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13/06/2019 | FRANCE | N°18-15647;18-15648;18-15649;18-15650

France | France, Cour de cassation, Chambre sociale, 13 juin 2019, 18-15647 et suivants


LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE SOCIALE, a rendu l'arrêt suivant :

Vu la connexité, joint les pourvois n° E 18-15.647 à G 18-15.650 ;

Sur le moyen unique :

Attendu, selon les jugements attaqués (tribunal d'instance de Fort-de-France, 13 avril 2018), que les sociétés Orange, Orange Caraïbes et Orange Porte-à-Porte constituent l'unité économique et sociale Orange (UES) ; que l'établissement principal DO Caraïbes comprend cinq établissements secondaires (ES), dont l'ES URC Caraïbes et l'ES AVSC Caraïbes ; que le 20 novembre 2017, le syndicat CGTM PTT a désignÃ

© trois délégués syndicaux dans chacun de ces deux ES ; que le 21 novembre, le synd...

LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE SOCIALE, a rendu l'arrêt suivant :

Vu la connexité, joint les pourvois n° E 18-15.647 à G 18-15.650 ;

Sur le moyen unique :

Attendu, selon les jugements attaqués (tribunal d'instance de Fort-de-France, 13 avril 2018), que les sociétés Orange, Orange Caraïbes et Orange Porte-à-Porte constituent l'unité économique et sociale Orange (UES) ; que l'établissement principal DO Caraïbes comprend cinq établissements secondaires (ES), dont l'ES URC Caraïbes et l'ES AVSC Caraïbes ; que le 20 novembre 2017, le syndicat CGTM PTT a désigné trois délégués syndicaux dans chacun de ces deux ES ; que le 21 novembre, le syndicat CGTG Télécom a désigné respectivement trois et deux délégués syndicaux dans les premier et second ; que par requêtes en date des 5 et 6 décembre 2017, les sociétés ont contesté ces désignations comme non conformes à l'accord du 20 janvier 2017 « portant sur les moyens des organisations syndicales de l'UES Orange » ;

Attendu que les syndicats font grief aux jugements d'annuler les désignations, alors, selon le moyen :

1°/ que, d'une part, il résulte de l'article 4 du code civil que les juges ne peuvent méconnaître les termes du litige ; qu'au cas présent, les syndicats exposants ont toujours revendiqué être largement représentatifs au sein de l'établissement principal DO Caraïbes et les sociétés Orange, qui contestaient à titre d'employeurs, la désignation de plusieurs délégués syndicaux pour leur caractère supposé surnuméraire, ont expressément reconnu la représentativité de ces syndicats dans leur requête ; qu'ainsi le tribunal ne pouvait affirmer que « le syndicat CGT
, qui ne conteste pas ne pas être représentatif au niveau de l'UES Orange, n'avait donc pas à être associé aux négociations en vue de l'accord du 20 janvier 2017 » sans dénaturer les termes du litige en violation de l'article 4 du code de procédure civile ;

2°/ que, d'autre part, aux termes de l'article L 2231-1 du code du travail, les conventions ou accords collectifs de travail sont conclus entre d'une part, une ou plusieurs organisations syndicales de salariés représentatives dans le champ d'application de la convention ou de l'accord et d'autre part, entre un ou plusieurs employeurs pris individuellement; qu'au cas présent, l'accord du 20 janvier 2017 portait sur les désignations des délégués syndicaux dans l'ensemble de l'UES Orange et prévoyait un certain nombre d'exceptions pour les DOM (article 1.3.1 de l'accord) ; qu'il est acquis au débat que les syndicats exposants sont représentatifs au sein de l'établissement principal DO Caraïbes situé dans les DOM et donc dans le champ d'application de l'accord du 20 janvier 2017 ; qu'ainsi ces syndicats devaient être associés à la négociation et à la conclusion de cet accord ; qu'en décidant le contraire, le tribunal a violé l'article susvisé ensemble l'accord du 20 janvier 2017 ;

3°/ qu'en tout état de cause, à supposer que l'accord du 20 janvier 2017 soit opposable au syndicat exposant, il résulte de l'article 1.3.1 de cet accord que par exception et du fait de leur situation géographique particulière, pour les établissements secondaires de l'établissement principal DO Caraïbes, qui couvrent plus de deux départements, les OS représentatives peuvent désigner un DSES par département ; qu'au cas présent, l'établissement secondaire en cause couvrant trois départements, Guadeloupe, Martinique et Guyane, il pouvait désigner trois DSES ; que le tribunal constatant que le syndicat a régulièrement désigné parmi les salariés de cet établissement secondaire, trois DSES, il ne pouvait annuler ces désignations au motif inopérant que l'établissement secondaire ne les aurait pas « ventilé » sur les trois territoires que couvrent l'établissement ; qu'en statuant comme il l'a fait, le tribunal n'a pas tiré les conséquences légales de ses propres constatations en violation de l'accord du 20 janvier 2017 ;

4°/ alors qu'en outre, à supposer encore que l'accord du 20 janvier 2017 soit opposable au syndicat exposant, il résulte de l'article 1.3.3 de l'accord du 20 janvier 2017 que, par exception et du fait de la situation géographique particulière des établissements situés dans les DOM, « les DSES bénéficient de 12 déplacements trimestriels sur le périmètre de l'ES ou sur leur département de désignation pour ceux qui sont dans le cas où l'ES couvre plusieurs départements d'Outre-Mer », les DSES exerçant leur mandat de DS uniquement sur leur département administratif précité ; que cette exception est discriminatoire dans la mesure où dans les zones géographiques dépendant de l'UES d'Orange hors DOM les DS se déplacent librement contrairement au DS des DOM dont le champ de déplacement est limité au périmètre de l'ES ou du département de désignation ;

5°/ alors que, par ailleurs, les exposants invoquaient l'inopposabilité de l'accord du 20 janvier 2017 en raison d'un usage d'entreprise consistant à systématiquement décliner au plan local les accords nationaux, les déclinaisons locales étant négociées en tenant compte des spécificités des départements et territoires d'outre-mer et de la nécessité de prendre en compte la représentativité importante d'organisations syndicales locales telles que la CGTM et la CGTG ; qu'un usage d'entreprise ne pouvant être dénoncé que par un accord collectif, le tribunal ne pouvait refuser de tenir compte de l'usage d'entreprise résultant notamment de l'accord de déclinaison d'un accord national conclu en 2005 invoqué sans rechercher si cet accord de déclinaison avait été dénoncé par un accord collectif et si faute d'un tel accord, l'usage ne devait pas continuer à s'appliquer dans l'entreprise ; qu'en ne le précisant pas, le tribunal a privé sa décision de base légale au regard de l'article L 2261-9 du code du travail ;

6°/ alors qu'enfin l'article 1.3.1 de l'accord du 20 janvier 2017 énonce en son dernier alinéa que « l'ensemble des modalités de calcul et de répartition décrites dans cet article entreront en vigueur à compter du début de la prochaine mandature soit fin 2017 et pour la durée de cette mandature » ; qu'ainsi l'article 18 II de la loi n° 2017-256 du 28 février 2017 ouvrant notamment en Guadeloupe, Guyane et Martinique, à certains syndicats représentatifs la possibilité de négocier pour adapter au niveau d'un territoire les conventions et accords collectifs de travail dont le champ d'application est national en application de l'article L. 2222-1 du code du travail, lequel ouvre aux organisations syndicales habilitées à négocier dans ces mêmes territoires un délai de six mois à compter de la date d'entrée en vigueur des conventions et accords collectifs de travail dont le champ d'application est national pour conclure des accords dans le même champ, était applicable aux organisations syndicales exposantes ; qu'en décidant le contraire, le tribunal a violé l'article 1.3.1 de l'accord du 20 janvier 2017 ensemble l'article 18 II de la loi n° 2017-256 du 28 février 2017 ;

Mais attendu d'abord qu'ayant estimé, sans avoir à effectuer la recherche prétendument omise, que l'usage d'entreprise allégué n'était pas établi et constaté que l'accord conclu le 20 janvier 2017 s'applique à l'ensemble des sociétés composant l'UES, le tribunal d'instance, devant lequel les syndicats ne prétendaient pas être représentatifs au niveau de l'UES, a, sans dénaturer les termes du litige ni méconnu l'article 18 II de la loi n° 2017-256 du 28 février 2017, lequel n'est applicable qu'aux accords conclus à compter du 1er avril 2017, jugé à bon droit que l'accord du 20 janvier 2017 leur était applicable ;

Attendu ensuite qu'ayant relevé que les désignations effectuées dans un même établissement n'étaient pas réparties par département d'affectation, le tribunal en a exactement déduit que, faute de déterminer le périmètre d'action des délégués syndicaux, elles ne respectaient pas l'article 1.3.1 de l'accord précité et devaient être annulées ;

D'où il suit que le moyen qui pris en sa quatrième branche, s'attaque à des motifs surabondants, n'est pas fondé pour le surplus ;
PAR CES MOTIFS :

REJETTE les pourvois ;

Vu l'article 700 du code de procédure civile, rejette les demandes ;

Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, chambre sociale, et prononcé par le président en son audience publique du treize juin deux mille dix-neuf.

MOYENS ANNEXES au présent arrêt :

Moyen produit au pourvoi n° E 18-15.647 par Me Bouthors, avocat aux Conseils, pour le syndicat CGT Martinique PTT, M. B..., M. O... et Mme F...

