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18/09/2019 | FRANCE | N°17-26586

France | France, Cour de cassation, Chambre commerciale, 18 septembre 2019, 17-26586


LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE COMMERCIALE, a rendu l'arrêt suivant :

Attendu, selon le jugement attaqué, rendu en dernier ressort, que Mme U... a assigné l'établissement public de coopération intercommunale de la Communauté de Communes du Pays de Montsalvy (l'EPCI) pour être exonérée de la redevance d'enlèvement des ordures ménagères pour les années 2010 à 2015 et remboursée des sommes qu'elle a payées au titre des années 2010 et 2011 ;

Sur le premier moyen :

Attendu qu'il n'y a pas lieu de statuer par une décision spécialement motivée sur ce moyen, qu

i n'est manifestement pas de nature à entraîner la cassation ;

Mais sur le second mo...

LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE COMMERCIALE, a rendu l'arrêt suivant :

Attendu, selon le jugement attaqué, rendu en dernier ressort, que Mme U... a assigné l'établissement public de coopération intercommunale de la Communauté de Communes du Pays de Montsalvy (l'EPCI) pour être exonérée de la redevance d'enlèvement des ordures ménagères pour les années 2010 à 2015 et remboursée des sommes qu'elle a payées au titre des années 2010 et 2011 ;

Sur le premier moyen :

Attendu qu'il n'y a pas lieu de statuer par une décision spécialement motivée sur ce moyen, qui n'est manifestement pas de nature à entraîner la cassation ;

Mais sur le second moyen, pris en sa deuxième branche :

Vu l'article L. 2333-76 du code général des collectivités territoriales ;

Attendu que pour dire que Mme U... n'était pas tenue au paiement de la redevance d'enlèvement des ordures ménagères, le jugement, après avoir énoncé qu'il résulte de l'article L. 2333–76 du code général des collectivités territoriales que cette redevance, calculée en fonction du service rendu, comporte nécessairement, en contrepartie de son paiement, une prestation effective de la part de la collectivité qui l'institue, consistant en la collecte et l'élimination des déchets ménagers, retient que c'est à la collectivité qu'il incombe de rapporter la preuve que celui auprès de qui elle entend en percevoir le montant peut effectivement bénéficier de ce service et que ce n'est qu'à cette condition qu'il appartient à celui qui conteste être redevable de la redevance d'établir, soit qu'il ne produit pas de déchets, soit qu'il procède à leur évacuation et leur élimination selon des méthodes conformes à la réglementation applicable ; que, relevant qu'en l'espèce, l'EPCI ne procédait pas au ramassage des déchets ménagers sur la propriété de Mme U... et que le container permettant leur collecte était situé à deux kilomètres de sa résidence, le jugement en déduit que le service public de collecte des ordures ménagères, qui s'entend de leur collecte et de leur élimination, et non de cette seule élimination, n'était pas fourni à Mme U... ;

Qu'en statuant ainsi, alors que le service de collecte des ordures ménagères n'implique pas un ramassage de porte à porte, le juge de proximité a violé le texte susvisé ;

PAR CES MOTIFS, et sans qu'il y ait lieu de statuer sur les autres griefs :

CASSE ET ANNULE, en toutes ses dispositions, le jugement rendu le 1er juin 2017, entre les parties, par la juridiction de proximité d'Aurillac ; remet, en conséquence, la cause et les parties dans l'état où elles se trouvaient avant ledit jugement et, pour être fait droit, les renvoie devant le tribunal d'instance de Saint-Flour ;

Condamne Mme U... aux dépens ;

Vu l'article 700 du code de procédure civile, rejette la demande ;

Dit que sur les diligences du procureur général près la Cour de cassation, le présent arrêt sera transmis pour être transcrit en marge ou à la suite du jugement cassé ;

Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, chambre commerciale, financière et économique, prononcé en l'audience publique du dix-huit septembre deux mille dix-neuf et signé par M. Guérin, conseiller qui en a délibéré, en remplacement de Mme ORSINI.

MOYENS ANNEXES au présent arrêt :

Moyens produits par la SCP Lyon-Caen et Thiriez, avocat aux Conseils, pour la Communauté de Communes du Pays de Montsalvy

PREMIER MOYEN DE CASSATION :

Le moyen fait grief au jugement attaqué d'AVOIR rejeté les fins de non-recevoir tirées de la prescription et d'AVOIR déclaré Madame F... U... recevable en ses demandes ;

