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05/06/2019 | FRANCE | N°17-27657

France | France, Cour de cassation, Chambre sociale, 05 juin 2019, 17-27657


LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE SOCIALE, a rendu l'arrêt suivant :

Attendu, selon l'arrêt attaqué, que M. T... a été engagé par la société Préfal production en qualité de chauffeur livreur manutentionnaire avec reprise d'ancienneté au 18 juin 2001 ; qu'à la suite d'un accident du travail, il a été licencié pour inaptitude et impossibilité de reclassement le 17 octobre 2013 ; qu'il a saisi la juridiction prud'homale de demandes notamment à titre de licenciement sans cause réelle et sérieuse et de rémunération de temps de pause ;

Sur les deux moyens réunis du p

ourvoi principal de l'employeur, en ce qu'ils font grief à l'arrêt de le condamne...

LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE SOCIALE, a rendu l'arrêt suivant :

Attendu, selon l'arrêt attaqué, que M. T... a été engagé par la société Préfal production en qualité de chauffeur livreur manutentionnaire avec reprise d'ancienneté au 18 juin 2001 ; qu'à la suite d'un accident du travail, il a été licencié pour inaptitude et impossibilité de reclassement le 17 octobre 2013 ; qu'il a saisi la juridiction prud'homale de demandes notamment à titre de licenciement sans cause réelle et sérieuse et de rémunération de temps de pause ;

Sur les deux moyens réunis du pourvoi principal de l'employeur, en ce qu'ils font grief à l'arrêt de le condamner à délivrer au salarié un certificat de travail indiquant que la relation de travail a débuté le 18 juin 2001 :

Attendu qu'aucune critique n'étant articulée à l'encontre du chef de dispositif contesté, le moyen ne peut être accueilli ;

Mais sur le premier moyen du pourvoi principal de l'employeur en ce qu'il fait grief à l'arrêt de dire le licenciement du salarié sans cause réelle et sérieuse et de lui allouer des dommages-intérêts à ce titre :

Vu l'article 4 du code de procédure civile ;

Attendu que pour dire le licenciement sans cause réelle et sérieuse et allouer à ce titre au salarié des dommages-intérêts, l'arrêt retient que la lettre de licenciement indique que M. T... a occupé du 21 juin au 31 juillet 2013 un poste de travail temporaire consistant à réaliser des kits pour PVC, que l'employeur n'explique pas la raison pour laquelle ce poste de travail compatible avec l'état de santé du salarié ne lui a pas été proposé dans le cadre de son obligation de reclassement, que par ailleurs l'employeur ne justifie pas avoir donné suite à la réponse de la société Alupréférence, laquelle, par courrier en date du 26 septembre 2013, lui indiquait avoir deux postes d'opérateur de production à pourvoir et souhaitait recevoir le dossier du salarié, pas plus qu'il ne justifie avoir informé l'intéressé de cette possibilité de reclassement externe ;

Qu'en statuant ainsi, alors d'une part que le salarié n'invoquait pas, au titre du non-respect par l'employeur de son obligation de reclassement, le défaut de proposition par celui-ci des postes de conception de kits PVC et d'opérateur de production, d'autre part que l'employeur faisait valoir, s'agissant du premier poste, que celui-ci n'était disponible que de manière temporaire en raison d'un accroissement d'activité et ne correspondait pas à un besoin permanent de l'entreprise, la cour d'appel, qui a méconnu les termes du litige, a violé le texte susvisé ;

Sur le premier moyen du pourvoi principal de l'employeur en ce qu'il fait grief à l'arrêt de le condamner à payer une somme à titre de "préavis" :

Vu l'article 4 du code de procédure civile ;

Attendu que pour allouer au salarié une certaine somme à titre "préavis", l'arrêt retient que le salarié recevra un "préavis" égal à deux mois de salaire représentant la somme de 3 737,06 euros dont le montant n'est pas contesté ;

