La jurisprudence francophone des Cours suprêmes


recherche avancée

23/05/2019 | FRANCE | N°18-15568

France | France, Cour de cassation, Chambre civile 2, 23 mai 2019, 18-15568


LA COUR DE CASSATION, DEUXIÈME CHAMBRE CIVILE, a rendu l'arrêt suivant :

Donne acte à la société HDI Gerling Verzekeringen NV du désistement de son pourvoi en ce qu'il est dirigé contre la société QBE Insurance Europe Limited ;

Sur le moyen unique, pris en sa première branche :

Attendu, selon l'arrêt attaqué (Rennes, 23 février 2018), que, selon un contrat du 3 juillet 2010, M. E... a, sur les conseils de la société Névot Finances, société de conseil en gestion du patrimoine, placé une somme de 100 000 euros sur un produit d'investissement dans l'art co

ntemporain proposé par la société Marble Art Invest (la société MAI), puis à l'échéa...

LA COUR DE CASSATION, DEUXIÈME CHAMBRE CIVILE, a rendu l'arrêt suivant :

Donne acte à la société HDI Gerling Verzekeringen NV du désistement de son pourvoi en ce qu'il est dirigé contre la société QBE Insurance Europe Limited ;

Sur le moyen unique, pris en sa première branche :

Attendu, selon l'arrêt attaqué (Rennes, 23 février 2018), que, selon un contrat du 3 juillet 2010, M. E... a, sur les conseils de la société Névot Finances, société de conseil en gestion du patrimoine, placé une somme de 100 000 euros sur un produit d'investissement dans l'art contemporain proposé par la société Marble Art Invest (la société MAI), puis à l'échéance de ce placement, le 12 octobre 2010, M. E... a placé une nouvelle somme de 100 000 euros auprès de la société MAI, somme remise à des huissiers de justice comme séquestres ; que, par lettre du 31 janvier 2011, ces huissiers de justice ont adressé à M. E... un chèque de 31 000 euros correspondant au montant restant disponible sur la somme de 100 000 euros, en l'informant qu'ils s'étaient libérés de leur mission de séquestre, la société MAI n'ayant pas répondu à leurs questions relatives, notamment, à la réalité des ventes de toiles ; que cette dernière a été placée en liquidation judiciaire par jugement du 12 avril 2011 ; que reprochant à la société Névot Finances de lui avoir fait souscrire un placement dans un produit qui s'était révélé frauduleux sans l'avoir alerté sur les risques encourus mais en l'ayant au contraire convaincu d'une rentabilité assurée, M. E... l'a assignée, ainsi que les sociétés QBE Insurance Europe limited et HDI Gerling Industrie Versicherung AG, assureurs, aux fins d'obtenir l'indemnisation de ses préjudices ; que la société Névot Finances ayant été placée en liquidation judiciaire par jugement du 14 juin 2013, M. E... a déclaré sa créance entre les mains du liquidateur, M. Y..., puis l'a assigné, ès qualités ; que la société HDI Gerling Verzekeringen NV (l'assureur), venant aux droits de la société Nassau assurances, est intervenue volontairement à l'instance, en qualité d'assureur de la société Névot Finances ; que l'assureur a opposé une clause d'exclusion de garantie aux termes de laquelle sont exclues « toutes activités de préconisation ou de commercialisation de produits mobiliers ou immobiliers sous le régime du bénéfice des lois de défiscalisation » ;

Attendu que l'assureur fait grief à l'arrêt de le condamner à payer à M. E... la somme de 69 000 euros avec intérêts au taux légal à compter du 26 mars 2013, alors, selon le moyen, que le juge, à qui il incombe de trancher le litige conformément aux règles de droit qui lui sont applicables, doit donner ou restituer leur exacte qualification aux faits et actes litigieux ; qu'en ayant écarté la clause d'exclusion 1.5 de l'extension A33 de la police souscrite auprès de HDI Gerling au motif qu'on ne savait quelle loi de défiscalisation était applicable aux oeuvres d'art et aux placements Marble Art Invest conseillés par la société Névot Finances à M. E..., la cour d'appel a méconnu son office et violé l'article 12 du code de procédure civile ;

