance devant le présent tribunal est sans frais ni dépens, les dépens éventuellement engagés par une partie resteront à sa charge » ;

1. ALORS QUE les termes du litige sont fixés par les prétentions respectives des parties ; qu'en l'espèce, aucune des parties ne contestait le fait que Mme H... s'était intentionnellement livrée à de fausses déclarations ; que dans ses conclusions oralement soutenues à la barre, outre l'absence de toute déclaration relative à sa nouvelle situation familiale depuis 2008, la CARSAT reprochait à Mme H... de s'être livrée à de fausses déclarations en faisant état, dans les deux imprimés qui lui avaient été adressés en 2011 et 2015, de sa seule situation de veuvage sans mentionner son remariage intervenu en 2008 et précisait que du fait de ces « fausses déclarations réitérées », Mme H... avait continué à bénéficier du service de sa pension de réversion alors que les ressources de son ménage s'opposaient à son paiement (conclusions p. 4 §7) ; que Mme H... qui n'avait contesté ni le montant de l'indu fixé hors prescription biennale comme le prévoit l'article L. 355-3 du code de la sécurité sociale en cas de fraude ou de fausses déclarations, ni le motif de la pénalité prononcée à son encontre pour fausses déclarations s'était contentée de faire état de ses difficultés financières (arrêt p. 2 §6) ; qu'en affirmant qu'il n'était pas démontré que Mme H... avait intentionnellement fraudé quand il était acquis au débat que l'assurée s'était intentionnellement livrée à de fausses déclarations, le tribunal des affaires de sécurité sociale a violé l'article 4 du code de procédure civile ;

2.ALORS QUE le juge doit en toutes circonstances faire observer et observer lui-même le principe du contradictoire ; qu'il ne peut fonder sa décision sur les moyens qu'il a relevés d'office sans avoir préalablement invité les parties à présenter leurs observations ; qu'en l'espèce, en relevant d'office le moyen tiré de l'absence d'élément intentionnel sans inviter les parties à s'exprimer sur ce point, le tribunal a violé l'article 16 de procédure civile ;

3. ALORS QUE le fait de se livrer à de fausses déclarations implique d'agir positivement dans le but de dissimuler la réalité de la situation ; que les fausses déclarations se différencient de la simple omission de déclaration en ce qu'elles supposent que le déclarant rende volontairement compte de faits inexacts ; qu'en l'espèce, il n'était pas seulement reproché à l'assurée, remariée depuis 2008, de s'être abstenue d'informer la CARSAT des changements intervenus dans sa vie familiale mais d'avoir, à deux reprises, en 2011 puis en 2015, déclaré sur les formulaires qui étaient destinés à rendre compte de sa situation être « veuve » plutôt que « mariée » ; qu'en retenant que les faits reprochés à Mme H... relevaient d'une simple omission de déclaration sans s'expliquer sur le contenu de ses déclarations faites en 2011 et 2015 dans lesquelles elle affirmait, contrairement à la réalité de sa situation, être veuve plutôt que mariée, le tribunal a privé sa décision de base légale au regard des articles L. 114-17 et R. 114-13 du code de la sécurité sociale ;

4. ALORS QUE le montant de la pénalité est fixé proportionnellement à la gravité des faits reprochés, en tenant compte notamment de leur caractère intentionnel ou répété, du montant et de la durée du préjudice et des moyens et procédés utilisés ; qu'en l'espèce, la Caisse de retraite faisait valoir qu'à deux reprises en 2011 puis en 2015, Mme H... avait fait état de sa situation de veuvage sans mentionner l'existence de son remariage intervenu en 2008, ce qui lui avait permis de bénéficier pendant près de sept années d'une pension de réversion à laquelle elle n'aurait pu prétendre si elle avait indiqué sa véritable situation de famille et précisait que le montant de la pénalité fixé à 500 euros était à la fois justifié et mesuré au regard des faits reprochés et du montant de l'indu qui s'élevait à 27614 euros ; qu'en prenant en compte la « gravité des faits », sans s'expliquer ni sur leur caractère réitéré, ni sur la durée du préjudice subi par la Caisse de retraite, le tribunal a privé sa décision de base légale au regard de l'article R. 114-14 du code la sécurité sociale ;

5. ALORS QUE le juge tranche le litige conformément aux règles de droit applicables et ne peut fonder sa décision sur l'équité ; qu'en retenant, pour réduire la pénalité qui avait été prononcée à l'encontre de Mme H... à 1 euro sur la « situation financière » de l'assurée, le tribunal s'est déterminé au regard de circonstances fondées sur l'équité et a violé l'article 12 du code de procédure civile, ensemble les articles L. 114-17 et R. 114-13 du code de la sécurité sociale ;


Synthèse
Formation : Chambre civile 2
Numéro d'arrêt : 18-20911
Date de la décision : 19/09/2019
Sens de l'arrêt : Cassation
Type d'affaire : Civile

Références :

Décision attaquée : Tribunal des affaires de sécurité sociale de la Loire, 24 mai 2018


Publications
Proposition de citation : Cass. Civ. 2e, 19 sep. 2019, pourvoi n°18-20911


Composition du Tribunal
Président : M. Prétot (conseiller doyen faisant fonction de président)
Avocat(s) : SCP Gatineau et Fattaccini

Origine de la décision
Date de l'import : 15/09/2022
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CCASS:2019:18.20911
Association des cours judiciaires suprmes francophones
Organisation internationale de la francophonie
Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie. Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie.
Logo iall 2012 website award