Qu'en statuant ainsi, alors que dans ses conclusions oralement soutenues l'employeur s'opposait à ce chef de demande en faisant valoir que l'indemnité prévue par l'article L. 1226-14 du code du travail avait été intégralement versée au salarié dans le cadre de son solde de tout compte, la cour d'appel, qui a méconnu les termes du litige, a violé le texte susvisé ;

Et sur le second moyen du pourvoi principal de l'employeur :

Vu l'article 4 du code de procédure civile ;

Attendu que pour condamner l'employeur au paiement d'une somme à titre de rémunération des temps de pause, l'arrêt retient qu'en sollicitant la confirmation du jugement, en ce compris en ce qu'il emporte condamnation des temps de pause, l'employeur a implicitement mais nécessairement admis que le principe de cette réclamation était fondé ;

Qu'en statuant ainsi, alors que dans ses conclusions oralement soutenues l'employeur demandait la confirmation de la décision des premiers juges, sauf en ce qu'elle l'avait condamné au titre des temps de pause, la cour d'appel, qui a méconnu l'objet du litige, a violé le texte susvisé ;

PAR CES MOTIFS, et sans qu'il soit nécessaire de statuer sur le moyen unique du pourvoi incident du salarié :

CASSE ET ANNULE, mais seulement en ce qu'il dit le licenciement de M. T... sans cause réelle et sérieuse et en ce qu'il condamne la société Préfal production à lui payer les sommes de 3 737,06 euros à titre de "préavis", 22 500 euros à titre de dommages-intérêts, 5 712,50 euros à titre de rémunération des temps de pause et 571,25 euros au titre des congés payés afférents, l'arrêt rendu le 14 septembre 2017, entre les parties, par la cour d'appel d'Aix-en-Provence ; remet, en conséquence, sur ces points, la cause et les parties dans l'état où elles se trouvaient avant ledit arrêt et, pour être fait droit, les renvoie devant la cour d'appel d'Aix-en-Provence, autrement composée ;

Condamne M. T... aux dépens ;

Vu l'article 700 du code de procédure civile, rejette les demandes ;

Dit que sur les diligences du procureur général près la Cour de cassation, le présent arrêt sera transmis pour être transcrit en marge ou à la suite de l'arrêt partiellement cassé ;

Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, chambre sociale, et prononcé par le président en son audience publique du cinq juin deux mille dix-neuf.

MOYENS ANNEXES au présent arrêt :

Moyens produits au pourvoi principal par la SCP Gatineau et Fattaccini, avocat aux Conseils, pour la société Prefal production

PREMIER MOYEN DE CASSATION :

IL EST FAIT GRIEF à l'arrêt attaqué d'AVOIR confirmé le jugement en ce qu'il a alloué au salarié la somme de 5 712,50 euros, ainsi que 571,25 euros au titre des congés payés afférents, en rémunération d'un temps de pause, d' AVOIR, en infirmation du jugement, dit le licenciement du salarié dépourvu de cause réelle et sérieuse, d'AVOIR condamné l'employeur à lui verser les sommes de 3 737,06 euros pour préavis, et de 22 500 euros à titre de dommages et intérêts, d'AVOIR condamné l'employeur à délivrer au salarié un certificat de travail indiquant que la relation de travail a débuté le 18 juin 2001, d'AVOIR rejeté les demandes plus amples ou contraires, d'AVOIR condamné l'employeur aux entiers dépens et d'AVOIR condamné l'employeur à verser 3 000 euros au salarié pour ses frais non compris dans les dépens de première instance et d'appel confondus, en application de l'article 700 du code de procédure civile ;

