LA COUR DE CASSATION, TROISIÈME CHAMBRE CIVILE, a rendu l'arrêt suivant :
Attendu, selon l'arrêt attaqué (Chambéry, 13 février 2018), que M. et Mme C... ont consenti à M. B... une promesse de vente, sous conditions suspensives, d'un terrain et d'un immeuble avec rétrocession d'une partie de terrain aux vendeurs pour un euro après division parcellaire et construction ; que, M. et Mme C... ayant refusé de signer l'acte authentique de vente, M. B... et la société civile immobilière La Ferme des [...] (la SCI) les ont assignés en réalisation forcée de la vente et en paiement de la clause pénale prévue par la promesse ;
Sur les premier et second moyens du pourvoi principal, ci-après annexés :
Attendu qu'il n'y a pas lieu de statuer par une décision spécialement motivée sur ces moyens qui ne sont manifestement pas de nature à entraîner la cassation ;
Mais sur le moyen unique du pourvoi incident :
Vu l'article 1152 du code civil, dans sa rédaction antérieure à celle issue de l'ordonnance du 10 février 2016 ;
Attendu que, pour réduire le montant de la clause pénale stipulée au contrat, l'arrêt, par motifs propres et adoptés, retient que M. et Mme C... ont fait preuve de patience avec M. B..., que la vente n'est finalement pas intervenue parce que les vendeurs ont été las des tergiversations de l'acquéreur alors qu'ils avaient en 2012 accordé tacitement la prorogation du délai de réalisation de la condition suspensive, que la clause pénale est d'un montant excessif compte tenu du contexte dans lequel est intervenue cette opération plutôt complexe et que l'attitude des vendeurs relève plus d'une certaine incompréhension du dossier que de la mauvaise foi ;
Qu'en statuant ainsi, par des motifs impropres à établir le caractère manifestement disproportionné de la peine prévue par rapport au préjudice réellement subi par le bénéficiaire de la clause, la cour d'appel a violé le texte susvisé ;
PAR CES MOTIFS :
CASSE ET ANNULE, mais seulement en ce qu'il rejette la demande de M. B... et de la SCI La Ferme des [...] au titre de la clause pénale qui sera ramenée à un euro symbolique, l'arrêt rendu le 13 février 2018, entre les parties, par la cour d'appel de Chambéry ; remet, en conséquence, sur ce point, la cause et les parties dans l'état où elles se trouvaient avant ledit arrêt et, pour être fait droit, les renvoie devant la cour d'appel de Chambéry, autrement composée ;
Condamne M. et Mme C... aux dépens ;
Vu l'article 700 du code de procédure civile, rejette la demande de M. et Mme C... et les condamne à payer à M. B... et à la SCI La Ferme des [...] la somme globale de 3 000 euros ;
Dit que sur les diligences du procureur général près la Cour de cassation, le présent arrêt sera transmis pour être transcrit en marge ou à la suite de l'arrêt partiellement cassé ;
Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, troisième chambre civile, et prononcé par le président en son audience publique du dix-neuf septembre deux mille dix-neuf.
MOYENS ANNEXES au présent arrêt :
Moyens produits par Me Rémy-Corlay, avocat aux Conseils, pour M. et Mme C..., demandeur au pourvoi principal.
