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06/06/2019 | FRANCE | N°18-15301

France | France, Cour de cassation, Chambre civile 2, 06 juin 2019, 18-15301


LA COUR DE CASSATION, DEUXIÈME CHAMBRE CIVILE, a rendu l'arrêt suivant :

CIV. 2

MY1

COUR DE CASSATION
______________________

Audience publique du 6 juin 2019

Rejet

Mme FLISE, président

Arrêt n° 762 F-P+B+I

Pourvoi n° D 18-15.301

R É P U B L I Q U E F R A N Ç A I S E

_________________________

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS
_________________________

LA COUR DE CASSATION, DEUXIÈME CHAMBRE CIVILE, a rendu l'arrêt suivant :

Statuant sur le pourvoi formé par la société Cannes Estérel, dont le

siège est [...], contre l'arrêt rendu le 15 mars 2018 par la cour d'appel d'Aix-en-Provence (1re chambre C), dans le litige l'opposant à la commun...

LA COUR DE CASSATION, DEUXIÈME CHAMBRE CIVILE, a rendu l'arrêt suivant :

CIV. 2

MY1

COUR DE CASSATION
______________________

Audience publique du 6 juin 2019

Rejet

Mme FLISE, président

Arrêt n° 762 F-P+B+I

Pourvoi n° D 18-15.301

R É P U B L I Q U E F R A N Ç A I S E

_________________________

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS
_________________________

LA COUR DE CASSATION, DEUXIÈME CHAMBRE CIVILE, a rendu l'arrêt suivant :

Statuant sur le pourvoi formé par la société Cannes Estérel, dont le siège est [...], contre l'arrêt rendu le 15 mars 2018 par la cour d'appel d'Aix-en-Provence (1re chambre C), dans le litige l'opposant à la commune de Cannes, prise en la personne de son maire en exercice, domicilié [...], défenderesse à la cassation ;

La demanderesse invoque, à l'appui de son pourvoi, les deux moyens de cassation annexés au présent arrêt ;

Vu la communication faite au procureur général ;

LA COUR, en l'audience publique du 9 mai 2019, où étaient présents : Mme Flise, président, M. de Leiris, conseiller référendaire rapporteur, Mme Brouard-Gallet, conseiller doyen, Mme Mainardi, greffier de chambre ;

Sur le rapport de M. de Leiris, conseiller référendaire, les observations de la SCP Foussard et Froger, avocat de la société Cannes Estérel, de la SCP Lyon-Caen et Thiriez, avocat de la commune de Cannes, l'avis de Mme Vassallo, avocat général, et après en avoir délibéré conformément à la loi ;

Attendu, selon l'arrêt attaqué (Aix-en-Provence, 15 mars 2018), que la société Cannes Estérel a relevé appel de l'ordonnance de référé du président d'un tribunal de grande instance lui ayant ordonné d'autoriser la commune de Cannes, ses agents ainsi que toutes entreprises missionnées par la commune à cet effet, à pénétrer, au besoin avec le concours de la force publique, sur son terrain le temps d'effectuer les travaux de démontage et d'enlèvement d'une grue ; que la cour d'appel a été saisie d'un appel incident de la commune sollicitant la réformation de ce chef de l'ordonnance ;

Sur le second moyen :

Attendu que la société Cannes Estérel fait grief à l'arrêt de réformer l'ordonnance de référé entreprise sur les modalités de pénétration sur son terrain et d'enlèvement de la grue, et d'autoriser la commune de Cannes, ses agents, ainsi que toutes entreprises missionnées par elle à cet effet, à pénétrer de manière forcée, en présence d'un huissier de justice et d'un serrurier, et au besoin avec le concours de la force publique, sur son terrain afin de procéder aux travaux de démontage de la grue, alors, selon le moyen, que la cour d'appel est tenue de vérifier, au besoin d'office, la régularité de sa saisine ; que le droit d'appel appartient à toute partie qui y a intérêt ; que l'intérêt à former un appel incident s'apprécie au regard du dispositif des conclusions prises en première instance par l'auteur de l'appel incident ; qu'en l'espèce, l'ordonnance de référé du 22 février 2017, en ordonnant à la société Cannes Estérel d'autoriser la commune de Cannes, ses agents ainsi que toutes entreprises missionnées par la commune à cet effet, à pénétrer sur son terrain, a fait droit au chef de demande de la commune tel qu'il était libellé dans ses conclusions de première instance ; qu'en accueillant l'appel incident de la commune formé à l'encontre d'un chef de l'ordonnance qui lui avait donné satisfaction, la cour d'appel a violé les articles 546 et 548 du code de procédure civile ;