Mais attendu, qu'ayant exactement rappelé qu'il incombe à l'assureur invoquant une exclusion de garantie, laquelle doit être formelle et limitée, de démontrer que les conditions de celle-ci sont réunies et relevé que l'assureur ne précisait pas de quelle loi de défiscalisation serait spécifiquement bénéficiaire le placement de la société MAI conseillé par la société Névot Finances à M. E..., la cour d'appel, qui n'a pas méconnu son office, en a déduit à bon droit que l'assureur ne rapportait pas la preuve qui lui incombait et qu'il convenait d'écarter l'application de la clause d'exclusion de garantie ;

Et attendu qu'il n'y a pas lieu de statuer par une décision spécialement motivée sur les quatre dernières branches du moyen, annexé, qui ne sont manifestement pas de nature à entraîner la cassation ;

PAR CES MOTIFS :

REJETTE le pourvoi ;

Condamne la société HDI Gerling Verzekeringen NV aux dépens ;

Vu l'article 700 du code de procédure civile, rejette sa demande ; la condamne à payer à M. E... la somme de 3 000 euros ;

Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, deuxième chambre civile, et prononcé par le président en son audience publique du vingt-trois mai deux mille dix-neuf.

MOYEN ANNEXE au présent arrêt :

.

Moyen produit par la SCP Le Bret-Desaché, avocat aux Conseils, pour la société HDI Gerling Verzekeringen NV.

- IL EST FAIT GRIEF A l'arrêt attaqué d'avoir condamné la société HDI Gerling Industrie Verzekeringen NV à payer à M. F... E... la somme de 69 000 € avec intérêts au taux légal à compter du 26 mars 2013 ;

AUX MOTIFS QUE la police [...] souscrite par la société Nevot Finances auprès de la société Nassau assurances aux droits de laquelle vient la société HDI Gerling Verzekeringen NV assure notamment son activité de conseiller en investissement financier dans le cadre de laquelle elle a engagé sa responsabilité à l'égard de M. E.... Pour refuser sa garantie, la société HDI Gerling Verzekeringen NV soutient également que les garanties de cette police ne peuvent être mobilisées en raison de l'exclusion de garantie résultant de l'extension A33 applicable aux conseillers en investissements financiers et de l'exclusion 1.5 de " toutes activités de préconisation ou de commercialisation de produits mobiliers ou immobiliers sous le régime du bénéfice des lois de défiscalisation". Mais il incombe à l'assureur invoquant une exclusion de garantie, laquelle doit être formelle et limitée, de démontrer que les conditions de celle-ci sont réunies. À cet égard, la société la société HDI Gerling Verzekeringen NV qui pose elle-même la question de savoir si le produit de Marble Art Invest est soumis à une loi de défiscalisation, répond par l'affirmative en se prévalant des quelques mentions relatives à la fiscalité du placement, mais ne précise pas de quelle loi de défiscalisation serait spécifiquement bénéficiaire le placement Marble Art Invest conseillé par la société Névot Finances à M. E.... Au contraire, le descriptif du placement ne fait aucune référence à une loi de défiscalisation et les clauses d'exclusion devant être appliquées restrictivement et limitativement, le rappel général et imprécis de la fiscalité applicable aux cessions d'oeuvre d'art et la mention "fiscalité : non imposable" ne doit certainement pas être considérés comme se rattachant à une loi spécifique de défiscalisation, de telle sorte que l'assureur est mal fondé en son allégation d'exclusion de garantie. En conséquence, la garantie de la société HDI Gerling Verzekeringen NV, assureur de la société Névot Finances doit être mobilisée et elle sera condamnée à indemniser M. E.... De son côté, la société QBE a assuré la société Névot Finances à compter du 7 juillet 2008 jusqu'à la résiliation de la police avec effet au 31 décembre 2010. Le contrat de la société Nassau assurances devenue HDI Gerling Verzekeringen NV a pris effet le 1er janvier 2011. M. E... a été alerté du dommage par lui subi le 31 janvier 2011 et sa réclamation résulte de l'assignation du 18 mars 2013, soit postérieurement à la date de résiliation de la police souscrite auprès de QBE. Il n'est contesté par aucune des autres parties que la police QBE était en base de réclamation et que, par application des dispositions de l'article 124-5 du code des assurances, en cas de succession de deux garanties, ici QBE jusqu'au 31 décembre 2010 puis HDI Gerling Verzekeringen NV à compter du 1er janvier 2011, la seconde doit s'appliquer au titre de la reprise du passé. En conséquence, la réclamation de M. E... ne relève pas de la garantie de la société QBE et il sera débouté de ses demandes formées à son égard. Correctement informé du caractère dangereux et peu fiable du produit Marble Art Invest, M. E... n'aurait pas investi dans ce produit. Son préjudice est donc certain et, ne consistant pas seulement dans la perte de chance de ne pas contracter, il doit être intégralement réparé. La société [...] demande à la cour de surseoir à statuer, comme l'a fait le tribunal, aux motifs que dans l'ignorance des sommes que M. E... recevra de la liquidation judiciaire de la société Marble Art lnvest le préjudice n'est ni certain, ni évaluable. Mais, cette demande procède d'une confusion entre la certitude du préjudice et son montant, et la possibilité pour M. E... d'en recouvrer l'indemnisation auprès de la liquidation judiciaire des responsables de son préjudice. Il y a lieu de statuer sur le montant du préjudice sans attendre de très hypothétiques distributions de fonds entre de multiples créanciers chirographaires victimes du placement Marble Art lnvest. M. E..., auquel il n'a été restitué que 31 000 euros sur son investissement de 100 000 € a ainsi perdu 69 000 €, montant représentant son préjudice ;

