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18/09/2019 | FRANCE | N°18-11700

France | France, Cour de cassation, Chambre sociale, 18 septembre 2019, 18-11700


LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE SOCIALE, a rendu l'arrêt suivant :

Attendu, selon l'arrêt attaqué rendu sur renvoi après cassation (Soc., 2 juillet 2014, pourvoi n° 13-19.990), que Mme I..., a été engagée par la société Neubauer distributeur Chambourcy, concessionnaire automobile, le 1er janvier 2000 en qualité de chef comptable ; qu'en dernier lieu, elle exerçait les fonctions de directeur administratif et financier ; que licenciée le 12 mai 2010, elle a saisi la juridiction prud'homale à l'effet d'obtenir paiement d'indemnités pour rupture injustifiée et vexatoire ainsi

que des rappels de primes ; qu'en cause d'appel, elle a demandé paie...

LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE SOCIALE, a rendu l'arrêt suivant :

Attendu, selon l'arrêt attaqué rendu sur renvoi après cassation (Soc., 2 juillet 2014, pourvoi n° 13-19.990), que Mme I..., a été engagée par la société Neubauer distributeur Chambourcy, concessionnaire automobile, le 1er janvier 2000 en qualité de chef comptable ; qu'en dernier lieu, elle exerçait les fonctions de directeur administratif et financier ; que licenciée le 12 mai 2010, elle a saisi la juridiction prud'homale à l'effet d'obtenir paiement d'indemnités pour rupture injustifiée et vexatoire ainsi que des rappels de primes ; qu'en cause d'appel, elle a demandé paiement d'un rappel de salaire au titre d'heures supplémentaires ;

Sur le deuxième moyen :

Attendu qu'il n'y a pas lieu de statuer par une décision spécialement motivée sur le moyen annexé qui n'est manifestement pas de nature à entraîner la cassation ;

Sur le quatrième moyen, pris en sa seconde branche :

Attendu que le deuxième moyen ayant fait l'objet d'un rejet, le moyen tiré d'une cassation par voie de conséquence est sans portée ;

Mais sur le premier moyen :

Vu les articles 2241 du code civil, L. 3245-1 et R. 1452-1 du code du travail dans leur rédaction applicable en la cause ;

Attendu que si, en principe, l'interruption de la prescription ne peut s'étendre d'une action à une autre, il en est autrement lorsque les deux actions, au cours d'une même instance, concernent l'exécution du même contrat de travail ;

Attendu que pour déclarer irrecevables comme prescrites les demandes de rappels de salaire au titre des heures supplémentaires pour

la période antérieure au 14 novembre 2007 et des congés payés afférents, l'arrêt retient que les dispositions transitoires de la loi du 14 juin 2013 prévoient que lorsqu'une instance a été introduite avant le 16 juin 2013, l'action est poursuivie et jugée conformément à la loi ancienne, c'est-à-dire avec un délai de prescription de cinq ans, y compris en appel et en cassation, que l'instance ayant été introduite le 31 mai 2010, le délai de prescription est de cinq ans, qu'il n'en demeure pas moins que la salariée n'a réclamé paiement d'heures supplémentaires qu'à compter du 14 novembre 2012, date à laquelle ses conclusions formalisant cette demande nouvelle ont été communiquées à la partie adverse devant la cour d'appel de Versailles, que l'effet interruptif attaché à une première demande en justice ne s'étend pas à une seconde demande, différente de la première par son objet ;

Qu'en statuant ainsi, alors que la prescription avait été interrompue par la saisine du conseil de prud'hommes le 31 mai 2010 même si la demande avait été présentée en cours d'instance, la cour d'appel a violé les textes susvisés ;

Et sur le troisième moyen :

Vu les articles 624 et 638 du code de procédure civile, ensemble l'article 1351 du code civil devenu l'article 1355 du même code ;