Mais attendu que le défaut d'intérêt à former un appel n'affecte pas la régularité de la saisine de la cour d'appel qui dispose, en vertu de l'article 125, alinéa 2, du code de procédure civile d'une simple faculté de relever d'office le défaut d'intérêt à agir ; que dès lors, à supposer la commune de Cannes dénuée d'intérêt à relever un appel incident de l'ordonnance attaquée, la cour d'appel n'était pas tenue de relever d'office l'irrecevabilité, pour ce motif, dudit appel ;

D'où il suit que le moyen n'est pas fondé ;

Et attendu qu'il n'y a pas lieu de statuer par une décision spécialement motivée sur le premier moyen annexé, qui n'est manifestement pas de nature à entraîner la cassation ;

PAR CES MOTIFS :

REJETTE le pourvoi ;

Condamne la société Cannes Estérel aux dépens ;

Vu l'article 700 du code de procédure civile, rejette sa demande ; la condamne à payer à la commune de Cannes la somme de 3 000 euros ;

Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, deuxième chambre civile, et prononcé par le président en son audience publique du six juin deux mille dix-neuf.

MOYENS ANNEXES au présent arrêt :

Moyens produits par la SCP Foussard et Froger, avocat aux Conseils, pour la société Cannes Estérel.

PREMIER MOYEN DE CASSATION :

L'arrêt attaqué encourt la censure ;

EN CE QU'il a écarté des débats les conclusions déposées et notifiées le 5 février 2018 par la société CANNES ESTEREL ainsi que la pièce n° 2 produite le même jour ;

AUX MOTIFS QU' aux termes de l'article 15 du code de procédure civile, les parties doivent se faire connaître mutuellement en temps utile les moyens de fait sur lesquels elles fondent leurs prétentions, les éléments de preuve qu'elles produisent et les moyens de droit qu'elles invoquent, afin que chacune soit à même d'organiser sa défense ; qu'en vertu de l'article 16 du même code, le juge doit faire observer le principe de la contradiction et ne peut retenir, dans sa décision, les moyens, les explications et les documents invoqués ou produits par les parties que si celles-ci ont été à même d'en débattre contradictoirement ; qu'en l'espèce, la Commune de CANNES a certes mis plus de six mois pour répondre aux premières conclusions de l'appelante du 7 juin 2017 et n'a notifié ses conclusions que le 19 janvier 2018 ; mais que ces conclusions déposées plus de quinze jours avant l'audience, ne peuvent être considérées comme tardives au sens de l'article 15 du code de procédure civile dès lors que ce délai était suffisant pour permettre une réponse en temps utile de la SNC CANNES ESTEREL, d'autant plus que l'appel incident formé ne porte que sur un aspect mineur des modalités de pénétration sur le terrain de l'appelante ; qu'en revanche, en communiquant des conclusions et une pièce complémentaire le 5 février 2018 à 20 heures pour une audience se tenant le lendemain à 8h15, la SNC CANNES ESTEREL n'a pas permis à la commune de CANNES de répondre avant l'audience ; qu'il convient en conséquence de rejeter des débats ces conclusions tardives ainsi que la pièce n° 2 produite par l'appelante ;

ALORS QUE, premièrement, les conclusions et pièces nouvelles sont recevables jusqu'à la clôture de la mise en état ; qu'en l'absence de procédure de mise en état, la clôture intervient au terme de l'audience ; que si les juges estiment que la communication tardive de conclusions ou de pièces ne permet pas d'assurer le respect du principe de la contradiction, il leur appartient d'expliquer en quoi les derniers éléments communiqués appelaient une nécessaire réponse de la partie adverse, et en quoi cette dernier n'a pas disposé du temps utile pour y répondre ; qu'en retenant en l'espèce que les dernières conclusions de la société CANNES ESTEREL étaient irrecevables pour cette seule raison qu'elles avaient été communiquées la veille de l'audience et qu'elles comportaient une pièce supplémentaire, la cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard des articles 15, 16 et 135 du code de procédure civile ;

ET ALORS QUE, deuxièmement, et subsidiairement, les conclusions et pièces nouvelles sont recevables jusqu'à la clôture de la mise en état ; qu'à cet égard, la recevabilité des dernières conclusions ne dépend pas de celle des pièces qui s'y trouvent annexées ; qu'en retenant en l'espèce que les dernières conclusions de la société CANNES ESTEREL étaient irrecevables pour cette seule raison qu'elles avaient été communiquées la veille de l'audience et qu'elles comportaient une pièce supplémentaire, cependant que cette circonstance ne concernait tout au plus que la recevabilité de cette pièce supplémentaire, la cour d'appel a encore privé sa décision de base légale au regard des articles 15, 16 et du code de procédure civile.