Le moyen reproche au tribunal d'instance d'avoir constaté la validité de l'accord portant sur les moyens des organisations syndicales de l'UES Orange du 20 janvier 2017 et son opposabilité au syndicat CGTM PTT et d'avoir annulé les désignations par les syndicats CGTM PTT de Monsieur Z... B..., Monsieur V... O... et Madame P... F... comme délégués syndicaux au sein de l'établissement secondaire URC Caraïbes ;

aux motifs qu'en l'espèce, l'accord du 20 janvier 2017 a été conclu entre les sociétés Orange SA, Orange Caraïbe SA et Orange Portaporte SA, sociétés composant l'UES Orange, et les syndicats suivants : CFDT- F3C, FO-COM et SUD PTT ;

Qu'également invités à négocier l'accord, les syndicats CFE-CGC et CGT-FAPT ne l'ont pas signé ;

Que le syndicat CGTM PTT, qui ne conteste pas ne pas être représentatif au niveau de l'UES Orange, n'avait donc pas à être associé aux négociations en vue de l'accord du 20 janvier 2017 ;

Qu'il y a lieu ici de rappeler qu'à la date de conclusion de l'accord du 20 janvier 2017, la loi n° 2017-256 du 28 février 2017 n'était pas encore entrée en vigueur ; que les dispositions de l'article 18 de cette loi, sur la représentativité des organisations syndicales de salariés et d'employeurs ultra-marines, ne pouvaient donc pas s'appliquer dans le cadre de la négociation de cet accord ;

Que contrairement à ce qui est allégué par le syndicat CGTM PTT, ce syndicat n'avait pas non plus à être associé à une négociation au niveau local d'un accord d'adaptation de l'accord du 20 janvier 2017 ;

Qu'en effet, si l'article 18 de la loi n°2017-256 du 28 février 2017 ouvre en Guadeloupe, Guyane, Martinique, à Mayotte, La Réunion, Saint-Barthélemy, Saint-Martin et Saint-Pierre-et-Miquelon à certains syndicats représentatifs (syndicats qui cumulativement : respectent les valeurs républicaines, ont recueilli au moins 8 % des suffrages exprimés résultant de l'addition au niveau d'un des territoires mentionnés au premier alinéa du I du présent article des suffrages exprimés au premier tour des dernières élections des titulaires aux comités d'entreprise ou de la délégation unique du personnel ou, à défaut, des délégués du personnel, quel que soit le nombre de votants, des suffrages exprimés au scrutin concernant les entreprises de moins de onze salariés dans les conditions prévues aux articles L. 2122-10-1 et suivants du code du travail ainsi que des suffrages exprimés aux élections des membres représentant les salariés aux chambres départementales d'agriculture dans les conditions prévues à l'article L. 2122-6 du même code, ont une ancienneté minimale de deux ans dans le champ professionnel et géographique couvrant le niveau de la négociation ; cette ancienneté s'apprécie à compter de la date de dépôt légal des statuts) la possibilité de négocier pour « adapter au niveau d'un territoire mentionné au premier alinéa du I du présent article les conventions et accords collectifs de travail dont le champ d'application est national en application de l'article L. 2222-1 du code du travail », il y a lieu de relever que le dernier alinéa de l'article L. 2222-1 du code du travail ouvrant « aux organisations syndicales de salariés et d'employeurs habilitées à négocier en Guadeloupe, en Guyane, en Martinique, à Mayotte, à La Réunion, à Saint-Barthélemy, à Saint-Martin et à Saint-Pierre-et-Miquelon un délai de six mois à compter de la date d'entrée en vigueur des conventions et accords collectifs de travail dont le champ d'application est national pour conclure des accords dans le même champ si elles le souhaitent n'est applicable qu'à compter du 1er avril 2017, pour les conventions et accords conclus après cette date ;

Que l'accord conclu le 20 janvier 2017, dont il n'est pas allégué qu'il aurait été négocié avec des syndicats ne remplissant pas les conditions de représentativité, s'applique dans toute l'UES Orange, ainsi que cela ressort du paragraphe « champ d'application » de l'accord ; que s'agissant d'un accord portant sur les moyens des Organisations syndicales de l'UES Orange, il était bien opposable au syndicat CGT Martinique PTT ;

Qu'en effet, cet accord a dénoncé totalement ou partiellement des accords qui s'appliquaient aux sociétés de l'UES orange, parmi lesquels l'accord sur l'architecture des IRP dans le cadre de l'UES du 2 juillet 2008 ainsi que ses avenants postérieurs signés pour une durée déterminée, dont l'avenant n° 3 du 4 mai 2011 ;

Qu'en outre, les défendeurs, qui se prévalent de l'existence d'un usage d'entreprise consistant à systématiquement décliner au plan local les accords nationaux, ne rapportent pas la preuve de l'existence d'un tel usage en ne produisant qu'un accord de déclinaison d'un accord national conclu en 2005 entre la Direction régionale de France Telecom Guadeloupe et les organisations syndicales suivantes : CFDT, CFE-CGC, CFTC, CGT et FO - la production d'une annexe à l'avenant n°3 du 4 mai 2011 à l'accord d'architecture IRP de l'UES ne suffisant pas pour démontrer que cette avenant prévoyait la déclinaison au plan local d'un accord national (ce qui est d'ailleurs contesté par les sociétés requérantes qui indiquent que cet avenant était d'application nationale) ;

Qu'enfin, il y a lieu de constater que l'accord du 20 janvier 2017 ne peut être qualifié de discriminatoire à l'égard des organisations syndicales ultra-marines ; en effet,

- alors que selon le système de calcul applicable hors Guadeloupe, Martinique, Guyane, Réunion et Mayotte, les organisations syndicales représentatives au niveau de l'établissement principal DO Caraïbes (dont l'effectif est de 800 équivalents temps plein en CDI) n'auraient pu désigner qu'un délégué syndical pour l'établissement principal DO Caraïbes et un délégué syndical par établissement secondaire, elles peuvent, grâce au système dérogatoire mis en place, désigner un DSEP DO Caraïbes Martinique, un DSEP DO Caraïbes Guadeloupe, un DSEP DO Caraïbes Guyane et pour chaque établissement secondaire : un DSES Martinique, un DSES Guadeloupe et un DSES Guyane puisque les cinq établissement secondaires de l'établissement principal DO Caraïbes couvrent tous plus de deux départements,

- que, s'agissant des déplacements s'il est exact que les DSEP et DSES basés en Martinique, Guadeloupe, Guyane, à la Réunion ou à Mayotte se voient rembourser, lorsque leur établissement de désignation couvre plusieurs départements, moins de déplacements au sein de tout l'établissement principal pour les DSEP / secondaire pour les DSES (4 déplacements par trimestre sur l'ensemble de l'établissement principal pour les DSEP et 1 déplacement par trimestre sur l'ensemble de l'établissement secondaire pour les DSES) et moins de déplacements en France métropolitaine que les autres délégués syndicaux nationaux (2 déplacements annuels), cette décision ne peut être considérée comme discriminatoire puisque compensée par le fait que les organisations syndicales peuvent désigner un délégué syndical par département couvert par l'EP et un délégué syndical par département couvert par l'établissement secondaire lorsque celui-ci couvre plus de deux départements et par le fait que les DSEP d'un même établissement principal / DSES d'un même établissement secondaire peuvent mutualiser leurs déplacements (Ainsi, en comptabilisant trois DSES pour l'établissement URC Caraïbes, on parvient à 6 déplacements annuels en France métropolitaine) ;

Sur la demande d'annulation des trois désignations de DS par le syndicat CGT Martinique PTT pour l'établissement secondaire URC Caraïbes ;

L'accord du 20 janvier 2017 prévoit en son paragraphe « 1.3 Les délégués syndicaux (DS) et les délégués syndicaux conventionnels d'établissements principaux (DSEP) et d'établissements secondaires (DSES) », article « 1.3.1 Nombre de DSEP et DSES » le « cas particulier de DS au sein des EP/ES basés dans les DOM » ;

Qu'ainsi :
- s'agissant des établissements principaux situés en Guadeloupe, Guyane, Martinique, réunion et à Mayotte, les organisations syndicales représentatives peuvent désigner un DSEP par département,
- s'agissant des établissements secondaires situés en Guadeloupe, Guyane, Martinique, réunion et à Mayotte, les organisations syndicales représentatives peuvent désigner un DSES par département lorsque l'établissement secondaire couvre plus de deux départements ;

Que l'interprétation de ce texte ne pose pas de difficulté particulière, ce même s'il y est question :
- de « DOM » - les territoires visés étant clairement identifiés : Guadeloupe, Guyane, Martinique, Réunion et Mayotte
- de « département administratif d'affectation » - la notion de département administratif d'affectation précité renvoyant à la Guadeloupe, la Guyane, la Martinique, la Réunion et à Mayotte

Qu'en l'espèce, l'URC Caraïbes (dont le siège social se trouve en Martinique) couvrant les territoires de Guadeloupe, Martinique et Guyane, la CGTM PTT, représentative au niveau de l'établissement principal DO Caraïbes, aurait dû désigner un DSES URC Caraïbes Guadeloupe, un DSES URC Caraïbes Martinique et un DSES URC Caraïbes Guyane ;

Que si ce syndicat a bien désigné parmi les salariés de l'établissement secondaire URC Caraïbes, trois DSES pour l'établissement secondaire URC Caraïbes, elle ne les a pas « ventilés » sur les trois territoires (DOM ou Collectivité territoriales) que couvre l'établissement URC Caraïbes ;

Qu'une telle ventilation a pourtant toute son importance puisque, ainsi que cela vient d'être vu, elle détermine le périmètre d'action du délégué syndical ;

Qu'il y a lieu en conséquence d'annuler les désignations par CGTM PTT de Monsieur Z... B..., Monsieur V... O... et Madame P... F... comme délégués syndicaux au sein de l'établissement secondaire URC Caraïbes (jugement p. 7 à 9).