PREMIER MOYEN DE CASSATION :
Le moyen reproche à l'arrêt attaqué d'AVOIR déclaré la vente parfaite entre les époux C..., d'une part, et M. B... et la SCI La Ferme des [...], d'autre part, d'AVOIR dit qu'à défaut de réitération de l'acte authentique dans un délai de 2 mois à compter de la décision, sous réserve de la consignation du prix de vente à hauteur de 1.400.000 € sur le compte séquestre du Bâtonnier de l'ordre du Barreau de Bonneville, la publication du jugement au Service de la publicité foncière de Bonneville vaudrait titre avec toutes conséquences de droit portant sur les biens suivants : « Sur la commune de [...] - les parcelles [...]- [...]-et [...] pour 14 a 31 ca avec le bâtiment y édifié soumis au régime de la copropriété et composé de 7 lots tels que décrits dans le compromis du 18 juillet 2011, - la parcelle [...] issue de la parcelle [...] pour 5 a 43 ca telle qu'apparaissant sur le document d'arpentage de la SARL Arpentage publié le 3 septembre 2013 sous le numéro 6599 V - avec la condition particulière suivante : la parcelle de 957 m² détachée de la parcelle cadastrée section [...] d'une contenance de 7.464 m², résultant de la division de la parcelle [...] par le document d'arpentage du 3 septembre 2013, serait rétrocédée aux vendeurs moyennant un euro symbolique aux frais de l'acquéreur dès que la construction serait édifiée et dans tous les cas avant le 16 juin 2019;
AUX MOTIFS PROPRES QUE: « Sur la régularité du compromis de vente ; la concordance entre le compromis de vente et le projet d'acte authentique ; Les appelants exposent que le compromis de vente prévoit la cession d'un terrain de 2.931 m², soit 1.431 m² des parcelles n° [...], [...] et [...] et de 1.500 m² environ issus de la parcelle [...] avec rétrocession de 1.000 m², alors que le projet d'acte porte sur la vente des 1.431 m² outre 8.007 m² des parcelles [...] et [...] issues de la parcelle [...]. Mais les intimés ne réclament pas l'application du projet d'acte de vente, mais celle du compromis du 18/07/2011, et ce moyen ne sera pas retenu, étant relevé que les écarts de surface dans les deux actes sont minimes : tandis que le compromis porte sur une superficie de (2,931 m² - 1.000 m²) soit 1.931 m², le projet d'acte stipule une rétrocession de 7.464 m² pour un euro par les acquéreurs aux vendeurs, ce qui aboutit finalement à la cession d'un terrain de (8.007 m² + 1.431 m² - 7,464 m²) soit 1.974 m². Par ailleurs, en raison de la possibilité de voir déclasser un morceau de chemin rural appartenant à la commune, la rétrocession d'une surface pourra être supérieure à celle prévue. L'indétermination de la chose vendue ; Les appelants font valoir que la rétrocession d'une partie du terrain vendue est indissociable de l'acte de vente et qu'elle porte sur une parcelle dont la consistance est indéterminée, ce qui doit entraîner la nullité de l'acte. Là encore, ce moyen n'est pas fondé puisqu'au compromis de vente, est joint un plan signé par les parties, dessinant les contours de la parcelle à rétrocéder, qui est ainsi définie. En outre, l'emploi du terme « environ » ne suffit pas à rendre imprécise la chose vendue, l'article 1616 du code civil disposant que le vendeur doit délivrer la surface prévue à l'acte. Les appelants doivent ainsi céder aux intimés un terrain d'une superficie de 1.500 m², le fait que les contours de celui-ci ne soient pas déterminés avec précision étant en conséquence sans incidence, s'agissant en réalité d'une cession de l'assiette d'une parcelle supportant des droits à construire, destinée à être rétrocéder, une fois les droits en cause attachés au terrain ayant été utilisés par l'acquéreur. Par ailleurs, seul l'acquéreur étant en droit d'invoquer un manquement à l'obligation de délivrance du vendeur. En effet, l'article 1619 du code civil dispose que, dans le cas comme en l'espèce où un prix global a été fixé, si la contenance délivrée est moindre que celle convenue d'au moins un vingtième, l'acheteur a droit à une diminution du prix. C'est donc l'acheteur seul qui peut envisager de poursuivre la nullité du contrat pour vice de consentement et non pas le vendeur. (Il doit alors être en mesure d'établir que l'exacte contenance était à ses yeux, compte tenu de l'usage qu'il entendait faire de l'immeuble, une qualité déterminante de celui-ci). » ;
ET AUX MOTIFS ADOPTES DES PREMIERS JUGES QUE : « (