AUX MOTIFS QUE « La cour renvoie pour plus ample exposé aux écritures reprises et soutenues par les conseils des parties à l'audience d'appel tenue le 21 juin 2017 (
) Sur les demandes liées au licenciement
Engagé à compter du 23 avril 2003 par la société Préfal, en qualité de chauffeur livreur manutentionnaire, avec reprise de son ancienneté au 18 juin 2001, M. T... a été licencié le 17 octobre 2013 en raison de son inaptitude physique à occuper son poste de travail.
Le contrat de travail de M. T... a été suspendu une première fois à la suite d'un accident du travail survenu le 5 février 2013, ce jusqu'au 10 juin 2013, date de sa visite de reprise le déclarant inapte à son poste de travail, mais apte à un autre poste sans port de charge.
L'employeur proposait le salarié un poste de préparateur de stock au sein de la société F21, que l'intéressé refusait le 11 septembre 2013 au motif qu'après un jour d'essai, le port de cartons lourds lui a occasionné un mal au dos.
Faisant suite à un premier avis en date du 9 septembre 2013, le médecin du travail déclarait le 16 septembre 2013 le salarié inapte à tous postes dans l'entreprise.
M. T... soutient que son employeur n'a tenu aucun compte du premier avis lui imposant de l'affecter à un poste sans port de charge puisqu'il a repris son poste de travail de chauffeur livreur manutentionnaire, fait attesté par M. U... (pièce 17 dossier employeur), responsable logistique, lequel indique que le chauffeur T... ne se plaignait pas de sa situation ce qui est indifférent à la solution du litige.
C'est en cet état que se présente la contestation de M. T... qui conteste la solution de reclassement au poste de préparateur de stock, motif pris des contraintes physiques imposées par ce poste de travail, ainsi qu'un manquement de l'employeur à ses obligations d'adaptation et de reclassement.
L'employeur ne peut éluder le fait que le déchargement des marchandises par les chauffeurs était problématique au sein de l'entreprise, cette anomalie étant pointée par les responsables de la logistique.
La cour ne peut que constater que M. T... était employé en qualité de chauffeur même après son accident du travail au mépris des préconisations du médecin du travail, ce qui explique que l'emploi occupé par ce salarié fut toujours selon ses bulletins de salaire celui de chauffeur livreur manutentionnaire.
Cependant, le conseil du salarié ne tire de ce constat aucune conséquence au plan juridique.
Sur l'obligation de reclassement, le poste de préparateur de stock au sein de l'entreprise F2I proposé au salarié, le 3 septembre 2013, entraînait un changement d'employeur que celui-ci était libre de refuser sans faute de sa part.
La lettre de licenciement indique que M. T... a occupé du 21 juin au 31 juillet 2013 un poste de travail temporaire consistant à réaliser des kits pour PVC, mais l'employeur n'explique pas la raison pour laquelle ce poste de travail compatible avec l'état de santé du salarié ne lui a pas été proposé dans le cadre de son obligation de reclassement.
Par ailleurs, l'employeur ne justifie pas avoir donné suite à la réponse de la société Alupréférence, laquelle, par courrier en date du 26 septembre 2013, lui indiquait avoir deux postes d'opérateur de production à pourvoir et souhaitait recevoir le dossier de M. T..., pas plus qu'il ne justifie avoir informé M. T... de cette possibilité de reclassement externe.
En conséquence de quoi, la cour, infirmant, dit sans cause réelle et sérieuse le licenciement de M. T....
Le salarié recevra un préavis égal à 2 mois de salaire représentant la somme de 3 737,06 euros dont le montant n'est pas contesté.
Âgé de 51 ans au moment de la rupture de son contrat de travail, survenue en l'état d'une ancienneté approchant 12 ans au service d'une entreprise occupant habituellement plus de 11 salariés, M. T... a perdu un salaire brut de 1 868,53 euros par mois.
L'intéressé justifie de son inscription auprès de Pôle emploi jusqu'à ce jour.
La cour dispose des éléments d'appréciation suffisants pour arrêter à la somme de 22.500 euros la juste indemnisation liée à la perte de son emploi » ;

