La jurisprudence francophone des Cours suprêmes


recherche avancée

29/05/2019 | FRANCE | N°18-18338

France | France, Cour de cassation, Chambre civile 1, 29 mai 2019, 18-18338


LA COUR DE CASSATION, PREMIÈRE CHAMBRE CIVILE, a rendu l'arrêt suivant :

Sur le moyen unique :

Vu les articles 247, 247-1 et 247-2 du code civil, ensemble l'article 1077 du code de procédure civile ;

Attendu, selon l'arrêt attaqué, que Mme H... a, sur le fondement de l'article 242 du code civil, assigné M. T... en divorce ; que celui-ci a formé une demande reconventionnelle sur le même fondement ; qu'en cause d'appel, Mme H... a sollicité le prononcé du divorce aux torts exclusifs de M. T..., tandis que ce dernier a conclu à son prononcé au titre de l'altérat

ion définitive du lien conjugal ;

Attendu que, pour accueillir cette demande,...

LA COUR DE CASSATION, PREMIÈRE CHAMBRE CIVILE, a rendu l'arrêt suivant :

Sur le moyen unique :

Vu les articles 247, 247-1 et 247-2 du code civil, ensemble l'article 1077 du code de procédure civile ;

Attendu, selon l'arrêt attaqué, que Mme H... a, sur le fondement de l'article 242 du code civil, assigné M. T... en divorce ; que celui-ci a formé une demande reconventionnelle sur le même fondement ; qu'en cause d'appel, Mme H... a sollicité le prononcé du divorce aux torts exclusifs de M. T..., tandis que ce dernier a conclu à son prononcé au titre de l'altération définitive du lien conjugal ;

Attendu que, pour accueillir cette demande, après avoir rejeté la demande de l'épouse, l'arrêt retient qu'en cas de présentation d'une demande principale en divorce pour faute et d'une demande reconventionnelle pour altération définitive du lien conjugal, le rejet de la première emporte nécessairement le prononcé du divorce du chef de la seconde ;

Qu'en statuant ainsi, alors que la nouvelle demande de l'époux, fondée sur l'altération définitive du lien conjugal, était irrecevable, la cour d'appel a violé les textes susvisés ;

PAR CES MOTIFS :

CASSE ET ANNULE, dans toutes ses dispositions, l'arrêt rendu le 19 janvier 2017, entre les parties, par la cour d'appel d'Aix-en-Provence ; remet, en conséquence, la cause et les parties dans l'état où elles se trouvaient avant ledit arrêt et, pour être fait droit, les renvoie devant la cour d'appel de Montpellier ;

Condamne M. T... aux dépens ;

Vu l'article 700 du code de procédure civile, rejette la demande ;

Dit que sur les diligences du procureur général près la Cour de cassation, le présent arrêt sera transmis pour être transcrit en marge ou à la suite de l'arrêt cassé ;

Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, première chambre civile, et prononcé par le président en son audience publique du vingt-neuf mai deux mille dix-neuf.

MOYEN ANNEXE au présent arrêt :

Moyen produit par Me Carbonnier, avocat aux Conseils, pour Mme H....

Il est fait grief à l'arrêt infirmatif attaqué d'AVOIR prononcé, au visa des articles 237 et 238 du code civil, le divorce des époux X... H... et J... T... et d'en avoir tiré les conséquences (liquidation et partage des intérêts patrimoniaux, rejet de la demande d'attribution préférentielle, irrecevabilité de la demande formée par Mme H...-T... au titre de l'attribution de la jouissance du domicile conjugal, rejet de la demande de Mme T... d'usage du nom marital, irrecevabilité de la demande de dommages et intérêts, prestation compensatoire limitée à 70 000 euros etc.),

