LA COUR DE CASSATION, TROISIÈME CHAMBRE CIVILE, a rendu l'arrêt suivant :
Attendu, selon l'arrêt attaqué (Lyon, 16 janvier 2018), que la société Véolia eau - Compagnie générale des eaux (la société Véolia) a, sous la maîtrise d'oeuvre complète de M. F..., entrepris la réfection d'une agence en procédant au remplacement de la vêture des façades, composée de plaques en amiante-ciment ; que la fourniture et la pose des bardages, composés de matériaux fabriqués par la société Prodema, ont été confiées à la société Smac ; que les travaux ont été réceptionnés le 17 janvier 2003, avec des réserves portant notamment sur des taches ayant pénétré de manière irréversible les panneaux ; que la société Veolia a, après expertise, assigné la société Smac, M. F... et la société Prodema en indemnisation de ses préjudices ;
Sur le second moyen du pourvoi principal, ci-après annexé :
Attendu que la société Smac fait grief à l'arrêt de mettre hors hors de cause la société Prodema et de la condamner à verser diverses sommes à la société Veolia ;
Mais attendu qu'ayant retenu que l'expert relevait que les non-conformités de la pose des panneaux étaient de nature à réduire la libre circulation de l'air nécessaire sur la face cachée des panneaux et favorisaient la migration de l'humidité à l'intérieur de la lame de bois et qu'aucune des constatations mentionnées dans son rapport ne permettait d'étayer l'affirmation selon laquelle les non-conformités de la pose, pourtant établies, étaient sans incidence, alors même que la circulation de l'air, pourtant impérative, n'était pas assurée, la cour d'appel a pu en déduire que la non-conformité de la pose aux préconisations du fabricant et à l'avis technique du CSTB était à l'origine des désordres constatés ;
D'où il suit que le moyen n'est pas fondé ;
Mais sur le premier moyen du pourvoi principal :
Vu les article 473 et 478 du code de procédure civile ;
Attendu que, pour déclarer le jugement non avenu à l'encontre de M. F... et déclarer irrecevables les demandes formées contre lui, l'arrêt retient que le jugement rendu, alors que M. F... n'avait pas constitué avocat, était réputé contradictoire du seul fait qu'il était susceptible d'appel et qu'il n'était pas contesté qu'il n'avait pas été signifié dans le délai de six mois à compter de sa date ;
Qu'en statuant ainsi, alors que le jugement rendu le 22 janvier 2015 par le tribunal de grande instance de Villefranche-sur-Saône alors que M. F... n'était pas comparant, était réputé contradictoire dès lors qu'il était susceptible d'appel et qu'en outre M. F... avait été régulièrement cité à personne, la cour d'appel a violé les textes susvisés ;
PAR CES MOTIFS, et sans qu'il y ait lieu de statuer sur le moyen unique du pourvoi provoqué qui n'est qu'éventuel :
CASSE ET ANNULE, mais seulement en ce qu'il déclare le jugement non avenu à l'encontre de M. T... F... et déclare irrecevables les demandes formées à son encontre devant la cour, l'arrêt rendu le 16 janvier 2018, entre les parties, par la cour d'appel de Lyon ; remet, en conséquence, sur ce point, la cause et les parties dans l'état où elles se trouvaient avant ledit arrêt et, pour être fait droit, les renvoie devant la cour d'appel de Lyon, autrement composée ;
Condamne la société Smac aux dépens des pourvois ;
Vu l'article 700 du code de procédure civile, rejette les demandes ;
Dit que sur les diligences du procureur général près la Cour de cassation, le présent arrêt sera transmis pour être transcrit en marge ou à la suite de l'arrêt partiellement cassé ;
Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, troisième chambre civile, et prononcé par le président en son audience publique du onze juillet deux mille dix-neuf.
