La jurisprudence francophone des Cours suprêmes


recherche avancée

19/06/2019 | FRANCE | N°18-85354

France | France, Cour de cassation, Chambre criminelle, 19 juin 2019, 18-85354


LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE CRIMINELLE, a rendu l'arrêt suivant :

Statuant sur les pourvois formés par :

- M. S... T...,
- M. I... T...,
- M. P... B...,
- M. C... A...,
- M. X... O...,

contre l'arrêt de la cour d'appel de NANCY, chambre correctionnelle, en date du 26 juin 2018, qui les a condamnés, le premier, pour faux et usage, obtention indue de documents administratifs, détention frauduleuse de faux documents administratifs, aide au séjour irrégulier en bande organisée, et association de malfaiteurs, à trois ans d'emprisonnement et 7 500 euros d

'amende, le deuxième, pour faux et usage, obtention indue de documents administratifs ...

LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE CRIMINELLE, a rendu l'arrêt suivant :

Statuant sur les pourvois formés par :

- M. S... T...,
- M. I... T...,
- M. P... B...,
- M. C... A...,
- M. X... O...,

contre l'arrêt de la cour d'appel de NANCY, chambre correctionnelle, en date du 26 juin 2018, qui les a condamnés, le premier, pour faux et usage, obtention indue de documents administratifs, détention frauduleuse de faux documents administratifs, aide au séjour irrégulier en bande organisée, et association de malfaiteurs, à trois ans d'emprisonnement et 7 500 euros d'amende, le deuxième, pour faux et usage, obtention indue de documents administratifs et tentatives, détention frauduleuse de faux documents administratifs, aide au séjour irrégulier en bande organisée, et association de malfaiteurs, à cinq ans d'emprisonnement, 15 000 euros d'amende et à l'interdiction définitive du territoire français, le troisième, pour détention frauduleuse de faux documents administratifs, aide au séjour d'irrégulier commise en bande organisée, et association de malfaiteurs, à cinq ans d'emprisonnement, 15 000 euros d'amende et à l'interdiction définitive du territoire français, le quatrième, pour faux et usage, obtention indue de documents administratifs, détention frauduleuse de faux documents administratifs, aide au séjour irrégulier en bande organisée, et association de malfaiteurs, à trois ans d'emprisonnement, 7 500 euros d'amende et à l'interdiction définitive du territoire français, et, le cinquième, pour détention frauduleuse de faux documents administratifs, aide au séjour irrégulier en bande organisée et association de malfaiteurs, à cinq ans d'emprisonnement, 15 000 euros d'amende et à l'interdiction définitive du territoire français, et qui a prononcé une mesure de confiscation ;

La COUR, statuant après débats en l'audience publique du 22 mai 2019 où étaient présents dans la formation prévue à l'article 567-1-1 du code de procédure pénale : M. Soulard, président, M. de Larosière de Champfeu, conseiller rapporteur, M. Castel, conseiller de la chambre ;

Greffier de chambre : Mme Guichard ;

Sur le rapport de M. le conseiller de M. de LAROSIÈRE de CHAMPFEU, les observations de la société civile professionnelle SPINOSI et SUREAU, de la société civile professionnelle GADIOU et CHEVALLIER, avocats en la Cour, et les conclusions de Mme l'avocat général MORACCHINI ;

Joignant les pourvois en raison de la connexité ;

I- Sur le pourvoi formé par M. O... :

Attendu que le demandeur, qui s'est régulièrement pourvu en cassation, n'a pas déposé, dans le délai légal, personnellement ou par l'intermédiaire de son avocat, un mémoire exposant ses moyens de cassation ; qu'il y a lieu, en conséquence, de le déclarer déchu de son pourvoi, par application de l'article 590-1 du code de procédure pénale ;

II- Sur les pourvois des autres demandeurs ;

Vu les mémoires produits ;

Sur le premier moyen de cassation proposé pour M. S... T..., pris de la violation des articles 6 de la Convention des droits de l'homme, préliminaire, 157, 406, 407, 408, 512, D. 594-16, 591 et 592 du code de procédure pénale ;

"en ce que la cour d'appel a déclaré M. S... T... coupable de obtention frauduleuse de document administratif constatant un droit, une identité ou une qualité, ou accordant une autorisation, de faux – altération frauduleuse de la vérité dans un écrit, d'usage de faux document administratif constatant un droit, une identité ou une qualité, ou accordant une autorisation, d'usage de faux en écriture, de participation à association de malfaiteurs en vue de la préparation d'un délit puni de dix ans d'emprisonnement, d'aide à l'entrée, à la circulation ou au séjour irréguliers d'un étranger en France ou dans un Etat partie à la Convention de Schengen, en bande organisée et de détention frauduleuse de plusieurs faux documents administratifs, et l'a condamné à trois ans d'emprisonnement et à une amende de 7 500,00 euros, en plus de la confiscation des scellés ;