) Le compromis du 18 juillet 2011 concerne la vente d'une parcelle de terrain destinée à la construction d'une maison d'habitation après démolition des bâtiments existants cadastrée à [...] « [...] » [...] pour 1003 m², [...] pour 120 m² et « montée des [...] » [...] pour 1316 m² et une surface de 1500 m² environ à prendre sur un plus grand corps cadastré [...] « montée des [...] » de 8007 m² avec la précision suivante « étant observé que cette bande de terrain sera obligatoirement restituée (à l'exclusion d'une bande d'une surface de 500 m² environ sur l'emplacement des chemins privés qui entourent la parcelle [...] et au delà pour atteindre les 500m² selon représentation en rose sur le plan ci-annexé) aux vendeurs dès que la construction sera habitable et au plus tard dans tous les cas le 31 juillet 2013 moyennant un euro symbolique ... et plus loin, après « division cadastrale à effectuer ...cette bande est à prendre le long de la de la limite divisoire des parcelles cadastrées section [...] et [...] » ; Contrairement à ce qu'affirment les vendeurs, un plan cadastral sur lequel figure en rose la bande de terrain telle que décrite plus haut portant la signature des parties ayant signé le compromis est annexé à l'acte du 18 juillet 2011. De même, il n'est nullement prévu que l'acte authentique comprendra la cession de toute la parcelle de 8007 m² mais seulement un bande de terrain de 500 m² après restitution du solde de la parcelle moyennant le prix de 1 € dont il est parfaitement aisé de déterminer la contenance d'environ 1500 m² et la localisation. Le compromis prévoit comme condition suspensive l'obtention par l'acquéreur d'un permis de construire une construction à usage d'habitation dont la SHON est d'au moins 348m². L'opération conclue entre les époux C... et Monsieur B... telle qu'elle ressort du compromis devait permettre à l'acquéreur de présenter une demande de permis de construire pour une SHON d'au moins 348 m² en se prévalant de la propriété de 2900 m² de terrain (1431 m² correspondant à la superficie des parcelle [...]-[...]-[...]) et de 1500 m² à prendre sur la parcelle [...] , puis de conserver la propriété de seulement 1950 m² environ (1431 + 500) après rétrocession au vendeur de 1000 m² de terrain environ de sorte que ceux-ci restaient propriétaires de 7500 m² de la parcelle [...] . Contrairement à ce qu'affirment encore les vendeurs, le compromis de vente ne comporte aucune clause ou condition liée aux droits à bâtir au profit de ces derniers sur le terrain rétrocédé. La clause de restitution du terrain n'apparaît pas potestative dans la mesure où une date limite est fixée et que cette restitution ne relève donc pas du bon vouloir de l'acquéreur qui s'est engagé, quelque soit l'avancement des travaux à rétrocéder la bande terrain devant revenir aux vendeurs au plus tard le 31 juillet 2013. Le compromis ne comporte aucune ambiguïté sur la consistance, la contenance et sur la localisation des biens vendus sauf à parfaire après division parcellaire restant à effectuer. Il a été rédigé par Maître N..., notaire des vendeurs et ces derniers ont forcément été conseillés et avertis de la portée des engagements réciproques des parties. Toute l'argumentation fondée sur le dol de l'acquéreur lié à l'absence de droit à bâtir sur le terrain revenant aux vendeurs doit être rejetée dès lors qu'elle repose sur de fausses affirmations des vendeurs sur la cession de la totalité des 8007m2 dans l'acte authentique ou encore sur leur prétendue perte de droits à bâtir dont il n'est pas fait mention dans le compromis. En conséquence, la demande de nullité du compromis des époux C... pour vice du consentement, que ce soit sur l'erreur sur la substance ou sur le dol, ne peut être accueillie ; (
)Monsieur B... et la Sci La Ferme de [...] apparaissent donc bien fondés dans leurs demandes visant à déclarer la vente intervenue selon compromis du 18 juillet 2011 parfaite et à voir dire qu'à défaut de réitération par acte authentique de la dite vente dans un délai de 2 mois à compter du jugement, ce jugement vaudra vente des biens suivants : - les parcelles [...]- [...] et [...] pour 14 a 31 ca avec le bâtiment y édifié soumis au régime de la copropriété et composé de 7 lots tels que décrits dans le compromis du 18 Juillet 2011, - la parcelle [...] issue de la parcelle [...] pour 5a 43 ca telle qu'apparaissant sur le document d'arpentage de la SARL Arpentage publié le 3 septembre 2013 sous le n° 6599 V, - avec la condition particulière suivante, la vente comprend temporairement la parcelle [...] pour 7464 m2 issue de la parcelle [...] visée au compromis, laquelle parcelle sera rétrocédée au vendeur moyennant l'euro symbolique aux frais de l'acquéreur dès que la construction sera édifiée et dans tous les cas avant la date que le tribunal fixe au 6 octobre 2016 (
