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11/07/2019 | FRANCE | N°18-13954

France | France, Cour de cassation, Chambre civile 1, 11 juillet 2019, 18-13954


LA COUR DE CASSATION, PREMIÈRE CHAMBRE CIVILE, a rendu l'arrêt suivant :

Attendu, selon l'arrêt attaqué (Paris, 23 janvier 2018), que M. C... et la société Macris ont conclu successivement avec la société ITM entreprises, un contrat d'adhésion aux fins d'exploiter un point de vente sous l'enseigne Intermarché, ainsi qu'un contrat d'enseigne et une convention dite Mag3 prévoyant le développement d'un nouveau concept de vente, financé par un budget d'accompagnement octroyé par la société ITM alimentaire ; que, M. C... et la société Macris ayant mis fin aux relations con

tractuelles, un différend les a opposés à la société ITM entreprises ; ...

LA COUR DE CASSATION, PREMIÈRE CHAMBRE CIVILE, a rendu l'arrêt suivant :

Attendu, selon l'arrêt attaqué (Paris, 23 janvier 2018), que M. C... et la société Macris ont conclu successivement avec la société ITM entreprises, un contrat d'adhésion aux fins d'exploiter un point de vente sous l'enseigne Intermarché, ainsi qu'un contrat d'enseigne et une convention dite Mag3 prévoyant le développement d'un nouveau concept de vente, financé par un budget d'accompagnement octroyé par la société ITM alimentaire ; que, M. C... et la société Macris ayant mis fin aux relations contractuelles, un différend les a opposés à la société ITM entreprises ; que, pour obtenir la réparation de leur préjudice, ils ont mis en oeuvre la convention d'arbitrage stipulée au contrat d'enseigne ; qu'un tribunal arbitral a rendu, le 19 mai 2016, une sentence rejetant leurs demandes d'indemnisation ;

Sur le moyen unique, pris en sa première branche, ci-après annexé :

Attendu qu'il n'y a pas lieu de statuer par une décision spécialement motivée sur ce grief qui n'est manifestement pas de nature à entraîner la cassation ;

Sur les trois autres branches du moyen :

Attendu que M. C... et la société Macris font grief à l'arrêt de rejeter leur recours en annulation de la sentence, alors, selon le moyen :

1°/ qu'en déduisant par ailleurs la prétendue prise en considération de l'équité par le tribunal arbitral, d'un motif de la sentence ainsi libellé : « surabondamment, et pour répondre au souci d'examen exhaustif de l'affaire, force est de constater que les demandes présentées par la société Macris et M. C... auraient été vouées à un rejet si l'application incontournable en droit comme en équité d'une règle d'ordre public ne les avaient rendues irrecevables », la cour d'appel, qui s'est satisfaite d'une référence purement formelle à l'équité, a violé l'article 1492 du code de procédure civile ;

2°/ qu'au soutien de leur recours en annulation de la sentence arbitrale, M. C... et la société Macris avaient fait valoir qu'en vertu de la loi et de la jurisprudence de la Cour de cassation, la prescription d'une action indemnitaire ne peut commencer de courir avant la manifestation du dommage dont réparation est demandée, qu'au cas particulier, le dommage dont ils demandaient réparation ne s'était pas manifesté avant leur condamnation, par un arrêt rendu le 22 novembre 2012 par la cour d'appel de Paris, à payer à la société ITM alimentaire France une somme supérieure à 7 000 000 euros du fait d'un prétendu manquement contractuel, que le délai de la prescription quinquennale applicable à leur action indemnitaire contre la société ITM entreprises, tendant à être couverts de cette condamnation judiciaire, ne pouvait donc courir avant la date mentionnée ci-dessus et qu'en conséquence la saisine des arbitres, effectuée par lettre en date du 18 décembre 2014, ne pouvait être regardée comme tardive, que ce soit en droit, dès lors qu'elle avait eu lieu moins de cinq ans après le point de départ du délai, ou que ce soit en équité, dès lors qu'elle avait eu lieu quelques mois à peine après le rejet par la Cour de cassation, le 18 février 2014, du pourvoi formé contre l'arrêt de condamnation rendu par la cour d'appel de Paris ; qu'en ne recherchant pas, comme elle y avait ainsi été invitée, si la prétendue prescription retenue par le tribunal arbitral n'était pas contraire à l'équité, comme ne prenant aucunement en considération la situation effective des demandeurs en indemnisation, lesquels n'avaient pu agir avant d'avoir subi la condamnation judiciaire qui constituait le dommage à réparer et avaient engagé la procédure arbitrale en indemnisation six mois à peine après le rejet du recours formé contre cette condamnation, la cour d'appel n'a pas légalement justifié sa décision au regard de l'article 1492 du code de procédure civile ;