SECOND MOYEN DE CASSATION :

L'arrêt partiellement infirmatif attaqué encourt la censure ;

EN CE QU' il a réformé l'ordonnance de référé entreprise sur les modalités de pénétration sur le terrain de la société CANNES ESTEREL et d'enlèvement de la grue, et a autorisé la commune de CANNES, ses agents, ainsi que toutes entreprises missionnées par elle à cet effet, à pénétrer de manière forcée, en présent d'un huissier et d'un serrurier, et au besoin avec le concours de la force publique, sur le terrain de la société CANNES ESTEREL afin de procéder aux travaux de démontage de la grue ;

AUX MOTIFS QUE le premier juge s'est fondé sur l'article 809 du code de procédure civile qui permet au juge des référés, même en présence d'une contestation sérieuse, de prescrire les mesures conservatoires ou de remise en état qui s'imposent pour prévenir un dommage imminent ou faire cesser un trouble manifestement illicite ; qu'en l'espèce, il est difficile de caractériser un dommage imminent dans la mesure où la grue litigieuse est installée sur le 'terrain de la SNC CANNES ESTEREL depuis 1992 sans avoir causé un quelconque dommage matériel ; qu'en revanche, le maire de la ville de Cannes a, au visa de l'article L. 2213-25 du code général des collectivités territoriales, pris un arrêté le 29 mars 2016 mettant en demeure la SNC CANNES ESTEREL de remettre en état son terrain en procédant au démontage et à l'enlèvement de la grue dans un délai d'un mois à compter de la notification de l'arrêté ; que cet arrêté a été notifié le 2 avril 2016 à la SNC CANNES ESTEREL ; qu'il n'a pas fait l'objet de recours et est ainsi définitif ; que le nonrespect de cet arrêté suffit à caractériser l'existence d'un trouble manifestement illicite de sorte que la commune de CANNES est fondée à solliciter l'autorisation de procéder à l'enlèvement de la grue ; que l'intimée n'ayant toujours pas obtenu l'autorisation de la SNC CANNES ESTEREL de pénétrer sur son terrain pour faire enlever la grue, il y a lieu de faire droit à son appel incident et de l'autoriser directement à pénétrer de manière forcée, en présence d'un huissier et d'un serrurier et au besoin avec le concours de la force publique, sur le terrain de la SNC CANNES ESTEREL pour effectuer les travaux de démontage de la grue et ce dès la signification du présent arrêt ;

ALORS QUE la cour d'appel est tenue de vérifier, au besoin d'office, la régularité de sa saisine ; que le droit d'appel appartient à toute partie qui y a intérêt ; que l'intérêt à former un appel incident s'apprécie au regard du dispositif des conclusions prises en première instance par l'auteur de l'appel incident ; qu'en l'espèce, l'ordonnance de référé du 22 février 2017, en ordonnant à la société CANNES ESTEREL d'autoriser la commune de CANNES, ses agents ainsi que toutes entreprises missionnées par la commune à cet effet, à pénétrer sur son terrain, a fait droit au chef de demande de la commune tel qu'il était libellé dans ses conclusions de première instance ; qu'en accueillant l'appel incident de la commune formé à l'encontre d'un chef de l'ordonnance qui lui avait donné satisfaction, la cour d'appel a violé les articles 546 et 548 du code de procédure civile.


Synthèse
Formation : Chambre civile 2
Numéro d'arrêt : 18-15301
Date de la décision : 06/06/2019
Sens de l'arrêt : Rejet
Type d'affaire : Civile

Analyses

APPEL CIVIL - Recevabilité - Moyen d'irrecevabilité - Moyen soulevé d'office - Défaut d'intérêt à agir - Obligation (non)

PROCEDURE CIVILE - Fin de non-recevoir - Possibilité de la relever d'office - Cas - Défaut d'intérêt à agir

Le défaut d'intérêt à former un appel n'affecte pas la régularité de la saisine elle-même de la cour d'appel qui dispose, en vertu de l'article 125, alinéa 2, du code de procédure civile d'une simple faculté de relever d'office le défaut d'intérêt à agir. En conséquence, une cour d'appel n'est pas tenue de relever d'office l'irrecevabilité d'un appel incident en raison du défaut d'intérêt de son auteur


Références :

article 125 du code de procédure civile

Décision attaquée : Cour d'appel d'Aix-en-Provence, 15 mars 2018


Publications
Proposition de citation : Cass. Civ. 2e, 06 jui. 2019, pourvoi n°18-15301, Bull. civ.
Publié au bulletin des arrêts des chambres civiles

Composition du Tribunal
Président : Mme Flise
Avocat(s) : SCP Foussard et Froger, SCP Lyon-Caen et Thiriez

Origine de la décision
Date de l'import : 16/12/2019
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CCASS:2019:18.15301
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