LA COUR DE CASSATION, DEUXIÈME CHAMBRE CIVILE, a rendu l'arrêt suivant :
Donne acte à l'URSSAF d'Ile-de-France du désistement de son pourvoi en ce qu'il est dirigé contre le ministre chargé de la sécurité sociale ;
Sur le premier moyen :
Vu l'article L. 241-10, III du code de la sécurité sociale, dans sa rédaction applicable au litige ;
Attendu que ce texte, qui prévoit sur les rémunérations des aides à domicile employées, une exonération des cotisations patronales pour la fraction versée en contrepartie des tâches effectuées chez les personnes visées au I du même texte, ne peut s'appliquer qu'aux rémunérations des salariés intervenant au domicile privatif de ces personnes, à l'exclusion des lieux non privatifs ou collectifs occupés en établissement, en raison de l'impossibilité de maintenir ces personnes chez elles ;
Attendu, selon l'arrêt attaqué, que l'association Création équipements pilotes personnes âgées (l'association) a fait l'objet d'un contrôle portant sur les années 2008 à 2010 par l'union de recouvrement des cotisations de sécurité sociale et d'allocations familiales d'Ile-de-France (l'URSSAF), ayant donné lieu à une lettre d'observations du 30 novembre 2011, concernant notamment l'exonération de cotisations patronales et d'allocations familiales sur les rémunérations des aides à domiciles ; que la société a saisi d'un recours une juridiction de sécurité sociale ;
Attendu que pour faire droit au recours, l'arrêt retient essentiellement qu'il est constant qu'un établissement hospitalier pour personnes âgées dépendantes offre un hébergement aux personnes âgées dépendantes et que les prestations d'aide à domicile sont délivrées par le personnel de l'association auprès des résidents et chez les résidents au sein de l'établissement ;
Qu'en statuant ainsi, la cour d'appel a violé le texte susvisé ;
Sur les deuxième et troisième moyens :
Attendu qu'en application de l'article 624 du code de procédure civile, la cassation des dispositions de l'arrêt ayant annulé le chef de redressement n° 3 relatif aux exonérations des aides à domicile, services à la personne pour un montant de 546 249 euros au titre des cotisations outre les majorations de retard, entraîne la cassation par voie de conséquence des chefs de l'arrêt relatifs au remboursement par l'URSSAF d'Ile-de-France à l'association de la somme de 298 232 euros au titre des cotisations 2010, au rejet la demande de l'URSSAF en paiement de dommages-intérêts et à l'injonction faite à l'URSSAF d'Ile-de-France de faire cesser l'effet de l'inscription de privilège du 6 septembre 2012 pour un montant de 643 868 euros, qui s'y rattachent par un lien de dépendance nécessaire ;
PAR CES MOTIFS :
CASSE ET ANNULE, mais seulement en ce qu'il annule le chef de redressement n° 3 relatif aux exonérations des aides à domicile, services à la personne pour un montant 546 249 euros au titre des cotisations outre les majorations de retard ; en ce qu'il ordonne à l'URSSAF d'Ile-de-France de rembourser à l'association Création équipements pilotes personnes âgées de la somme de 298 232 euros au titre des cotisations 2010 ; en ce qu'il rejette la demande de l'URSSAF en paiement de dommages-intérêts ; et en ce qu'il enjoint à l'URSSAF d'Ile-de-France de faire cesser l'effet de l'inscription de privilège du 6 septembre 2012 pour un montant de 643 868 euros, l'arrêt rendu le 9 mars 2018, entre les parties, par la cour d'appel de Paris ; remet, en conséquence, sur ces points, la cause et les parties dans l'état où elles se trouvaient avant ledit arrêt et, pour être fait droit, les renvoie devant la cour d'appel de Paris, autrement composée ;
Condamne l'association Création équipements pilotes personnes âgées aux dépens ;
Vu l'article 700 du code de procédure civile, rejette la demande de l'association Création équipements pilotes personnes âgées et la condamne à payer à l'union de recouvrement des cotisations de sécurité sociale et d'allocations familiales d'Ile-de-France la somme de 3 000 euros ;
Dit que sur les diligences du procureur général près la Cour de cassation, le présent arrêt sera transmis pour être transcrit en marge ou à la suite de l'arrêt partiellement cassé ;
Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, deuxième chambre civile, et prononcé par le président en son audience publique du vingt-neuf mai deux mille dix-neuf.
MOYENS ANNEXES au présent arrêt :
.Moyens produits par la SCP Gatineau et Fattaccini, avocat aux Conseils, pour l'union de recouvrement des cotisations de sécurité sociale et d'allocations familiales d'Ile-de-France.