3°/ que l'arbitre à qui il a été confié la mission de statuer comme amiable compositeur doit s'assurer de la conformité à l'équité de chacune des règles de droit en application de laquelle il se prononce ; que la cour d'appel a constaté que les arbitres, statuant comme amiables compositeurs, avaient jugé prescrite l'action de M. C... et de la société Macris en application de l'article 2224 du code civil par la considération que le délai de la prescription avait commencé de courir à leur encontre dès la conclusion du contrat invoqué au soutien de l'action, puisque les intéressés ne démontraient pas ne pas être immédiatement entrés en possession d'un exemplaire dudit contrat lors de sa signature ; qu'aux termes de l'arrêt, les arbitres avaient également relevé « qu'on peut légitimement présumer qu'une personne qui signe un contrat en a eu une connaissance effective » ; qu'il résultait ainsi des constatations de l'arrêt que les arbitres s'étaient prononcés en application d'une règle de droit, tenant à ce que le signataire d'un contrat est présumé en avoir une connaissance effective dès sa signature, règle de droit déterminante de l'entière solution retenue par la sentence puisque c'était cette règle qui avait conduit les arbitres à considérer que M. C... et la société Macris n'apportaient pas la preuve d'un fait nécessaire au succès de leurs prétentions, à savoir l'absence de détention par une partie du contrat après sa signature ; qu'en se bornant à dire que le tribunal arbitral aurait vérifié en équité les conséquences de sa décision relativement à la prescription de l'action, sans s'assurer spécifiquement que les arbitres avaient justifié la conformité à l'équité de la règle de droit prise de la présomption susmentionnée, dont ils avaient fait application, la cour d'appel a, de plus fort, violé l'article 1492 du code de procédure ;

Mais attendu que l'arrêt constate, d'abord, qu'après avoir rappelé que l'article 14 du contrat d'enseigne y habilite le tribunal arbitral, la sentence énonce, dans son dispositif, qu'il est statué en amiable composition ; qu'il relève, ensuite, que dans les motifs de leur décision, les arbitres indiquent que les demandes présentées par la société Macris et M. C... auraient été, en tout état de cause, vouées à un rejet si l'application incontournable en droit comme en équité d'une règle d'ordre public ne les avaient rendues irrecevables ; qu'il retient, enfin, que le tribunal arbitral a accueilli la fin de non-recevoir tirée de la prescription de l'action en écartant la vraisemblance des allégations de la société Macris et de son dirigeant qui prétendaient avoir été mis en possession d'un exemplaire du contrat Mag3, non pas lors de sa signature le 25 août 2008, mais seulement le 3 juin 2010, dès lors que des éléments de fait venaient contredire cette position et que M. C... était un dirigeant expérimenté, averti de la pratique des affaires qui veut que, lors de la signature d'un contrat, un exemplaire soit remis à chaque partie ; que, de ces constatations et énonciations, la cour d'appel a pu déduire que le tribunal arbitral avait pris en considération l'équité et s'était ainsi conformé à sa mission ; que le moyen ne peut être accueilli ;

PAR CES MOTIFS :

REJETTE le pourvoi ;

Condamne la société Macris et M. C... aux dépens ;

Vu l'article 700 du code de procédure civile, rejette leur demande et les condamne à payer à la société ITM entreprises la somme de 3 000 euros ;

Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, première chambre civile, prononcé par le président en son audience publique du onze juillet deux mille dix-neuf et signé par lui et par Mme Randouin, greffier de chambre, qui a assisté au prononcé de l'arrêt.