1°) alors que, d'une part, il résulte de l'article 4 du code civil que les juges ne peuvent méconnaître les termes du litige; qu'au cas présent, les syndicats exposants ont toujours revendiqué être largement représentatifs au sein de l'établissement principal DO CARAIBES (conclusions en réplique n° 2 p.2 § 8 et s., produites) et les sociétés Orange, qui contestaient à titre d'employeurs, la désignation de plusieurs délégués syndicaux pour leur caractère supposé surnuméraire, ont expressément reconnu la représentativité de ces syndicats dans leur requête (requête p. 3 § 2 et 3, produite) ; qu'ainsi le tribunal ne pouvait affirmer que « le syndicat CGT
, qui ne conteste pas ne pas être représentatif au niveau de l'UES Orange, n'avait donc pas à être associé aux négociations en vue de l'accord du 20 janvier 2017 » sans dénaturer les termes du litige en violation de l'article 4 du code de procédure civile ;

2°) alors que, d'autre part, aux termes de l'article L 2231-1 du code du travail, les conventions ou accords collectifs de travail sont conclus entre d'une part, une ou plusieurs organisations syndicales de salariés représentatives dans le champ d'application de la convention ou de l'accord et d'autre part, entre un ou plusieurs employeurs pris individuellement; qu'au cas présent, l'accord du 20 janvier 2017 portait sur les désignations des délégués syndicaux dans l'ensemble de l'UES Orange et prévoyait un certain nombre d'exceptions pour les DOM (article 1.3.1 de l'accord) ; qu'il est acquis au débat que les syndicats exposants sont représentatifs au sein de l'établissement principal DO CARAIBES situé dans les DOM et donc dans le champ d'application de l'accord du 20 janvier 2017 ; qu'ainsi ces syndicats devaient être associés à la négociation et à la conclusion de cet accord; qu'en décidant le contraire, le tribunal a violé l'article susvisé ensemble l'accord du 20 janvier 2017 ;

3°) alors qu'en tout état de cause, à supposer que l'accord du 20 janvier 2017 soit opposable au syndicat exposant, il résulte de l'article 1.3.1 de cet accord que par exception et du fait de leur situation géographique particulière, pour les établissements secondaires de l'établissement principal DO Caraïbes, qui couvrent plus de deux départements, les OS représentatives peuvent désigner un DSES par département; qu'au cas présent, l'établissement secondaire en cause couvrant trois départements, Guadeloupe, Martinique et Guyane, il pouvait désigner trois DSES ; que le tribunal constatant que le syndicat a régulièrement désigné parmi les salariés de cet établissement secondaire, trois DSES, il ne pouvait annuler ces désignations au motif inopérant que l'établissement secondaire ne les aurait pas « ventilé » sur les trois territoires que couvrent l'établissement ; qu'en statuant comme il l'a fait, le tribunal n'a pas tiré les conséquences légales de ses propres constatations en violation de l'accord du 20 janvier 2017 ;

4°) alors qu'en outre, à supposer encore que l'accord du 20 janvier 2017 soit opposable au syndicat exposant, il résulte de l'article 1.3.3 de l'accord du 20 janvier 2017 que, par exception et du fait de la situation géographique particulière des établissements situés dans les DOM, « les DSES bénéficient de 12 déplacements trimestriels sur le périmètre de l'ES ou sur leur département de désignation pour ceux qui sont dans le cas où l'ES couvre plusieurs départements d'Outre-Mer », les DSES exerçant leur mandat de DS uniquement sur leur département administratif précité ; que cette exception est discriminatoire dans la mesure où dans les zones géographiques dépendant de l'UES d'Orange hors DOM les DS se déplacent librement contrairement au DS des DOM dont le champ de déplacement est limité au périmètre de l'ES ou du département de désignation; qu'en considérant cependant qu'il n'existait pas de discrimination, le tribunal a derechef violé l'accord du 20 janvier 2017 ;

5°) alors que, par ailleurs, les exposants invoquaient l'inopposabilité de l'accord du 20 janvier 2017 en raison d'un usage d'entreprise consistant à systématiquement décliner au plan local les accords nationaux , les déclinaisons locales étant négociées en tenant compte des spécificités des départements et territoires d'outre-mer et de la nécessité de prendre en compte la représentativité importante d'organisations syndicales locales telles que la CGTM et la CGTG ; qu'un usage d'entreprise ne pouvant être dénoncé que par un accord collectif, le tribunal ne pouvait refuser de tenir compte de l'usage d'entreprise résultant notamment de l'accord de déclinaison d'un accord national conclu en 2005 invoqué sans rechercher si cet accord de déclinaison avait été dénoncé par un accord collectif et si faute d'un tel accord, l'usage ne devait pas continuer à s'appliquer dans l'entreprise; qu'en ne le précisant pas, le tribunal a privé sa décision de base légale au regard de l'article L2261-9 du code du travail ;

6°) alors qu'enfin l'article 1.3.1 de l'accord du 20 janvier 2017 énonce en son dernier alinéa que « l'ensemble des modalités de calcul et de répartition décrites dans cet article entreront en vigueur à compter du début de la prochaine mandature soit fin 2017 et pour la durée de cette mandature"; qu'ainsi l'article 18 II de la loi n° 2017-256 du 28 février 2017 ouvrant notamment en Guadeloupe, Guyane et Martinique, à certains syndicats représentatifs la possibilité de négocier pour adapter au niveau d'un territoire les conventions et accords collectifs de travail dont le champ d'application est national en application de l'article L. 2222-1 du code du travail, lequel ouvre aux organisations syndicales habilitées à négocier dans ces mêmes territoires un délai de six mois à compter de la date d'entrée en vigueur des conventions et accords collectifs de travail dont le champ d'application est national pour conclure des accords dans le même champ, était applicable aux organisations syndicales exposantes; qu'en décidant le contraire, le tribunal a violé l'article 1.3.1 de l'accord du 20 janvier 2017 ensemble l'article 18 II de la loi n° 2017-256 du 28 février 2017 ;
Moyen produit au pourvoi n° F 18-15.648 par Me Bouthors, avocat aux Conseils, pour le syndicat CGT Martinique PTT, Mme N..., Mme H... et M. R...

Le moyen reproche au tribunal d'instance d'avoir constaté la validité de l'accord portant sur les moyens des organisations syndicales de l'UES Orange du 20 janvier 2017 et son opposabilité au syndicat CGTM PTT et d'avoir annulé en conséquence la désignation par le syndicat CGTM PTT de Mme K... N..., Mme J... H... et M. W... R... comme délégués syndicaux au sein de l'établissement secondaire AVSC Caraïbes ;

aux motifs que :

Sur la validité de l'accord portant sur les moyens des Organisations syndicales de l'UES Orange SA, Orange Caraïbe SA et Orange Porteaporte SA

En l'espèce, l'accord du 20 janvier 2017 a été conclu entre les sociétés Orange SA, Orange Caraïbe SA et Orange Portaporte SA, sociétés composant l'UES Orange, et les syndicats suivants : CFDT- F3C, FO-COM et SUD PTT ;

Egalement invités à négocier l'accord, les syndicats CFE-CGC et CGT-FAPT ne l'ont pas signé ;

Le syndicat CGTM PTT, qui ne conteste pas ne pas être représentatif au niveau de l'UES Orange, n'avait donc pas à être associé aux négociations en vue de l'accord du 20 janvier 2017 ;

Il y a lieu ici de rappeler qu'à la date de conclusion de l'accord du 20 janvier 2017, la loi n° 2017- 256 du 28 février 2017 n'était pas encore entrée en vigueur. Les dispositions de l'article 18 de cette loi, sur la représentativité des organisations syndicales de salariés et d'employeurs ultra-marines, ne pouvaient donc pas s'appliquer dans le cadre de la négociation de cet accord ;

Contrairement à ce qui est allégué par le syndicat CGTM PTT, ce syndicat n'avait pas non plus à être associé à une négociation au niveau local d'un accord d'adaptation de l'accord du 20 janvier 2017 ;

