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26/06/2019 | FRANCE | N°18-11581

France | France, Cour de cassation, Chambre sociale, 26 juin 2019, 18-11581


LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE SOCIALE, a rendu l'arrêt suivant :

Sur le moyen unique :

Vu les articles 4 et 5 du code de procédure civile ;

Attendu, selon l'arrêt attaqué, que le comité d'hygiène, de sécurité et des conditions de travail (CHSCT) de la caisse d'allocations familiales (CAF) de l'Isère a par délibération du 4 mai 2015 décidé le recours à un expert agréé en raison d'un risque grave ; que l'employeur a saisi le juge des référés d'une demande d'annulation de cette décision ;

Attendu que, pour rejeter la demande, l'arrêt retient que,

courant 2015, la caisse d'allocations familiales de l'Isère a mis en oeuvre un plan d'action...

LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE SOCIALE, a rendu l'arrêt suivant :

Sur le moyen unique :

Vu les articles 4 et 5 du code de procédure civile ;

Attendu, selon l'arrêt attaqué, que le comité d'hygiène, de sécurité et des conditions de travail (CHSCT) de la caisse d'allocations familiales (CAF) de l'Isère a par délibération du 4 mai 2015 décidé le recours à un expert agréé en raison d'un risque grave ; que l'employeur a saisi le juge des référés d'une demande d'annulation de cette décision ;

Attendu que, pour rejeter la demande, l'arrêt retient que, courant 2015, la caisse d'allocations familiales de l'Isère a mis en oeuvre un plan d'action portant sur l'encadrement du BE/DI/BCSI, la création d'un nouveau collectif de travail afin de fédérer les équipes pour la création d'un nouveau service, qu'elle a par ailleurs annoncé le déploiement de nouveaux applicatifs : CLEA, et CLEA (information) et RECIT (suivi des incivilités), que ces mesures, principalement la création d'un nouveau service, emportent une modification importante des conditions de travail par la modification de l'organisation du travail, au sens de l'article L. 4612- 8- 1 du code du travail, et justifiaient par conséquent le recours à l'expertise prévue par l'article L. 4614-12 du code du travail ;

Qu'en statuant ainsi, alors qu'il résultait de ses constatations que la délibération décidait le recours à un expert en raison d'un risque grave et qu'elle avait estimé que le risque grave n'était pas caractérisé, la cour d'appel qui a méconnu les termes du litige a violé les textes susvisés ;

PAR CES MOTIFS :

CASSE ET ANNULE mais seulement en ce qu'il infirme l'ordonnance du 4 novembre 2015 en ce qu'elle a annulé la délibération du CHSCT de la CAF de l'Isère du 4 mai 2015 décidant du recours à l'expertise et désignant le cabinet Secafi pour y procéder, en ce qu'il confirme la désignation d'expert décidée par le CHSCT de la CAF de l'Isère le 4 mai 2015, et confirme le choix de l'expert choisi notifié à la direction de la CAF de l'Isère, l'arrêt rendu le 19 décembre 2017, entre les parties, par la cour d'appel de Grenoble ; remet, en conséquence, sur ces points, la cause et les parties dans l'état où elles se trouvaient avant ledit arrêt et, pour être fait droit, les renvoie devant la cour d'appel de Chambéry ;

Condamne la CAF de l'Isère aux dépens ;

Vu l'article L. 4614-13 du code du travail, condamne la CAF de l'Isère à payer à la SCP Jean-Philippe Caston la somme de 3 500 euros TTC ;

Dit que sur les diligences du procureur général près la Cour de cassation, le présent arrêt sera transmis pour être transcrit en marge ou à la suite de l'arrêt partiellement cassé ;

Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, chambre sociale, et prononcé par le président en son audience publique du vingt-six juin deux mille dix-neuf.

MOYEN ANNEXE au présent arrêt :

Moyen produit par la SCP Nicolaÿ, de Lanouvelle et Hannotin, avocat aux Conseils, pour la caisse d'allocations familiales de l'Isère.