). »;
ALORS QUE 1°) les conventions légalement formées tiennent lieu de loi à ceux qui les ont faites ; que les juges du fond ne disposent pas d'un pouvoir de réfaction ; qu'il ressortait des propres constatations des juges du fond (arrêt attaqué p. 4, §antépénultième) que le compromis de vente du 18 juillet 2011 portait sur une superficie de 1.931 m², soit 1.431 m² correspondant aux parcelles [...] [...] et [...] + 500 m² environ conservés par les acquéreurs, après rétrocession aux vendeurs de 1.000 m² environ sur la parcelle à détacher de 1.500 m² sur la parcelle [...] de 8.007m² ; que le projet de vente soumis à la signature des parties portait lui sur une superficie de 1.974 m², soit 1.431 m² correspondant aux parcelles [...] [...] et [...] + 543 m² conservés par les acquéreurs, après rétrocession aux vendeurs de 7.464 m² sur la parcelle cédée de 8.007 m² ; qu'en déclarant dès lors la vente parfaite sur la base de 1.974 m² soit 1.431 m² + 543 m² correspondant à la différence entre la parcelle à détacher de 1.500 m² environ et la parcelle à rétrocéder telle que fixée en définitive par la Cour d'appel elle-même à 957 m², au motif que la différence de surface de près de 50m² par rapport au compromis de vente portant sur 1.931 m² était prétendument « minime » (arrêt attaqué p. 4, § 3), la Cour d'appel a violé l'article 1134 du code civil dans sa rédaction antérieure à l'ordonnance du 10 février 2016 ;
ALORS QUE 2°) le juge ne peut se prononcer par des motifs contradictoires ; que la Cour d'appel a constaté d'une part que « les intimés ne réclament pas l'application du projet d'acte de vente mais celle du compromis du 18 juillet 2011 » (v. arrêt p. 4 avant dernier alinéa) pour débouter les exposants de leur moyen se prévalant du manque de concordance entre le compromis de vente portant sur une superficie totale de 1.931 m² et le projet d'acte authentique portant sur une superficie totale de 1.974 m², d'autre part, confirmant le jugement, que les acheteurs étaient bien fondés à ce que soit prononcée la vente « des biens suivants - les parcelles [...]- [...] et [...] pour 14 a 31 ca avec le bâtiment y édifié soumis au régime de la copropriété et composé de 7 lots tels que décrits dans le compromis du 18 juillet 2011, - la parcelle [...] issue de la parcelle [...] pour 5a 43 ca telle qu'apparaissant sur le document d'arpentage de la SARL Arpentage publié le 3 septembre 2013 sous le n° 6599 V, - avec la condition particulière suivante, la vente comprend temporairement la parcelle [...] pour 7464 m2 issue de la parcelle [...] visée au compromis, laquelle parcelle sera rétrocédée au vendeur moyennant l'euro symbolique aux frais de l'acquéreur dès que la construction sera édifiée et dans tous les cas avant la date que le tribunal fixe au 6 octobre 2016 » (v. jugement p. 7), soit pour la surface totale de 1.974 m² prévue au projet de contrat et non par le compromis ; que ce faisant, la Cour d'appel a violé l'article 455 du Code de procédure civile ;
ALORS, EN TOUT ETAT DE CAUSE, QUE 3°) la vente suppose un accord sur la chose et le prix; que faute pour l'objet de la vente de pouvoir être déterminé au vu des énonciations de l'acte, sans dépendre d'un accord ultérieur des parties, la vente est nulle ; que les juges du fond avaient eux-mêmes considéré que les surfaces à détacher et à rétrocéder étaient mentionnées de façon approximative dans le compromis visant : « une surface de 1.500 m² environ à prendre sur un plus grand corps (
laquelle) sera obligatoirement restituée (à l'exclusion d'une bande d'une surface de 500 m² environ