En effet, si l'article 18 de la loi n°2017-256 du 28 février 2017 ouvre en Guadeloupe, Guyane, Martinique, à Mayotte, La Réunion, Saint-Barthélemy, Saint-Martin et Saint-Pierre-et-Miquelon à certains syndicats représentatifs (syndicats qui cumulativement : respectent les valeurs républicaines, ont recueilli au moins 8 % des suffrages exprimés résultant de l'addition au niveau d'un des territoires mentionnés au premier alinéa du I du présent article des suffrages exprimés au premier tour des dernières élections des titulaires aux comités d'entreprise ou de la délégation unique du personnel ou, à défaut, des délégués du personnel, quel que soit le nombre de votants, des suffrages exprimés au scrutin concernant les entreprises de moins de onze salariés dans les conditions prévues aux articles L. 2122-10-1 et suivants du code du travail ainsi que des suffrages exprimés aux élections des membres représentant les salariés aux chambres départementales d'agriculture dans les conditions prévues à l'article L. 2122-6 du même code, ont une ancienneté minimale de deux ans dans le champ professionnel et géographique couvrant le niveau de la négociation ; cette ancienneté s'apprécie à compter de la date de dépôt légal des statuts) la possibilité de négocier pour « adapter au niveau d'un territoire mentionné au premier alinéa du I du présent article les conventions et accords collectifs de travail dont le champ d'application est national en application de l'article L. 2222-1 du code du travail », il y a lieu de relever que le dernier alinéa de l'article L. 2222-1 du code du travail ouvrant « aux organisations syndicales de salariés et d'employeurs habilitées à négocier en Guadeloupe, en Guyane, en Martinique, à Mayotte, à La Réunion, à Saint-Barthélemy, à Saint-Martin et à Saint-Pierre-et-Miquelon un délai de six mois à compter de la date d'entrée en vigueur des conventions et accords collectifs de travail dont le champ d'application est national pour conclure des accords dans le même champ si elles le souhaitent n'est applicable qu'à compter du 1er avril 2017, pour les conventions et accords conclus après cette date ;

L'accord conclu le 20 janvier 2017, dont il n'est pas allégué qu'il aurait été négocié avec des syndicats ne remplissant pas les conditions de représentativité, s'applique dans toute l'UES Orange, ainsi que cela ressort du paragraphe « champ d'application » de l'accord ; que s'agissant d'un accord portant sur les moyens des Organisations syndicales de l'UES Orange, il était bien opposable au syndicat CGT Martinique PTT ;

En effet, cet accord a dénoncé totalement ou partiellement des accords qui s'appliquaient aux sociétés de l'UES orange, parmi lesquels l'accord sur l'architecture des IRP dans le cadre de l'UES du 2 juillet 2008 ainsi que ses avenants postérieurs signés pour une durée déterminée, dont l'avenant n° 3 du 4 mai 2011 ;

En outre, les défendeurs, qui se prévalent de l'existence d'un usage d'entreprise consistant à systématiquement décliner au plan local les accords nationaux, ne rapportent pas la preuve de l'existence d'un tel usage en ne produisant qu'un accord de déclinaison d'un accord national conclu en 2005 entre la Direction régionale de France Telecom Guadeloupe et les organisations syndicales suivantes : CFDT, CFE-CGC, CFTC, CGT et FO - la production d'une annexe à l'avenant n°3 du 4 mai 2011 à l'accord d'architecture IRP de l'UES ne suffisant pas pour démontrer que cette avenant prévoyait la déclinaison au plan local d'un accord national (ce qui est d'ailleurs contesté par les sociétés requérantes qui indiquent que cet avenant était d'application nationale) ;
Enfin, il y a lieu de constater que l'accord du 20 janvier 2017 ne peut être qualifié de discriminatoire à l'égard des organisations syndicales ultra-marines ; en effet,

- alors que selon le système de calcul applicable hors Guadeloupe, Martinique, Guyane, Réunion et Mayotte, les organisations syndicales représentatives au niveau de l'établissement principal DO Caraïbes (dont l'effectif est de 800 équivalents temps plein en CDI) n'auraient pu désigner qu'un délégué syndical pour l'établissement principal DO Caraïbes et un délégué syndical par établissement secondaire, elles peuvent, grâce au système dérogatoire mis en place, désigner un DSEP DO Caraïbes Martinique, un DSEP DO Caraïbes Guadeloupe, un DSEP DO Caraïbes Guyane et pour chaque établissement secondaire : un DSES Martinique, un DSES Guadeloupe et un DSES Guyane puisque les cinq établissement secondaires de l'établissement principal DO Caraïbes couvrent tous plus de deux départements,

- s'agissant des déplacements s'il est exact que les DSEP et DSES basés en Martinique, Guadeloupe, Guyane, à la Réunion ou à Mayotte se voient rembourser, lorsque leur établissement de désignation couvre plusieurs départements, moins de déplacements au sein de tout l'établissement principal pour les DSEP / secondaire pour les DSES (4 déplacements par trimestre sur l'ensemble de l'établissement principal pour les DSEP et 1 déplacement par trimestre sur l'ensemble de l'établissement secondaire pour les DSES) et moins de déplacements en France métropolitaine que les autres délégués syndicaux nationaux (2 déplacements annuels), cette décision ne peut être considérée comme discriminatoire puisque compensée par le fait que les organisations syndicales peuvent désigner un délégué syndical par département couvert par l'EP et un délégué syndical par département couvert par l'établissement secondaire lorsque celui-ci couvre plus de deux départements et par le fait que les DSEP d'un même établissement principal / DSES d'un même établissement secondaire peuvent mutualiser leurs déplacements (Ainsi, en comptabilisant trois DSES pour l'établissement AVSC Caraïbes, on parvient à 6 déplacements annuels en France métropolitaine) ;

Sur la demande d'annulation des trois désignations de DS par le syndicat CGT Martinique PTT pour l'établissement secondaire AVSC Caraïbes ;

L'accord du 20 janvier 2017 prévoit en son paragraphe « 1.3 Les délégués syndicaux (DS) et les délégués syndicaux conventionnels d'établissements principaux (DSEP) et d'établissements secondaires (DSES) », article « 1.3.1 Nombre de DSEP et DSES » le « cas particulier de DS au sein des EP/ES basés dans les DOM » ;

Ainsi :
- s'agissant des établissements principaux situés en Guadeloupe, Guyane, Martinique, réunion et à Mayotte, les organisations syndicales représentatives peuvent désigner un DSEP par département,
- s'agissant des établissements secondaires situés en Guadeloupe, Guyane, Martinique, réunion et à Mayotte, les organisations syndicales représentatives peuvent désigner un DSES par département lorsque l'établissement secondaire couvre plus de deux départements ;

L'interprétation de ce texte ne pose pas de difficulté particulière, ce même s'il y est question :

- de « DOM » - les territoires visés étant clairement identifiés : Guadeloupe, Guyane, Martinique, Réunion et Mayotte
- de « département administratif d'affectation » - la notion de département administratif d'affectation précité renvoyant à la Guadeloupe, la Guyane, la Martinique, la Réunion et à Mayotte

En l'espèce, l'établissement secondaire AVSC Caraïbes (dont le siège social se trouve en Martinique) couvrant les territoires de Guadeloupe, Martinique et Guyane, la CGTM PTT, représentative au niveau de l'établissement principal DO Caraïbes, aurait dû désigner un DSES AVSC Caraïbes Guadeloupe, un DSES AVSC Caraïbes Martinique et un DSES AVSC Caraïbes Guyane ;

Si ce syndicat a bien désigné parmi les salariés de l'établissement secondaire AVSC Caraïbes, trois DSES pour l'établissement secondaire AVSC Caraïbes, elle ne les a pas « ventilés » sur les trois territoires (DOM ou Collectivité territoriales) que couvre l'établissement AVSC Caraïbes ;

Une telle ventilation a pourtant toute son importance puisque, ainsi que cela vient d'être vu, elle détermine le périmètre d'action du délégué syndical ;

Il y a lieu en conséquence d'annuler les désignations par CGTM PTT de Madame K... N..., Madame J... H... et Monsieur W... R... comme délégués syndicaux au sein de l'établissement secondaire AVSC Caraïbes (jugement p. 7 à 9).

1°) alors que, d'une part, il résulte de l'article 4 du code civil que les juges ne peuvent méconnaître les termes du litige; qu'au cas présent, les syndicats exposants ont toujours revendiqué être largement représentatifs au sein de l'établissement principal DO CARAIBES (conclusions en réplique n° 2 p.2 § 8 et s., produites) et les sociétés Orange, qui contestaient à titre d'employeurs, la désignation de plusieurs délégués syndicaux pour leur caractère supposé surnuméraire, ont expressément reconnu la représentativité de ces syndicats dans leur requête (requête p. 3 § 2 et 3, produite) ; qu'ainsi le tribunal ne pouvait affirmer que « le syndicat CGT
, qui ne conteste pas ne pas être représentatif au niveau de l'UES Orange, n'avait donc pas à être associé aux négociations en vue de l'accord du 20 janvier 2017 » sans dénaturer les termes du litige en violation de l'article 4 du code de procédure civile ;

2°) alors que, d'autre part, aux termes de l'article L 2231-1 du code du travail, les conventions ou accords collectifs de travail sont conclus entre d'une part, une ou plusieurs organisations syndicales de salariés représentatives dans le champ d'application de la convention ou de l'accord et d'autre part, entre un ou plusieurs employeurs pris individuellement; qu'au cas présent, l'accord du 20 janvier 2017 portait sur les désignations des délégués syndicaux dans l'ensemble de l'UES Orange et prévoyait un certain nombre d'exceptions pour les DOM (article 1.3.1 de l'accord); qu'il est acquis au débat que les syndicats exposants sont représentatifs au sein de l'établissement principal DO CARAIBES situé dans les DOM et donc dans le champ d'application de l'accord du 20 janvier 2017 ; qu'ainsi ces syndicats devaient être associés à la négociation et à la conclusion de cet accord; qu'en décidant le contraire, le tribunal a violé l'article susvisé ensemble l'accord du 20 janvier 2017;