PREMIER MOYEN DE CASSATION :
Il est fait grief à la décision attaquée d'AVOIR annulé le chef de redressement n° 3 relatif aux « exonérations des aides à domicile, services à la personne, notion de domicile » pour un montant 546.249 euros au titre des cotisations outre les majorations de retard ; d'AVOIR ordonné à l'URSSAF d'Ile de France de rembourser à l'ACEP la somme de 298.232 euros au titre des cotisations 2010, d'AVOIR dit qu'il appartenait à l'ACEP de se rapprocher de l'URSSAF d'Ile de France aux fins de faire les comptes de régularisation des comptes entre les parties, d'AVOIR rejeté la demande de l'URSSAF en paiement de dommages et intérêts et d'AVOIR enjoint à l'URSSAF Ile de France de faire cesser l'effet de l'inscription de privilège du 6 septembre 2012 d'un montant de 643.868 euros ;
AUX MOTIFS QUE les dispositions de l'article L 241-10 III, dans leur version applicable au litige, prévoient III.- Les rémunérations des aides à domicile employées sous contrat à durée indéterminée ou sous contrat à durée déterminée pour remplacer les salariés absents ou dont le contrat de travail est suspendu dans les conditions visées à l'article L. 122-1-1 du code du travail par les associations et les entreprises admises, en application de l'article L. 129-1 du code du travail, à exercer des activités concernant la garde d'enfant ou l'assistance aux personnes âgées ou handicapées, les centres communaux et intercommunaux d'action sociale et les organismes habilités au titre de l'aide sociale ou ayant passé convention avec un organisme de sécurité sociale sont exonérées des cotisations patronales d'assurances sociales et d'allocations familiales pour la fraction versée en contrepartie de l'exécution des tâches effectuées chez les personnes visées au 1 ou bénéficiaires de prestations d'aide ménagère aux personnes âgées ou handicapées au titre de l'aide sociale légale ou dans le cadre d'une convention conclue entre ces associations ou organismes et un organisme de sécurité sociale, dans la limite, pour les personnes visées au a du I. du plafond prévu par ce a ;
qu'ainsi, l'article L 241 - 10 Ill, dans sa version applicable au litige, soumet le bénéfice de l'exonération aux conditions suivantes :
- elle doit porter sur les cotisations patronales d'assurances sociales et d'allocations familiales,
- le personnel et les personnes visées sont les aides à domicile employées sous contrat à durée indéterminée ou déterminée pour remplacer les salariés absents ou dont le contrat de travail est suspendu pour effectuer des tâches d'aide à domicile,
- les employeurs sont soit des centres communaux ou intercommunaux d'action sociale, soit des associations ou des entreprises ayant obtenu l'agrément en application du code du travail pour exercer des activités de service à la personne, soit des organismes habilités au titre de l'aide sociale ou ayant passé une convention avec un organisme de sécurité sociale,
- les tâches doivent être effectuées chez les personnes visées au a)b)c)d)e) visés au I : les personnes âgées d'au moins 70 ans non dépendantes, les parents d'un enfant handicapé, les personnes titulaires de la prestation de compensation ou de la majoration tierce personne, les personnes âgées d'au moins 60 ans dans l'obligation de recours à l'assistance d'une tierce personne pour accomplir les actes de la vie courante, les personnes remplissant la condition de perte d'autonomie titulaire de l'APA ;
qu'il n'est pas contesté que l'ACEP est un organisme habilité à recevoir des bénéficiaires de l'aide sociale, qui a passé une convention avec un organisme de sécurité sociale, l'assurance maladie, que l'exonération qu'elle sollicite porte uniquement sur les cotisations patronales pour le personnel qu'elle emploie sous contrat à durée indéterminée ou déterminée et pour les tâches d'aide à domicile qu'il effectue ; que cependant pour refuser à l'ACEP le bénéfice de l'exonération, l'URSSAF fait valoir que le dispositif prévu par les dispositions susvisées est réservé aux activités réalisées au domicile des bénéficiaires, ce qui exclurait les structures d'hébergement collectif, à l'exception des foyers logement ; que force est de constater que le terme de domicile n'est pas employé au paragraphe III des dispositions litigieuses ; que le texte prévoit que les taches doivent être effectuées "chez" les personnes visées au visées au a)b)c)d)e) visés au 1 ; qu'or il est constant que les EHPAD offrent un hébergement aux personnes âgées dépendantes et les prestations d'aide à domicile sont délivrées par le personnel de l'ACEP auprès des résidents et chez les résidents au sein de l'établissement ; que même si l'URSSAF interprète l'adverbe « chez » comme étant synonyme de domicile, lieu du principal établissement de la personne, ainsi qu'il ressort de l'article 102 du code civil, il doit être constaté que l'ACEP constitue l'habitation réelle et effective des résidents ; qu'ils ont signé un contrat de séjour, prennent leur repas à l'ACEP, ils y dorment, y reçoivent leur famille et y exercent la majorité de leurs activités journalières ; qu'ils ont également la possibilité d'aménager leur logement et de le personnaliser ; que le domicile étant non seulement le lieu où la personne a son principal établissement mais encore celui, qu'elle y habite ou non, où elle a le droit de se dire chez elle, quels que soient le titre