LA COUR DE CASSATION, DEUXIÈME CHAMBRE CIVILE, a rendu l'arrêt suivant :
Donne acte à M. J... de ce qu'il se désiste de son pourvoi en ce qu'il est dirigé contre Mme C... S... venant aux droits de P... S..., la société Prévalet Cuisinella et la société H... et Fils ;
Sur le moyen unique, pris en sa première branche :
Vu l'article 16 du code de procédure civile ;
Attendu, selon l'arrêt attaqué, que mis en cause par M. S..., qui avait été assigné par le preneur à bail d'un local commercial en indemnisation des désordres affectant ce local, sur lequel il avait effectué des travaux de couverture, M. J... a appelé en garantie son assureur, la SAMDA, aux droits de laquelle vient la Mutuelle Groupama Grand Est (l'assureur) ;
Attendu que, pour débouter M. J... de sa demande de garantie, l'arrêt retient que, dans les causes d'exclusion expresse mentionnées dans les conditions générales de l'assurance, étaient notamment exclus les dommages qui sont la conséquence de l'inobservation par l'assuré des règles de l'art telles que définies par les réglementations en vigueur, les documents techniques unifiés ou les normes établies par les organismes compétents à caractère officiel ou dans le marché de travaux concerné ; que les dommages causés résultent incontestablement de travaux réalisés par l'assuré sans observer les règles de l'art ; que cette stipulation contractuelle permet de retenir que l'assureur n'était pas tenu de garantir son assuré ;
Qu'en statuant ainsi, en faisant application d'office d'une clause d'exclusion de garantie qui n'était pas invoquée par l'assureur, et sans inviter préalablement les parties à présenter leurs observations sur la mise en oeuvre de cette clause, qui n'était pas dans le débat, la cour d'appel a violé le texte susvisé ;
PAR CES MOTIFS, et sans qu'il y ait lieu de statuer sur la seconde branche du moyen unique :
CASSE ET ANNULE, mais seulement en ce qu'il dit que la Mutuelle Groupama Grand Est n'est pas tenue de garantir M. J... des condamnations prononcées à son encontre, l'arrêt rendu le 15 mai 2018, entre les parties, par la cour d'appel de Besançon ; remet, en conséquence, sur ce point, la cause et les parties dans l'état où elles se trouvaient avant ledit arrêt et, pour être fait droit, les renvoie devant la cour d'appel de Dijon ;
Condamne la Mutuelle Groupama grand Est aux dépens ;
Vu l'article 700 du code de procédure civile ; rejette sa demande ; la condamne à payer à M. J... la somme de 3 000 euros ;
Dit que sur les diligences du procureur général près la Cour de cassation, le présent arrêt sera transmis pour être transcrit en marge ou à la suite de l'arrêt partiellement cassé ;
Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, deuxième chambre civile, et prononcé par le président en son audience publique du treize juin deux mille dix-neuf.
MOYEN ANNEXE au présent arrêt :
.Moyen produit par la SCP Thouvenin, Coudray et Grévy, avocat aux Conseils, pour M. J....
Le moyen reproche à l'arrêt infirmatif attaqué d'avoir débouté un assuré (M. J..., l'exposant) de sa demande tendant à être garanti par son assureur (la mutuelle Groupama Grand Est) de toutes les condamnations prononcées contre lui ;
AUX MOTIFS QUE M. J... avait souscrit le 2 septembre 1993 une police d'assurance « Responsabilité civile professionnelle » auprès de la SA Groupama Samda, aux droits de laquelle venait la société Groupama grand Est ; que, faisant sienne la motivation des premiers juges, l'assuré soutenait que les condamnations prononcées à son encontre entraient dans le champ de sa garantie « responsabilité civile du fait des travaux » ; que la société Groupama Grand Est prétendait que cette garantie ne s'appliquait qu'en cas de dommages corporels, matériels et immatériels causés à autrui et résultant de l'exécution des travaux objets de l'activité professionnelle de l'assuré, et qu'au surplus la responsabilité de son assuré relevait en l'espèce de la garantie décennale qui n'entrait pas dans le champ du contrat d'assurance ; qu'il appartenait à l'assureur de rapporter la preuve que la police d'assurance ne garantissait pas le sinistre dont avaient été victimes le propriétaire du local et le preneur, pour la raison que ces sinistres auraient relevé d'un cas d'exclusion de garantie ; qu'il ressortait des conditions générales applicables à la police litigieuse qu'après la réception cette garantie s'appliquait aux dommages causés à autrui, y compris au maître de l'ouvrage, par les travaux réalisés pendant la période de validité du contrat et ayant pour origine une faute professionnelle et aux dommages causés aux existants ainsi qu'à tous autres biens mobiliers ou immobiliers par les travaux réalisés pendant la période de validité du contrat ; qu'en l'espèce, il devait être tenu pour suffisamment établi par les faits de la cause que la réception des travaux, à tout le moins tacite, était intervenue ; que néanmoins, dans les causes d'exclusion expresse mentionnées à la suite des stipulations qui précédaient, étaient notamment exclus les dommages qui étaient la conséquence de l'inobservation par l'assuré des règles de l'art telles que définies par les réglementations en vigueur, les documents techniques unifiés (DTU) ou les normes établies par les organismes compétents à caractère officiel ou dans le marché de travaux concerné, et les dommages engageant la responsabilité décennale de l'assuré et la garantie de bon fonctionnement ; que les dommages causés tant au propriétaire sur le fondement de la responsabilité délictuelle qu'au preneur résultaient incontestablement de travaux réalisés par l'assuré sans observer les règles de l'art ; que, sans même qu'il fût besoin d'examiner si la responsabilité de M. J... à l'égard du propriétaire des lieux relevait, comme le soutenait l'assureur, de la garantie décennale, la combinaison de ces stipulations contractuelles permettait de retenir que, contrairement à ce qu'avaient considéré les premiers juges, l'assureur n'était pas tenu de garantir son assuré ;
ALORS QUE le juge doit, en toutes circonstances, faire observer et observer lui-même le principe de la contradiction ; que, ainsi que l'a lui-même observé l'arrêt attaqué, l'assureur fondait uniquement sa prétention sur la clause d'exclusion de garantie prétendument applicable lorsque les travaux étaient de nature décennale, tandis que l'assuré objectait que les travaux n'étaient pas de cette nature et qu'en conséquence l'assureur devait sa garantie ; qu'en se fondant d'office sur une autre clause d'exclusion tirée de ce que l'entrepreneur n'aurait pas respecté les règles de l'art, sans inviter préalablement les parties à en discuter, la cour d'appel a méconnu le principe de la contradiction en violation de l'article 16 du code de procédure civile ;
ALORS QUE, subsidiairement, le juge ne peut statuer par voie de simple affirmation ; qu'en déclarant péremptoirement que les dommages causés par l'assuré résultaient incontestablement de travaux qu'il avait réalisés sans avoir, paraît-il, observé les règles de l'art, tout en s'abstenant d'énoncer aucun motif propre à justifier cette assertion, la cour d'appel a méconnu les exigences de l'article 455 du code de procédure civile.