"alors que l'interprète, s'il n'est pas assermenté, prête serment d'apporter son concours à la justice en son honneur et en sa conscience ; qu'en l'espèce, en ne précisant pas si l'interprète ayant assisté M. S... T... a prêté serment ou était assermenté pour être inscrit sur une liste d'experts judiciaires en qualité d'interprète, la cour d'appel n'a pas donné de base légale à sa décision" ;

Sur le premier moyen de cassation proposé pour M. I... T..., pris de la violation des articles préliminaire,157, 406, 407, 408, 512, D.594-16, 591 et 593 du code de procédure pénale, de l'article 6 de la Convention européenne des droits de l'homme, défaut de motif et manque de base légale ;

"en ce que l'arrêt attaqué a déclaré M. I... T... coupable d'usage de faux document administratif, d'obtention frauduleuse de document administratif, de faux, d'usage de faux, de tentative d'obtention frauduleuse de document administratif, de détention frauduleuses de plusieurs documents administratifs, d'aide au séjour irrégulier de personne de nationalité étrangère en bande organisée et de participation à une association de malfaiteurs et l'a condamné à la peine de cinq ans d'emprisonnement, à une amende de 15 000 euros et a prononcé à son encontre une interdiction définitive du territoire français ;

"alors que l'interprète, qui n'est pas inscrit sur une liste des experts judiciaires ou sur celles des experts traducteurs, doit prêter serment d'apporter son concours à la justice en son honneur et en sa conscience ; qu'en cas présent aucune des mentions de l'arrêt ne permet de savoir si l'interprète ayant assisté l'exposant était inscrit sur une liste des experts judiciaires ou sur celles des experts traducteurs, ou à défaut, s'il avait prêté le serment requis de sorte que la Cour de cassation n'est pas en mesure d'exercer son contrôle sur ce point" ;

Sur le premier moyen de cassation proposé pour M. B..., pris de la violation des articles préliminaire,157, 406, 407, 408, 512, D.594-16, 591 et 593 du code de procédure pénale, de l'article 6 de la Convention européenne des droits de l'homme, défaut de motif et manque de base légale ;

"en ce que l'arrêt attaqué a déclaré M. P... B... coupable de participation à une association de malfaiteurs, d'aide au séjour irrégulier de personne de nationalité étrangère en bande organisée et d'obtention frauduleuse de document administratif et l'a condamné à la peine de cinq ans d'emprisonnement, à une amende de 15 000 euros et a prononcé à son encontre une interdiction définitive du territoire français ;

"alors que l'interprète, qui n'est pas inscrit sur une liste des experts judiciaires ou sur celles des experts traducteurs, doit prêter serment d'apporter son concours à la justice en son honneur et en sa conscience ; qu'en cas présent aucune des mentions de l'arrêt ne permet de savoir si l'interprète ayant assisté le demandeur était inscrit sur une liste des experts judiciaires ou sur celles des experts traducteurs, ou à défaut, s'il avait prêté le serment requis de sorte que la Cour de cassation n'est pas en mesure d'exercer son contrôle sur ce point ;

Sur le premier moyen de cassation proposé pour M. A..., pris de la violation des articles 6 de la Convention des droits de l'homme, préliminaire, 157, 406, 407, 408, 512, D. 594-16, 591 et 592 du code de procédure pénale ;

"en ce que la cour d'appel a déclaré M. C... A... coupable de participation à association de malfaiteurs en vue de la préparation d'un délit puni de dix ans d'emprisonnement, faux – altération frauduleuse de la vérité dans un écrit, usage de faux en écriture, obtention frauduleuse de document administratif constatant un droit, une identité ou une qualité, ou accordant une autorisation, détention frauduleuse de plusieurs faux documents administratifs, aide à l'entrée, à la circulation ou au séjour irréguliers d'un étranger en France ou dans un Etat partie à la Convention de Schengen, en bande organisée et usage de faux document administratif constatant un droit, une identité ou une qualité, ou accordant une autorisation, et l'a condamné à trois ans d'emprisonnement et à une amende de 7 500,00 euros, ainsi qu'à une interdiction définitive du territoire français, en plus de la confiscation des scellés ;