AUX MOTIFS QUE, aux termes du jugement attaqué, « selon les dispositions de l'article L. 1617-5 2° du code général des collectivités territoriales "l'action dont dispose le débiteur d'une créance assise et liquidée par une collectivité territoriale ou un établissement public local pour contester directement devant la juridiction compétente le bien-fondé de ladite créance se prescrit dans le délai de deux mois suivant la réception du titre exécutoire ou, à défaut, du premier acte procédant de ce titre ou de la notification d'un acte de poursuite" ;
Encore faut-il que le délai et les voies de recours soient mentionnés sur le titre exécutoire ou la notification de l'acte de poursuite ; et il incombe à la collectivité territoriale ou à l'établissement public local de rapporter la preuve de la date de réception des titres par l'intéressé ;
En l'espèce, il n'est produit, par la Communauté de Communes du Pays de Montsalvy aucune pièce à l'exception d'une délibération du 19 mai 2014 déléguant compétence à son Président relativement aux actions en justice et d'un extrait d'une délibération du 12 avril 2010 fixant les tarifs des "redevances ordures ménagères" pour 2010 ;
Il ressort des pièces jointes par Madame U... à sa déclaration au greffe que les factures émises pour les années 2013 et 2014 ne comportent aucune mention relative aux délais et voies de recours et que seule la facture pour l'année 2012 comporte une mention ainsi libellée : "dans le délai de 2 mois suivant la notification de l'acte Avis des sommes à payer (article L. 1617-5 du code général des collectivités territoriales) vous pouvez contester la somme mentionnée en saisissant directement le tribunal judiciaire ou le tribunal administratif compétent selon la nature de la créance", dont l'imprécision notamment quant à la juridiction pouvant être saisie n'est pas de nature à assurer l'effectivité de la faculté légale de contestation ;
Il n'est justifié par la Communauté de Communes de la date de notification d'aucun de ces titres ;
S'agissant de la notification d'opposition à tiers détenteur, relative aux titres émis pour les années 2012, 2013 et 2014, il n'est pas davantage justifié de ce qu'elle comporte les mentions relatives aux délais et voies de recours ou de la date de sa notification ;

Dès lors, la fin de non-recevoir tirée de la prescription ne saurait prospérer ;
Madame U... sera déclarée recevable » ;

ALORS QUE le juge a l'obligation de ne pas dénaturer les documents de la cause ; que l'opposition à tiers détenteur notifiée à Madame U... et visant les redevances de 2012, 2013 et 2014 précisait que « toute contestation relative au présent acte doit être formulée dans les conditions fixées par l'article L. 1617-5-1° et 2° du code général des collectivités territoriales » (opposition à tiers détenteur du 25/02/2015 ; cf. prod.) ; que cette opposition est datée du 25 février 2015 ; qu'en décidant pourtant que, « s'agissant de la notification d'opposition à tiers détenteur, relative aux titres émis pour les années 2012, 2013 et 2014, il n'est pas [
] justifié de ce qu'elle comporte les mentions relatives aux délais et voies de recours ou de la date de sa notification » (jugement, p. 5, § 2), le tribunal a dénaturé les termes clairs et précis de l'opposition à tiers détenteur notifiée à Madame U... le 25 février 2015.

SECOND MOYEN DE CASSATION :

Le moyen fait grief au jugement attaqué d'AVOIR dit que Madame F... U... n'est pas redevable de la redevance d'enlèvement des ordures ménagères instituée par la Communauté de Communes du Pays de Montsalvy pour les années 2010, 2011, 2012, 2013 et 2014 et d'AVOIR condamné l'Établissement Public de Coopération Intercommunale Communauté de Communes du Pays de Montsalvy à payer à Madame F... U... la somme de 320 euros, avec intérêts au taux légal à compter du 31 août 2016, à titre de remboursement des sommes indûment perçues au titre de la redevance d'enlèvement des ordures ménagères pour les années 2010 à 2014 incluses ;

AUX MOTIFS QUE, aux termes du jugement attaqué, « selon l'article L. 2333-76 du code général des collectivités territoriales, la redevance d'enlèvement des ordures ménagères est calculée en fonction du service rendu à la condition que soit au moins assurée la collecte des déchets ménagers ;
Il en résulte qu'elle comporte nécessairement en contrepartie de son paiement une prestation effective de la part de la collectivité qui l'institue ;
Elle n'est donc pas due lorsque le service n'est pas fourni et contrairement à ce que soutient la Communauté de Communes du Pays de Montsalvy il lui incombe, par application de l'article 1315 du code civil, de rapporter la preuve que celui à qui elle facture ce service peut effectivement en bénéficier, ainsi que l'a jugé la Haute Juridiction (Cass. 3ème civ. 19 mai 2016 n° 15-12.409) ;
Ce n'est qu'à cette condition qu'il incombe à celui qui conteste être redevable de rapporter la preuve soit qu'il ne produit pas de déchets soit qu'il procède à leur évacuation et élimination selon des méthodes conformes à la réglementation applicable en la matière ;
En l'espèce, il est constant que l'EPCI de la Communauté de Communes du Pays de Montsalvy ne procède pas au ramassage des déchets ménagers sur la propriété de Madame U... et il n'est pas contesté que le point de collecte existant est situé à deux kilomètres de sa résidence ;
Ainsi en l'absence de ramassage de porte à porte et compte tenu de l'éloignement du point de collecte, il ne peut être considéré que le service public de collecte des ordures ménagères est fourni à Madame U... ;
Dans ces conditions, il y a lieu de dire que Madame U... n'est pas redevable des redevances d'enlèvement des ordures ménagères pour les années 2010 à 2014, étant observé que sa demande relative à l'année 2015 est sans objet puisqu'elle n'est plus inscrite au rôle de ladite redevance depuis 2015 ;
La Communauté de Communes du Pays de Montsalvy sera condamnée à lui payer la somme de 320 euros à titre de remboursement des redevances indûment perçues ;
Il n'est pas justifié par Madame U... d'un préjudice distinct de celui résultant du paiement d'une partie des redevances contestées, déjà réparé par l'application du taux d'intérêts légal à compter de la date de saisine de la présente juridiction ;
Il ne sera pas fait droit à la demande de dommages et intérêts » ;

