LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE COMMERCIALE, a rendu l'arrêt suivant :
Sur le premier moyen :
Attendu, selon l'arrêt attaqué (Paris, 19 juin 2017), que M. M... était le dirigeant de la SARL Axel société de flocage et d'isolation (la société), qui a été mise en liquidation judiciaire ; que le chef du service comptable du service des impôts des entreprises de Boissy-Saint-Léger l'a assigné sur le fondement de l'article L. 267 du livre des procédures fiscales afin qu'il soit déclaré solidairement responsable avec la société du paiement des dettes fiscales de cette dernière ;
Attendu que M. M... fait grief à l'arrêt de rejeter les exceptions de nullité qu'il a soulevées et de le condamner à payer, solidairement avec la société, les sommes dues par celle-ci alors, selon le moyen, que la procédure prévue à l'article L. 267 du livre des procédures fiscales ne doit être mise en oeuvre que sur décision personnelle du directeur des services fiscaux ou du trésorier payeur général, qui doivent s'assurer que les circonstances propres à chaque affaire justifient ou non l'engagement de l'action ; que cette exigence n'est valablement remplie que s'il résulte de l'autorisation que son auteur a procédé à un examen concret de la situation du contribuable ou qu'elle a été délivrée au visa d'un projet d'assignation ; qu'en décidant que l'autorisation à agir en justice du directeur des finances publiques avait été valablement délivrée après avoir pris connaissance de la situation de M. M... et des circonstances propres de l'affaire, tout en constatant que cette autorisation, qui ne comportait aucun exposé factuel, n'avait été donnée qu'au vu d'un rapport et non du projet d'assignation, la cour d'appel qui n'a pas tiré les conséquences légales de ses propres constatations a violé l'article L. 267 du livre des procédures fiscales ;
Mais attendu que l'arrêt constate que l'autorisation donnée par le directeur départemental des finances publiques est rédigée comme suit : « Le directeur soussigné, vu le rapport qui lui a été soumis et après s'être assuré que les circonstances propres de l'affaire caractérisent les conditions requises pour l'application de l'article L. 267 du livre des procédures fiscales, autorise la comptable des finances publiques du service des impôts des entreprises de Boissy-Saint-Léger, comptable chargée du recouvrement, à engager à l'encontre de M. N... M... (...), dirigeant de la SARL Axel société de flocage et d'isolation (...), l'action prévue audit article » ; que la cour d'appel a pu en déduire que ce directeur départemental avait donné son autorisation après avoir pris connaissance de la situation particulière de M. M... et qu'il l'avait donc donnée en toute connaissance de cause, les termes de l'autorisation attestant que la procédure avait été respectée ; que le moyen n'est pas fondé ;
Et attendu qu'il n'y a pas lieu de statuer par une décision spécialement motivée sur le second moyen, qui n'est manifestement pas de nature à entraîner la cassation ;
PAR CES MOTIFS :
REJETTE le pourvoi ;
Condamne M. M... aux dépens ;
Vu l'article 700 du code de procédure civile, rejette sa demande ;
Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, chambre commerciale, financière et économique, et prononcé par le président en son audience publique du cinq juin deux mille dix-neuf.
MOYENS ANNEXES au présent arrêt :
Moyens produits par la SCP Ortscheidt, avocat aux Conseils, pour M. M....