"alors que l'interprète, s'il n'est pas assermenté, prête serment d'apporter son concours à la justice en son honneur et en sa conscience ; qu'en l'espèce, en ne précisant pas si l'interprète ayant assisté M. A... a prêté serment ou était assermenté pour être inscrit sur une liste d'experts judiciaires en qualité d'interprète, la cour d'appel n'a pas donné de base légale à sa décision" ;

Les moyens étant réunis ;

Attendu que l'arrêt attaqué mentionne la présence, à l'audience de la cour d'appel, de Mme H... et de M. R..., tous deux interprètes en langue arabe ; que les demandeurs sollicitent l'annulation de l'arrêt, au motif qu'il ne précise pas que ces interprètes aient prêté serment à l'audience, ni qu'ils soient inscrits sur une liste d'experts judiciaires ou d'interprètes traducteurs ;

Attendu que, si aucune énonciation de l'arrêt n'indique que les interprètes aient prêté à l'audience le serment prescrit par l'article 407 du code de procédure pénale, la Cour de cassation est en mesure de s'assurer que les deux interprètes précités étaient inscrits sur la liste des experts près la cour d'appel de Nancy, établie pour l'année 2018 ;

D'où il suit qu'en l'absence d'atteinte portée aux intérêts des demandeurs, les moyens doivent être écartés ;

Sur le deuxième moyen de cassation proposé pour M. S... T..., pris de la violation des articles préambule, 2, 72-3 de la Constitution de 1958, 9 de la Déclaration des droits de l'homme et du citoyen de 1789, 6 de la Convention des droits de l'homme, 111-3, 111-4, 132-71, 441-1, 441-2, 441-3, 441-6, 441-10, 441-11, 450-1, 450-3, 450-5 du code pénal, L. 622-1, L. 622-3, L. 622-5, L. 622-6, L. 622-7 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, préliminaire, 427, 485, 512, 591 et 593 du code de procédure pénale ;

"en ce que la cour d'appel a déclaré M. S... T... coupable de obtention frauduleuse de document administratif constatant un droit, une identité ou une qualité, ou accordant une autorisation, de faux – altération frauduleuse de la vérité dans un écrit, d'usage de faux document administratif constatant un droit, une identité ou une qualité, ou accordant une autorisation, d'usage de faux en écriture, de participation à association de malfaiteurs en vue de la préparation d'un délit puni de dix ans d'emprisonnement, d'aide à l'entrée, à la circulation ou au séjour irréguliers d'un étranger en France ou dans un Etat partie à la Convention de Schengen, en bande organisée et de détention frauduleuse de plusieurs faux documents administratifs, et l'a condamné à trois ans d'emprisonnement et à une amende de 7 500,00 euros, en plus de la confiscation des scellés ;

"alors que tout jugement ou arrêt doit être motivé à peine de nullité ; qu'en l'espèce, en fondant le constat selon lequel les agissements des prévenus, en ce compris ceux de M. T..., avaient été perpétrés contre rémunération sur des considérations d'ordre général, sans relever un seul fait précis en ce sens dans le chef de celui-ci, la cour d'appel a insuffisamment motivé sa décision" ;

Sur le deuxième moyen de cassation proposé pour M. A..., pris de la violation des articles préambule, 2, 72-3 de la Constitution de 1958, 9 de la Déclaration des droits de l'homme et du citoyen de 1789, 6 de la Convention des droits de l'homme, 111-3, 111-4, 132-71, 441-1, 441-2, 441-3, 441-6, 441-10, 441-11, 450-1, 450-3, 450-5 du code pénal, L. 622-1, L.622-3, L. 622-5, L. 622-6, L. 622-7 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, préliminaire, 427, 485, 512, 591 et 593 du code de procédure pénale ;

"en ce que la cour d'appel a déclaré M. C... A... coupable de participation à association de malfaiteurs en vue de la préparation d'un délit puni de dix ans d'emprisonnement, faux – altération frauduleuse de la vérité dans un écrit, usage de faux en écriture, obtention frauduleuse de document administratif constatant un droit, une identité ou une qualité, ou accordant une autorisation, détention frauduleuse de plusieurs faux documents administratifs, aide à l'entrée, à la circulation ou au séjour irréguliers d'un étranger en France ou dans un Etat partie à la Convention de Schengen, en bande organisée et usage de faux document administratif constatant un droit, une identité ou une qualité, ou accordant une autorisation, et l'a condamné à trois ans d'emprisonnement et à une amende de 7 500,00 euros, ainsi qu'à une interdiction définitive du territoire français, en plus de la confiscation des scellés ;

