La jurisprudence francophone des Cours suprêmes


recherche avancée

23/05/2019 | FRANCE | N°17-31721

France | France, Cour de cassation, Chambre civile 3, 23 mai 2019, 17-31721


LA COUR DE CASSATION, TROISIÈME CHAMBRE CIVILE, a rendu l'arrêt suivant :

Sur les moyens uniques du pourvoi principal et du pourvoi incident, réunis, ci-après annexés :

Attendu, selon l'arrêt attaqué (Limoges, 26 juin 2017), rendu sur renvoi après cassation (3e Civ., 23 juin 2016, pourvoi n° 15-10.315), que, par acte du 1er janvier 2006, M. et Mme I... ont donné à bail à M. et Mme X... des parcelles agricoles et des bâtiments destinés à l'élevage ; que, par déclaration du 1er février 2012, les bailleurs ont saisi le tribunal paritaire en résiliation du bail, e

xpulsion et paiement de sommes ;

Attendu que M. X... et Mme M...-X... font gr...

LA COUR DE CASSATION, TROISIÈME CHAMBRE CIVILE, a rendu l'arrêt suivant :

Sur les moyens uniques du pourvoi principal et du pourvoi incident, réunis, ci-après annexés :

Attendu, selon l'arrêt attaqué (Limoges, 26 juin 2017), rendu sur renvoi après cassation (3e Civ., 23 juin 2016, pourvoi n° 15-10.315), que, par acte du 1er janvier 2006, M. et Mme I... ont donné à bail à M. et Mme X... des parcelles agricoles et des bâtiments destinés à l'élevage ; que, par déclaration du 1er février 2012, les bailleurs ont saisi le tribunal paritaire en résiliation du bail, expulsion et paiement de sommes ;

Attendu que M. X... et Mme M...-X... font grief à l'arrêt de prononcer la résiliation du bail ;

Mais attendu qu'ayant relevé que l'exploitation porcine avait été définitivement abandonnée en janvier 2011, date à laquelle Mme M...-X... avait délaissé son activité agricole pour une formation d'aide soignante, que l'initiative des preneurs avait privé de leur fonction les bâtiments qui avaient été spécialement aménagés à cette fin, toute reprise d'une installation soumise à déclaration pour la protection de l'environnement étant désormais prohibée à proximité d'une habitation, et que les bailleurs produisaient un constat d'huissier de justice faisant état du mauvais entretien de certaines parcelles, de l'absence de drainage des parties basses et humides et de haies et clôtures en mauvais état, la cour d'appel, qui n'était pas tenue de s'expliquer sur chacun des éléments de preuve qu'elle décidait d'écarter, en a exactement déduit, sans inverser la charge de la preuve, que ces agissements des preneurs, non justifiés par des raisons sérieuses et légitimes, compromettaient la bonne exploitation du fonds et a, par ces seuls motifs, légalement justifié sa décision ;

PAR CES MOTIFS :

REJETTE les pourvois ;

Condamne M. X... et Mme M...-X... aux dépens ;

Vu l'article 700 du code de procédure civile, rejette les demandes ;

Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, troisième chambre civile, et prononcé par le président en son audience publique du vingt-trois mai deux mille dix-neuf.

Le conseiller rapporteur le president

Le greffier de chambre

MOYENS ANNEXES au présent arrêt :

Moyen produit au pourvoi principal par la SCP Lyon-Caen et Thiriez, avocat aux Conseils, pour M. X....

Il est fait grief à l'arrêt attaqué d'avoir confirmé le jugement du Tribunal paritaire des baux ruraux de TULLE du 22 février 2013 en ce qu'il a prononcé la résiliation du bail ;