de son occupation et l'affectation donnée aux locaux, peu importe les conditions juridiques de l'installation, qu'elle soit ou non titulaire d'un bail ; qu'en l'espèce, les résidents ont signé avec l'établissement un contrat de séjour à durée indéterminée ; qu'un état des lieux a été dressé et ils ont versé un dépôt de garantie ; que ce contrat constitue un titre leur donnant droit à l'occupation de leur logement ; que par ailleurs, il est établi, au vu des pièces produites, que les personnes âgées résidant au sein de l'ACEP sont fiscalement domiciliées à l'adresse de l'ACEP, qu'elles y reçoivent leur courrier, qu'elles sont inscrites sur les listes électorales de leur lieu de domicile que constitue l'ACEP ; qu'outre ces conditions matérielles, l'élément intentionnel du principal établissement se définit comme la volonté manifestée par l'intéressé de se fixer en un lieu de manière complète et permanente mais non pas nécessairement définitive ; qu'en l'espèce, le changement de domicile fiscal, électoral et social a exigé des démarches auprès des administrations et l'installation à l'ACEP a impliqué une procédure préalable d'inscription, de sorte que ces circonstances établissent l'intention des résidents de s'y fixer de manière complète et permanente mais non pas nécessairement définitive ; qu'enfin, le fait que le domicile soit constitué d'une partie privative au sein d'une structure collective n'est pas de nature à priver l'ACEP du bénéfice de l'exonération dans la mesure où le texte de l'article L 241-10 III ne prévoit aucune exclusion du bénéfice de l'exonération des structures d'hébergement collectif ; qu'en conséquence, il convient d'annuler le chef de redressement n° 3 relatif aux exonérations des aides à domicile, services à la personne :
notion de domicile, pour un montant 546.249 € au titre des cotisations outre les majorations de retard ;
(
)
que le jugement entrepris sera donc infirmé en toutes ses dispositions ; qu'il appartient à l'ACEP de se rapprocher de l'URSSAF aux fins de faire les comptes de régularisation des comptes entre les parties ;
ALORS QUE l'exonération de charges sociales patronales dans les conditions prévues par l'article L. 241-10 III du code de la sécurité sociale ne s'applique qu'aux rémunérations de salariés intervenant au domicile privatif de la personne âgée ; que tel n'est pas le cas des salariés intervenant au bénéfice de personnes âgées vivant dans une structure d'hébergement collectif telle que l'EHPAD ; qu'en considérant le contraire, la cour d'appel a violé l'article susvisé.
DEUXIEME MOYEN DE CASSATION :
Il est fait grief à la décision attaquée d'AVOIR annulé le chef de redressement n° 3 relatif aux « exonérations des aides à domicile, services à la personne, notion de domicile » pour un montant 546.249 euros au titre des cotisations outre les majorations de retard ; d'AVOIR ordonné à l'URSSAF d'Ile de France de rembourser à l'ACEP la somme de 298.232 euros au titre des cotisations 2010, d'AVOIR dit qu'il appartenait à l'ACEP de se rapprocher de l'URSSAF Ile de France aux fins de faire les comptes de régularisation des comptes entre les parties, d'AVOIR rejeté la demande de l'URSSAF en paiement de dommages et intérêts et d'AVOIR enjoint à l'URSSAF d'Ile de France de faire cesser l'effet de l'inscription de privilège du 6 septembre 2012 d'un montant de 643.868 euros ;
AUX MOTIFS QUE sur la demande de remboursement de la somme de 298.232 € au titre des cotisations 2010, le chef de redressement n° 3 n'ayant porté que sur les années 2008 et 2009, il convient au vu des pièces du dossier, de faire droit à la demande de remboursement présentée par l'ACEP au titre des mêmes cotisations 2010 pour un montant de 298.232€ ;
ALORS QUE la cassation qui sera prononcée sur le fondement du premier moyen entraînera par voie de conséquence, pour perte de fondement, l'annulation du chef ici querellé des dispositifs de l'arrêt et ce, en application de l'article 624 du code de procédure civile.
TROISIEME MOYEN DE CASSATION :
Il est fait grief à la décision attaquée d'AVOIR annulé le chef de redressement n° 3 relatif aux « exonérations des aides à domicile, services à la personne, notion de domicile » pour un montant 546.249 euros au titre des cotisations outre les majorations de retard ; d'AVOIR ordonné à l'URSSAF d'Ile de France de rembourser à l'ACEP la somme de 298.232 euros au titre des cotisations 2010, d'AVOIR dit qu'il appartenait à l'ACEP de se rapprocher de l'URSSAF Ile de France aux fins de faire les comptes de régularisation des comptes entre les parties, d'AVOIR rejeté la demande de l'URSSAF en paiement de dommages et intérêts et d'AVOIR enjoint à l'URSSAF d'Ile de France de faire cesser l'effet de l'inscription de privilège du 6 septembre 2012 d'un montant de 643.868 euros ;
AUX MOTIFS QUE sur les autres demandes, le chef de redressement n° 3 étant annulé, la demande de l'URSSAF en paiement de dommages et intérêts doit être rejetée ; qu'en revanche, il convient d'enjoindre à l'URSSAF de faire cesser l'effet de l'inscription de privilège du 6 septembre 2012 d'un montant de 643.868€ ;
ALORS QUE la cassation qui sera prononcée sur le fondement du premier moyen entraînera par voie de conséquence, pour perte de fondement, l'annulation du chef ici querellé des dispositifs de l'arrêt et ce, en application de l'article 624 du code de procédure civile.