"1°) alors que tout jugement ou arrêt doit être motivé à peine de nullité ; qu'en l'espèce, en fondant le constat selon lequel les agissements des prévenus, en ce compris ceux de M. A..., avaient été perpétrés contre rémunération sur des considérations d'ordre général, sans relever un seul fait précis en ce sens dans le chef de celui-ci, la cour d'appel a insuffisamment motivé sa décision ;

"2°) alors que la présomption d'innocence dont bénéficie un suspect ne cesse qu'en cas de déclaration de culpabilité, prononcée par la juridiction de jugement et devenue irrévocable ; qu'en l'espèce, en fondant sa déclaration de culpabilité et sa décision de condamnation sur la considération selon laquelle M. A... avait été signalisé sous une autre identité le 11 mars 2009 à Nanterre pour violences avec arme et le 13 mai 2010 à Melun pour recels, sans indiquer si ces signalements avaient donné lieu à des condamnations pénales, définitives de surcroît, la cour d'appel n'a pas donné de base légale à sa décision" ;

Les moyens étant réunis ;

Attendu que, pour déclarer M. S... T... coupable des infractions qui lui sont reprochées, la cour d'appel relève que des documents administratifs falsifiés, destinés à obtenir indûment des titres d'identité, ont été découverts à son domicile ; qu'elle ajoute qu'il a falsifié des documents et obtenu indûment, en les utilisant, des documents administratifs, pour des personnes de nationalité étrangère ;

Que, pour déclarer M. A... coupable des infractions qui lui sont reprochées, la cour d'appel relève qu'il s'est fait délivrer, par les administrations chargées de les établir, des documents d'identité et des permis de conduire sous de fausses identités, à partir de documents falsifiés qu'il utilisait ; que l'arrêt retient qu'il a fourni et fait obtenir, à des personnes de nationalité étrangère, des documents administratifs falsifiés ou obtenus indûment ;

Que les juges ajoutent que l'enquête a établi l'appartenance des prévenus à un réseau structuré ayant favorisé la venue irrégulière en France de personnes de nationalité étrangère, et la fourniture à celles-ci de documents administratifs falsifiés ou indûment obtenus, afin de leur permettre de se maintenir de manière illégale sur le territoire et de percevoir des prestations sociales, contre rémunération ; que l'arrêt attaqué souligne que le versement de sommes d'argent est établi par les auditions, les conversations téléphoniques interceptées et les saisies de sommes en numéraire effectuées par les enquêteurs ;

Attendu qu'en l'état de ces motifs, la cour d'appel, qui a caractérisé sans insuffisance la nature lucrative du trafic, et a pu relever que M. A... avait été mis en cause sous de fausses identités dans deux procédures distinctes, sans être tenue de rechercher si celles-ci avaient conduit à des condamnations définitives pour des faits non visés à la prévention dont elle était saisie, a justifié sa décision sans encourir les griefs des moyens, qui ne peuvent être admis ;

Mais sur le deuxième moyen de cassation, proposé pour M. I... T..., pris de la violation du principe non bis in idem, des articles 132-71, 441-1, 441-2, 441-3, 441-6, 441-10, 441-11, 450-1, 450-3, 450-5 du code pénal, L. 622-1 et suivants du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, 591 et 593 du code de procédure pénale, contradiction et défaut de motif, manque de base légale ;

"en ce que l'arrêt attaqué a déclaré M. I... T... coupable d'usage de faux document administratif, d'obtention frauduleuse de document administratif, de faux, d'usage de faux, de tentative d'obtention frauduleuse de document administratif, de détention frauduleuses de plusieurs documents administratifs, d'aide au séjour irrégulier de personne de nationalité étrangère en bande organisée et de participation à une association de malfaiteurs et l'a condamné à la peine de cinq ans d'emprisonnement, à une amende de 15 000 euros et a prononcé à son encontre une interdiction définitive du territoire français ;

"alors qu'en vertu du principe non bis in idem des faits qui procèdent de manière indissociable d'une action unique caractérisée par une seule intention coupable ne peuvent être retenus comme élément constitutif d'une infraction et circonstance aggravante d'une autre infraction ; que, pour confirmer la déclaration de culpabilité du demandeur du chef de participation à une association de malfaiteurs, en retenant également la circonstance aggravante de bande organisée du délit d'aide au séjour irrégulier de personnes de nationalité étrangère en bande organisée sans expliquer en quoi la participation à une association de malfaiteurs aurait été, dans les circonstances de l'espèce, dissociable de la circonstance aggravante de bande organisée sur laquelle l'arrêt attaqué ne s'est pas davantage expliqué, la cour d'appel a méconnu le principe non bis in idem et n'a pas légalement justifié sa décision ;