Aux motifs propres que « sur la demande en résiliation du bail au titre de l'exploitation des biens par un tiers et de la cessation d'activité ; que Madame M... et Monsieur X... opposent aux époux I... une fin de non-recevoir tirée de l'irrecevabilité de ces demandes nouvelles en cause d'appel ; mais qu'attendu qu'en application de l'article 565 du Code de procédure civile, n'est pas nouvelle la demande en prononcé de la résiliation du bail pour manquement des preneurs à une obligation autre que celle en paiement du fermage, qui tend aux mêmes fins que celles portées devant les premiers juges et qui n'en diffère que par son fondement juridique ; que cette demande, recevable en cause d'appel, n'a pas à être soumise au préliminaire de conciliation prévu par l'article 887 du Code de procédure civile devant le tribunal paritaire des baux ruraux ; que le bail a notamment porté, outre sur des parcelles d'une contenance de 62ha 81 a 38 ca, sur des bâtiments d'exploitation consistant en une stabulation libre, une porcherie avec maternité, salle de post-sevrage et engraissement et un hangar de stockage ; que, selon une attestation de la chambre d'agriculture, l'exploitation porcine qui était conduite par Madame M..., alors gérante de l'Earl d'Alias, a été progressivement réduite au cours de l'année 2010 pour être définitivement arrêtée en janvier 2011, date à partir de laquelle Madame M... a cessé son activité d'exploitante agricole pour débuter une formation d'aide-soignante ; que cette cessation de l'activité porcine a été antérieure à la saisine du tribunal paritaire des baux ruraux par les époux I... le 1er février 2012 ; que les époux I... avaient eux-mêmes exploité le fonds agricole avant de le donner à bail aux époux M...-X... et qu'ils y avaient fait réaliser en 2000-2001 des travaux d'aménagement de la porcherie, puis de rénovation en 2004 ; que l'élevage porcin allait ainsi devenir leur principale source de revenus ainsi que le démontrent les comptes de résultats 2003-2004 et 2004-2005 ; que pour les époux M...-X... également, l'activité porcine, loin d'être accessoire, représentait la principale ressource de l'exploitation avec, ainsi qu'ils l'indiquent, 1350 porcs, porcelets ou truies vendus en 2008 et, en suite de l'arrêt de cette activité, des produits d'exploitation qui, de 395.405 euros en 2007-2008, sont passés à 72.188 euros seulement en 2010-2011, et un résultat courant qui, de positif de 18.755 euros en 2008-2009, a enregistré un déficit de 118.172 euros en 2010-2011 ; que les ex époux M...-X... soutiennent qu'à la suite d'un sinistre de 2009, des dommages importants ont été causés au bâtiment servant à l'exploitation de l'élevage porcin, que leurs interventions auprès des époux I... en vue de la remise en état du bâtiment sont restées lettres mortes et que c'est confrontés à cette situation qui a été aggravée par des difficultés économiques et également familiales, qu'ils ont abandonné l'activité porcine ; que, toutefois, s'il est acquis que des dommages ont été causés à la porcherie en 2009 à la suite de la tempête Klaus, les époux I... produisent le rapport d'expertise de leur assureur G... du 4 mars 2009 ayant chiffré le montant des reprises consistant au remplacement de 10 tôles et de 10 ml de faîtières en éverite à la modeste somme de 1.023,78 euros et le témoignage de monsieur S... disant avoir aidé à la remise des tôles dans la semaine du 11 au 15 mai 2009 ; que, de leur côté, les preneurs ne justifient d'aucune réclamation alors faite auprès des bailleurs pour obtenir l'exécution de ces travaux de reprise, notamment par un prétendu courrier recommandé de septembre 2010, dont il n'est justifié ni de l'envoi, ni de la réception, et que le seul document attestant d'un mauvais état de la porcherie incompatible avec une exploitation d'élevage est en date du 28 mars 2013, soit postérieur de plus de deux années à l'arrêt de l'activité porcine; qu'il serait par ailleurs surprenant que les preneurs, qui ont été confrontés à de sérieuses difficultés économiques en 2010 - avec le retrait par leur banque d'une autorisation de découvert en juillet 2010 et une interdiction bancaire en octobre 2010 - soient restés totalement inactifs à l'égard des bailleurs si, comme ils le soutiennent, ces difficultés en ce qu'elles étaient liées à l'arrêt progressif de l'activité porcine leur étaient imputables à faute pour n'avoir pas assuré le clos et le couvert de la porcherie, et que leur argument selon lequel ils se seraient trouvés dans l'impossibilité morale de le faire à raison des relations amicales qu'ils auraient entretenues par le passé avec les époux I..., ne peut être retenu ; qu'aucun lien de causalité entre les dommages causés en 2009 à la porcherie et la décision des preneurs de cesser l'activité porcine ne peut donc être retenu ; que Madame M... a totalement délaissé son activité rurale en janvier 2011 et que si Monsieur X... justifie avoir réglé des loyers aux époux I... jusqu'en avril 2014, aucun document ne vient attester de la poursuite d'une activité d'exploitation agricole par ce dernier ou par l'Earl d'Alias au profit de laquelle les preneurs avaient mis à disposition les biens affermés ; qu'il est seulement dit dans un document daté de juin 2013 qu'à raison des difficultés financières de l'Earl d'Alias, la comptabilité 2011-2012 n'a pu être établie ; que les bailleurs produisent à cet égard un constat dressé par huissier de justice le 17 octobre 2012 et faisant état du mauvais entretien de certaines parcelles, de l'absence de drainage des parties basses et humides et de haies et clôtures en mauvais état ; qu'il sera en conséquence retenu que l'interruption de l'activité d'élevage porcin, qui, à défaut d'une justification dans un manquement des bailleurs à leurs obligations, a relevé d'une initiative des preneurs, a mis en péril l'exploitation du fonds et qu'au surplus, elle a été de nature à terme à priver de leur fonction les bâtiments qui avaient été spécialement aménagés à cette fin puisque, s'agissant d'une exploitation classée soumise à déclaration pour la protection de l'environnement et située à moins de 100 mètres d'une habitation, toute reprise se trouve désormais prohibée par un arrêté du 27 décembre 2013 ; qu'il convient en conséquence de faire droit à la demande des époux I... en prononcé de la résiliation du bail sur le fondement des articles L. 411-27 et L. 411-31 du Code rural et de la pêche maritime et de, débouter Madame M... et Monsieur X..., qui ont libéré les lieux en exécution de l'arrêt du 27 mars 2014, de leur demande en restitution de biens, objet du bail ;