Le conseiller rapporteur le president
Le greffier de chambre
MOYENS ANNEXES au présent arrêt :
Moyens produits au pourvoi principal par Me Le Prado, avocat aux Conseils, pour la société Smac
PREMIER MOYEN DE CASSATION :
Le moyen reproche à l'arrêt attaqué, D'AVOIR déclaré le jugement non avenu à l'encontre de M. T... F... et d'AVOIR déclaré irrecevables les demandes formées à son encontre devant la cour d'appel ;
AUX MOTIFS QUE « Monsieur T... F... soulève la caducité du jugement déféré en application de l'article 478 du code de procédure civile qui dispose : « Le jugement rendu par défaut ou le jugement réputé contradictoire au seul motif qu'il est susceptible d'appel est non avenu s'il n'a pas été notifié dans les six mois de sa date. La procédure peut être reprise après réitération de la citation primitive. » ; que le jugement déféré rendu alors que monsieur F... n'avait pas constitué avocat est réputé contradictoire du seul fait qu'il est susceptible d'appel et il n'est pas contesté qu'il n'a pas été signifié dans le délai susvisé ; que si un appel au fond avant l'expiration du délai de six mois rend sans application l'article 478 du code de procédure civile, en application de l'effet dévolutif de l'appel, c'est à la condition que cet appel émane de la partie non comparante, dont le recours emporte alors renonciation à se prévaloir des dispositions dudit article ; qu'en l'espèce, le jugement rendu le 22 janvier 2015 a été frappé d'appel le 07 avril 2015 par la société PRODEMA et monsieur T... F... a conclu in limine litis à la caducité du jugement ; que son exception de procédure doit être accueillie et il y a lieu de constater la caducité du jugement rendu à l'encontre de monsieur F..., de le déclarer non avenu, la procédure pouvant être reprise après réitération de la citation primitive ; qu'il en résulte que les demandes formées à l'encontre de monsieur F... devant la cour sont irrecevables » ;
1) ALORS QUE seul est non avenu parce qu'il n'a pas été notifié dans les six mois de sa date, le jugement réputé contradictoire au seul motif qu'il est susceptible d'appel ; qu'en l'espèce, le jugement du 22 janvier 2015 du tribunal de grande instance de Villefranche-sur-Saône rendu alors que M. T... F... n'était pas comparant, était réputé contradictoire au motif non seulement qu'il était susceptible d'appel, mais encore que M. T... F... avait été régulièrement cité à personne ; qu'en déduisant de ce que ce jugement n'avait pas été signifié à M. T... F... dans les six mois de sa date, qu'il était caduc, de sorte que les demandes formées à son encontre étaient irrecevables, la cour d'appel a violé les articles 473 et 478 du code de procédure civile.
2) ALORS, EN TOUTE HYPOTHESE, QUE le juge ne peut dénaturer les écrits qui lui sont soumis ; que le jugement du 22 janvier 2015 du tribunal de grande instance de Villefranche-sur-Saône mentionnait que « bien que régulièrement cité à personne, T... F... n'a pas constitué avocat » (cf. prod. n° 1) ; qu'en énonçant que ce jugement était réputé contradictoire du seul fait qu'il était susceptible d'appel, la cour d'appel a dénaturé ses termes clairs et précis en violation du principe selon lequel le juge ne peut dénaturer les écrits qui lui sont soumis, ensemble de l'article 4 du code de procédure civile.
SECOND MOYEN DE CASSATION :
Le moyen reproche à l'arrêt attaqué, D'AVOIR mis hors de cause la société Prodema et d'AVOIR condamné la société SMAC à verser à la société Veolia eau - Compagnie générale des eaux les sommes de 95 000 euros HT au titre de la remise en état des façades, 19 000 euros à titre de dommages et intérêts pour l'atteinte portée à son image, 2 000 euros au titre du temps consacré par son personnel à la gestion de ce contentieux ;
AUX MOTIFS QUE « la réception des travaux exécutés par la société SMAC ACIEROÏD EUROFACADE est intervenue suivant procès-verbal du 17 janvier 2003, avec des réserves portant notamment sur des tâches ayant pénétré de manière irréversible les panneaux PRODEMA BAK ; que ces dégradations se sont étendues et l'expert a constaté que les panneaux exposés aux intempéries étaient tachés et noircis, le veinage du bois prenant une teinte sépia à brune ; qu'il a relevé que les dégradations qui affectent l'ensemble des façades sont particulièrement étendues sur les façades sud et ouest et précise que dans les parties abritées, les panneaux bien que conservant leur couleur originelle présentent également des veinages sépia se diffusant depuis les bords ainsi qu'autour des vis de fixation ; que ces modifications ne peuvent s'analyser comme des évolutions de la teinte des panneaux prévue par le fabricant ; qu'ils constituent des désordres affectant gravement l'aspect extérieur de la façade du bâtiment occupé par la société VEOLIA ; que l'expert a conclu que « la cause des désordres est la mise en oeuvre d'un produit inadapté à son usage » et le premier juge a « constaté l'inadéquation à un usage extérieur des panneaux de façade de marque PRODEMA » ; qu'il convient cependant de relever que les panneaux litigieux destinés selon le fabricant à revêtir des façades non protégées ont fait l'objet d'un avis technique du Centre Scientifique et Technique du Bâtiment (CSTB) qui valide leur utilisation pour réaliser un bardage et revêtir ainsi des murs extérieurs ; que dans son avis circonstancié, le CSTB précise que les résultats d'essais de dégradations artificielles, la vérification du comportement satisfaisant des réalisations antérieures réalisées avec ce type de