Le moyen fait grief à l'arrêt attaqué d'avoir infirmé l'ordonnance du 4 novembre 2015 en ce qu'elle a annulé la délibération du CHSCT de la Caf de l'Isère du 4 mai 2015 décidant du recours à l'expertise et désignant le cabinet Secafi pour y procéder ; statuant à nouveau, d'avoir confirmé la désignation d'expert décidée par le CHSCT de la Caf de l'Isère le 4 mai 2015 ; d'avoir confirmé le choix de l'expert choisi notifié à la direction de la Caf de l'Isère ; d'avoir dit que l'intégralité des frais d'expertise seront à la charge de la Caf de l'Isère conformément à l'article L 4614-13 du code du travail, dans sa rédaction antérieure à la loi 2016-1088 du 8 août 2016 ; d'avoir débouté la Caf de l'Isère de sa demande tendant à ce qu'il soit jugé que n'était pas rapportée la preuve de l'existence d'un risque grave de nature à justifier le recours par le CHSCT de la Caf de l'Isère aux services d'un expert sur le fondement des dispositions de l'article L 4614-12 du code du travail ;

AUX MOTIFS QUE l'article L 4614-12 du [code du] travail prévoit que le comité d'hygiène, de sécurité et des conditions de travail peut faire appel à une expert agréé : 1° lorsqu'un risque grave, révélé ou non par un accident du travail, une maladie professionnelle ou à caractère professionnel est constatée dans l'établissement ; 2° en cas de projet important modifiant les conditions de santé et de sécurité ou les conditions de travail, prévu à l'article L 4612-8-1 du même code ; que l'article L 4612-8 du [code du] travail édicte que le comité d'hygiène, de sécurité et des conditions de travail est consulté avant toute décision d'aménagement important modifiant les conditions de santé et de sécurité ou les conditions de travail et notamment avant tout toute transformation importante ou de l'organisation du travail, avant toute modification des cadences et des normes de productivité liées ou non à la rémunération du travail ; qu'aux termes d'un document daté du 16 juin 2015, le cabinet Secafi a indiqué que les représentants du personnel souhaitaient que l'expertise porte sur les évolutions récentes et celles projetées au sein de la Caf 38 d'un point de vue organisationnel, humain et technique, des observations, entretiens et analyses de situations de travail, notamment au travers d'une enquête auprès du personnel, l'identification de services ou de catégories de personnels où se concentraient les problèmes principaux en terme de mal-être et souffrance au travail et la formulation de propositions pratiques d'amélioration des conditions de travail et de santé, des conditions de travail et de santé et de prévention des risques professionnels et psychosociaux pour les salariés ; qu'il est constant que le 24 mai 2015, divers salariés de la crèche dite « Des Cèdres » gérée par la Caf de l'Isère à Vienne ont émis un droit d'alerte fondé sur un état de stress psychologique ; qu'il convient cependant de relever, d'une part que ce droit d'alerte a été traité sans délai par l'employeur, lequel a fait appel à un psychologue du travail, décidé une mesure d'enquête conjointement avec les représentants du personnel et adopté les mesures correctrices adéquates, d'autre part que cette situation ne portait que sur un site particulier, et enfin que ce motif n'est pas retenu dans la définition de la mission du cabinet Secafi telle que définie par les représentants du personnel ; que le CHSCT de la Caf de l'Isère ne peut en conséquence prétendre à l'existence d'un risque grave pour justifier une mesure d'expertise ; qu'en revanche, courant 2015, la Caf de l'Isère a mis en oeuvre un plan d'action avec l'aide d'un cabinet extérieur, portant sur l'encadrement du BE/DI/BCSI, la création d'un nouveau collectif de travail et afin de fédérer les équipes pour la création d'un nouveau service ; qu'elle a par ailleurs annoncé le déploiement de nouveaux applicatifs : le CLEA, et CLEA (information) et RECIT (suivi des incivilités) ; que ces mesures, principalement la création d'un nouveau service, emportent une modification importante des conditions de travail par la modification de l'organisation du travail, au sens de l'article L 4612-8-1 du code du travail, et justifiaient par conséquent le recours à l'expertise prévue par l'article L 4614-12 du code du travail ; que l'ordonnance critiquée, en ce qu'elle a annulé la délibération du CHSCT du 4 mai 2015, sera par conséquent infirmée ;