Et sur le deuxième moyen de cassation proposé pour M. B..., pris de la violation du principe non bis in idem, des articles 132-71, 441-1, 441-2, 441-3, 441-10, 441-11, 450-1, 450-3, 450-5 du code pénal, L. 622-1 et suivants du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, 591 et 593 du code de procédure pénale, contradiction et défaut de motif, manque de base légale ;

"en ce que l'arrêt attaqué a déclaré M. B... coupable de participation à une association de malfaiteurs, d'aide au séjour irrégulier de personne de nationalité étrangère en bande organisée et d'obtention frauduleuse de document administratif et l'a condamné à la peine de cinq ans d'emprisonnement, à une amende de 15 000 euros et a prononcé à son encontre une interdiction définitive du territoire français ;

"alors qu'en vertu du principe non bis in idem des faits qui procèdent de manière indissociable d'une action unique caractérisée par une seule intention coupable ne peuvent être retenus comme élément constitutif d'une infraction et circonstance aggravante d'une autre infraction ; que, pour confirmer la déclaration de culpabilité du demandeur du chef de participation à une association de malfaiteurs, en retenant également la circonstance aggravante de bande organisée du délit d'aide au séjour irrégulier de personnes de nationalité étrangère en bande organisée sans expliquer en quoi la participation à une association de malfaiteurs aurait été, dans les circonstances de l'espèce, dissociable de la circonstance aggravante de bande organisée sur laquelle l'arrêt attaqué ne s'est pas davantage expliqué, la cour d'appel a méconnu le principe non bis in idem et n'a pas légalement justifié sa décision ;

Les moyens étant réunis ;

Vu le principe ne bis in idem, ensemble l'article 593 du code de procédure pénale ;

Attendu qu'il résulte du principe ci-dessus rappelé que des faits qui procèdent de manière indissociable d'une action unique caractérisée par une seule intention coupable ne peuvent être retenus à la fois comme éléments constitutifs d'une infraction et comme circonstance aggravante d'une autre infraction ;

Attendu que tout jugement ou arrêt doit contenir les motifs propres à justifier la décision, pour permettre à la Cour de cassation de reconnaître si la loi a été respectée dans le dispositif ;

Attendu que, pour déclarer MM. I... T... et B... coupables, d'une part, d'association de malfaiteurs en vue de commettre les délits d'aide à l'immigration irrégulière en bande organisée, d'usage et de détention de faux documents administratifs, et, d'autre part, d'aide à l'entrée, à la circulation et au séjour irréguliers en France de personnes de nationalité étrangère, commis en bande organisée, la cour d'appel relève qu'ils ont participé à un réseau structuré d'immigration clandestine, organisant, moyennant rémunération, la venue et le maintien sur le territoire français de personnes de nationalité étrangère au moyen de documents administratifs obtenus indûment, à l'aide de pièces justificatives falsifiées, pour obtenir le versement de prestations sociales ; que l'arrêt précise que M. B... favorisait l'obtention indue de cartes nationales d'identité, en particulier en falsifiant des actes de naissance, des factures d'électricité et des certificats de nationalité, qu'il a été trouvé en possession d'un matériel sophistiqué destiné à fabriquer des faux, l'exploitation de son ordinateur ayant permis de retrouver 336 documents en lien avec l'obtention de documents administratifs, et 438 actes de naissance ; que les juges retiennent que M. I... T... participait à l'accueil en France de personnes de nationalité étrangère, qu'il était en relation avec M. B... pour constituer des demandes frauduleuses de titres d'identité dans de multiples mairies, et qu'il a aidé des personnes de nationalité étrangère à obtenir des prestations sociales, qui ont servi à rétribuer ses services ;

Mais attendu qu'en prononçant ainsi, sans distinguer, parmi les faits dont les demandeurs ont été reconnus coupables, ceux qui ont été réprimés sous la qualification d'association de malfaiteurs et ceux qui caractérisent la circonstance aggravante de bande organisée, la cour d'appel n'a pas mis la Cour de cassation en mesure de contrôler la légalité de sa décision au regard du principe susvisé ;

D'où il suit que la cassation est encoure de ce chef ;

Et sur le troisième moyen de cassation proposé pour M. S... T..., pris de la violation des articles 130-1, 132-1, 132-19 du code pénal, 485, 512, 591 et 593 du code de procédure pénale ;

"en ce que la cour d'appel a condamné M. S... T... à une peine de trois ans d'emprisonnement ;