Attendu que selon le premier de ces textes la portée de la cassation est déterminée par le dispositif de l'arrêt qui la prononce, sauf le cas d'indivisibilité ou de dépendance nécessaire ; que selon le second, l'affaire est à nouveau jugée en fait et en droit par la juridiction de renvoi à l'exclusion des chefs non atteints par la cassation ;

Attendu que réformant le jugement en ce qu'il avait condamné la société à payer à la salariée la somme de 14 188,82 euros à titre de rappel de primes, outre les congés payés afférents, l'arrêt condamne l'employeur à lui payer la somme de 5 597,48 euros bruts à titre de rappel de primes pour les années 2008-2009-2010 et celle de 559,74 euros au titre des congés payés afférents ;

Qu'en statuant ainsi, alors que la cassation prononcée ne concernait que les demandes en paiement de dommages-intérêts pour licenciement vexatoire, d'heures supplémentaires et congés payés afférents et d'indemnité pour travail dissimulé, la cour d'appel, qui a méconnu les limites de sa saisine, a violé les textes susvisés ;

Et attendu qu'en application de l'article 624 du code de procédure civile, la cassation sur le premier moyen entraîne la cassation, par voie de conséquence, du chef de dispositif critiqué par le quatrième moyen, pris en sa première branche, relatif à la déclaration d'irrecevabilité de la demande de rappel de primes de fin d'année pour la période antérieure au 14 novembre 2007qui s'y rattache par un lien de dépendance nécessaire ;

Et vu l'article 627 du code de procédure civile ;

PAR CES MOTIFS :

CASSE ET ANNULE, mais seulement en ce qu'il réforme le jugement du conseil de prud'hommes de Paris du 14 novembre 2011 en son chef de dispositif condamnant la société Neubauer distributeur Chambourcy à payer à Mme I... la somme de 14 188,82 euros à titre de rappel de primes, outre les congés payés afférents, en ce qu'il condamne la société Neubauer distributeur Chambourcy à payer à Mme I... la somme de 5 597,48 euros bruts à titre de rappel de primes pour les années 2008-2009-2010 et la somme de 559,74 euros bruts au titre des congés payés afférents et en ce qu'il déclare irrecevables comme prescrites les demandes de rappel d'heures supplémentaires, de congés payés afférents et de rappel de primes de fin d'année pour la période antérieure au 14 novembre 2007, l'arrêt rendu le 23 novembre 2017, entre les parties, par la cour d'appel de Paris ;

Dit n'y avoir lieu à renvoi du chef de dispositif relatif à la demande de rappel de primes pour les années 2008-2009-2010 et des congés payés afférents ;

Constate que l'arrêt de la cour d'appel de Versailles du 23 avril 2013 est devenu irrévocable en ce qui concerne cette demande ;

Renvoie la cause et les parties devant la cour d'appel de Paris autrement composée pour qu'il soit statué sur les demandes au titre des heures supplémentaires, congés payés afférents et primes de fin d'année pour la période antérieure au 14 novembre 2007 restant en litige ;

Condamne la société Neubauer distributeur Chambourcy aux dépens ;

Vu l'article 700 du code de procédure civile, rejette la demande de la société Neubauer distributeur Chambourcy et la condamne à payer à Mme I... la somme de 3 000 euros ;
Dit que sur les diligences du procureur général près la Cour de cassation, le présent arrêt sera transmis pour être transcrit en marge ou à la suite de l'arrêt partiellement cassé ;

Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, chambre sociale, et prononcé par le président en son audience publique du dix-huit septembre deux mille dix-neuf.

MOYENS ANNEXES au présent arrêt :

Moyens produits par la SCP Thouvenin, Coudray et Grévy, avocat aux Conseils, pour Mme I...

PREMIER MOYEN DE CASSATION :

Le moyen reproche à l'arrêt attaqué d'AVOIR déclaré irrecevables comme prescrites les demandes de rappel d'heures supplémentaires et de congés payés sur heures supplémentaires pour la période antérieure au 14 novembre 2007.