produit et la connaissance acquise sur les produits de cette famille en ce qui concerne la conservation de leur caractéristique mécanique permet d'envisager une durabilité supérieure à 15 ans ; que s'il note que l'aspect extérieur présentera une évolution perceptible dans un délai variable de 2 à 5 ans, il relève que ce changement d'aspect assimilable à celui d'un bois verni par son blanchiment n'en présente pas cependant l'écaillage habituellement constaté dans ce cas ; que l'utilisation du produit dans le domaine d'emploi préconisé par le fabricant a fait ainsi l'objet d'un avis favorable qui exclut de retenir comme cause du désordre le choix d'un produit inadapté à son usage ; qu'alors que le CSTB mentionne que les prescriptions de ventilation de la lame d'air devront être impérativement respectées, l'expert après dépose de deux panneaux en façade sud et nord, a examiné le système de pose, a relevé que la circulation de l'air n'était pas assurée au dos des panneaux ; que la société PRODEMA a adressé un dire sur la non-conformité de la pose des panneaux à l'avis technique 2/02-919 en raison de : - joints inexistants entre les panneaux et les bavettes basses et hautes, - panneaux en contact des sous-faces de coudières métalliques, - joint d'étanchéité entre panneaux en retour de tableaux d'ouverture et coudière, - joint d'étanchéité entre panneaux en retour de linteaux et panneau façade ; que l'expert relève expressément que ces non-conformités sont de nature à réduire la libre circulation de l'air nécessaire sur la face cachée des panneaux, et favorisent la migration de l'humidité à l'intérieur de la lame de bois ; que s'il ajoute qu'il a pu constater que les dégradations étaient les mêmes, quels que soient les modes de pose et en conclut que les défauts de mise en oeuvre imputables à la société SMAC n'ont pas d'incidence sur ces désordres, aucune des constatations mentionnés dans le rapport d'expertise ne permet de relever des systèmes de pose différents selon les façades et d'étayer l'affirmation selon laquelle les non-conformités de la pose, pourtant établies, sont sans incidence alors même que la circulation de l'air, pourtant impérative, n'est pas assurée ; que par ailleurs, alors que les panneaux mis en oeuvre sont adaptés à une pose extérieure pour réaliser un bardage, aucun des éléments fournis aux débats n'établit que le lot de panneaux litigieux était affecté d'un vice à l'origine des désordres ; qu'il en résulte que la non conformité de la pose aux préconisations du fabricant et à l'avis technique du CSTB est à l'origine des désordres constatés ; sur les responsabilités : que les désordres affectent des panneaux, dissociables de l'immeuble, destinés à assurer l'esthétique du bâtiment dont l'étanchéité à l'air et à l'eau n'est pas remise en cause par ces défauts d'aspect ; qu'en tout état de cause, ces désordres, même s'ils se sont aggravés postérieurement, étaient apparents pour le maître de l'ouvrage lors de la réception des travaux et ont fait l'objet de réserves précises et détaillées ; qu'ils ne relèvent ni de la garantie décennale ni de la garantie de bon fonctionnement prévue à l'article 1792-3 du code civil s'agissant d'éléments non destinés à fonctionner ; que s'ils relèvent de la garantie de parfait achèvement prévue à l'article 1792-6 du code civil, cette garantie n'exclut pas l'application de la responsabilité contractuelle de droit commun pour faute même si, comme en l'espèce, la mise en oeuvre de la responsabilité n'est pas intervenue dans le délai de la garantie ; que le fait que la responsabilité décennale ait été invoquée devant le premier juge par la société VEOLIA ne porte pas atteinte à la recevabilité de sa demande sur le fondement de la responsabilité contractuelle de droit commun ; qu'or, le non-respect des règles de l'art par la société SMAC ACIEROÏD EUROFACADE constitue un manquement de ses obligations contractuelles de nature à engager sa responsabilité contractuelle à l'encontre de la société VEOLIA EAU ; qu'il résulte de ce qui précède que la société PRODEMA doit être mise hors de cause ; que compte tenu de la caducité du jugement à l'encontre de monsieur F..., il n'appartient pas à la cour d'examiner la question de la responsabilité de ce dernier pour non respect de ses obligations contractuelles de suivi du chantier à l'encontre de la société VEOLIA ni celle de la garantie demandée de ce fait par la société SMAC ACIEROÏD EUROFACADE qui sera condamnée à réparer le préjudice subi par la société VEOLIA ; que le jugement sera donc infirmé sur ce point » ;
ALORS QUE seul le manquement de l'entrepreneur qui présente un lien de causalité avec le désordre est susceptible d'engager la responsabilité contractuelle de cet entrepreneur ; qu'en l'espèce, la cour d'appel, pour retenir que les désordres affectant les panneaux auraient eu pour cause une pose inadaptée par la société SMAC et exclure la conclusion inverse de l'expert, s'est fondée sur la considération que la constatation de cet expert selon laquelle les désordres présentaient un caractère identique quel que soit le mode de pose des panneaux, devait être écartée dès lors que son rapport ne permettait de relever des systèmes de pose différents ; qu'en statuant ainsi, la cour d'appel n'a pas caractérisé le lien de causalité entre ces désordres et la prestation de pose des panneaux effectuée par la société SMAC, en violation de l'article 1147 du code civil dans sa rédaction antérieure à l'entrée en vigueur de l'ordonnance du 10 février 2016.