MOYEN ANNEXE au présent arrêt :

Moyen produit par la SCP Matuchansky, Poupot et Valdelièvre, avocat aux Conseils, pour M. C... et la société Macris

Le moyen reproche à l'arrêt attaqué D'AVOIR rejeté le recours en annulation de la sentence rendue à Paris entre les parties le 19 mai 2016 ;

AUX MOTIFS QUE la clause d'amiable composition était une renonciation conventionnelle aux effets et au bénéfice de la règle de droit, les parties perdant la prérogative d'en exiger la stricte application et les arbitres recevant corrélativement le pouvoir de modifier ou de modérer les conséquences des stipulations contractuelles dès lors que l'équité ou l'intérêt commun bien compris des parties l'exige ; que la société Macris et monsieur C... reprochaient au tribunal arbitral d'avoir jugé en droit, « sans égard pour l'équitable, le juste ni le légitime », la sentence procédant d'un syllogisme purement juridique excluant toute prise en compte de l'équité ; qu'ils avaient ainsi estimé que la prescription était incontournable, s'agissant « d'une règle d'ordre public » ; que si le respect par le tribunal arbitral de sa mission ne saurait se déduire des références formelles de la sentence à l'équité mais doit résulter de la motivation de la sentence elle-même, il convenait de relever, à la suite de ITM Entreprises, que les arbitres avaient rappelé à plusieurs reprises, dans la sentence, le cadre de leur mission et qu'ils avaient donc conscience des pouvoirs conférés par les parties ; qu'ainsi la sentence indiquait (page 3 paragraphe B/a intitulé "Fondement conventionnel de l'instance arbitrale") : « Il réside dans l'article 14 du contrat d'enseigne du 30-04-2009 qui prévoit essentiellement la constitution d'un Tribunal arbitral habilité à statuer en amiable composition et en dernier ressort sans être tenu d'observer les règles de procédure et les délais du code de procédure civile" ; que le dispositif de la sentence débutait par le mention suivante : « Le Tribunal arbitral, après en avoir délibéré, statuant en amiable composition et en dernier ressort » ; que, dans la partie « motifs » de la sentence, le paragraphe E (page 12), consacré au fond de l'affaire, était ainsi libellé : « Surabondamment, et pour répondre au souci d'examen exhaustif de l'affaire, force est de considérer que les demandes présentées par la société Macris et monsieur M... C... auraient été vouées à un rejet si l'application incontournable en droit comme en équité d'une règle d'ordre public ne les avaient rendues irrecevables » ; que pour juger l'action prescrite, le tribunal arbitral avait retenu que celle-ci se prescrivait par cinq ans par application de l'article 2224 du code civil, ce dont les parties convenaient ; que la question en débat portait donc sur la détermination du point de départ de ce