AUX MOTIFS QU'en application de l'article L3245-1 du code du travail dans sa rédaction issue de la loi n°2013-504 du 14 juin 2013, l'action en paiement du salaire se prescrit par trois ans à compter du jour où celui qui l'exerce a connu ou aurait dû connaître les faits lui permettant de l'exercer ; la demande peut porter sur les sommes dues au titre des trois dernières années à compter de ce jour, ou, lorsque le contrat de travail est rompu, sur les sommes dues au titre des trois dernières années précédant la rupture du contrat ; les dispositions transitoires de la loi du 14 juin 2013 prévoient que lorsqu'une instance a été introduite avant le 16 juin 2013, l'action est poursuivie et jugée conformément à la loi ancienne, c'est-à-dire avec un délai de prescription de cinq ans y compris en appel et en cassation ; l'instance ayant été introduite le 31 mai 2010, le délai de prescription est de cinq ans ; il n'en demeure pas moins que Mme I... n'a réclamé paiement d'heures supplémentaires qu'à compter du 14 novembre 2012, date à laquelle ses conclusions formalisant cette demande nouvelle ont été communiquées à la partie adverse devant la cour d'appel de Versailles ; en effet, devant le conseil de prud'hommes, Mme I... ne réclamait qu'un rappel de primes pour la période 2008-2010, et un paiement d'astreintes de weekend ; or, l'effet interruptif attaché à une première demande en justice ne s'étend pas à une seconde demande différente de la première par son objet ; la salariée n'est donc plus recevable à réclamer le paiement d'heures supplémentaires et de rappels de salaire liés à cette demande pour la période antérieure au 14 novembre 2007 ; (
) qu'il convient d'exclure la période couverte par la prescription, soit de juin 2005 à la mi-novembre 2007.

ALORS QUE si, en principe, l'interruption de la prescription ne peut s'étendre d'une action à une autre, il en est autrement lorsque les deux actions, au cours d'une même instance, concernent l'exécution du même contrat de travail ; que pour déclarer prescrite une partie de la demande au titre des heures supplémentaires et des congés payés, l'arrêt énonce que la salariée n'en a réclamé le paiement que le 14 novembre 2012, date de ses conclusions formalisant cette demande ; qu'en statuant ainsi, quand la prescription avait été interrompue par la saisine du conseil de prud'hommes le 31 mai 2010, même si la demande avait été présentée en cours d'instance, la cour d'appel a violé l'articles 2241 du code civil et les articles L. 3245-1 et R. 1452-1 du code du travail dans leur rédaction applicable en la cause.

DEUXIEME MOYEN DE CASSATION :

Le moyen reproche à l'arrêt attaqué d'AVOIR rejeté la demande de paiement d'heures supplémentaires et les congés payés afférents pour la période du 16 avril 2010 au 14 août 2010.

AUX MOTIFS QU'il convient d'exclure la période allant du 16 avril 2010 au mois d'août 2010, au cours de laquelle la salariée n'a pas travaillé, étant successivement en arrêt maladie, puis en dispense d'activité dans l'attente de son licenciement.

1° ALORS QUE le juge doit, en toute circonstances, faire respecter et observer luimême le principe de la contradiction ; que la cour d'appel a retenu qu'il convenait d'exclure la période allant du 16 avril 2010 au mois d'août 2010, aux motifs que la salariée n'avait pas travaillé, étant successivement en arrêt maladie, puis en dispense d'activité dans l'attente de son licenciement ; qu'en relevant d'office ce moyen sans inviter préalablement les parties à présenter leurs observations, la cour d'appel a violé l'article 16 du code de procédure civile.

