LA COUR DE CASSATION, DEUXIÈME CHAMBRE CIVILE, a rendu l'arrêt suivant :
Sur le moyen unique :
Vu les articles 2224 du code civil, R. 142-18 et R. 441-14 du code de la sécurité sociale ;
Attendu que si la décision de la caisse primaire qui reconnaît le caractère professionnel de l'accident, de la maladie professionnelle ou de la rechute, fait grief à l'employeur qui est recevable à en contester l'opposabilité ou le bien-fondé dans les conditions fixées par les deux derniers de ces textes, le recours de l'employeur ne revêt pas le caractère d'une action au sens du premier ;
Attendu que, selon l'arrêt attaqué, que la caisse primaire d'assurance maladie de la Mayenne (la caisse) ayant pris en charge au titre de la législation professionnelle, la maladie d'un des salariés de la société TDV industrie (l'employeur), celle-ci, après avoir infructueusement saisi le 24 février 2014 la commission de recours amiable de la caisse en demandant que cette décision lui soit inopposable, a porté son recours devant une juridiction de sécurité sociale ;
Attendu que pour déclarer l'action prescrite, l'arrêt énonce qu'en l'absence de délai de prescription spécifique à l'action tendant à voir reconnaître le caractère inopposable à l'employeur de la décision de prise en charge de la maladie professionnelle du salarié, la caisse est fondée à se prévaloir de la prescription quinquennale de droit commun de l'article 2224 du code civil ;
Qu'en statuant ainsi, la cour d'appel a violé les textes susvisés ;
PAR CES MOTIFS :
CASSE ET ANNULE, en toutes ses dispositions, l'arrêt rendu le 18 janvier 2018, entre les parties, par la cour d'appel d'Angers ; remet, en conséquence, la cause et les parties dans l'état où elles se trouvaient avant ledit arrêt et, pour être fait droit, les renvoie devant la cour d'appel de Rennes ;
Condamne la caisse primaire d'assurance maladie de la Mayenne aux dépens ;
Vu l'article 700 du code de procédure civile, rejette les demandes ;
Dit que sur les diligences du procureur général près la Cour de cassation, le présent arrêt sera transmis pour être transcrit en marge ou à la suite de l'arrêt cassé ;
Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, deuxième chambre civile, et prononcé par le président en son audience publique du vingt-neuf mai deux mille dix-neuf.
MOYEN ANNEXE au présent arrêt :
.Moyen produit par la SCP Gatineau et Fattaccini, avocat aux Conseils, pour la société TDV industrie.
Il est fait grief à la décision attaquée d'AVOIR déclaré irrecevable l'ensemble des demandes de la société TDV Industries et d'AVOIR, en conséquence, déclaré opposable à la société TDV Industries la prise en charge par la CPAM de la Mayenne de la maladie professionnelle dont a été reconnu atteint M. S... F... ;
AUX MOTIFS QUE sur la recevabilité de la demande s'agissant de la saisine de la commission de recours amiable, c'est par des motifs pertinents que la cour adopte que les premiers juges ont considéré que dès lors que l'article R. 441-14 du code de la sécurité sociale dans sa version applicable au moment de la décision de prise en charge ne prévoyait pas de notification à l'employeur de la prise en charge de l'accident ou de la maladie au titre de la législation professionnelle, le délai de forclusion de deux mois pour saisir cette commission ne courait pas et que c'est bien la prescription extinctive de droit commun de l'article 2224 du Code civil qui doit trouver application en l'espèce ; que l'article 2224 du code civil prévoit que les actions personnelles ou mobilières se prescrivent par cinq ans à compter du jour où le titulaire d'un droit a connu ou aurait dû connaître les faits lui permettant de l'exercer ; que les nouvelles dispositions réduisant la durée de la prescription s'appliquent aux prescriptions en cours à compter du jour de l'entrée en vigueur de la loi, sans que la durée totale puisse excéder la durée prévue par la loi antérieure (article 26 de la loi du 17 juin 2008) ; qu'en l'absence de texte spécifique applicable, la prescription trentenaire, aujourd'hui réduite à cinq ans, a vocation à régir toutes les actions personnelles ou mobilières et, en particulier, celle visant à voir reconnaître le caractère inopposable à l'employeur de la prise en charge de la maladie professionnelle du salarié ; que cette prescription de cinq ans court à compter de la date à