AUX MOTIFS QUE "X... H... sollicite le divorce sur le fondement de l'article 242 du Code Civil, tandis que J... T... forme une demande reconventionnelle au titre des articles 237 et 238 du Code Civil.
La demande principale : Aux termes de l'article 242 du Code Civil, le divorce peut être demandé par l'un des époux lorsque des faits constitutifs d'une violation grave ou renouvelée des devoirs et obligations du mariage sont imputables à son conjoint, et rendent intolérable le maintien de la vie commune. En l'espèce, X... H... soulève à l'encontre de son mari deux griefs : - Des violences répétées à son encontre durant toute la durée de la vie commune - Le non-respect des obligations alimentaires A l'appui du premier grief, X... H... invoque le contenu de la lettre que sa fille S... a adressée à la cour pour solliciter son audition et des propos qu'elle a tenus au membre de la cour qui a procédé à cette audition. Ce moyen de preuve ne peut être admis de par la prohibition posée par les articles 259 du Code Civil et 205 du Code de Procédure Civile, aux ternies desquels les descendants ne peuvent jamais être entendus sur les griefs invoqués par les époux à l'appui d'une demande en divorce ou en séparation de corps. Elle produit également des photographies issues d 'un film vidéo, et trois attestations de personnes ayant visionné ce film qui décrivent ce qu'ils ont pu constater de la séquence filmée. Les photographies montrent à l'évidence une scène de violence, dans laquelle un homme (J... T... ne nie pas que ce soit lui) se dispute avec une femme assise dans un canapé, tenant un enfant dans les bras. L'homme est menaçant à l'égard de la femme et lève à plusieurs reprises la main comme s'il voulait la frapper ou l'avait déjà frappée. Monsieur P... indique que X... H... subit dans cette scène de nombreuses insultes verbales et deux agressions physiques se traduisant par des gifles et une simulation d'étranglement. Mme Z... V... relève quant à elle des agressions verbales et physiques sans décrire lesquelles. Enfin Mme I... Y... affirme que dans ce filin, J... T... se tape tout seul la tête puis frappe X... H... devant S... qui pleure. A l'encontre de cet élément de preuve, J... T... fait valoir que son épouse l'a filmé à son insu, et a monté une mise en scène pour pousser à bout son époux et pouvoir ainsi obtenir les preuves d'une prétendue violence. Certes, X... H... ne s'explique pas dans ses écritures sur l'obtention de ce document, tout à fait inhabituel dans ce type de dossier. Mais à supposer même qu'elle ait poussé à bout son mari comme ce dernier le prétend, rien ne justifie que J... T... ait adopté alors une attitude aussi violente à l'égard de son conjoint, de surcroît devant l'enfant. En revanche, J... T... invoque la réconciliation intervenue dans le couple depuis ces faits. La vidéo date effectivement du 30 août 2003, et le couple ne s'est séparé qu'en juillet 2009. X... H... soutient que le fait que la vie commune ait perduré jusqu'à cette date, ne peut s'analyser comme une réconciliation, dans la mesure où elle n'a jamais pardonné à son Inari, et qu'elle est restée silencieuse pendant toutes ces années sur les violences répétées qu'elle subissait, soumise au joug de son mari. S'il est vrai qu'il est difficile pour les victimes de violences conjugales répétées de se libérer de l'emprise de leur compagnon, il n'en demeure pas moins qu'en justice, il convient d'apporter la preuve de ses allégations. Or, X... H... n'apporte aux débats pas le moindre élément laissant supposer que les violences auraient pu perdurer pendant toute cette période. Dès lors c'est à bon droit que le premier juge a retenu la réconciliation intervenue entre les époux depuis les faits, empêchant de les invoquer comme cause de divorce. Ce grief doit donc être écarté. X... H... invoque également le fait que J... T... a volontairement réduit le montant des pensions alimentaires dues, de par la soustraction du montant du crédit immobilier, si bien qu'elle s'est trouvée dans une situation matérielle précaire et a dû faire diligenter une procédure de paiement direct en juillet 2014. Il résulte des pièces produites qu'effectivement, à partir de mars 2014 et pendant les mois qui ont suivi, J... T... ne s'est pas acquitté de l'intégralité des pensions alimentaires dues à son épouse au titre du devoir de secours et de la contribution à l'entretien et l'éducation de l'enfant. Mais il a réglé, parce que son épouse ne le faisait pas, le montant du crédit immobilier grevant le bien commun, qui avait été analysé par le magistrat conciliateur comme une charge de l'épouse, pour fixer le quantum de la pension alimentaire. Cette mesure a été prise par lui, suite à divers incidents survenus sur le compte joint en règlement de ce prêt, pour éviter de nouveaux problèmes, et en sauvegarde des intérêts du couple. Si bien qu'il est loisible de considérer que la situation précaire invoquée par X... H... n'était pas la conséquence de la décision unilatérale de J... T... - lequel certes aurait dû immédiatement saisir la justice en modification des mesures provisoires - mais la cause d'une mauvaise gestion de son budget. Là encore le grief ne peut être retenu. Partant, il convient de débouter X... H... de sa demande principale en divorce.
Sur la demande reconventionnelle : Aux termes de l'article 238 alinéa 2 du Code Civil, nonobstant les dispositions de l'alinéa précédent, le divorce est prononcé pour altération définitive du lien conjugal dès lors que la demande présentée sur ce fondement est formée à titre reconventionnel. Il résulte de ce texte qu'en cas de présentation d'une demande principale en divorce pour faute et d'une demande reconventionnelle pour altération définitive du lien conjugal, le rejet de la première emporte nécessairement le prononcé du divorce du chef de la seconde. En conséquence, le divorce sera prononcé sur le fondement des articles 237 et 238 du Code Civil" (arrêt, p. 7 à 9),