1°) ALORS QUE les juges du fond ne peuvent dénaturer les termes du litige tels qu'ils sont définis par les prétentions respectives des parties ; qu'en l'espèce, dans ses conclusions d'appel, oralement soutenues lors de l'audience (arrêt p. 3), le salarié prétendait que le poste de préparateur de kits PVC du 21 juin au 31 juillet 2013 n'était pas en adéquation avec son état de santé puisqu'il impliquait le port de charges lourdes (conclusions d'appel adverses p. 3 et p. 8) ; que s'il invoquait un manquement de l'employeur à son obligation de reclassement, il ne lui reprochait pas de ne pas lui avoir proposé le poste de préparateur de kits PVC dans le cadre de cette obligation ; que dès lors, en reprochant à l'employeur de ne pas expliquer la raison pour laquelle le poste de confection de kits PVC n'avait pas été proposé au salarié dans le cadre de son obligation de reclassement, la cour d'appel a violé l'article 4 du code de procédure civile ;

2°) ALORS QUE le juge ne peut dénaturer les conclusions d'une partie ; que dans ses conclusions d'appel (p. 12 et 13), oralement reprises (arrêt p. 3), la société Préfal faisait valoir, preuve à l'appui (production n° 9), que le poste de confection de kits PVC n'était disponible que de manière temporaire en raison d'un accroissement d'activité lors de la mise à jour des stocks et que ce poste ne répondait pas à un besoin permanent de l'entreprise ; qu'en retenant que l'employeur n'expliquait pas la raison pour laquelle le poste de confection de kits PVC n'avait pas été proposé au salarié dans le cadre de son obligation de reclassement, la cour d'appel a violé l'article 4 du code de procédure civile ;

3°) ALORS QUE les juges du fond ne peuvent dénaturer les termes du litige ; qu'en l'espèce, dans ses conclusions d'appel, oralement soutenues lors de l'audience (arrêt p. 3), le salarié se bornait à affirmer que parmi les postes proposés par la société Alupréférence, seul le poste de responsable de production aurait pu lui convenir et reprochait à l'employeur de ne pas lui avoir proposé ce seul poste (conclusions d'appel adverses p. 11) ; que dès lors, en retenant, pour dire que l'employeur avait manqué à son obligation de reclassement, que la société Alupréférence avait indiqué avoir deux postes d'opérateur de production à pourvoir et que l'employeur n'avait pas répondu à cette société ni informé le salarié de cette possibilité de reclassement, la cour d'appel a violé l'article 4 du code de procédure civile ;

4°) ALORS QUE le juge doit en toutes circonstances faire observer et observer lui-même le principe du contradictoire ; qu'il ne peut fonder sa décision sur les moyens qu'il a relevés d'office sans avoir au préalable invité les parties à présenter leurs observations ; qu'en l'espèce, il n'était nullement soutenu que les postes d'opérateur de production au sein de la société Alupréférence auraient dû être proposés au salarié dans le cadre de son reclassement ; qu'en soulevant ce moyen d'office, sans inviter les parties à s'expliquer sur la disponibilité de ces postes et sur leur compatibilité avec la qualification et l'état de santé du salarié, la cour d'appel a violé l'article 16 du code de procédure civile ;

5°) ALORS QUE les possibilités de reclassement s'apprécient antérieurement à la date du licenciement, à compter du moment où celui-ci est envisagé et, au plus tard, à la date où il est notifié au salarié ; qu'en l'espèce, il résultait du courrier de la société Alupréférence du 26 septembre 2013, dont les termes n'étaient pas discutés par les parties, que « deux personnes (Charpentier et Planchjet) de l'atelier sont en cours de sortie sur des postes d'opérateur de production/ouvrier menuisier aluminium », de sorte que ces postes n'étaient pas encore disponibles ; qu'en reprochant à l'employeur de ne pas avoir proposé les deux postes d'opérateur de production existant au sein de la société Alupréférence, sans à aucun moment constater que ces postes étaient disponibles au plus tard à la date du licenciement du salarié intervenu le 17 octobre 2013, la cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard de l'article L. 1226-10 du code du travail ;