1) Alors que la résiliation d'un bail rural ne peut être prononcée que si les agissements reprochés au preneur sont de nature à compromettre la bonne exploitation du fonds ; que pour prononcer la résiliation d'un bail rural, les juges du fond, qui relèvent le défaut d'exploitation des parcelles ou l'interruption d'une activité, doivent constater que ce fait était de nature à compromettre la bonne exploitation du fonds ; que, pour prononcer la résiliation du bail rural, la Cour d'appel s'est bornée à affirmer que l'interruption de l'élevage porcin avait « mis en péril » l'exploitation du fond sans constater en quoi ces faits étaient de nature à compromettre la bonne exploitation du fonds ; qu'en statuant de la sorte, la Cour d'appel a privé sa décision de toute base légale au regard des articles L 411-27 et L 411-31 du Code rural et de la pêche maritime, ensemble l'article 1766 du Code civil ;

2) Alors que la résiliation d'un bail rural ne peut être prononcée que si les agissements reprochés au preneur sont de nature à compromettre la bonne exploitation du fonds ; que la preuve de ces agissements, qui peut être apportée par tous moyens, ne peut résulter de la seule constatation de l'interruption d'une activité ; qu'en se bornant à énoncer, pour statuer comme elle l'a fait, que l'activité porcine avait été interrompue, sans rechercher, ainsi qu'elle y était invitée, si l'exploitation des autres parcelles et le maintien de l'activité agricole sur ces parcelles ne caractérisaient pas une bonne exploitation du fonds s'opposant pas à la résiliation du bail, la Cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard de l'article L 411-31 du Code rural et de la pêche maritime ;

3) Alors que la résiliation d'un bail rural ne peut être prononcée que si les agissements reprochés au preneur sont de nature à compromettre la bonne exploitation du fonds ; que la charge de la preuve de ces agissements pèse sur le bailleur ; qu'en retenant, pour statuer comme elle l'a fait, qu'« aucun document ne vient attester de la poursuite d'une activité d'exploitation agricole par Monsieur X... » (arrêt p. 7 § 5), la Cour d'appel a fait peser sur de dernier la charge de la preuve de la bonne exploitation du fonds et, ce faisant, inversé la charge de la preuve en violation des articles L 411-31 du Code rural et de la pêche maritime et 1315 du Code civil ;

4) Alors, en tout état de cause, que la résiliation d'un bail rural ne peut être prononcée si les agissements reprochés au preneur ont pour cause une raison sérieuse et légitime constituée par le défaut d'exécution par le bailleur des grosses réparations lui incombant ; que, pour prononcer la résiliation du bail rural, la Cour d'appel s'est bornée à énoncer que les preneurs ne justifiaient d' « aucune réclamation » (arrêt p. 7 § 2) effectuée auprès du bailleur pour effectuer les travaux de reprise, sans rechercher si Monsieur X... n'avait pas été dans l'impossibilité d'utiliser la porcherie fortement endommagée, raison sérieuse et légitime de nature à interrompre l'activité porcine et exclure le prononcé de la résiliation ; qu'en statuant de la sorte, la Cour d'appel a privé sa décision de toute base légale au regard de l'article L 411-31 du Code rural et de la pêche maritime ;

5) Alors, en tout état de cause, que les juges du fond ne peuvent accueillir ou rejeter les demandes dont ils sont saisis sans examiner tous les éléments de preuve qui leur sont fournis par les parties au soutien de leurs prétentions ; qu'en considérant que n'existait aucun lien de causalité entre les dommages causés en 2009 à la porcherie et la décision des preneurs de cesser l'activité porcine, sans pour autant avoir examiné les attestations de Monsieur T... et de Monsieur L..., régulièrement produites aux débats, et qui justifiaient des carences du bailleur, la Cour d'appel, qui a éludé un élément déterminant du débat, a violé les dispositions de l'article 455 du Code de procédure civile. Moyen produit au pourvoi incident par la SCP Lyon-Caen et Thiriez, avocat aux Conseils, pour Mme M....