"alors que le juge qui prononce une peine d'emprisonnement sans sursis doit en justifier la nécessité au regard des faits de l'espèce, de la gravité de l'infraction, de la personnalité de son auteur, de sa situation matérielle, familiale et sociale, ainsi que du caractère inadéquat de toute autre sanction ; qu'en l'espèce, en condamnant M. T... à une peine de trois ans d'emprisonnement sans sursis, sans s'expliquer sur le caractère manifestement inadéquat de toute autre sanction, la cour d'appel n'a pas donné de base légale à sa décision" ;

Et sur le troisième moyen de cassation proposé pour M. I... T..., pris de la violation des articles 132-1, 132-19, 132-20, 132-71, 441-1, 441-2, 441-3, 441-6, 441-10, 441-11, 450-1, 450-3, 450-5 du code pénal, L. 622-1 et suivants du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, 485, 591 et 593 du code de procédure pénale, de l'article 6 de la Convention européenne des droits de l'homme, défaut de motif et manque de base légale ;

"en ce que l'arrêt attaqué a déclaré M. I... T... coupable d'usage de faux document administratif, d'obtention frauduleuse de document administratif, de faux, d'usage de faux, de tentative d'obtention frauduleuse de document administratif, de détention frauduleuses de plusieurs documents administratifs, d'aide au séjour irrégulier de personne de nationalité étrangère en bande organisée et de participation à une association de malfaiteurs et l'a condamné à la peine de cinq ans d'emprisonnement, à une amende de 15 000 euros et a prononcé à son encontre une interdiction définitive du territoire français ;

"1°) alors que le juge qui prononce une peine doit motiver sa décision au regard des circonstances de l'infraction, de la personnalité et de la situation personnelle de son auteur, en tenant compte de ses ressources et de ses charges ; qu'en prononçant comme elle l'a fait, sans s'expliquer sur la situation personnelle de M. T... qu'elle devait prendre en considération pour fonder sa décision, la cour d'appel n'a pas légalement justifié sa décision ;

"2°) alors que le juge, qui prononce en matière correctionnelle une peine d'emprisonnement sans sursis, doit en justifier la nécessité au regard de la gravité de l'infraction, de la personnalité de son auteur et du caractère manifestement inadéquat de toute autre sanction et est tenu de spécialement motiver sa décision au regard de la situation matérielle, familiale et sociale du prévenu ; que pour condamner le demandeur à une peine d'emprisonnement d'une durée de cinq ans, sans s'expliquer sur les éléments de la personnalité du prévenu qu'elle a pris en considération pour fonder sa décision et sur le caractère inadéquat de toute autre sanction, la cour d'appel n'a pas légalement justifié sa décision ;

"3°) alors que la juridiction qui prononce une peine d'amende doit motiver sa décision au regard des circonstances de l'infraction, de la personnalité et de la situation personnelle de son auteur, en tenant compte de ses ressources et de ses charges ; qu'en l'occurrence, aucune motif n'a été fourni par la cour d'appel à ce titre pour la peine d'amende de sorte que la cassation s'ensuivra ;

"4°) alors que la juridiction qui prononce une peine d'interdiction définitive du territoire français doit motiver sa décision au regard des circonstances de l'infraction, de la personnalité et de la situation personnelle de son auteur, en tenant compte de ses ressources et de ses charges ; qu'en l'occurrence, aucun motif n'a été fourni par la cour d'appel à ce titre pour une peine complémentaire que n'avait pas prononcé le premier juge de sorte que la cassation s'ensuivra" ;

Et sur le troisième moyen de cassation proposé pour M. B..., pris de la violation des articles 132-1, 132-19, 132-20, 132-71, 441-1, 441-2, 441-3, 441-10, 441-11, 450-1, 450-3, 450-5 du code pénal, L. 622-1 et suivants du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, 485, 591 et 593 du code de procédure pénale, de l'article 6 de la Convention européenne des droits de l'homme, défaut de motif et manque de base légale ;

"en ce que l'arrêt attaqué a déclaré M. B... coupable de participation à une association de malfaiteurs, d'aide au séjour irrégulier de personne de nationalité étrangère en bande organisée et d'obtention frauduleuse de document administratif et l'a condamné à la peine de cinq ans d'emprisonnement, à une amende de 15 000 euros et a prononcé à son encontre une interdiction définitive du territoire français ;

"1°) alors que le juge qui prononce une peine doit motiver sa décision au regard des circonstances de l'infraction, de la personnalité et de la situation personnelle de son auteur, en tenant compte de ses ressources et de ses charges ; qu'en prononçant comme elle l'a fait, sans s'expliquer sur la situation personnelle de M. B... qu'elle devait prendre en considération pour fonder sa décision, la cour d'appel n'a pas légalement justifié sa décision ;