délai, les demandeurs soutenant ne pas avoir eu connaissance du contrat MAG3 au jour de sa conclusion, le 25 août 2008, mais le 3 juin 2010 seulement, à la réception d'une lettre de ITM Entreprises, aucun exemplaire de ce contrat ne leur ayant été remis au moment de sa signature et ITM Entreprises ayant failli dans son obligation d'information et caché ensuite l'existence de ce contrat ; que pour écarter la thèse des demandeurs, le tribunal arbitral avait relevé « au rebours de la présentation des faits par les demandeurs » que les intéressés ne démontraient pas ne pas avoir été en possession d'un exemplaire du contrat MAG3, et que les éléments de fait, notamment la détention et la production par eux de certains exemplaires de cette convention sans être en mesure d'en expliquer la provenance, laissaient au contraire penser qu'ils en avaient eu « une connaissance effective [...] au delà du seul moment où il a été conclu" et "qu'à tout le moins [...] ils [n'avaient] pas pris connaissance du contrat MAG3 seulement le 3 juin 2010 » ; qu'au delà de ces constatations, il apparaissait que le tribunal arbitral avait vérifié le caractère équitable de sa décision en s'attachant, non seulement au sens commun en relevant « qu'on peut légitimement présumer qu'une personne qui signe un contrat en a eu une connaissance effective » (page 10 de la sentence), mais aussi à la personnalité des contractants en estimant devoir passer « sur le point de savoir s'il lui revient de pallier ce qui constitue au minimum une négligence de la part d'un dirigeant d'entreprise qui, une fois un contrat important conclu avec son partenaire, ne serait-ce parce ce que ce contrat devait lui rapporter une somme importante [...], omet d'en conserver un exemplaire par devers lui, alors que, même s'il n'est pas un juriste, il a pu aisément constater que ce contrat a été signé en autant d'exemplaires qu'il a de parties » ; que de même, l'existence même et le libellé du motif surabondant mentionné par la sentence caractérisent le souci du tribunal arbitral de justifier, en équité, la solution retenue relativement à la prescription au regard des chances de succès qu'auraient eues les demandeurs au fond dans l'hypothèse où leur action aurait été jugée recevable ; qu'il avait ainsi, en estimant ces demandes vouées à l'échec et en s'attachant là encore, notamment, au défaut de « vraisemblance » de la thèse de monsieur C..., « dirigeant d'entreprise expérimenté et ancien du Groupement des Mousquetaires », vérifié les conséquences de sa décision relativement à la prescription de l'action ; que ces divers éléments témoignent de la volonté qu'avait eue le tribunal arbitral de rechercher une solution fondée en droit mais aussi en équité ; que le moyen d'annulation serait donc rejeté » (arrêt, pp. 6 et 7).