PREMIER MOYEN DE CASSATION :
Il est fait grief à l'arrêt confirmatif attaqué d'avoir rejeté les exceptions de nullité soulevées par Monsieur N... M... et, en conséquence, condamné Monsieur M... à payer au chef de service comptable du service les impôts des entreprises de BOISSY SAINT-LEGER, solidairement avec la société AXEL Société FLOCAGE et d'ISOLATION ASFI, la somme de 363.944 euros au titre de l'article L 267 du code des procédures fiscales ;
AUX MOTIFS PROPRES QUE (
) sur l'exception d'irrecevabilité de la demande de l'administration fiscale (
) l'autorisation donnée par le directeur départemental des finances publiques est ainsi libellée : "Le Directeur soussigné, vu le rapport qui lui a été soumis et après s'être assuré que les circonstances propres de l'affaire caractérisent les conditions requises pour l'application de l 'article L.267 du livre des procédures .fiscales, autorise la comptable des finances publiques du service des impôts des entreprises de Boissy Saint Léger, comptable chargée du recouvrement, à engager à I'encontre de M. N... M..., né le.[...] à Rochefort sur Mer, dirigeant de la SARL Axel Société de Flocage et d'Isolation ASFI dont l'établissement était situé [...] , l'action prévue audit article" ; qu'il en résulte que le directeur départemental des finances publiques a donné son autorisation, après avoir pris connaissance de la situation dc M. M... et s'être assuré que les circonstances propres de l'affaire caractérisaient les conditions requises pour l'application de l'article L 267 sans que l'on puisse exiger qu'il donne son avis sur l'issue de la procédure envisagée de sorte que c'est à bon droit que le premier juge a rejeté l'exception d'irrecevabilité ; que le jugement déféré sera donc confirmé sur ce point (
) ;
ET AUX MOTIFS ADOPTES QUE (
) Monsieur M... soulève enfin le défaut de motivation. Il considère que l'autorisation délivrée le 1er août 2014 par l'administration fiscale n'est pas conforme aux prescriptions de J'instruction du 6 septembre 1988 qui impose de s'assurer que les circonstances propres à chaque affaire justifient ou non l'engagement de la décision ; qu'en l'espèce, l'autorisation donnée le 1er août 2014 est rendue au visa de l'article L 267 du code des procédures fiscales, elle mentionne la situation de Monsieur M... ; qu'au vu de ces éléments, la preuve est suffisamment rapportée que l'autorisation a été valablement donnée ; que le moyen sera rejeté ;
ALORS QUE la procédure prévue à l'article L. 267 du livre des procédures fiscales ne doit être mise en oeuvre que sur décision personnelle du directeur des services fiscaux ou du trésorier payeur général, qui doivent s'assurer que les circonstances propres à chaque affaire justifient ou non l'engagement de l'action ; que cette exigence n'est valablement remplie que s'il résulte de l'autorisation que son auteur a procédé à un examen concret de la situation du contribuable ou qu'elle a été délivrée au visa d'un projet d'assignation ; qu'en décidant que l'autorisation à agir en justice du directeur des finances publiques avait été valablement délivrée après avoir pris connaissance de la situation dc M. M... et des circonstances propres de l'affaire, tout en constatant que cette autorisation, qui ne comportait aucun exposé factuel, n'avait été donnée qu'au vu d'un rapport et non du projet d'assignation, la cour d'appel qui n'a pas tiré les conséquences légales de ses propres constatations a violé l'article L. 267 du livre des procédures fiscales.
SECOND MOYEN DE CASSATION :
Il est fait grief à l'arrêt confirmatif attaqué d'avoir condamné Monsieur M... à payer au chef de service comptable du service les impôts des entreprises de BOISSY SAINT-LEGER, solidairement avec la société AXEL Société FLOCAGE et d'ISOLATION ASFI, la somme de 363.944 euros au titre de l'article L 267 du code des procédures fiscales ;
AUX MOTIFS PROPRES QUE l'article L 267 du livre des procédures fiscales dispose : « Lorsqu'un dirigeant d'une société, d'une personne morale ou de tout autre groupement, est responsable des manoeuvres frauduleuses ou de l'inobservation grave et répétée des obligations fiscales qui ont rendu impossible le recouvrement des impositions et des pénalités chues par la société, la personne morale ou le groupement, ce dirigeant peut, s'il n'est pas déjà tenu au paiement des dettes sociales en application d'une autre disposition, être déclaré solidairement responsable du paiement de ces impositions et pénalités par le président du tribunal de grande instance. A cette fin, le comptable public compétent assigne le dirigeant devant le président du tribunal de grande instance du lieu du siège social. Cette disposition est applicable à toute personne exerçant en droit ou en fait, directement ou indirectement, la direction effective de la société, de la personne morale ou du groupement » ; que la qualité de dirigeant de droit de la société AFSI n'est pas contestée par M. M... ; qu'il résulte des pièces produites aux débats par les parties que la société AFSI a déposé tardivement et sans paiement des déclarations de TVA en janvier 2013 et mars 2013 ; qu'elle a omis de déclarer le chiffre d'affaires pour les mois