"2°) alors que le juge, qui prononce en matière correctionnelle une peine d'emprisonnement sans sursis, doit en justifier la nécessité au regard de la gravité de l'infraction, de la personnalité de son auteur et du caractère manifestement inadéquat de toute autre sanction et est tenu de spécialement motiver sa décision au regard de la situation matérielle, familiale et sociale du prévenu ; que pour condamner le demandeur à une peine d'emprisonnement d'une durée de cinq ans, sans s'expliquer sur les éléments de la personnalité du prévenu qu'elle a pris en considération pour fonder sa décision et sur le caractère inadéquat de toute autre sanction, la cour d'appel n'a pas légalement justifié sa décision ;

"3°) alors que la juridiction qui prononce une peine d'amende doit motiver sa décision au regard des circonstances de l'infraction, de la personnalité et de la situation personnelle de son auteur, en tenant compte de ses ressources et de ses charges ; qu'en l'occurrence, aucune motif n'a été fourni par la cour d'appel à ce titre pour la peine d'amende de sorte que la cassation s'ensuivra ;

"4°) alors que la juridiction qui prononce une peine d'interdiction définitive du territoire français doit motiver sa décision au regard des circonstances de l'infraction, de la personnalité et de la situation personnelle de son auteur, en tenant compte de ses ressources et de ses charges ; qu'en l'occurrence, aucun motif n'a été fourni par la cour d'appel à ce titre pour une peine complémentaire que n'avait pas prononcé le premier juge de sorte que la cassation s'ensuivra" ;

Et sur le troisième moyen de cassation proposé pour M. A..., pris de la violation des articles 130-1, 132-1, 132-19 du code pénal, 485, 512, 591 et 593 du code de procédure pénale ;

"en ce que la cour d'appel a condamné M. C... A... à une peine de trois ans d'emprisonnement ;

"alors que le juge qui prononce une peine d'emprisonnement sans sursis doit en justifier la nécessité au regard des faits de l'espèce, de la gravité de l'infraction, de la personnalité de son auteur, de sa situation matérielle, familiale et sociale, ainsi que du caractère inadéquat de toute autre sanction ; qu'en l'espèce, en ne se fondant que sur des considérations tenant aux faits de l'espèce et à la gravité de l'infraction pour justifier le prononcé contre d'une peine de trois ans d'emprisonnement sans sursis contre M. A..., sans prononcer cette sanction en considération de sa personnalité et sans s'expliquer sur le caractère manifestement inadéquat de toute autre sanction, la cour d'appel n'a pas donné de base légale à sa décision ;

Et sur le quatrième moyen de cassation proposé pour M. A..., pris de la violation des articles 132-1, 132-20 du code pénal, 485, 512, 591 et 593 du code de procédure pénale ;

"en ce que la cour d'appel a condamné M. A... au paiement de 7 500,00 euros d'amende et a ordonné la confiscation des scellés ;

"alors que le juge qui, en matière correctionnelle, prononce une amende ou une peine de nature économique ou pécuniaire doit motiver sa décision au regard des circonstances de l'infraction, de la personnalité et de la situation personnelle de son auteur, en tenant compte de ses ressources et de ses charges ; qu'en l'espèce, en se référant aux circonstances des infractions sans se référer à la personnalité de leur auteur et à ses ressources et ses charges pour décider des peines d'amende et de confiscation infligées à M. A..., la cour d'appel n'a pas donné de base légale à sa décision" ;

Les moyens étant réunis ;

Sur les moyens de cassation proposés pour MM. S... T... et A..., et sur les troisièmes moyens de cassation proposés pour MM. I... T... et B..., pris en leurs deux premières branches :

Vu l'article 132-19 du code pénal ;

Attendu qu'il résulte de ce texte que le juge qui prononce une peine d'emprisonnement sans sursis en matière correctionnelle doit en justifier la nécessité au regard des faits de l'espèce, de la gravité de l'infraction, de la personnalité de son auteur, de sa situation matérielle, familiale et sociale, ainsi que du caractère inadéquat de toute autre sanction ;

Attendu que, pour prononcer des peines d'emprisonnement sans sursis à l'encontre de MM. S... T..., I... T..., B... et A..., la cour d'appel énonce qu'ils ont commis des infractions d'une particulière gravité, ainsi qu'il résulte des circonstances et de la durée de leur commission, pendant deux ans, et de l'ampleur des contrefaçons de documents ayant servi à l'obtention indue et moyennant rémunération de titres de séjour, au profit de personnes de nationalité étrangère, venues irrégulièrement sur le territoire français, qui les ont utilisées pour bénéficier de prestations sociales auxquelles elles n'avaient pas droit ; que l'arrêt ajoute que M. I... T... fait valoir qu'il est inséré socialement, travaille régulièrement depuis 2013, et bénéficie d'un titre de séjour régulier depuis 2016, que M. B... indique qu'il bénéficie d'un titre de séjour et travaille en intérim dans le nettoyage, et que M. A... expose qu'il travaille régulièrement et attend la régularisation de sa situation administrative ;