3°) alors qu'en tout état de cause, à supposer que l'accord du 20 janvier 2017 soit opposable au syndicat exposant, il résulte de l'article 1.3.1 de cet accord que par exception et du fait de leur situation géographique particulière, pour les établissements secondaires de l'établissement principal DO Caraïbes, qui couvrent plus de deux départements, les OS représentatives peuvent désigner un DSES par département; qu'au cas présent, l'établissement secondaire en cause couvrant trois départements, Guadeloupe, Martinique et Guyane, il pouvait désigner trois DSES; que le tribunal constatant que le syndicat a régulièrement désigné parmi les salariés de cet établissement secondaire, trois DSES, il ne pouvait annuler ces désignations au motif inopérant que l'établissement secondaire ne les aurait pas « ventilé » sur les trois territoires que couvrent l'établissement ; qu'en statuant comme il l'a fait, le tribunal n'a pas tiré les conséquences légales de ses propres constatations en violation de l'accord du 20 janvier 2017 ;

4°) alors qu'en outre, à supposer encore que l'accord du 20 janvier 2017 soit opposable au syndicat exposant, il résulte de l'article 1.3.3 de l'accord du 20 janvier 2017 que, par exception et du fait de la situation géographique particulière des établissements situés dans les DOM, « les DSES bénéficient de 12 déplacements trimestriels sur le périmètre de l'ES ou sur leur département de désignation pour ceux qui sont dans le cas où l'ES couvre plusieurs départements d'Outre-Mer », les DSES exerçant leur mandat de DS uniquement sur leur département administratif précité; que cette exception est discriminatoire dans la mesure où dans les zones géographiques dépendant de l'UES d'Orange hors DOM les DS se déplacent librement contrairement au DS des DOM dont le champ de déplacement est limité au périmètre de l'ES ou du département de désignation; qu'en considérant cependant qu'il n'existait pas de discrimination, le tribunal a derechef violé l'accord du 20 janvier 2017 ;

5°) alors que, par ailleurs, les exposants invoquaient l'inopposabilité de l'accord du 20 janvier 2017 en raison d'un usage d'entreprise consistant à systématiquement décliner au plan local les accords nationaux , les déclinaisons locales étant négociées en tenant compte des spécificités des départements et territoires d'outre-mer et de la nécessité de prendre en compte la représentativité importante d'organisations syndicales locales telles que la CGTM et la CGTG ; qu'un usage d'entreprise ne pouvant être dénoncé que par un accord collectif, le tribunal ne pouvait refuser de tenir compte de l'usage d'entreprise résultant notamment de l'accord de déclinaison d'un accord national conclu en 2005 invoqué sans rechercher si cet accord de déclinaison avait été dénoncé par un accord collectif et si faute d'un tel accord, l'usage ne devait pas continuer à s'appliquer dans l'entreprise; qu'en ne le précisant pas, le tribunal a privé sa décision de base légale au regard de l'article L2261-9 du code du travail ;

6°) alors qu'enfin l'article 1.3.1 de l'accord du 20 janvier 2017 énonce en son dernier alinéa que « l'ensemble des modalités de calcul et de répartition décrites dans cet article entreront en vigueur à compter du début de la prochaine mandature soit fin 2017 et pour la durée de cette mandature"; qu'ainsi l'article 18 II de la loi n° 2017-256 du 28 février 2017 ouvrant notamment en Guadeloupe, Guyane et Martinique, à certains syndicats représentatifs la possibilité de négocier pour adapter au niveau d'un territoire les conventions et accords collectifs de travail dont le champ d'application est national en application de l'article L. 2222-1 du code du travail, lequel ouvre aux organisations syndicales habilitées à négocier dans ces mêmes territoires un délai de six mois à compter de la date d'entrée en vigueur des conventions et accords collectifs de travail dont le champ d'application est national pour conclure des accords dans le même champ, était applicable aux organisations syndicales exposantes; qu'en décidant le contraire, le tribunal a violé l'article 1.3.1 de l'accord du 20 janvier 2017 ensemble l'article 18 II de la loi n° 2017-256 du 28 février 2017;

Moyen produit au pourvoi n° H 18-15.649 par Me Bouthors, avocat aux Conseils, pour le syndicat CGT Guadeloupe, M. E..., M. L... et M. M...

Le moyen reproche au tribunal d'instance d'avoir constaté la validité de l'accord portant sur les moyens des organisations syndicales de l'UES Orange du 20 janvier 2017 et son opposabilité au syndicat CGT Guadeloupe Télécom et d'avoir en conséquence annulé les désignations par le syndicat CGTG Télécom de M. Q... U..., M. S... L... et X... M... comme délégués syndicaux au sein de l'établissement secondaire URC Caraïbes ;

aux motifs qu'en l'espèce, l'accord du 20 janvier 2017 a été conclu entre les sociétés Orange SA, Orange Caraïbe SA et Orange Portaporte SA, sociétés composant l'UES Orange, et les syndicats suivants : CFDT- F3C, FO-COM et SUD PTT ;

Qu'également invités à négocier l'accord, les syndicats CFE-CGC et CGT-FAPT ne l'ont pas signé ;

Que le syndicat CGTG Télécom, qui ne conteste pas ne pas être représentatif au niveau de l'UES Orange, n'avait donc pas à être associé aux négociations en vue de l'accord du 20 janvier 2017 ;

Qu'il y a lieu ici de rappeler qu'à la date de conclusion de l'accord du 20 janvier 2017, la loi n° 2017-256 du 28 février 2017 n'était pas encore entrée en vigueur. Les dispositions de l'article 18 de cette loi, sur la représentativité des organisations syndicales de salariés et d'employeurs ultra-marines, ne pouvaient donc pas s'appliquer dans le cadre de la négociation de cet accord ;

Que contrairement à ce qui est allégué par le syndicat CGTG Télécom, ce syndicat n'avait pas non plus à être associé à une négociation au niveau local d'un accord d'adaptation de l'accord du 20 janvier 2017 ;

Qu'en effet, si l'article 18 de la loi n°2017-256 du 28 février 2017 ouvre en Guadeloupe, Guyane, Martinique, à Mayotte, La Réunion, Saint-Barthélemy, Saint-Martin et Saint-Pierre-et-Miquelon à certains syndicats représentatifs (syndicats qui cumulativement : respectent les valeurs républicaines, ont recueilli au moins 8 % des suffrages exprimés résultant de l'addition au niveau d'un des territoires mentionnés au premier alinéa du I du présent article des suffrages exprimés au premier tour des dernières élections des titulaires aux comités d'entreprise ou de la délégation unique du personnel ou, à défaut, des délégués du personnel, quel que soit le nombre de votants, des suffrages exprimés au scrutin concernant les entreprises de moins de onze salariés dans les conditions prévues aux articles L. 2122-10-1 et suivants du code du travail ainsi que des suffrages exprimés aux élections des membres représentant les salariés aux chambres départementales d'agriculture dans les conditions prévues à l'article L. 2122-6 du même code, ont une ancienneté minimale de deux ans dans le champ professionnel et géographique couvrant le niveau de la négociation ; cette ancienneté s'apprécie à compter de la date de dépôt légal des statuts) la possibilité de négocier pour « adapter au niveau d'un territoire mentionné au premier alinéa du I du présent article les conventions et accords collectifs de travail dont le champ d'application est national en application de l'article L. 2222-1 du code du travail », il y a lieu de relever que le dernier alinéa de l'article L. 2222-1 du code du travail ouvrant « aux organisations syndicales de salariés et d'employeurs habilitées à négocier en Guadeloupe, en Guyane, en Martinique, à Mayotte, à La Réunion, à Saint-Barthélemy, à Saint-Martin et à Saint-Pierre-et-Miquelon un délai de six mois à compter de la date d'entrée en vigueur des conventions et accords collectifs de travail dont le champ d'application est national pour conclure des accords dans le même champ si elles le souhaitent n'est applicable qu'à compter du 1er avril 2017, pour les conventions et accords conclus après cette date ;

Que l'accord conclu le 20 janvier 2017, dont il n'est pas allégué qu'il aurait été négocié avec des syndicats ne remplissant pas les conditions de représentativité, s'applique dans toute l'UES Orange, ainsi que cela ressort du paragraphe « champ d'application » de l'accord ; que s'agissant d'un accord portant sur les moyens des Organisations syndicales de l'UES Orange, il était bien opposable au syndicat CGT Guadeloupe Télécom ;

Qu'en effet, cet accord a dénoncé totalement ou partiellement des accords qui s'appliquaient aux sociétés de l'UES orange, parmi lesquels l'accord sur l'architecture des IRP dans le cadre de l'UES du 2 juillet 2008 ainsi que ses avenants postérieurs signés pour une durée déterminée, dont l'avenant n° 3 du 4 mai 2011 ;