laquelle l'employeur a connu ou aurait dû connaître la prise en charge au titre de la législation professionnelle de la maladie ou de l'accident de travail ; qu'en l'espèce, la SARL TDV Industries a eu connaissance de la déclaration de maladie professionnelle de M. S... F... par le courrier date du 22 septembre 2003 qu'elle ne conteste pas avoir reçu dans lequel la caisse fait état de la réception de cette déclaration et de ce qu'elle met en oeuvre un délai complémentaire d'instruction du dossier qui ne saurait excéder trois mois ; que de ce fait, la SARL TDV Industries avait nécessairement connaissance de ce que la caisse avait statué sur cette demande de son salarié au 23 décembre 2003 ; que si l'on admet que la SARL TDV Industries n'a pas reçu l'avis de fin d'information et la décision de prise en charge comme elle le soutient, la caisse produit à tout le moins le compte employeur annuel en date du 26 septembre 2006 émis pour l'exercice 2005 d'où il ressort des cotisations dues par l'employeur du fait de la maladie professionnelle de M. S... F... dont le nom est indiqué très clairement de même que le fait qu'il bénéficie d'une rente ; que la SARL TDV Industries ne peut valablement alléguer que la connaissance de son compte employeur n'équivalait pas à une connaissance de son droit à agir alors même qu'elle fonde sa saisine de la commission de recours amiable sur le fait qu'elle a eu connaissance de cette prise en charge justement du fait de la lecture de son compte employeur et que sa connaissance qu'une décision avait dû être prise par la caisse au titre de la déclaration de maladie professionnelle devait l'amener à regarder d'un oeil attentif ce compte employeur ; qu'ainsi, la SARL TDV Industries a eu connaissance de cette prise en charge au titre de la législation professionnelle en septembre 2006 de sorte qu'elle devait agir avant le 19 juin 2013 et que sa saisine de la commission de recours amiable par courrier daté du 24 février 2014 est intervenue tardivement ; qu'en conséquence, il y a lieu d'infirmer la décision des premiers juges et de débouter la SARL TDV Industries de l'ensemble de ses demandes ;
1) ALORS QUE la prescription quinquennale de droit commun telle que prévue à l'article 2224 du code civil ne s'applique que lorsque des dispositions spéciales ne sont pas prévues ; que l'article R. 142-1 du code de la sécurité sociale prévoit que la commission de recours amiable est saisie dans un délai de deux mois à compter de la notification de la décision contre laquelle les intéressés entendent former une réclamation ; qu'un délai de deux mois pour saisir la commission de recours amiable est ainsi ouvert à l'employeur à qui la caisse choisit de notifier la décision de prise en charge de l'accident du travail ou de la maladie professionnelle ; que le fait de ne pas user de cette faculté n'a pas pour effet d'exclure l'application des dispositions prévues par l'article R. 142-1 du code de la sécurité sociale et ne rend pas applicables pour autant les règles de prescription de droit commun ; qu'en décidant cependant qu'en l'absence de texte spécifique applicable, la prescription de droit commun avait vocation à régir les actions des employeurs relatives à la prise en charge des accidents du travail et des maladies professionnelles, la cour d'appel a violé l'article R 142-1 du code de la sécurité sociale et l'article 2224 du code civil ;
2) ALORS QU'en toute hypothèse, il résulte de l'article 2224 du code civil que le délai de prescription court à compter du jour où le titulaire d'un droit a connu ou aurait dû connaître les faits lui permettant de l'exercer ; que la date à laquelle l'employeur a eu connaissance de la prise en charge de l'accident à titre professionnel ne saurait être celle portée sur un relevé du compte employeur, à défaut pour la caisse de justifier d'une date certaine de réception dudit compte ; qu'en décidant que la connaissance par l'employeur de la prise en charge au titre de la législation professionnelle de la maladie de M. F... résultait de la lecture de son compte employeur daté du 26 septembre 2006, sans rechercher, ainsi qu'elle y avait pourtant été invitée, la date à laquelle l'employeur avait effectivement réceptionné et consulté son compte employeur, la cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard de l'article 2224 du code civil.