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07/08/2019 | FRANCE | N°19-83502

France | France, Cour de cassation, Chambre criminelle, 07 août 2019, 19-83502


LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE CRIMINELLE, a rendu l'arrêt suivant :

Statuant sur le pourvoi formé par :

- Mme I... U...,

contre l'arrêt de la chambre de l'instruction de la cour d'appel de COLMAR, en date du 25 avril 2019, qui, dans la procédure suivie contre elle du chef de coups mortels aggravés, a rejeté sa demande de mainlevée partielle du contrôle judiciaire ;

Vu le mémoire produit ;

Sur le moyen unique de cassation, pris de la violation des articles 137, 138, 139, 140, 181, 591 et 593 du code de procédure pénale, 8 de la Convention des droit

s de l'Homme, défaut de motifs, manque de base légale ;

en ce que l'arrêt attaqué a rej...

LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE CRIMINELLE, a rendu l'arrêt suivant :

Statuant sur le pourvoi formé par :

- Mme I... U...,

contre l'arrêt de la chambre de l'instruction de la cour d'appel de COLMAR, en date du 25 avril 2019, qui, dans la procédure suivie contre elle du chef de coups mortels aggravés, a rejeté sa demande de mainlevée partielle du contrôle judiciaire ;

Vu le mémoire produit ;

Sur le moyen unique de cassation, pris de la violation des articles 137, 138, 139, 140, 181, 591 et 593 du code de procédure pénale, 8 de la Convention des droits de l'Homme, défaut de motifs, manque de base légale ;

en ce que l'arrêt attaqué a rejeté la requête de Mme U... en mainlevée de son contrôle judiciaire ;

1°) alors que toute personne mise en examen, présumée innocente, demeurant libre, la chambre de l'instruction doit motiver sa décision sur le contrôle judiciaire en fonction des contestations émises ; qu'à défaut d'avoir recherché, comme elle y était invitée, si la divergence des versions entre Mme U... et son concubin ne provenait pas de l'« interrogatoire musclé » auquel ce dernier avait été soumis, ainsi que la chambre de l'instruction l'avait elle-même constaté dans son arrêt du 12 avril 2018, la chambre de l'instruction a entaché sa décision d'un défaut de réponse à une articulation essentielle de la requête en modification du contrôle judiciaire ;

2°) alors que l'absence de tout contact de la personne placée sous contrôle judiciaire avec son concubin et père de ses enfants porte, dans certaines circonstances, une atteinte disproportionnée au droit au respect de la vie privée et familiale ; qu'en rejetant la demande de Mme U... en mainlevée de l'interdiction d'entrer en contact avec son concubin, M. G..., après avoir constaté que les faits, déjà anciens, remontaient au mois d'avril 2013, que l'ordonnance de mise en accusation datait du 7 novembre 2018, qu'un supplément d'information avait été ordonné le 2 avril 2019 et que la date de l'audience devant la cour d'assises n'était toujours pas fixée, autant d'éléments démontrant le caractère manifestement disproportionné de la mesure d'interdiction prise contre Mme U..., la chambre de l'instruction a privé sa décision de base légale ;

3°) alors que les arrêts de la chambre de l'instruction sont nuls lorsqu'ils ont omis de se prononcer sur une ou plusieurs demandes des parties ; qu'en omettant purement et simplement de se prononcer sur les demandes de Mme U... tendant à voir ordonner la mainlevée de son interdiction de sortir du territoire français, de se présenter deux fois par mois au commissariat de police, de répondre aux convocations de diverses autorités, autant d'obligations que l'ancienneté des faits poursuivis ne justifiait plus, la chambre de l'instruction a violé l'article 593 du code de procédure pénale" ;

Vu l'article 593 du code de procédure pénale ;

Attendu que tout arrêt de la chambre de l'instruction doit comporter les motifs propres à justifier la décision et répondre aux articulations essentielles des mémoires des parties ; que l'insuffisance ou la contradiction des motifs équivaut à leur absence ;