ALORS QU'est irrecevable la demande nouvelle en divorce pour rupture du lien conjugal présentée en appel par un époux alors qu'il sollicitait le divorce pour faute en première instance ;

Qu'il est constant qu'à la suite du prononcé de l'ordonnance de non-conciliation, Mme X... T... a assigné son époux en divorce pour faute sur le fondement de l'article 242 du code civil et que celui-ci s'est opposé à cette demande en formant une demande reconventionnelle en divorce pour faute et a conclu, à titre subsidiaire, au prononcé du divorce pour altération définitive du lien conjugal ; que, par jugement du 25 septembre 2015, le tribunal de grande instance de Marseille a débouté les époux de leur demande respective en divorce pour faute et a déclaré irrecevable la demande subsidiaire pour altération définitive du lien conjugal formée par M. T..., sur le fondement de l'article 1077 du code de procédure civile ; qu'en cause d'appel, alors que Mme X... T... demandait le prononcé du divorce aux torts exclusifs de l'époux, celui-ci a demandé à la cour d'appel de prononcer le divorce pour altération définitive du lien conjugal ;

Qu'en accueillant la demande présentée par M. T..., alors que celle-ci aurait dû être déclarée irrecevable, la cour d'appel a violé les articles 247, 247-1 et 247-2 du code civil, ensemble l'article 1077 du code de procédure civile.


Synthèse
Formation : Chambre civile 1
Numéro d'arrêt : 18-18338
Date de la décision : 29/05/2019
Sens de l'arrêt : Cassation
Type d'affaire : Civile

Références :

Décision attaquée : Cour d'appel d'Aix-en-Provence, 19 janvier 2017


Publications
Proposition de citation : Cass. Civ. 1re, 29 mai. 2019, pourvoi n°18-18338


Composition du Tribunal
Président : Mme Batut (président)
Avocat(s) : Me Carbonnier, SCP Célice, Soltner, Texidor et Périer

Origine de la décision
Date de l'import : 15/09/2022
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CCASS:2019:18.18338
Association des cours judiciaires suprmes francophones
Organisation internationale de la francophonie
Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie. Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie.
Logo iall 2012 website award