6°) ALORS QUE dans le cadre de son obligation de reclassement d'un salarié inapte à son poste, l'employeur n'est tenu de lui proposer que des postes compatibles avec son état de santé et avec ses compétences professionnelles ; qu'en l'espèce, en demandant la confirmation du jugement entrepris, l'employeur était réputé s'en approprier les motifs selon lesquels « l'entreprise a recherché les ouvertures de postes au sein du groupe auquel elle appartient afin de trouver un emploi à son salarié, mais aucun poste correspondant aux aptitudes physiques de M. T... n'était disponible » (jugement p. 11 in fine) ; qu'en se bornant à reprocher à l'employeur de ne pas avoir proposé les deux postes d'opérateur de production existant au sein de la société Alupréférence, sans constater que ces postes étaient compatibles avec l'état de santé du salarié et avec ses compétences professionnelles, la cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard de l'article L. 1226-10 du code du travail ;

7°) ALORS QUE les juges ne peuvent accueillir ou rejeter les demandes dont ils sont saisis sans examiner et analyser tous les éléments de preuve qui leur sont fournis par les parties au soutien de leurs prétentions ; qu'en l'espèce, l'employeur avait versé aux débats le bulletin de salaire de M. T... d'octobre 2013 établissant le paiement de la somme de 4 053,08 euros au titre de l'indemnité compensatrice de préavis ; qu'en condamnant l'employeur à payer au salarié la somme de 3 737,06 euros à titre d'indemnité compensatrice de préavis, sans viser ni analyser serait-ce sommairement, le document susvisé, la cour d'appel a violé l'article 455 du code de procédure civile.

DEUXIEME MOYEN DE CASSATION :

IL EST FAIT GRIEF à l'arrêt attaqué d'AVOIR confirmé le jugement en ce qu'il a alloué au salarié la somme de 5 712,50 euros, ainsi que 571,25 euros au titre des congés payés afférents, en rémunération d'un temps de pause, d'AVOIR, en infirmation du jugement, dit le licenciement du salarié dépourvu de cause réelle et sérieuse, d'AVOIR condamné l'employeur à lui verser les sommes de 3 737,06 euros pour préavis, et de 22 500 euros à titre de dommages et intérêts, d'AVOIR condamné l'employeur à délivrer au salarié un certificat de travail indiquant que la relation de travail a débuté le 18 juin 2001, d'AVOIR rejeté les demandes plus amples ou contraires, d'AVOIR condamné l'employeur aux entiers dépens et d'AVOIR condamné l'employeur à verser 3 000 euros au salarié pour ses frais non compris dans les dépens de première instance et d'appel confondus, en application de l'article 700 du code de procédure civile ;

AUX MOTIFS PROPRES QUE « La cour renvoie pour plus ample exposé aux écritures reprises et soutenues par les conseils des parties à l'audience d'appel tenue le 21 juin 2017
(
) Sur les temps de pause
En sollicitant la confirmation du jugement, en ce compris en ce qu'il emporte condamnation des temps de pause, la société Téfal a implicitement mais nécessairement admis que le principe de cette réclamation était fondé.
Cependant, la demande en paiement de 45 minutes par jour sur une période quinquennale, représentant la somme de 11 425 euros, ne sera pas admise sachant que l'employeur a rémunéré ces temps de pause puisque nulle retenue de salaire ne fut jamais opérée à ce titre.
La demande dont la cour est saisie ne se confondant pas avec une demande de dommages et intérêts qui pourrait sanctionner les manquements de l'employeur relativement aux temps de pause, mais s'entendant d'une demande en paiement de temps de pause inclus dans le temps de travail ayant déjà reçu rémunération, la cour rejettera dans les limites de la confirmation » ;