1°) ALORS QUE le juge ne peut modifier l'objet de la demande tel que déterminé par les prétentions respectives des parties ; qu'en confirmant la désignation d'un expert par le comité d'hygiène, de sécurité et des conditions de travail sur le fondement de l'article L 4614-12, 2°, du code du travail disposant que le CHSCT peut faire appel à un expert agréé en cas de projet important modifiant les conditions de santé et de sécurité ou les conditions de travail, prévu à l'article L 4612-8, cependant qu'il avait décidé faire appel à une expert, non pas en considération d'un projet important, mais en raison d'un risque grave prétendu, en application du 1° de l'article L 4614-12 du code du travail, la cour d'appel a violé l'article 4 du code de procédure civile ;

2°) ALORS AU DEMEURANT QU'en cas de désignation d'expert par le comité d'hygiène, de sécurité et des conditions de travail, le juge appelé à se prononcer sur la justification de la mesure est lié par les termes de la résolution ; qu'ayant constaté que le CHSCT avait pris cette décision en raison d'un « risque grave » en application de l'article L 4614-12, 1°, du code du travail, en validant cette expertise au regard d'une modification importante des conditions de travail par la modification de l'organisation du travail, au visa l'article L 4614-12, 2°, du même code, la cour d'appel a violé ces dispositions alors applicables ;

3 ° ) ALORS EN OUTRE QUE toute décision de justice doit être justifiée par des motifs compréhensibles ; qu'en jugeant nécessaire le recours à une expertise en raison d'un plan d'action portant sur l'encadrement du BE/DI/BCSI et pour apprécier les conséquences de nouveaux applicatifs, CLEA, CLEA (information) et RECIT (suivi des incivilités), ce qui ne permet de comprendre ni la justification de cette expertise ni même son objet, la cour d'appel a violé l'article 455 du code de procédure civile ;

4°) ET ALORS ENFIN QU'en relevant que courant 2015, la Caf de l'Isère avait mis en oeuvre un plan d'action avec l'aide d'un cabinet extérieur, portant sur l'encadrement du BE/DI/BCSI, la création d'un nouveau collectif de travail afin de fédérer les équipes pour la création d'un nouveau service, qu'elle avait par ailleurs annoncé le déploiement de nouveaux applicatifs : le CLEA, et CLEA (information) et RECIT (suivi des incivilités), et en jugeant que ces mesures, principalement la création d'un nouveau service, emportaient une modification importante des conditions de travail par la modification de l'organisation du travail, la cour d'appel, qui n'a pas caractérisé la justification du recours à l'expertise, a violé l'article L 4614-12, 2°, du code du travail alors applicable.


Synthèse
Formation : Chambre sociale
Numéro d'arrêt : 18-11581
Date de la décision : 26/06/2019
Sens de l'arrêt : Cassation partielle
Type d'affaire : Sociale

Références :

Décision attaquée : Cour d'appel de Grenoble, 19 décembre 2017


Publications
Proposition de citation : Cass. Soc., 26 jui. 2019, pourvoi n°18-11581


Composition du Tribunal
Président : M. Huglo (conseiller doyen faisant fonction de président)
Avocat(s) : SCP Jean-Philippe Caston, SCP Nicolaý, de Lanouvelle et Hannotin

Origine de la décision
Date de l'import : 15/09/2022
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CCASS:2019:18.11581
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