», (arrêt attaqué p. 2, § 1er et p. 4, dernier §), de sorte que n'étaient connus ni la surface exacte de la parcelle conservée par les acquéreurs, ni par conséquent, celle de la parcelle rétrocédée aux vendeurs; qu'ainsi que le faisaient valoir les époux C..., dans leurs conclusions d'appel (p. 19, § 5 au dernier), les acquéreurs avaient eux-mêmes reconnu, par courriels des 5 et 24 juin 2013, ainsi que par leurs propres conclusions (p. 8, dernier § et p.9, § 1er), que les incertitudes sur les surfaces vendues n'ont été partiellement levées que par le document d'arpentage signé par Mme C..., seule, le 10 août 2013; qu'en déclarant dès lors la vente parfaite, sans avoir recherché si la détermination de l'objet de la vente n'était pas ainsi à convenir, la Cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard des dispositions de l'article 1129 du code civil, dans sa rédaction antérieure à l'ordonnance du 10 février 2016, ainsi que de celles des articles 1583 et 1589 du code civil ;
ET ALORS QUE 4°) il est de principe que le juge ne peut dénaturer les éléments de la cause ; qu'en disant que l'objet du compromis était déterminé aux motifs que « les appelants font valoir que la rétrocession d'une partie du terrain vendue est indissociable de l'acte de vente et qu'elle porte sur une parcelle dont la consistance est indéterminée, ce qui doit entraîner la nullité de l'acte. Là encore, ce moyen n'est pas fondé puisqu'au compromis de vente, est joint un plan signé par les parties, dessinant les contours de la parcelle à rétrocéder, qui est ainsi définie. » quand le contours dessiné ne concerne que les 543 m² à ne pas restituer, ne portant aucun mention des terrains à restituer ; que ce faisant, la Cour d'appel a dénaturé la pièces litigieuse en violation du principe sus-visé ;
ALORS QUE 5°), la nullité d'un contrat pour absence d'accord sur la chose et le prix peut être invoquée par chacune des parties; que de même, la nullité d'un contrat peut être poursuivie par toute partie dont le consentement a été vicié, notamment par le vendeur dont le consentement a été surpris par le dol de l'acquéreur, ou donné par erreur sur les qualités substantielle de la chose vendue ; qu'en déniant dès lors aux époux C... le droit d'invoquer l'indétermination des surfaces vendues au motif que seul l'acquéreur aurait été en droit d'invoquer un manquement à l'obligation de délivrance du vendeur de sorte que c'est (
) l'acheteur seul qui peut envisager de poursuivre la nullité du contrat pour vice de consentement et non pas le vendeur » (arrêt attaqué p. 5, § 2) la Cour d'appel a violé par refus d'application les dispositions des articles 1108 et suivants, 1129 du code civil dans leur rédaction antérieure à l'ordonnance du 10 février 2016, ensemble celles des articles 1583 et 1589 du même code.
SECOND MOYEN DE CASSATION :
Le moyen reproche à l'arrêt attaqué d'AVOIR déclaré la vente parfaite entre les époux C..., d'une part, et M. B... et la SCI La Ferme des [...], d'autre part, d'AVOIR dit qu'à défaut de réitération de l'acte authentique dans un délai de 2 mois à compter de la décision, sous réserve de la consignation du prix de vente à hauteur de 1.400.000 € sur le compte séquestre du Bâtonnier de l'ordre du Barreau de Bonneville, la publication du jugement au Service de la publicité foncière de Bonneville vaudrait titre avec toutes conséquences de droit portant sur les biens suivants : « Sur la commune de [...] - les parcelles [...]- [...]-et [...] pour 14 a 31 ca avec le bâtiment y édifié soumis au régime de la copropriété et composé de 7 lots tels que décrits dans le compromis du 18 juillet 2011, - la parcelle [...] issue de la parcelle [...] pour 5 a 43 ca telle qu'apparaissant sur le document d'arpentage de la SARL Arpentage publié le 3 septembre 2013 sous le numéro 6599 V - avec la condition particulière suivante : la parcelle de 957 m² détachée de la parcelle cadastrée section [...] d'une contenance de 7.464 m², résultant de la division de la parcelle [...] par le document d'arpentage du 3 septembre 2013, serait rétrocédée aux vendeurs moyennant un euro symbolique aux frais de l'acquéreur dès que la construction serait édifiée et dans tous les cas avant le 16 juin 2019;