ET AUX MOTIFS EVENTUELLEMENT ADOPTES QUE « Sur le temps de pause :
Qu'en droit, le règlement européen du 15 mars 2006 applicable au domaine des transports prévoit, dans son chapitre II, les dispositions suivantes :
« Après un temps de conduite de quatre heures et demie, un conducteur observe une pause ininterrompue d'au moins quarante-cinq minutes, à moins qu'il ne prenne un temps de repos.
Cette pause peut être remplacée par une pause d'au moins quinze minutes suivie d'une pause d'au moins trente minutes réparties au cours de la période de manière à se conformer aux dispositions du premier alinéa ».
qu'en l'espèce, on constate que quelques copies de disques de chronotachygraphie apportées par le salarié aux débats, des pauses effectuées dans le respect de la réglementation, et sur d'autres copies, ces pauses de 45 minutes après 4h30 de conduite ne sont pas entièrement respectées :
Par exemple, celui du 09 juin 2010 où il y a effectivement une pause de 45 minutes de 8h à 9h suite à un départ à 4h30. Suivent d'autres pauses pendant la journée de 1h30 à 14h15, puis la fin de la journée à 17h20.
En revanche, le disque du 22 juin 2010 démontre un départ à 4h du matin, la pause s'effectuant seulement à 9h15 et jusqu'à 10h15 ; le salarié aurait dû s'arrêter à 8h30 pour être conforme à la réglementation européenne.
En revanche, pour justifier une demande s'étalant sur une période de 5 ans, le salarié ne fournit pas un décompte détaillé précisant les jours et les années où il n'aurait pas effectué le temps de pause réglementaire, malgré le fait qu'il avait la possibilité de se procurer les disques de chronotachygraphie (voir les copies pour l'année 2010).
Il est curieux par ailleurs que M. T... ne se soit jamais plaint durant ses dix ans d'emploi au sein de la société de n'avoir pas pu prendre ses temps de pause.
Il s'avère exact que l'employeur a demandé à ses chauffeurs régulièrement de se conformer à cette réglementation et que la responsabilité du chauffeur quant à la prise de ses pauses est engagée.
Cependant, on peut considérer que l'employeur aurait dû régulièrement contrôler si ces temps de pause étaient effectivement respectés, et y remédier si cela n'était pas le cas.
Néanmoins, la responsabilité est partagée aussi bien du salarié que de l'employeur quant à la conformité au règlement.
En tout état de cause, la preuve n'est nullement apportée par le demandeur que ces pauses soient régulièrement non prises. C'est pourquoi la prétention du salarié d'une indemnité pour une période de 5 ans n'est pas justifiée.
Qu'en conséquence, compte tenu de la responsabilité partagée des parties concernant la conformité au règlement européen, une somme de 5 712,50 € ainsi que les congés payés afférents de 571,25 € sera accordée au titre des pauses » ;

1°) ALORS QUE le juge ne peut dénaturer les conclusions d'une partie ; que dans ses conclusions d'appel (cf. p. 20 in fine à 23 et p. 33, productions n° 5 à 8), oralement reprises (arrêt p. 3), l'employeur avait sollicité la confirmation du jugement sauf en ce qu'il l'avait condamné au titre des temps de pause et affirmait avec offres de preuve que le salarié disposait d'une grande liberté d'organisation de ses tournées de livraisons, qu'il était régulièrement informé de ses temps de pause et que lorsqu'il n'avait pas respecté ses temps de pause, il avait été sanctionné par un avertissement ; qu'en retenant que l'employeur avait sollicité la confirmation pure et simple du jugement et qu'il admettait ainsi que le principe de la demande relative aux temps de pause était fondé, la cour d'appel a violé l'article 4 du code de procédure civile ;

2°) ALORS QUE le salarié ne peut prétendre à un rappel de salaire pour ses temps de pause que lorsque le juge constate qu'ils n'ont pas été pris ; qu'en l'espèce, les juges du fond ont relevé que la preuve que les pauses n'étaient régulièrement pas prises n'était pas apportée (motifs adoptés p. 12 in fine) ; qu'en octroyant pourtant au salarié les sommes de 5 712,50 euros au titre des temps de pause et de 571,25 euros au titre des congés payés afférents, la cour d'appel n'a pas tiré les conséquences légales de ses propres constatations et partant a violé l'article 7 du règlement européen du 15 mars 2006 ;