Qu'en outre, les défendeurs, qui se prévalent de l'existence d'un usage d'entreprise consistant à systématiquement décliner au plan local les accords nationaux, ne rapportent pas la preuve de l'existence d'un tel usage en ne produisant qu'un accord de déclinaison d'un accord national conclu en 2005 entre la Direction régionale de France Telecom Guadeloupe et les organisations syndicales suivantes : CFDT, CFE-CGC, CFTC, CGT et FO - la production d'une annexe à l'avenant n°3 du 4 mai 2011 à l'accord d'architecture IRP de l'UES ne suffisant pas pour démontrer que cette avenant prévoyait la déclinaison au plan local d'un accord national (ce qui est d'ailleurs contesté par les sociétés requérantes qui indiquent que cet avenant était d'application nationale) ;

Qu'enfin, il y a lieu de constater que l'accord du 20 janvier 2017 ne peut être qualifié de discriminatoire à l'égard des organisations syndicales ultra-marines ; en effet,

- alors que selon le système de calcul applicable hors Guadeloupe, Martinique, Guyane, Réunion et Mayotte, les organisations syndicales représentatives au niveau de l'établissement principal DO Caraïbes (dont l'effectif est de 800 équivalents temps plein en CDI) n'auraient pu désigner qu'un délégué syndical pour l'établissement principal DO Caraïbes et un délégué syndical par établissement secondaire, elles peuvent, grâce au système dérogatoire mis en place, désigner un DSEP DO Caraïbes Martinique, un DSEP DO Caraïbes Guadeloupe, un DSEP DO Caraïbes Guyane et pour chaque établissement secondaire : un DSES Martinique, un DSES Guadeloupe et un DSES Guyane puisque les cinq établissement secondaires de l'établissement principal DO Caraïbes couvrent tous plus de deux départements,

- que, s'agissant des déplacements s'il est exact que les DSEP et DSES basés en Martinique, Guadeloupe, Guyane, à la Réunion ou à Mayotte se voient rembourser, lorsque leur établissement de désignation couvre plusieurs départements, moins de déplacements au sein de tout l'établissement principal pour les DSEP / secondaire pour les DSES (4 déplacements par trimestre sur l'ensemble de l'établissement principal pour les DSEP et 1 déplacement par trimestre sur l'ensemble de l'établissement secondaire pour les DSES) et moins de déplacements en France métropolitaine que les autres délégués syndicaux nationaux (2 déplacements annuels), cette décision ne peut être considérée comme discriminatoire puisque compensée par le fait que les organisations syndicales peuvent désigner un délégué syndical par département couvert par l'EP et un délégué syndical par département couvert par l'établissement secondaire lorsque celui-ci couvre plus de deux départements et par le fait que les DSEP d'un même établissement principal / DSES d'un même établissement secondaire peuvent mutualiser leurs déplacements (Ainsi, en comptabilisant trois DSES pour l'établissement URC Caraïbes, on parvient à 6 déplacements annuels en France métropolitaine) ;

Sur la demande d'annulation des trois désignations de DS par le syndicat CGT Guadeloupe pour l'établissement secondaire URC Caraïbes ;

L'accord du 20 janvier 2017 prévoit en son paragraphe « 1.3 Les délégués syndicaux (DS) et les délégués syndicaux conventionnels d'établissements principaux (DSEP) et d'établissements secondaires (DSES) », article « 1.3.1 Nombre de DSEP et DSES » le « cas particulier de DS au sein des EP/ES basés dans les DOM » ;

Qu'ainsi :
- s'agissant des établissements principaux situés en Guadeloupe, Guyane, Martinique, réunion et à Mayotte, les organisations syndicales représentatives peuvent désigner un DSEP par département,
- s'agissant des établissements secondaires situés en Guadeloupe, Guyane, Martinique, réunion et à Mayotte, les organisations syndicales représentatives peuvent désigner un DSES par département lorsque l'établissement secondaire couvre plus de deux départements ;

Que l'interprétation de ce texte ne pose pas de difficulté particulière, ce même s'il y est question :
- de « DOM » - les territoires visés étant clairement identifiés : Guadeloupe, Guyane, Martinique, Réunion et Mayotte

- de « département administratif d'affectation » - la notion de département administratif d'affectation précité renvoyant à la Guadeloupe, la Guyane, la Martinique, la Réunion et à Mayotte

Qu'en l'espèce, l'établissement URC Caraïbes (dont le siège social se trouve en Martinique) couvrant les territoires de Guadeloupe, Martinique et Guyane, la CGTG Télécom, représentative au niveau de l'établissement principal DO Caraïbes, aurait dû désigner un DSES URC Caraïbes Guadeloupe, un DSES URC Caraïbes Martinique et un DSES URC Caraïbes Guyane ;

Que si ce syndicat a bien désigné parmi les salariés de l'établissement secondaire URC Caraïbes, trois DSES pour l'établissement secondaire URC Caraïbes, elle ne les a pas « ventilés » sur les trois territoires (DOM ou Collectivité territoriales) que couvre l'établissement URC Caraïbes ;

Qu'une telle ventilation a pourtant toute son importance puisque, ainsi que cela vient d'être vu, elle détermine le périmètre d'action du délégué syndical ;

Qu'il y a lieu en conséquence d'annuler les désignations par CGTG Télécom de Q... U..., S... L... et X... M... comme délégués syndicaux au sein de l'établissement secondaire URC Caraïbes ; (jugement p. 7 à 9).

1°) alors que, d'une part, il résulte de l'article 4 du code civil que les juges ne peuvent méconnaître les termes du litige; qu'au cas présent, les syndicats exposants ont toujours revendiqué être largement représentatifs au sein de l'établissement principal DO CARAIBES (conclusions en réplique n° 2 p.2 § 8 et s., produites) et les sociétés Orange, qui contestaient à titre d'employeurs, la désignation de plusieurs délégués syndicaux pour leur caractère supposé surnuméraire, ont expressément reconnu la représentativité de ces syndicats dans leur requête (requête p. 3 § 2 et 3, produite) ; qu'ainsi le tribunal ne pouvait affirmer que « le syndicat CGT
, qui ne conteste pas ne pas être représentatif au niveau de l'UES Orange, n'avait donc pas à être associé aux négociations en vue de l'accord du 20 janvier 2017 » sans dénaturer les termes du litige en violation de l'article 4 du code de procédure civile ;

2°) alors que, d'autre part, aux termes de l'article L 2231-1 du code du travail, les conventions ou accords collectifs de travail sont conclus entre d'une part, une ou plusieurs organisations syndicales de salariés représentatives dans le champ d'application de la convention ou de l'accord et d'autre part, entre un ou plusieurs employeurs pris individuellement; qu'au cas présent, l'accord du 20 janvier 2017 portait sur les désignations des délégués syndicaux dans l'ensemble de l'UES Orange et prévoyait un certain nombre d'exceptions pour les DOM (article 1.3.1 de l'accord) ;

qu'il est acquis au débat que les syndicats exposants sont représentatifs au sein de l'établissement principal DO CARAIBES situé dans les DOM et donc dans le champ d'application de l'accord du 20 janvier 2017 ; qu'ainsi ces syndicats devaient être associés à la négociation et à la conclusion de cet accord; qu'en décidant le contraire, le tribunal a violé l'article susvisé ensemble l'accord du 20 janvier 2017 ;

3°) alors qu'en tout état de cause, à supposer que l'accord du 20 janvier 2017 soit opposable au syndicat exposant, il résulte de l'article 1.3.1 de cet accord que par exception et du fait de leur situation géographique particulière, pour les établissements secondaires de l'établissement principal DO Caraïbes, qui couvrent plus de deux départements, les OS représentatives peuvent désigner un DSES par département; qu'au cas présent, l'établissement secondaire en cause couvrant trois départements, Guadeloupe, Martinique et Guyane, il pouvait désigner trois DSES; que le tribunal constatant que le syndicat a régulièrement désigné parmi les salariés de cet établissement secondaire, trois DSES, il ne pouvait annuler ces désignations au motif inopérant que l'établissement secondaire ne les aurait pas « ventilé » sur les trois territoires que couvrent l'établissement ; qu'en statuant comme il l'a fait, le tribunal n'a pas tiré les conséquences légales de ses propres constatations en violation de l'accord du 20 janvier 2017 ;

4°) alors qu'en outre, à supposer encore que l'accord du 20 janvier 2017 soit opposable au syndicat exposant, il résulte de l'article 1.3.3 de l'accord du 20 janvier 2017 que, par exception et du fait de la situation géographique particulière des établissements situés dans les DOM, « les DSES bénéficient de 12 déplacements trimestriels sur le périmètre de l'ES ou sur leur département de désignation pour ceux qui sont dans le cas où l'ES couvre plusieurs départements d'Outre-Mer », les DSES exerçant leur mandat de DS uniquement sur leur département administratif précité; que cette exception est discriminatoire dans la mesure où dans les zones géographiques dépendant de l'UES d'Orange hors DOM les DS se déplacent librement contrairement au DS des DOM dont le champ de déplacement est limité au périmètre de l'ES ou du département de désignation; qu'en considérant cependant qu'il n'existait pas de discrimination, le tribunal a derechef violé l'accord du 20 janvier 2017 ;