1°) ALORS QUE le juge, à qui il incombe de trancher le litige conformément aux règles de droit qui lui sont applicables, doit donner ou restituer leur exacte qualification aux faits et actes litigieux ; qu'en ayant écarté la clause d'exclusion 1.5 de l'extension A33 de la police souscrite auprès de HDI Gerling au motif qu'on ne savait quelle loi de défiscalisation était applicable aux oeuvres d'art et aux placements Marble Art Invest conseillés par la société Névot Finances à M. E..., la cour d'appel a méconnu son office et violé l'article 12 du code de procédure civile ;

2°) ALORS QUE l'assureur doit seulement établir la réunion des conditions de jeu d'une exclusion de garantie ; qu'en ayant refusé de faire jouer la clause d'exclusion 1.5 de l'extension A33 de la police souscrite auprès de la société HDI Gerling, sous prétexte que l'exposante ne précisait pas quelle loi de défiscalisation était susceptible de s'appliquer aux placements Marble Art Invest, quand l'exclusion litigieuse visait seulement la préconisation ou la commercialisation, par l'assurée, la société Névot Finances, d'un produit mobilier sous le bénéfice des lois de défiscalisation, ce qui avait été le cas pour le produit MAI, présenté par l'intermédiaire comme défiscalisant, la cour d'appel a violé l'article L. 113-1 du code des assurances ;

3°) ALORS QUE l'exclusion de garantie formelle et limitée doit être appliquée par les juges du fond ; qu'en ayant écarté la clause d'exclusion 1.5 de l'extension A33 de la police souscrite auprès de la société HDI Gerling, sous prétexte que le descriptif du produit MAI, s'il annonçait celui-ci comme défiscalisant, ne précisait pas de quelle loi de défiscalisation il s'agissait, la cour d'appel a violé les articles L. 113-1 du code des assurances et 1134 ancien du code civil ;

4°) ALORS QU'est formelle et limitée la clause d'exclusion de garantie qui vise le conseil en investissement financier exercé sous le bénéfice de lois de défiscalisation ; qu'en jugeant que la clause d'exclusion 1.5 litigieuse ne pouvait être limitée que si le placement visé indiquait sous quelle loi de défiscalisation il était placé, la cour d'appel a violé l'article L. 113-1 du code des assurances ;

5°) ALORS QUE n'est pas certain, né et actuel le préjudice qui dépend de l'issue d'une liquidation judiciaire ; qu'en ayant jugé que le préjudice de M. E... était certain et actuel à hauteur de 69 000 €, quand il dépendait de l'issue de la liquidation judiciaire de la société Névot Finances, la cour d'appel a violé l'article 1147 ancien du code civil.


Synthèse
Formation : Chambre civile 2
Numéro d'arrêt : 18-15568
Date de la décision : 23/05/2019
Sens de l'arrêt : Rejet
Type d'affaire : Civile

Références :

Décision attaquée : Cour d'appel de Rennes, 23 février 2018


Publications
Proposition de citation : Cass. Civ. 2e, 23 mai. 2019, pourvoi n°18-15568


Composition du Tribunal
Président : Mme Flise (président)
Avocat(s) : SCP Baraduc, Duhamel et Rameix, SCP Garreau, Bauer-Violas et Feschotte-Desbois, SCP Le Bret-Desaché

Origine de la décision
Date de l'import : 29/12/2022
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CCASS:2019:18.15568
Association des cours judiciaires suprmes francophones
Organisation internationale de la francophonie
Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie. Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie.
Logo iall 2012 website award