Mais attendu qu'en l'état de ces motifs, qui justifient les peines d'emprisonnement sans sursis qu'elle a prononcées au regard de la gravité des faits et de la personnalité des prévenus, la cour d'appel, qui ne s'est pas expliquée sur le caractère manifestement inadéquat de toute autre sanction, n'a pas justifié sa décision ;

D'où il suit que la cassation est encore encourue ;

Sur les troisièmes moyens de cassation proposés pour MM. I... T... et B..., pris en leurs troisièmes branches, et sur le quatrième moyen de cassation proposé pour M. A... :

Vu les articles 132-20, alinéa 2, et 132-1 du code pénal, et les articles 485, 512 et 593 du code de procédure pénale ;

Attendu qu'en matière correctionnelle, le juge qui prononce une amende doit motiver sa décision au regard des circonstances de l'infraction, de la personnalité et de la situation personnelle de son auteur, en tenant compte de ses ressources et de ses charges ;

Attendu que tout jugement ou arrêt doit comporter les motifs propres à justifier la décision ; que l'insuffisance ou la contradiction des motifs équivaut à leur absence ;

Attendu que la cour d'appel a prononcé des amendes sans s'expliquer sur les ressources et les charges des demandeurs précités ; qu'elle a prononcé la confiscation des scellés sans motiver cette mesure ;
Qu'en statuant ainsi, les juges n'ont pas justifié leur décision de prononcer des peines d'amende et n'ont pas mis la Cour de cassation en mesure de s'assurer de la légalité de la confiscation prononcée ;

D'où il suit que la cassation est encore encourue ;

Qu'elle sera limitée à la déclaration de culpabilité de MM. I... T... et B... des chefs d'association de malfaiteurs et d'aide à l'entrée, à la circulation et au séjour irréguliers en France de personnes de nationalité étrangère commise en bande organisée, aux peines prononcées à l'encontre de MM. S... T..., I... T..., B... et A..., et à la confiscation des scellés, toutes autres dispositions étant expressément maintenues ;

Par ces motifs :

I- Sur le pourvoi formé par M. O... :

Le DÉCLARE déchu de son pourvoi ;

II- Sur les pourvois des autres demandeurs :

CASSE et ANNULE l'arrêt susvisé de la cour d'appel de Nancy, en date du 26 juin 2018, mais en ses seules dispositions ayant déclaré MM. I... T... et B... coupables d'association de malfaiteurs et d'aide à l'entrée, à la circulation et au séjour irréguliers en France de personnes de nationalité étrangère en bande organisée, et relatives aux peines prononcées à l'égard de : MM. S... T..., I... T..., B... et A..., et à la confiscation des scellés, toutes autres dispositions étant expressément maintenues ;

Et pour qu'il soit à nouveau statué, conformément à la loi, dans les limites de la cassation ainsi prononcée,

RENVOIE la cause et les parties devant la cour d'appel de Nancy autrement composée, à ce désignée par délibération spéciale prise en chambre du conseil ;

ORDONNE l'impression du présent arrêt, sa transcription sur les registres du greffe de la cour d'appel de Nancy et sa mention en marge ou à la suite de l'arrêt partiellement annulé ;

Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, chambre criminelle, et prononcé par le président le dix-neuf juin deux mille dix-neuf ;

En foi de quoi le présent arrêt a été signé par le président, le rapporteur et le greffier de chambre.


Synthèse
Formation : Chambre criminelle
Numéro d'arrêt : 18-85354
Date de la décision : 19/06/2019
Sens de l'arrêt : Déchéance
Type d'affaire : Criminelle

Références :

Décision attaquée : Cour d'appel de Nancy, 26 juin 2018


Publications
Proposition de citation : Cass. Crim., 19 jui. 2019, pourvoi n°18-85354


Composition du Tribunal
Président : M. Soulard (président)
Avocat(s) : SCP Gadiou et Chevallier, SCP Spinosi et Sureau

Origine de la décision
Date de l'import : 15/09/2022
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CCASS:2019:18.85354
Association des cours judiciaires suprmes francophones
Organisation internationale de la francophonie
Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie. Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie.
Logo iall 2012 website award