2° ALORS QUE l'inexécution du préavis, notamment en cas de dispense par l'employeur, n'entraîne aucune diminution des salaires et avantages que le salarié aurait perçus s'il avait accompli son travail jusqu'à l'expiration du préavis, indemnité de congés payés comprise ; qu'en statuant comme elle l'a fait, sans rechercher, ainsi qu'elle y était invitée, si la salariée avait été dispensée d'exécuter le préavis, ce dont résultait qu'elle était fondée à obtenir le paiement d'un rappel de salaire au titre des heures supplémentaires et les congés payés afférents, la cour d'appel a entaché sa décision d'un défaut de base légale au regard de l'article L1234-5 du code du travail.

TROISIEME MOYEN DE CASSATION :

Le moyen reproche à l'arrêt attaqué d'AVOIR réformé le jugement en ce qu'il a condamné la société à payer à la salariée la somme de 14 188,82 euros à titre de rappel de primes de fin d'année et de bilan, outre les congés payés y afférents.

SANS MOTIF.

ALORS QUE les dispositions de l'arrêt cassé, non atteintes par la cassation, ont acquis l'autorité de la chose jugée ; qu'en réformant le jugement en ce qu'il a condamné la société à payer à la salariée la somme de 14 188,82 euros à titre de rappel de primes de fin d'année et de bilan, outre les congés payés y afférents, quand ce chef du dispositif, confirmé par la cour d'appel dans son arrêt du 23 avril 2013, n'a pas été atteint par la cassation, la cour d'appel, statuant sur renvoi, a violé les articles 638 du code de procédure civile et 1351 du code civil (devenu l'article 1355).

QUATRIEME MOYEN DE CASSATION :

Le moyen reproche à l'arrêt attaqué d'AVOIR déclaré irrecevable comme prescrite la demande de rappel de primes de fin d'année pour la période antérieure au 14 novembre 2007 et d'AVOIR limité à 5 597,48 euros la somme allouée à titre de rappel de primes pour les années 2008, 2009 et 2010, outre les congés payés.

AUX MOTIFS QUE l'avenant au contrat de travail signé entre les parties le 1er août 2010 prévoit le versement d'une prime de fin d'année de 50% d'un salaire moyen perçu au cours de l'année civile ; s'agissant d'une demande liée aux heures supplémentaires, elle se heurte à la prescription quinquennale pour la période antérieure au 14.11.2007 ; que le rappel moyen d'heures supplémentaires, s'établit comme suit du 14.11.2007 jusqu'à la mi-avril 2010 : 2007 : 213,70 euros ; 2008 : 4639,21 euros ; 2009 : 5.895,82 euros ; 2010 : 446,24 euros, soit un total de 11.194,97 euros ; la SAS NDBM2 sera donc condamnée à lui payer un rappel de prime de 5.597,48 euros (11.194,97 X 50%) bruts outre une somme de 559,74 euros bruts au titre des congés payés y afférents .

1° ALORS QUE la cassation à intervenir sur le premier moyen de cassation emportera censure de l'arrêt en ce qu'il a déclaré irrecevable comme prescrite la demande de rappel de primes de fin d'année pour la période antérieure au 14 novembre 2007 et ce, en application de l'article 624 du code de procédure civile.

2° ALORS QUE la cassation à intervenir sur le deuxième moyen emportera censure de l'arrêt en ce qu'il a calculé les primes sans prendre en considération les heures supplémentaires pour la période de mai à août 2010 et ce, en application de l'article 624 du code de procédure civile.


Synthèse
Formation : Chambre sociale
Numéro d'arrêt : 18-11700
Date de la décision : 18/09/2019
Sens de l'arrêt : Cassation partielle partiellement sans renvoi
Type d'affaire : Sociale

Références :

Décision attaquée : Cour d'appel de Paris, 23 novembre 2017


Publications
Proposition de citation : Cass. Soc., 18 sep. 2019, pourvoi n°18-11700


Composition du Tribunal
Président : M. Schamber (conseiller doyen faisant fonction de président)
Avocat(s) : SCP Baraduc, Duhamel et Rameix, SCP Thouvenin, Coudray et Grévy

Origine de la décision
Date de l'import : 15/09/2022
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CCASS:2019:18.11700
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