AUX MOTIFS PROPRES QUE: « Les appelants font valoir que M. B..., architecte de profession et professionnel de l'immobilier, a manifesté une réticence dolosive à leur égard, en étant taisant sur la question des droits à bâtir attachés au terrain rétrocédé, préférant conclure une vente suivie d'une rétrocession plutôt qu'une cession de coefficients d'occupation des sols, ce qui leur aurait permis d'être parfaitement éclairés. Ils ajoutent que si M. B... a fini par leur donner des explications à ce sujet, ce n'est que postérieurement à la signature du compromis de vente, et celui-ci aboutit à les priver des droits à bâtir sur la parcelle vendue. En outre, ils indiquent que si M. B... a eu connaissance de cette façon de procéder, c'est grâce à la complicité d'un employé d'une agence immobilière, la société Vanipaul, qu'eux-mêmes avaient mandaté pour vendre la parcelle n° [...] et une partie de la parcelle n° [...]. Enfin, ils expliquent que M. B... leur a dissimulé l'existence d'un risque fiscal ainsi que celui d'une préemption de la commune au prix de un euro, l'obligation de rétrocession n'étant quant à elle assortie d'aucune garantie. Dans le silence d'un acte, il convient de rechercher la commune intention des parties. En l'occurrence, les vendeurs étaient, tout à fait au courant de l'existence d'un coefficient d'occupation des sols de 0,12 empêchant M. B... de réaliser son projet de construction de chalet, d'une superficie de 348 m², alors que la possibilité de construire un immeuble d'une surface importante est de nature à entraîner une majoration du prix de vente. C'est ainsi qu'en signant un accord comportant la vente d'une parcelle destinée à être rétrocédée, les parties ont entendu avoir pour objectif le transfert des droits à construire de ce terrain sur la parcelle restant à l'acquéreur, étant précisé que les vendeurs valorisaient mieux l'ensemble de leur propriété, la parcelle rétrocédée, bien que constructible, ne l'étant pas en réalité, étant située en zone rouge du plan de prévention des risques naturels prévisibles. Du reste, les vendeurs ont donné mandat en 2013 et 2014 à la société Vanipaul Immobilier pour la vente du terrain en cause. Or, cette agence avait établi une note technique expliquant le mécanisme de vente/rétrocession de façon à valoriser la partie située en zone rouge. Certes la société Vanipaul déclare maintenant n'avoir pas communiqué à ses mandants cette information, mais cette dénégation ne sera pas retenue par la cour, puisque ce transfert de Shon était essentiel pour valoriser les terrains mis en vente. En donnant ultérieurement mandat à un agent immobilier de céder leur terrain avec le même mécanisme que celui contesté, les époux C... ont vu là l'occasion de valoriser leur patrimoine. Ils ne peuvent ainsi prétendre avoir été victimes d'une manoeuvre frauduleuse, dès lors qu'eux-mêmes la revendiquent et en sollicitent l'application. Concernant l'incidence fiscale, la possibilité de voir la commune préempter le terrain destiné à être rétrocédé, les garanties de l'effectivité de la rétrocession, ce n'est pas à l'acquéreur, de nationalité suisse, résidant en Suisse et ne construisant pas en France, de conseiller ses vendeurs, ne disposant pas de la compétence nécessaire et de l'information suffisante, et ce, alors que les époux C... avaient leur propre notaire en la personne de Me N..., rédacteur de l'acte incriminé. Aucune dissimulation ne peut ainsi être reprochée à l'acquéreur. Quant aux autres griefs, ils sont soit postérieurs à la conclusion du contrat, soit ils n'ont pas d'incidence, comme des négociations avec la commune de [...] concernant un chemin rural, celles-ci étant postérieures à la signature du compromis et les difficultés relatives à sa propriété n'ayant été révélées à l'acquéreur qu'à l'occasion du dépôt du permis de construire. l'erreur sur les qualités substantielles Il résulte de ce qui précède que les époux C... n'ont pu se méprendre sur le mécanisme de cession/rétrocession d'une partie de leur terrain, de façon à faire bénéficier leur acquéreur de droits à construire supplémentaires. Dans ces conditions, le jugement déféré sera confirmé de ce chef, sauf à voir fixer la date ultime de rétrocession au 13/06/2019 (soit 14 mois à compter de la présente décision). » ;
ET AUX MOTIFS ADOPTES DES PREMIERS JUGES QUE : « Les époux C... invoquent la nullité du compromis pour vices du consentement ». L'article 1109 du code Civil dispose qu'il n'y a point consentement valable si le consentement a été donné par erreur ou surpris par le dol. L'erreur n'est cause de nullité en vertu de l'article 1110 que lorsque elle porte sur la substance même de la chose. L'article 1116 exige des manoeuvres dolosives caractérisées pour justifier la nullité d'un acte. (