Moyen produit au pourvoi provoqué éventuel par la SCP Matuchansky, Poupot et Valdelièvre, avocat aux Conseils, pour la société Prodema
À titre subsidiaire, si la cassation devait toutefois être prononcée sur le second moyen de cassation du pourvoi principal de la société Smac et que cette censure emportait anéantissement du chef de mise hors de cause de la société Prodema, l'exposante, qui avait elle-même formé des demandes à l'encontre de M. F..., que la cour d'appel a jugées irrecevables, entend s'associer aux critiques du premier moyen pour ce pourvoi éventuel.
Il est fait grief à l'arrêt d'avoir déclaré le jugement non avenu à l'encontre de M. T... F... et d'avoir déclaré irrecevables les demandes formées à son encontre devant la cour d'appel, Aux motifs que M. T... F... soulève la caducité du jugement déféré en application de l'article 478 du code de procédure civile qui dispose : « Le jugement rendu par défaut ou le jugement réputé contradictoire au seul motif qu'il est susceptible d'appel est non avenu s'il n'a pas été notifié dans les six mois de sa date. La procédure peut être reprise après réitération de la citation primitive » ; que le jugement déféré rendu alors que M. F... n'avait pas constitué avocat est réputé contradictoire du seul fait qu'il est susceptible d'appel et il n'est pas contesté qu'il n'a pas été signifié dans le délai susvisé ; que si un appel au fond avant l'expiration du délai de six mois rend sans application l'article 478 du code de procédure civile, en application de l'effet dévolutif de l'appel, c'est à la condition que cet appel émane de la partie non comparante, dont le recours emporte alors renonciation à se prévaloir des dispositions dudit article ; qu'en l'espèce, le jugement rendu le 22 janvier 2015 a été frappé d'appel le 07 avril 2015 par la société Prodema et M. F... a conclu in limine litis à la caducité du jugement ; que son exception de procédure doit être accueillie et il y a lieu de constater la caducité du jugement rendu à l'encontre de M. F..., de le déclarer non avenu, la procédure pouvant être reprise après réitération de la citation primitive ; qu'il en résulte que les demandes formées à l'encontre de M. F... devant la cour sont irrecevables,
1°) Alors que seul est non avenu parce qu'il n'a pas été notifié dans les six mois de sa date, le jugement réputé contradictoire au seul motif qu'il est susceptible d'appel ; qu'en l'espèce, le jugement du 22 janvier 2015 du tribunal de grande instance de Villefranche-sur-Saône rendu alors que M. F... n'était pas comparant, est réputé contradictoire, non seulement au motif qu'il était susceptible d'appel, mais également au motif que M. F... avait été régulièrement cité à personne ; qu'en déduisant de ce que ce jugement n'avait pas été signifié à M. F... dans les six mois de sa date, qu'il était caduc, de sorte que les demandes formées à son encontre étaient irrecevables, la cour d'appel a violé les articles 473 et 478 du code de procédure civile ;
2°) Alors que, en toute hypothèse, le juge ne peut dénaturer les écrits qui lui sont soumis ; que le jugement du 22 janvier 2015 du tribunal de grande instance de Villefranche-sur-Saône mentionnait que « bien que régulièrement cité à personne, T... F... n'a pas constitué avocat » (p. 4, avant-dernier §) ; qu'en énonçant que ce jugement était réputé contradictoire du seul fait qu'il était susceptible d'appel, la cour d'appel a ainsi dénaturé ses termes clairs et précis en violation du principe selon lequel le juge ne peut dénaturer les écrits qui lui sont soumis, ensemble de l'article 4 du code de procédure civile.