Attendu qu'il résulte de l'arrêt attaqué et des pièces de la procédure, qu'alors qu'elle était à la garde de Mme I... U..., assistante maternelle agréée, l'enfant L..., âgée de 6 mois, est décédée le [...] des suites de violences ; que Mme U... et son concubin M. V... G... ont été placés en garde à vue puis mis en examen ; que M. G... ayant en définitive été considéré comme témoin, Mme U... a seule fait l'objet d'une ordonnance de mise en accusation devant la cour d'assises du Haut-Rhin pour coups mortels sur mineur par personne ayant autorité ; qu'après une période de détention provisoire du 26 mars au 30 avril 2018, Mme U... a été placée sous contrôle judiciaire, avec diverses obligations dont celles de ne pas entrer en contact avec M. G..., de se présenter à la police deux fois par mois et de ne pas sortir de France ; que Mme U... a saisi la chambre de l'instruction d'une demande de mainlevée pure et simple de ces trois obligations ;

Attendu que, pour rejeter cette requête de ses trois chefs, l'arrêt attaqué énonce que la position du couple par rapport aux faits a beaucoup évolué en cours d'instruction et sensiblement depuis le mois de mars 2018 ; qu'ainsi M. G... est passé du statut de personne mise en examen à celui de simple témoin, appelé à déposer devant la cour d'assises du Haut-Rhin ; que les juges ajoutent que dans la perspective de cette audience et compte tenu du caractère oral de la procédure, il apparaît que seule l'interdiction de contact entre Mme U... et M. G... permet de s'assurer de l'absence de pression consciente ou inconsciente que l'accusée pourrait exercer vis à vis d'un témoin essentiel ;

Mais attendu qu'en se déterminant ainsi, sans répondre aux conclusions de Mme U... relatives à l'interdiction de sortie du territoire et à l'obligation de présentation régulière à la police, la chambre de l'instruction, si elle a répondu aux articulations essentielles de la requête dont elle était saisie au regard de la nécessité et de la proportionnalité de la mesure d'interdiction des contacts entre l'accusée et le témoin, n'a pas justifié le surplus de sa décision ;

D'où il suit que la cassation est encourue de ce chef ;

Par ces motifs :

CASSE et ANNULE en toutes ses dispositions l'arrêt susvisé de la chambre de l'instruction de la cour d'appel de Colmar, en date du 25 avril 2019, et pour qu'il soit à nouveau jugé conformément à la loi,

RENVOIE la cause et les parties devant la chambre de l'instruction de la cour d'appel de Nancy, à ce désignée par délibération spéciale prise en chambre du conseil ;

ORDONNE l'impression du présent arrêt, sa transcription sur les registres du greffe de la chambre de l'instruction de la cour d'appel de Colmar et sa mention en marge ou à la suite de l'arrêt annulé ;

Ainsi jugé et prononcé par la Cour de cassation, chambre criminelle, en son audience publique, les jour, mois et an que dessus ;

Etaient présents aux débats et au délibéré, dans la formation prévue à l'article 567-1-1 du code de procédure pénale : M. Soulard, président, M. Fossier, conseiller rapporteur, Mme de la Lance, conseiller de la chambre ;

Greffier de chambre : M. Bétron ;

En foi de quoi le présent arrêt a été signé par le président, le rapporteur et le greffier de chambre.


Synthèse
Formation : Chambre criminelle
Numéro d'arrêt : 19-83502
Date de la décision : 07/08/2019
Sens de l'arrêt : Cassation
Type d'affaire : Criminelle

Références :

Décision attaquée : Chambre de l'instruction de la cour d'appel de Colmar, 25 avril 2019


Publications
Proposition de citation : Cass. Crim., 07 aoû. 2019, pourvoi n°19-83502


Composition du Tribunal
Président : M. Soulard (président)
Avocat(s) : SCP Rousseau et Tapie

Origine de la décision
Date de l'import : 15/09/2022
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CCASS:2019:19.83502
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