3°) ALORS QUE les juges sont tenus de répondre aux moyens soulevés par les parties ; qu'en l'espèce, l'employeur faisait valoir et offrait de prouver que le salarié disposait d'une grande liberté d'organisation de ses tournées de livraisons, qu'il était régulièrement informé de ses temps de pause et que lorsqu'il n'avait pas respecté ses temps de pause, il avait été sanctionné par un avertissement, seule action que l'employeur pouvait mener pour faire respecter les temps de pause en l'état de la liberté d'organisation du salarié (cf. p. 20 in fine à p. 23 et productions n° 5 à 8) ; qu'en ne s'expliquant pas sur l'ensemble des actions menées par l'employeur pour faire respecter les temps de pause compte tenu de la liberté d'organisation du salarié, la cour d'appel a violé l'article 455 du code de procédure civile ;

4°) ALORS QUE le juge doit préciser et analyser les éléments qui lui permettent de fixer le montant de la condamnation de l'employeur à un rappel de salaires ; qu'en l'espèce, le salarié sollicitait les sommes de 11 425 euros au titre des temps de pause non pris et de 1 142,25 euros au titre des congés payés y afférents (conclusions d'appel adverses p. 15) ; que de son côté, l'employeur contestait cette créance en affirmant que le salarié disposait d'une grande liberté d'organisation de ses tournées de livraisons, qu'il était régulièrement informé de ses temps de pause et que lorsqu'il n'avait pas respecté ses temps de pause, il avait été sanctionné par un avertissement (conclusions d'appel p. 20 in fine à p. 23 et productions n° 7 à 10) ; qu'en se bornant à affirmer que la somme de 5 712,50 euros devait être allouée au salarié au titre des temps de pause outre la somme de 571,25 euros de congés payés y afférents, sans préciser les temps de pause non pris et les modalités de calcul retenues, la cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard de l'article 7 du règlement européen du 15 mars 2006. Moyen produit au pourvoi incident par la SCP Garreau, Bauer-Violas et Feschotte-Desbois, avocat aux Conseils, pour M. T...

Il est fait grief à l'arrêt attaqué d'avoir confirmé le jugement en ce qu'il a alloué au salarié la somme de 5 712,50 euros, ainsi que 571,25 euros au titre des congés payés afférents, en rémunération d'un temps de pause,

AUX MOTIFS PROPRES QU'
En sollicitant la confirmation du jugement, en ce compris en ce qu'il emporte condamnation des temps de pause, la société Préfal a implicitement mais nécessairement admis que le principe de cette réclamation était fondé,
Cependant, la demande en paiement de 45 minutes par jour sur une période quinquennale, représentant la somme de 11 425 euros, ne sera pas admise sachant que l'employeur a rémunéré ces temps de pause puisque nulle retenue de salaire ne fut jamais opérée à ce titre.
La demande dont la cour est saisie ne se confondant pas avec une demande de dommages et intérêts qui pourrait sanctionner les manquements de l'employeur relativement aux temps de pause, mais s'entendant d'une demande en paiement de temps de pause inclus dans le temps de travail ayant déjà reçu rémunération, la cour rejettera dans les limites de la confirmation,