de mars et avril 2013 qui ont dû faire l'objet d'une taxation d'office par le service ; que le dépôt de la déclaration afférente au mois de février 2013 comportant la régularisation d'une dette de TVA de 349.585 euros établit clairement l'existence d'une rétention très importante ancienne et récurrente de la TVA, pourtant perçue auprès de ses clients ; que ce défaut de reversement, que le service ne pouvait déceler sans mettre en oeuvre une procédure de contrôle fiscal externe a permis à la société débitrice d'utiliser la TVA, au préjudice de l'Etat, afin de se constituer de la trésorerie et maintenir artificiellement la société en activité et fausser le jeu de la concurrence vis-à-vis des entreprises respectant leurs obligations déclaratives et contributives ; que ce défaut de déclarations et de reversement de la TVA constitue l'inobservation grave et répétée des obligations fiscales ; qu'enfin, l'administration fiscale qui a déclaré sa créance laquelle n'a pas été contestée et a été admise à hauteur de la somme de 363.944 euros, a reçu un certificat d'irrécouvrabilité le 20 juin 2014 de sorte que les manquements graves et répétés de M. M... qui a laissé s'accumuler une dette fiscale importante et accroître le passif de l'entreprise ont rendu impossible le recouvrement des impôts éludés pour un montant de 363 944 euros ; que le jugement entrepris sera dès lors confirmé en ce qu'il a déclaré M. M... solidairement responsable avec la société ASFI du paiement de la somme de 363 944 euros ;
ET AUX MOTIFS NON CONTRAIRES ADOPTES QUE (
) sur les inobservations graves et répétés au obligations fiscales, il incombait (à M. M...) de remettre chaque mois au bureau du comptable des impôts dont la société dépendait un relevé indiquant le montant total des affaires réalisées ainsi que le détail des opérations taxables et d'acquitter les taxes exigibles au moment du dépôt de la déclaration ; qu'il résulte des diverses pièces versées aux débats et notamment des déclarations de TVA sans paiement en février 2013, déclaration rectificative de TVA dans paiement du 15 avril 2013, les omissions de déclaration du chiffre d'affaire en mars et avril 2013, les avis de recouvrement du 15 mai 2013, 10 juin 2013, 25 octobre 2013, 24 février 2014, que la société ASFI a manqué à ses obligations de déclaration ; que le dépôt de la déclaration de février 2013, comportant une régularisation de TVA de 349.585 euros démontre l'importance de la dette de TVA, révélée en février 2013, ce qui a conduit l'administration à convoquer Monsieur M..., lequel ne s'est pas rendu au rendez-vous , que la déclaration de cessation de paiements est intervenue le 12 avril 2013 ; que compte tenu du caractère déclaratif de cette taxe, le dirigeant qui ne déclare pas dans les délais et n'acquitte pas spontanément et concomitamment la taxe dont la société est redevable fait obstacle au recouvrement normal de cet impôt dû par la société (
) ;
1°) ALORS QUE pour apprécier l'existence d'une inobservation grave et répétée du dirigeant d'une société à ses obligations fiscales, le juge doit tenir compte de la situation financière de la société au moment des faits, et spécialement des répercutions de l'ouverture d'une procédure de redressement ou de liquidation judiciaire ; qu'en se bornant à affirmer, pour caractériser un manquement grave et répété de Monsieur M... à ses obligations fiscales, que la société AFSI a déposé tardivement et sans paiement des déclarations de TVA en janvier 2013 et mars 2013, qu'elle a omis de déclarer le chiffre d'affaires pour les mois de mars et avril 2013 qui ont dû faire l'objet d'une taxation d'office par le service, sans tenir compte, comme elle y avait été spécialement invitée, de la situation financière particulièrement obérée de la société à cette époque et de l'impossibilité pour son dirigeant d'accomplir ses obligations fiscales après la déclaration de cessation des paiements le 12 avril 2013 et l'ouverture d'une procédure de liquidation judiciaire de la société, la cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard de l'article L 267 du livre des procédures fiscales ;
2°) ALORS QU'en reprochant à Monsieur M... d'avoir maintenu artificiellement la société en activité quand il ressort au contraire des mentions de l'arrêt attaqué que le 12 avril 2013, la société ASFI a déposé la déclaration de TVA correspondant au mois de février 2013 laissant apparaitre un total à payer de 349.585 euros et que concomitamment, Monsieur M... a procédé à une déclaration de cessation des paiements au greffe du tribunal de commerce de Paris, ce dont il résulte qu'il a immédiatement tiré les conséquences de cette dette fiscale après en avoir eu connaissance de son existence, la cour d'appel a violé L 267 du livre des procédures fiscales ;
3°) ALORS QU'en reprochant à Monsieur M... d'avoir maintenu artificiellement la société en activité quand le jugement du 24 avril 2013 ouvrant une procédure de liquidation judiciaire de la société a fixé la date de la cessation des paiements au 31 mars 2013, et que cette date n'a jamais été remise en cause ensuite, la Cour d'appel a violé de plus fort l'article L 267 du livre des procédures fiscales.