ALORS en premier lieu QU'il appartient au redevable de la redevance d'apporter la preuve qu'il n'utilise pas les services rendus par la commune ; qu'en décidant pourtant que la redevance « n'est donc pas due lorsque le service n'est pas fourni et contrairement à ce que soutient la Communauté de Communes du Pays de Montsalvy il lui incombe, par application de l'article 1315 du code civil, de rapporter la preuve que celui à qui elle facture ce service peut effectivement en bénéficier » (jugement, p. 5, § 7), le tribunal a violé l'article L. 2333-76 du Code général des collectivités territoriales, ensemble l'article 1315 du Code civil dans sa version alors applicable ;

ALORS en deuxième lieu QUE, subsidiairement, les communes, les établissements publics de coopération intercommunale et les syndicats mixtes qui bénéficient de la compétence prévue à l'article L. 2224-13 peuvent instituer une redevance d'enlèvement des ordures ménagères calculée en fonction du service rendu dès lors qu'ils assurent au moins la collecte des déchets des ménages ; que la mise à disposition, à proximité du domicile de l'utilisateur, d'un conteneur lui permet de bénéficier de la collecte de ses déchets, ce dont il résulte que celle-ci suffit à justifier la perception d'une redevance au titre de l'enlèvement des ordures ménagères, peu important que l'utilisateur fasse le choix de ne pas s'en servir pour des raisons personnelles ; qu'en décidant pourtant qu'il « est constant que l'EPCI de la Communauté de Communes du Pays de Montsalvy ne procède pas au ramassage des déchets ménagers sur la propriété de Madame U... et il n'est pas contesté que le point de collecte existant est situé à deux kilomètres de sa résidence », pour en déduire qu'en « l'absence de ramassage de porte à porte et compte tenu de l'éloignement du point de collecte, il ne peut être considéré que le service public de collecte des ordures ménagères est fourni à Madame U... » (jugement, p. 5, pénultième et dernier §), la cour d'appel a violé l'article L. 2333-76 du Code général des collectivités territoriales ;

ALORS en troisième lieu QUE, en tout état de cause, une personne ne peut être dispensée du paiement de la redevance d'enlèvement des ordures ménagères que si elle établit qu'elle n'utilise aucun des services rendus par la collectivité publique et qu'elle évacue et élimine ses déchets conformément à l'article L. 541-2 du Code de l'environnement ; qu'en l'espèce, si Madame U... n'est pas en mesure de prouver qu'elle élimine elle-même ses déchets et que cette élimination se fait dans des conditions conformes aux dispositions de l'article L. 541-2 du Code de l'environnement, il en découle qu'elle devra nécessairement utiliser le service de points d'apports volontaires mis en place par la Communauté de Communes ; qu'en décidant simplement qu'il « est constant que l'EPCI de la Communauté de Communes du Pays de Montsalvy ne procède pas au ramassage des déchets ménagers sur la propriété de Madame U... et il n'est pas contesté que le point de collecte existant est situé à deux kilomètres de sa résidence », pour en déduire qu'en « l'absence de ramassage de porte à porte et compte tenu de l'éloignement du point de collecte, il ne peut être considéré que le service public de collecte des ordures ménagères est fourni à Madame U... » (jugement, p. 5, pénultième et dernier §), sans rechercher, comme il y avait été invité, si Madame U... éliminait elle-même ses déchets et si cette élimination se faisait dans des conditions conformes aux dispositions de l'article L. 541-2 du Code de l'environnement, le tribunal a privé sa décision de base légale au regard dudit article L. 541-2 du Code de l'environnement ;


Sens de l'arrêt : Cassation
Type d'affaire : Commerciale

Références :

Décision attaquée : Juridiction de proximité, 01 juin 2017


Publications
Proposition de citation: Cass. Com., 18 sep. 2019, pourvoi n°17-26586

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Composition du Tribunal
Président : Mme Orsini (conseiller doyen faisant fonction de président)
Avocat(s) : SCP Lyon-Caen et Thiriez

Origine de la décision
Formation : Chambre commerciale
Date de la décision : 18/09/2019
Date de l'import : 15/09/2022

Fonds documentaire ?: Legifrance


Numérotation
Numéro d'arrêt : 17-26586
Numéro NOR : JURITEXT000039157113 ?
Numéro d'affaire : 17-26586
Numéro de décision : 41900626
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.cassation;arret;2019-09-18;17.26586 ?
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