ET AUX MOTIFS ADOPTES QU'
En droit, le règlement européen du 15 mars 2006 applicable au domaine des transports prévoit, dans son chapitre II, les dispositions suivantes :
"Après un temps de conduite de quatre heures et demie, un conducteur observe une pause ininterrompue d'au moins quarante-cinq minutes, à moins qu'il ne prenne un temps de repos. Cette pause peut être remplacée par une pause d'au moins quinze minutes suivie d'une pause d'au moins trente minutes réparties au cours de la période de manière à se conformer aux dispositions du premier alinéa",
Attendu qu'en l'espèce, on constate que quelques copies de disques de chronotachygraphie apportées par le salarié aux débats, des pauses effectuées dans le respect de la réglementation, et sur d'autres copies, ces pauses de 45 minutes après 4h30 de conduite ne sont pas entièrement respectées :
Par exemple, celui du 9 juin 2010 où il y a effectivement une pause de 45 minutes de 8h à 9h suite à un départ à 4h30. Suivent d'autres pauses pendant la journée de 1h30 à 14h15, puis la fin de la journée à 17h20,
En revanche, le disque du 22 juin 2010 démontre un départ à 4h du matin, la pause s'effectuant seulement à 9h15 et jusqu'à 10h15, le salarié aurait dû s'arrêter à 8h30 pour être conforme à la réglementation européenne,
En revanche, pour justifier une demande s'étalant sur une période de 5 ans, le salarié ne fournit pas un décompte détaillé précisant les jours et les années où il n'aurait pas effectué le temps de pause réglementaire, malgré le fait qu'il avait la possibilité de se procurer les disques de chronotachygraphie (voir les copies pour l'année 2010),
Il est curieux par ailleurs que M. T... ne se soit jamais plaint durant ses dix ans d'emploi au sein de la société de n'avoir pas pu prendre ses temps de pause,
Il s'avère exact que l'employeur a demandé à ses chauffeurs régulièrement de se conformer à cette réglementation et que la responsabilité du chauffeur quant à la prise de ses pauses est engagée,
Cependant, on peut considérer que l'employeur aurait dû régulièrement contrôler si ces temps de pause étaient effectivement respectés, et y remédier si cela n'était pas le cas,
Néanmoins, la responsabilité est partagée aussi bien du salarié que de l'employeur quant à la conformité au règlement,
En tout état de cause, la preuve n'est nullement apportée par le demandeur que ces pauses soient régulièrement non prises. C'est pourquoi la prétention du salarié d'une indemnité pour une période de 5 ans n'est pas justifiée,
Qu'en conséquence, compte tenu de la responsabilité partagée des parties concernant la conformité au règlement européen, une somme de 5 712,50 euros ainsi que les congés payés afférents de 571,25 euros sera accordée au titre des pauses,

ALORS QU'eu égard à la finalité qu'assigne aux temps de repos quotidiens la directive 2003/88/CE du Parlement européen et du Conseil du 4 novembre 2003, concernant certains aspects de l'aménagement du temps de travail, il appartient à l'employeur de prendre les mesures propres à assurer au salarié la possibilité d'exercer effectivement son droit à une pause rémunérée, et, en cas de contestation, de justifier qu'il a accompli à cette fin les diligences qui lui incombent légalement ; qu'en énonçant par motifs adoptés du premier juge que "pour justifier une demande s'étalant sur une période de 5 ans, le salarié ne fournit pas un décompte détaillé précisant les jours et les années où il n'aurait pas effectué le temps de pause réglementaire, malgré le fait qu'il avait la possibilité de se procurer les disques de chronotachygraphie" et qu'"en tout état de cause, la preuve n'est nullement apportée par le demandeur que ces pauses soient régulièrement non prises", la cour d'appel a violé l'article L. 3121-33 du code du travail, pris pour l'application de l'article 4 de la directive 93/104/CE du Conseil du 23 novembre 1993 concernant certains aspects de l'aménagement du temps de travail, recodifiée par la directive 2003/88/CE du Parlement européen et du Conseil du 4 novembre 2003, ensemble l'ancien article 1315 du code civil, devenu l'article 1353 du code civil.


Synthèse
Formation : Chambre sociale
Numéro d'arrêt : 17-27657
Date de la décision : 05/06/2019
Sens de l'arrêt : Cassation partielle
Type d'affaire : Sociale

Références :

Décision attaquée : Cour d'appel d'Aix-en-Provence, 14 septembre 2017


Publications
Proposition de citation : Cass. Soc., 05 jui. 2019, pourvoi n°17-27657


Composition du Tribunal
Président : M. Schamber (conseiller doyen faisant fonction de président)
Avocat(s) : SCP Garreau, Bauer-Violas et Feschotte-Desbois, SCP Gatineau et Fattaccini

Origine de la décision
Date de l'import : 15/09/2022
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CCASS:2019:17.27657
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