) Contrairement à ce qu'affirment encore les vendeurs, le compromis de vente ne comporte aucune clause ou condition liée aux droits à bâtir au profit de ces derniers sur le terrain rétrocédé. (Le compromis) a été rédigé par Maître N..., notaire des vendeurs et ces derniers ont forcément été conseillés et avertis de la portée des engagements réciproques des parties. Toute l'argumentation fondée sur le dol de l'acquéreur lié à l'absence de droit à bâtir sur le terrain revenant aux vendeurs doit être rejetée dès lors qu'elle repose sur de fausses affirmations des vendeurs sur la cession de la totalité des 8007 m² dans l'acte authentique ou encore sur leur prétendue perte de droits à bâtir dont il n'est pas fait mention dans le compromis. En conséquence, la demande de nullité du compromis des époux C... pour vice du consentement, (notamment) l'erreur (
) sur le dol, ne peut être accueillie ; (
)Monsieur B... et la Sci La Ferme de [...] apparaissent donc bien fondés dans leurs demandes visant à déclarer la vente intervenue selon compromis du 18 juillet 2011 parfaite et à voir dire qu'à défaut de réitération par acte authentique de la dite vente dans un délai de 2 mois à compter du jugement, ce jugement vaudra vente des biens suivants : - les parcelles [...]- [...] et [...] pour 14 a 31 ca avec le bâtiment y édifié soumis au régime de la copropriété et composé de 7 lots tels que décrits dans le compromis du 18 Juillet 2011, - la parcelle [...] issue de la parcelle [...] pour 5a 43 ca telle qu'apparaissant sur le document d'arpentage de la SARL Arpentage publié le 3 septembre 2013 sous le n° 6599 V, - avec la condition particulière suivante, la vente comprend temporairement la parcelle [...] pour 7464 m2 issue de la parcelle [...] visée au compromis, laquelle parcelle sera rétrocédée au vendeur moyennant l'euro symbolique aux frais de l'acquéreur dès que la construction sera édifiée et dans tous les cas avant la date que le tribunal fixe au 6 octobre 2016 (
). »;
ALORS QUE 1°) le dol constitué par le silence d'une partie dissimulant à son cocontractant un fait qui, s'il avait été connu de lui, l'aurait empêché de contracter, peut émaner de l'acquéreur, et s'apprécie lors de la formation du contrat ; qu'ainsi que le faisaient valoir les époux C... dans leurs conclusions d'appel (p. 28, § 7, et p. 30, § 3, 4 et pénultième) ce n'est que postérieurement à la conclusion du compromis de vente du 18 juillet 2011, que M. B..., architecte et promoteur immobilier leur a indiqué, par courriel du 14 octobre 2013, qu'ils perdaient leurs droits à bâtir attachés à la parcelle rétrocédée: « Les droits à bâtir pris sur les 1.000 m² me restent acquis » ; qu'après avoir elle-même relevé que l'agence immobilière Vanipaul Immobilier déclarait ne pas avoir informé les époux C..., tous deux retraités et profanes, du mécanisme de vente/rétrocession portant sur les droits à construire des parcelles cédées et rétrocédées, la Cour d'appel a cependant retenu que les vendeurs en auraient été nécessairement informés « puisque ce transfert de SHON était essentiel pour valoriser les terrains mis en vente » (arrêt attaqué dernier §); qu'en statuant ainsi quand il ne s'en inférait nullement que les époux C... auraient été dûment informés, lors de la conclusion du compromis de vente, qu'ils perdaient les droits à bâtir attachés à la surface rétrocédée, la cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard des articles 1108 et suivants du code civil dans sa rédaction antérieure à l'ordonnance du 10 février 2016 ;
ALORS QUE 2°) le dol constitué par le silence d'une partie dissimulant à son cocontractant un fait qui, s'il avait été connu de lui, l'aurait empêché de contracter, peut émaner de l'acquéreur, et s'apprécie lors de la formation du contrat ; qu'ainsi que le faisaient valoir les époux C... dans leurs conclusions d'appel (p. 28, § 7, et p. 30, § 3, 4 et pénultième) ce n'est que postérieurement à la conclusion du compromis de vente du 18 juillet 2011, que M. B..., architecte et promoteur immobilier leur a indiqué, par courriel du 14 octobre 2013, qu'ils perdaient leurs droits à bâtir attachés à la parcelle rétrocédée dans la mesure où : « Les droits à bâtir pris sur les 1.000 m² me restent acquis »; que pour rejeter toute réticence dolosive dont avaient été victimes les époux C..., la Cour d'appel a retenu qu'ils avaient « donn(é) ultérieurement mandat à un agent immobilier de céder leur terrain avec le même mécanisme que celui contesté » (arrêt attaqué dernier §) ; qu'en statuant ainsi quand il ne s'en inférait nullement que les époux C... auraient été dûment informés, lors de la conclusion du compromis de vente, qu'ils perdaient les droits à bâtir attachés à la surface rétrocédée, la cour d'appel a derechef privé sa décision de base légale au regard des articles 1108 et suivants du code civil dans sa rédaction antérieure à l'ordonnance du 10 février 2016 ;