ALORS, EN PREMIER LIEU, QUE pour traiter de la prescription des demandes de la société Macris et de monsieur C..., le tribunal arbitral avait retenu que « la question débattue portait sur la détermination du point de départ du délai de prescription dont il [était] acquis [...] qu'il s'agissait d'un délai quinquennal par application de l'article 2224 du code civil » (sentence, p. 10, alinéa premier), que cette question était « régie par ce même article qui dispos[ait] plus spécialement que les actions personnelles se prescrivaient "à compter du jour où le titulaire du droit a[vait] connu ou aurait dû connaître les faits lui permettant de l'exercer" » (sentence, p. 10, deuxième alinéa), qu'en l'espèce, les « faits » dont il s'agissait étaient les stipulations du contrat invoqué par les demandeurs à l'action, que leur connaissance par lesdits demandeurs remontait « en principe » au jour où ils avaient conclu le contrat, « en effet, dès l'instant où une personne conclut un contrat, on ne [pouvait] que supposer qu'elle en [avait] connaissance, à la fois quand [sic] à son existence et à son contenu. C'était d'ailleurs la raison pour laquelle le Cour de cassation fix[ait] en principe le point de départ du délai de prescription au jour de la conclusion du contrat » (sentence, p. 10, troisième alinéa), que les demandeurs soutenaient n'avoir pas eu connaissance du contrat au jour de sa conclusion, mais bien plus tard, à compter de la réception, le 3 juin 2010, d'une lettre par laquelle ITM Entreprises leur avait rapporté les termes du contrat conclu le 25 août 2008 (sentence, p. 10, quatrième alinéa), que « c'[était] cette seule question, de nature probatoire, que d[evai]t trancher le tribunal arbitral » (sentence, p. 10, cinquième alinéa), qu'« on p[ouvait] légitimement présumer qu'une personne qui signait en a[vait] eu une connaissance effective. [...] Dès l'instant qu'un contrat [était] signé, on p[ouvait] donc présumer de façon quasiment irréfragable qui [sic] son signataire en a[vait] eu connaissance, ce que [sic] fai[sait] courir le délai de prescription » (sentence, p. 10, septième alinéa), que les demandeurs à l'action avaient invoqué divers éléments pour « contrarier cette présomption et rapporter la preuve contraire » et « insisté lors de l'audience sur le fait que ITM Entreprises aurait gardé par devers elle le contrat MAG 3 dès sa signature par monsieur C..., cette signature ayant eu lieu "sur un coin de table" » (sentence, p. 10, dernier alinéa), que le tribunal arbitral, sans s'arrêter « sur le point de savoir s'il lui revenait de pallier ce qui constituait au minimum une négligence de la part d'un dirigeant d'entreprise qui, une fois un contrat important conclu avec son partenaire [...] omettait d'une conserver un exemplaire par devers lui, alors que, même s'il n'était pas un juriste, il [avait] pu aisément constater que ce contrat [avait] été signé en autant d'exemplaires qu'il y [avait] de parties » (sentence, p. 11, aliéna premier), s'était attaché « ici à la seule question probatoire dont il [était] acquis qu'elle [était] juridiquement la seule pertinente » (sentence, p. 11, deuxième alinéa) et avait retenu deux éléments de fait laissant penser que les demandeurs avaient eu une connaissance effective du contrat au-delà du seul moment où il avait été conclu (sentence, p. 11, alinéas deuxième à quatrième et p. 12 aliénas premier et deuxième), d'où il suivait, selon le tribunal arbitral, qu'en l'absence de preuve par les demandeurs « du fait qu'ils n'avaient pas eu connaissance du contrat MAG3 avant le 3 juin 2010 », « il conv[enait] donc d'en revenir à la solution de principe et retenir que le point de départ du délai de prescription remon[tait] au jour de la signature du contrat d'enseigne conclu le 30 avril 2009 » et que l'action ayant été introduite le 18 décembre 2014, cependant que le délai de prescription quinquennal prenait fin le 30 avril 2014, l'action était prescrite (sentence, p. 12, troisième alinéa) ; que par ces motifs dénués de toute ambigüité, c'est exclusivement en droit que le tribunal arbitral s'était prononcé sur la prescription des demandes, sans aucune considération d'équité ; qu'en retenant néanmoins que, par l'affirmation de ce qu'« on [pouvait] légitimement présumer qu'une personne qui signait un contrat en [avait] eu une connaissance effective » et de ce qu'il pouvait y avoir « au minimum une négligence de la part d'un dirigeant d'entreprise qui, une fois un contrat important conclu avec son partenaire, [...] omet[tait] d'en conserver un exemplaire par devers lui, alors que, même s'il n'[était] pas un juriste, il avait pu aisément constater que ce contrat [avait] été signé en autant d'exemplaires qu'il y [avait] de parties », le tribunal aurait entendu vérifier le caractère équitable de sa décision, la cour d'appel a méconnu l'interdiction faite au juge de dénaturer les documents de la cause ;