5°) alors que, par ailleurs, les exposants invoquaient l'inopposabilité de l'accord du 20 janvier 2017 en raison d'un usage d'entreprise consistant à systématiquement décliner au plan local les accords nationaux , les déclinaisons locales étant négociées en tenant compte des spécificités des départements et territoires d'outre-mer et de la nécessité de prendre en compte la représentativité importante d'organisations syndicales locales telles que la CGTM et la CGTG ; qu'un usage d'entreprise ne pouvant être dénoncé que par un accord collectif, le tribunal ne pouvait refuser de tenir compte de l'usage d'entreprise résultant notamment de l'accord de déclinaison d'un accord national conclu en 2005 invoqué sans rechercher si cet accord de déclinaison avait été dénoncé par un accord collectif et si faute d'un tel accord, l'usage ne devait pas continuer à s'appliquer dans l'entreprise; qu'en ne le précisant pas, le tribunal a privé sa décision de base légale au regard de l'article L2261-9 du code du travail ;

6°) alors qu'enfin l'article 1.3.1 de l'accord du 20 janvier 2017 énonce en son dernier alinéa que « l'ensemble des modalités de calcul et de répartition décrites dans cet article entreront en vigueur à compter du début de la prochaine mandature soit fin 2017 et pour la durée de cette mandature"; qu'ainsi l'article 18 II de la loi n° 2017-256 du 28 février 2017 ouvrant notamment en Guadeloupe, Guyane et Martinique, à certains syndicats représentatifs la possibilité de négocier pour adapter au niveau d'un territoire les conventions et accords collectifs de travail dont le champ d'application est national en application de l'article L. 2222-1 du code du travail, lequel ouvre aux organisations syndicales habilitées à négocier dans ces mêmes territoires un délai de six mois à compter de la date d'entrée en vigueur des conventions et accords collectifs de travail dont le champ d'application est national pour conclure des accords dans le même champ, était applicable aux organisations syndicales exposantes; qu'en décidant le contraire, le tribunal a violé l'article 1.3.1 de l'accord du 20 janvier 2017 ensemble l'article 18 II de la loi n° 2017-256 du 28 février 2017.

Moyen produit au pourvoi n° G 18-15.650 par Me Bouthors, avocat aux Conseils, pour le syndicat CGT Guadeloupe, Mme A... et M. G...

Le moyen reproche au tribunal d'instance d'avoir constaté la validité de l'accord portant sur les moyens des organisations syndicales de l'UES Orange du 20 janvier 2017 et son opposabilité au syndicat CGT Guadeloupe Télécom et d'avoir en conséquence annulé les désignations par le syndicat CGTG Télécom de Mme T... A... et M. Y... G... comme délégués syndicaux au sein de l'établissement secondaire au sein de l'établissement secondaire AVSC Caraïbes ;

aux motifs qu'en l'espèce, l'accord du 20 janvier 2017 a été conclu entre les sociétés Orange SA, Orange Caraïbe SA et Orange Portaporte SA, sociétés composant l'UES Orange, et les syndicats suivants : CFDT- F3C, FO-COM et SUD PTT ;

Qu'également invités à négocier l'accord, les syndicats CFE-CGC et CGT-FAPT ne l'ont pas signé ;

Que le syndicat CGTF Télécom, qui ne conteste pas ne pas être représentatif au niveau de l'UES Orange, n'avait donc pas à être associé aux négociations en vue de l'accord du 20 janvier 2017 ;

Qu'il y a lieu ici de rappeler qu'à la date de conclusion de l'accord du 20 janvier 2017, la loi n° 2017-256 du 28 février 2017 n'était pas encore entrée en vigueur. Les dispositions de l'article 18 de cette loi, sur la représentativité des organisations syndicales de salariés et d'employeurs ultra-marines, ne pouvaient donc pas s'appliquer dans le cadre de la négociation de cet accord ;

Que contrairement à ce qui est allégué par le syndicat CGTG Télécom, ce syndicat n'avait pas non plus à être associé à une négociation au niveau local d'un accord d'adaptation de l'accord du 20 janvier 2017 ;

Qu'en effet, si l'article 18 de la loi n°2017-256 du 28 février 2017 ouvre en Guadeloupe, Guyane, Martinique, à Mayotte, La Réunion, Saint-Barthélemy, Saint-Martin et Saint-Pierre-et-Miquelon à certains syndicats représentatifs (syndicats qui cumulativement : respectent les valeurs républicaines, ont recueilli au moins 8 % des suffrages exprimés résultant de l'addition au niveau d'un des territoires mentionnés au premier alinéa du I du présent article des suffrages exprimés au premier tour des dernières élections des titulaires aux comités d'entreprise ou de la délégation unique du personnel ou, à défaut, des délégués du personnel, quel que soit le nombre de votants, des suffrages exprimés au scrutin concernant les entreprises de moins de onze salariés dans les conditions prévues aux articles L. 2122-10-1 et suivants du code du travail ainsi que des suffrages exprimés aux élections des membres représentant les salariés aux chambres départementales d'agriculture dans les conditions prévues à l'article L. 2122-6 du même code, ont une ancienneté minimale de deux ans dans le champ professionnel et géographique couvrant le niveau de la négociation ; cette ancienneté s'apprécie à compter de la date de dépôt légal des statuts) la possibilité de négocier pour « adapter au niveau d'un territoire mentionné au premier alinéa du I du présent article les conventions et accords collectifs de travail dont le champ d'application est national en application de l'article L. 2222-1 du code du travail », il y a lieu de relever que le dernier alinéa de l'article L. 2222-1 du code du travail ouvrant « aux organisations syndicales de salariés et d'employeurs habilitées à négocier en Guadeloupe, en Guyane, en Martinique, à Mayotte, à La Réunion, à Saint-Barthélemy, à Saint-Martin et à Saint-Pierre-et-Miquelon un délai de six mois à compter de la date d'entrée en vigueur des conventions et accords collectifs de travail dont le champ d'application est national pour conclure des accords dans le même champ si elles le souhaitent n'est applicable qu'à compter du 1er avril 2017, pour les conventions et accords conclus après cette date ;

Que l'accord conclu le 20 janvier 2017, dont il n'est pas allégué qu'il aurait été négocié avec des syndicats ne remplissant pas les conditions de représentativité, s'applique dans toute l'UES Orange, ainsi que cela ressort du paragraphe « champ d'application » de l'accord ; que s'agissant d'un accord portant sur les moyens des Organisations syndicales de l'UES Orange, il était bien opposable au syndicat CGT Guadeloupe Télécom ;

Qu'en effet, cet accord a dénoncé totalement ou partiellement des accords qui s'appliquaient aux sociétés de l'UES orange, parmi lesquels l'accord sur l'architecture des IRP dans le cadre de l'UES du 2 juillet 2008 ainsi que ses avenants postérieurs signés pour une durée déterminée, dont l'avenant n° 3 du 4 mai 2011 ;

Qu'en outre, les défendeurs, qui se prévalent de l'existence d'un usage d'entreprise consistant à systématiquement décliner au plan local les accords nationaux, ne rapportent pas la preuve de l'existence d'un tel usage en ne produisant qu'un accord de déclinaison d'un accord national conclu en 2005 entre la Direction régionale de France Telecom Guadeloupe et les organisations syndicales suivantes : CFDT, CFE-CGC, CFTC, CGT et FO - la production d'une annexe à l'avenant n°3 du 4 mai 2011 à l'accord d'architecture IRP de l'UES ne suffisant pas pour démontrer que cette avenant prévoyait la déclinaison au plan local d'un accord national (ce qui est d'ailleurs contesté par les sociétés requérantes qui indiquent que cet avenant était d'application nationale) ;

Qu'enfin, il y a lieu de constater que l'accord du 20 janvier 2017 ne peut être qualifié de discriminatoire à l'égard des organisations syndicales ultra-marines ; en effet,

- alors que selon le système de calcul applicable hors Guadeloupe, Martinique, Guyane, Réunion et Mayotte, les organisations syndicales représentatives au niveau de l'établissement principal DO Caraïbes (dont l'effectif est de 800 équivalents temps plein en CDI) n'auraient pu désigner qu'un délégué syndical pour l'établissement principal DO Caraïbes et un délégué syndical par établissement secondaire, elles peuvent, grâce au système dérogatoire mis en place, désigner un DSEP DO Caraïbes Martinique, un DSEP DO Caraïbes Guadeloupe, un DSEP DO Caraïbes Guyane et pour chaque établissement secondaire : un DSES Martinique, un DSES Guadeloupe et un DSES Guyane puisque les cinq établissement secondaires de l'établissement principal DO Caraïbes couvrent tous plus de deux départements, - que, s'agissant des déplacements s'il est exact que les DSEP et DSES basés en Martinique, Guadeloupe, Guyane, à la Réunion ou à Mayotte se voient rembourser, lorsque leur établissement de désignation couvre plusieurs départements, moins de déplacements au sein de tout l'établissement principal pour les DSEP / secondaire pour les DSES (4 déplacements par trimestre sur l'ensemble de l'établissement principal pour les DSEP et 1 déplacement par trimestre sur l'ensemble de l'établissement secondaire pour les DSES) et moins de déplacements en France métropolitaine que les autres délégués syndicaux nationaux (2 déplacements annuels), cette décision ne peut être considérée comme discriminatoire puisque compensée par le fait que les organisations syndicales peuvent désigner un délégué syndical par département couvert par l'EP et un délégué syndical par département couvert par l'établissement secondaire lorsque celui-ci couvre plus de deux départements et par le fait que les DSEP d'un même établissement principal / DSES d'un même établissement secondaire peuvent mutualiser leurs déplacements (Ainsi, en comptabilisant trois DSES pour l'établissement AVSC Caraïbes, on parvient à 6 déplacements annuels en France métropolitaine) ;