ALORS QUE 3°) tout jugement doit être motivé à peine de nullité; que l'erreur sur la substance s'entend, non seulement de celle qui porte sur la matière même dont la chose est composée, mais également, plus généralement, de celle qui a trait aux qualités substantielles en considération desquelles les parties ont contracté ; qu'outre l'erreur portant, à tout le moins, sur les droits à bâtir attachés à la parcelle rétrocédée, les époux C... invoquaient leur ignorance du risque fiscal que leur faisait courir la vente, leur ignorance du risque de voir la commune préempter la parcelle rétrocédée moyennant un euro, ainsi que leur erreur sur l'absence de garanties de l'effectivité de la rétrocession (conclusions d'appel p. 39, § pénultième); que pour débouter les vendeurs de leur action en nullité de la vente fondée sur ces erreurs, la Cour d'appel s'est bornée à renvoyer à ses développements relatifs au prétendu défaut de réticence dolosive de M. B... (arrêt attaqué p. 6, § 3) ; que si la Cour d'appel a ainsi exclu, d'une part, tout dol de M. B... concernant l'incidence fiscale, le risque de préemption de la commune et l'absence de garanties de l'effectivité de la rétrocession au motif qu'il n'aurait pas disposé de la compétence nécessaire et de l'information suffisante (arrêt attaqué p. 6, § 2), ainsi que, d'autre part, une erreur des époux C... sur le mécanisme de cession/ rétrocession (arrêt attaqué p. 6, § 3), elle ne s'est, en revanche, nullement expliquée sur les autres erreurs expressément invoquées par les époux C... comme ayant vicié leur consentement ; qu'en statuant ainsi, la Cour d'appel a violé les dispositions des articles 455 et 458 du code de procédure civile.
Moyen produit par la SCP Monod, Colin et Stoclet, avocat aux Conseils, pour M. B... et la SCI La Ferme des [...], demandeurs au pourvoi incident.
IL EST FAIT GRIEF à l'arrêt attaqué d'avoir limité à l'euro symbolique le montant de la condamnation des époux C... au titre de la clause pénale prévue au compromis de vente du 18 juillet 2011 ;
AUX MOTIFS PROPRES QUE l'attitude des vendeurs relevant plus d'une certaine incompréhension du dossier que de la mauvaise foi, c'est par une exacte application des circonstances de la cause que le premier juge a ramené le montant de la clause pénale à un euro (arrêt p. 6, § 5) ;
ET AUX MOTIFS ADOPTÉS QU'il est prévu dans le compromis que dans le cas où l'une des parties ne régulariserait pas l'acte authentique, après avoir été mise en demeure, elle devra verser à l'autre une somme de 140 000 €, l'application de la clause pénale ne privant pas dans la même hypothèse la possibilité pour chacune des parties de poursuivre l'autre en exécution de la vente ; que, par application de l'article 1152 du code civil, le juge peut, même d'office, modérer ou augmenter la clause pénale ; que les époux C... ont fait preuve de patience avec Monsieur B... et la vente n'est finalement pas intervenue parce que les vendeurs ont été las des tergiversations de l'acquéreur alors qu'ils avaient en 2012 accordé tacitement la prorogation de délai de réalisation de la condition suspensive ; que, dans ces conditions, il convient de ramener la clause pénale d'un montant excessif compte tenu du contexte dans lequel intervenait cette opération de vente plutôt complexe à l'euro symbolique (jugement p. 8) ;
ET QUE les vendeurs peuvent à juste titre avoir eu l'impression d'être « ballotés » d'une proposition à l'autre de l'acquéreur ; qu'ils ont fait preuve de patience en permettant à l'acquéreur de poursuivre son projet malgré le dépassement du délai de réalisation de la condition suspensive d'obtention du permis de construire ; que tous ces éléments ont été pris en compte au titre de la clause pénale réduite à un montant symbolique (jugement p. 9) ;
ALORS QU'en retenant que le montant conventionnellement fixé de la clause pénale était excessif et en le ramenant à l'euro symbolique, par des motifs tirés de l'attitude et du comportement des époux C..., débiteurs de cette pénalité, et sans se prononcer sur le rapport entre l'importance du préjudice effectivement subi et le montant conventionnellement fixé, la cour d'appel a violé l'article 1152, devenu 1231-5, du code civil.