ALORS, EN DEUXIEME LIEU, QU'en déduisant par ailleurs la prétendue prise en considération de l'équité par le tribunal arbitral, d'un motif de la sentence ainsi libellé : « surabondamment, et pour répondre au souci d'examen exhaustif de l'affaire, force est de constater que les demandes présentées par la société Macris et monsieur C... auraient été vouées à un rejet si l'application incontournable en doit comme en équité d'une règle d'ordre public ne les avaient rendues irrecevables », la cour d'appel, qui s'est satisfaite d'une référence purement formelle à l'équité, a violé l'article 1492 du code de procédure civile ;

ALORS, EN TROISIEME LIEU ET EN TOUT ETAT DE CAUSE, QU'au soutien de leur recours en annulation de la sentence arbitrale, monsieur C... et la société Macris avaient fait valoir (conclusions en réplique signifiées le 28 juillet 2017, points 93 à 99, points 33 à 35, également point 44 et note 21, pp. 16 et 17) qu'en vertu de la loi et de la jurisprudence de la Cour de cassation, la prescription d'une action indemnitaire ne peut commencer de courir avant la manifestation du dommage dont réparation est demandée, qu'au cas particulier, le dommage dont ils demandaient réparation ne s'était pas manifesté avant leur condamnation, par un arrêt rendu le 22 novembre 2012 par la cour d'appel de Paris, à payer à la société ITM Alimentaire France une somme supérieure à 7 000 000 euros du fait d'un prétendu manquement contractuel, que le délai de la prescription quinquennale applicable à leur action indemnitaire contre la société ITM Entreprises, tendant à être couverts de cette condamnation judiciaire, ne pouvait donc courir avant la date mentionnée ci-dessus et qu'en conséquence la saisine des arbitres, effectuée par lettre en date du 18 décembre 2014, ne pouvait être regardée comme tardive, que ce soit en droit, dès lors qu'elle avait eu lieu moins de cinq ans après le point de départ du délai, ou que ce soit en équité, dès lors qu'elle avait eu lieu quelques mois à peine après le rejet par la Cour de cassation, le 18 février 2014, du pourvoi formé contre l'arrêt de condamnation rendu par la cour d'appel de Paris ; qu'en ne recherchant pas, comme elle y avait ainsi été invitée, si la prétendue prescription retenue par le tribunal arbitral n'était pas contraire à l'équité, comme ne prenant aucunement en considération la situation effective des demandeurs en indemnisation, lesquels n'avaient pu agir avant d'avoir subi la condamnation judiciaire qui constituait le dommage à réparer et avaient engagé la procédure arbitrale en indemnisation six mois à peine après le rejet du recours formé contre cette condamnation, la cour n'a pas légalement justifié sa décision au regard de l'article 1492 du code de procédure civile ;

ALORS, EN QUATRIEME LIEU ET EN TOUT ETAT DE CAUSE, QUE l'arbitre à qui il a été confié la mission de statuer comme amiable compositeur doit s'assurer de la conformité à l'équité de chacune des règles de droit en application de laquelle il se prononce ; que la cour d'appel a constaté que les arbitres, statuant comme amiables compositeurs, avaient jugé prescrite l'action de monsieur C... et de la société Macris en application de l'article 2224 du code civil par la considération que le délai de la prescription avait commencé de courir à leur encontre dès la conclusion du contrat invoqué au soutien de l'action, puisque les intéressés ne démontraient pas ne pas être immédiatement entrés en possession d'un exemplaire dudit contrat lors de sa signature ; qu'aux termes de l'arrêt, les arbitres avaient également relevé « qu'on peut légitimement présumer qu'une personne qui signe un contrat en a eu une connaissance effective » ; qu'il résultait ainsi des constatations de l'arrêt que les arbitres s'étaient prononcés en application d'une règle de droit, tenant à ce que le signataire d'un contrat est présumé en avoir une connaissance effective dès sa signature, règle de droit déterminante de l'entière solution retenue par la sentence puisque c'était cette règle qui avait conduit les arbitres à considérer que monsieur C... et la société Macris n'apportaient pas la preuve d'un fait nécessaire au succès de leurs prétentions, à savoir l'absence de détention par une partie du contrat après sa signature ; qu'en se bornant à dire que le tribunal arbitral aurait vérifié en équité les conséquences de sa décision relativement à la prescription de l'action, sans s'assurer spécifiquement que les arbitres avaient justifié la conformité à l'équité de la règle de droit prise de la présomption susmentionnée, dont ils avaient fait application, la cour d'appel a, de plus fort, violé l'article 1492 du code de procédure.


Synthèse
Formation : Chambre civile 1
Numéro d'arrêt : 18-13954
Date de la décision : 11/07/2019
Sens de l'arrêt : Rejet
Type d'affaire : Civile

Références :

Décision attaquée : Cour d'appel de Paris, 23 janvier 2018


Publications
Proposition de citation : Cass. Civ. 1re, 11 jui. 2019, pourvoi n°18-13954


Composition du Tribunal
Président : Mme Batut (président)
Avocat(s) : SCP Delvolvé et Trichet, SCP Matuchansky, Poupot et Valdelièvre

Origine de la décision
Date de l'import : 15/09/2022
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CCASS:2019:18.13954
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