Sur la demande d'annulation des deux désignations de DS par le syndicat CGT Guadeloupe pour l'établissement secondaire AVSC Caraïbes ;

L'accord du 20 janvier 2017 prévoit en son paragraphe « 1.3 Les délégués syndicaux (DS) et les délégués syndicaux conventionnels d'établissements principaux (DSEP) et d'établissements secondaires (DSES) », article « 1.3.1 Nombre de DSEP et DSES » le « cas particulier de DS au sein des EP/ES basés dans les DOM » ;

Qu'ainsi :

- s'agissant des établissements principaux situés en Guadeloupe, Guyane, Martinique, réunion et à Mayotte, les organisations syndicales représentatives peuvent désigner un DSEP par département,
- s'agissant des établissements secondaires situés en Guadeloupe, Guyane, Martinique, réunion et à Mayotte, les organisations syndicales représentatives peuvent désigner un DSES par département lorsque l'établissement secondaire couvre plus de deux départements ;

Que l'interprétation de ce texte ne pose pas de difficulté particulière, ce même s'il y est question :
- de « DOM » - les territoires visés étant clairement identifiés : Guadeloupe, Guyane, Martinique, Réunion et Mayotte

- de « département administratif d'affectation » - la notion de département administratif d'affectation précité renvoyant à la Guadeloupe, la Guyane, la Martinique, la Réunion et à Mayotte

Qu'en l'espèce, l'établissement secondaire AVSC Caraïbes (dont le siège social se trouve en Martinique) couvrant les territoires de Guadeloupe, Martinique et Guyane, la CGTG Télécom, représentative au niveau de l'établissement principal DO Caraïbes, aurait dû désigner un DSES AVSC Caraïbes Guadeloupe, un DSES AVSC Caraïbes Martinique et un DSES AVSC Caraïbes Guyane ;

Que si ce syndicat a bien désigné parmi les salariés de l'établissement secondaire AVSC Caraïbes, deux délégués syndicaux pour l'établissement secondaire AVSC Caraïbes, elle ne les a pas « ventiler » sur les trois territoires (DOM ou Collectivité territoriales) que couvre l'établissement AVSC Caraïbes ;

Qu'une telle ventilation a pourtant toute son importance puisque, ainsi que cela vient d'être vu, elle détermine le périmètre d'action du délégué syndical ;

Qu'il y a lieu en conséquence d'annuler les désignations par CGTG Télécom de Mme T... A... et M. Y... G... comme délégués syndicaux au sein de l'établissement secondaire AVSC Caraïbes ; (jugement p. 7 à 9).

1°) alors que, d'une part, il résulte de l'article 4 du code civil que les juges ne peuvent méconnaître les termes du litige; qu'au cas présent, les syndicats exposants ont toujours revendiqué être largement représentatifs au sein de l'établissement principal DO CARAIBES (conclusions en réplique n° 2 p.2 § 8 et s., produites) et les sociétés Orange, qui contestaient à titre d'employeurs, la désignation de plusieurs délégués syndicaux pour leur caractère supposé surnuméraire, ont expressément reconnu la représentativité de ces syndicats dans leur requête (requête p. 3 § 2 et 3, produite) ; qu'ainsi le tribunal ne pouvait affirmer que « le syndicat CGT
, qui ne conteste pas ne pas être représentatif au niveau de l'UES Orange, n'avait donc pas à être associé aux négociations en vue de l'accord du 20 janvier 2017 » sans dénaturer les termes du litige en violation de l'article 4 du code de procédure civile ;

2°) alors que, d'autre part, aux termes de l'article L 2231-1 du code du travail, les conventions ou accords collectifs de travail sont conclus entre d'une part, une ou plusieurs organisations syndicales de salariés représentatives dans le champ d'application de la convention ou de l'accord et d'autre part, entre un ou plusieurs employeurs pris individuellement; qu'au cas présent, l'accord du 20 janvier 2017 portait sur les désignations des délégués syndicaux dans l'ensemble de l'UES Orange et prévoyait un certain nombre d'exceptions pour les DOM (article 1.3.1 de l'accord); qu'il est acquis au débat que les syndicats exposants sont représentatifs au sein de l'établissement principal DO CARAIBES situé dans les DOM et donc dans le champ d'application de l'accord du 20 janvier 2017 ; qu'ainsi ces syndicats devaient être associés à la négociation et à la conclusion de cet accord; qu'en décidant le contraire, le tribunal a violé l'article susvisé ensemble l'accord du 20 janvier 2017;

3°) alors qu'en tout état de cause, à supposer que l'accord du 20 janvier 2017 soit opposable au syndicat exposant, il résulte de l'article 1.3.1 de cet accord que par exception et du fait de leur situation géographique particulière, pour les établissements secondaires de l'établissement principal DO Caraïbes, qui couvrent plus de deux départements, les OS représentatives peuvent désigner un DSES par département; qu'au cas présent, l'établissement secondaire en cause couvrant trois départements, Guadeloupe, Martinique et Guyane, il pouvait désigner trois DSES; que le tribunal constatant que le syndicat a régulièrement désigné parmi les salariés de cet établissement secondaire, deux DSES, il ne pouvait annuler ces désignations au motif inopérant que l'établissement secondaire ne les aurait pas « ventilé » sur les trois territoires que couvrent l'établissement qu'en statuant comme il l'a fait, le tribunal n'a pas tiré les conséquences légales de ses propres constatations en violation de l'accord du 20 janvier 2017 ;

4°) alors qu'en outre, à supposer encore que l'accord du 20 janvier 2017 soit opposable au syndicat exposant, il résulte de l'article 1.3.3 de l'accord du 20 janvier 2017 que, par exception et du fait de la situation géographique particulière des établissements situés dans les DOM, « les DSES bénéficient de 12 déplacements trimestriels sur le périmètre de l'ES ou sur leur département de désignation pour ceux qui sont dans le cas où l'ES couvre plusieurs départements d'Outre-Mer », les DSES exerçant leur mandat de DS uniquement sur leur département administratif précité; que cette exception est discriminatoire dans la mesure où dans les zones géographiques dépendant de l'UES d'Orange hors DOM les DS se déplacent librement contrairement au DS des DOM dont le champ de déplacement est limité au périmètre de l'ES ou du département de désignation; qu'en considérant cependant qu'il n'existait pas de discrimination, le tribunal a derechef violé l'accord du 20 janvier 2017 ;

5°) alors que, par ailleurs, les exposants invoquaient l'inopposabilité de l'accord du 20 janvier 2017 en raison d'un usage d'entreprise consistant à systématiquement décliner au plan local les accords nationaux , les déclinaisons locales étant négociées en tenant compte des spécificités des départements et territoires d'outre-mer et de la nécessité de prendre en compte la représentativité importante d'organisations syndicales locales telles que la CGTM et la CGTG ; qu'un usage d'entreprise ne pouvant être dénoncé que par un accord collectif, le tribunal ne pouvait refuser de tenir compte de l'usage d'entreprise résultant notamment de l'accord de déclinaison d'un accord national conclu en 2005 invoqué sans rechercher si cet accord de déclinaison avait été dénoncé par un accord collectif et si faute d'un tel accord, l'usage ne devait pas continuer à s'appliquer dans l'entreprise; qu'en ne le précisant pas, le tribunal a privé sa décision de base légale au regard de l'article L2261-9 du code du travail ;

6°) alors qu'enfin l'article 1.3.1 de l'accord du 20 janvier 2017 énonce en son dernier alinéa que « l'ensemble des modalités de calcul et de répartition décrites dans cet article entreront en vigueur à compter du début de la prochaine mandature soit fin 2017 et pour la durée de cette mandature"; qu'ainsi l'article 18 II de la loi n° 2017-256 du 28 février 2017 ouvrant notamment en Guadeloupe, Guyane et Martinique, à certains syndicats représentatifs la possibilité de négocier pour adapter au niveau d'un territoire les conventions et accords collectifs de travail dont le champ d'application est national en application de l'article L. 2222-1 du code du travail, lequel ouvre aux organisations syndicales habilitées à négocier dans ces mêmes territoires un délai de six mois à compter de la date d'entrée en vigueur des conventions et accords collectifs de travail dont le champ d'application est national pour conclure des accords dans le même champ, était applicable aux organisations syndicales exposantes; qu'en décidant le contraire, le tribunal a violé l'article 1.3.1 de l'accord du 20 janvier 2017 ensemble l'article 18 II de la loi n° 2017-256 du 28 février 2017.


Synthèse
Formation : Chambre sociale
Numéro d'arrêt : 18-15647;18-15648;18-15649;18-15650
Date de la décision : 13/06/2019
Sens de l'arrêt : Rejet
Type d'affaire : Sociale

Références :

Décision attaquée : Tribunal d'instance de Fort-de-France, 13 avril 2018


Publications
Proposition de citation : Cass. Soc., 13 jui. 2019, pourvoi n°18-15647;18-15648;18-15649;18-15650


Composition du Tribunal
Président : M. Huglo (conseiller doyen faisant fonction de président)
Avocat(s) : Me Bouthors, SCP Célice, Soltner, Texidor et Périer

Origine de la décision
Date de l'import : 15/09/2022
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CCASS:2019:18.15647
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