Il est fait grief à l'arrêt attaqué d'avoir confirmé le jugement du Tribunal paritaire des baux ruraux de TULLE du 22 février 2013 en ce qu'il a prononcé la résiliation du bail ;

Aux motifs propres que « sur la demande en résiliation du bail au titre de l'exploitation des biens par un tiers et de la cessation d'activité ; que Madame M... et Monsieur X... opposent aux époux I... une fin de non-recevoir tirée de l'irrecevabilité de ces demandes nouvelles en cause d'appel ; mais qu'attendu qu'en application de l'article 565 du Code de procédure civile, n'est pas nouvelle la demande en prononcé de la résiliation du bail pour manquement des preneurs à une obligation autre que celle en paiement du fermage, qui tend aux mêmes fins que celles portées devant les premiers juges et qui n'en diffère que par son fondement juridique ; que cette demande, recevable en cause d'appel, n'a pas à être soumise au préliminaire de conciliation prévu par l'article 887 du Code de procédure civile devant le tribunal paritaire des baux ruraux ; que le bail a notamment porté, outre sur des parcelles d'une contenance de 62ha 81 a 38 ca, sur des bâtiments d'exploitation consistant en une stabulation libre, une porcherie avec maternité, salle de post-sevrage et engraissement et un hangar de stockage ; que, selon une attestation de la chambre d'agriculture, l'exploitation porcine qui était conduite par Madame M..., alors gérante de l'Earl d'Alias, a été progressivement réduite au cours de l'année 2010 pour être définitivement arrêtée en janvier 2011, date à partir de laquelle Madame M... a cessé son activité d'exploitante agricole pour débuter une formation d'aide-soignante ; que cette cessation de l'activité porcine a été antérieure à la saisine du tribunal paritaire des baux ruraux par les époux I... le 1er février 2012 ; que les époux I... avaient eux-mêmes exploité le fonds agricole avant de le donner à bail aux époux M...-X... et qu'ils y avaient fait réaliser en 2000-2001 des travaux d'aménagement de la porcherie, puis de rénovation en 2004 ; que l'élevage porcin allait ainsi devenir leur principale source de revenus ainsi que le démontrent les comptes de résultats 2003-2004 et 2004-2005 ; que pour les époux M...-X... également, l'activité porcine, loin d'être accessoire, représentait la principale ressource de l'exploitation avec, ainsi qu'ils l'indiquent, 1350 porcs, porcelets ou truies vendus en 2008 et, en suite de l'arrêt de cette activité, des produits d'exploitation qui, de 395.405 euros en 2007-2008, sont passés à 72.188 euros seulement en 2010-2011, et un résultat courant qui, de positif de 18.755 euros en 2008-2009, a enregistré un déficit de 118.172 euros en 2010-2011 ; que les ex époux M...-X... soutiennent qu'à la suite d'un sinistre de 2009, des dommages importants ont été causés au bâtiment servant à l'exploitation de l'élevage porcin, que leurs interventions auprès des époux I... en vue de la remise en état du bâtiment sont restées lettres mortes et que c'est confrontés à cette situation qui a été aggravée par des difficultés économiques et également familiales, qu'ils ont abandonné l'activité porcine ; que, toutefois, s'il est acquis que des dommages ont été causés à la porcherie en 2009 à la suite de la tempête Klaus, les époux I... produisent le rapport d'expertise de leur assureur G... du 4 mars 2009 ayant chiffré le montant des reprises consistant au remplacement de 10 tôles et de 10 ml de faîtières en éverite à la modeste somme de 1.023,78 euros et le témoignage de monsieur S... disant avoir aidé à la remise des tôles dans la semaine du 11 au 15 mai 2009 ; que, de leur côté, les preneurs ne justifient d'aucune réclamation alors faite auprès des bailleurs pour obtenir l'exécution de ces travaux de reprise, notamment par un prétendu courrier recommandé de septembre 2010, dont il n'est justifié ni de l'envoi, ni de la réception, et que le seul document attestant d'un mauvais état de la porcherie incompatible avec une exploitation d'élevage est en date du 28 mars 2013, soit postérieur de plus de deux années à l'arrêt de l'activité porcine; qu'il serait par ailleurs surprenant que les preneurs, qui ont été confrontés à de sérieuses difficultés économiques en 2010 - avec le retrait par leur banque d'une autorisation de découvert en juillet 2010 et une interdiction bancaire en octobre 2010 - soient restés totalement inactifs à l'égard des bailleurs si, comme ils le soutiennent, ces difficultés en ce qu'elles étaient liées à l'arrêt progressif de l'activité porcine leur étaient imputables à faute pour n'avoir pas assuré le clos et le couvert de la porcherie, et que leur argument selon lequel ils se seraient trouvés dans l'impossibilité morale de le faire à raison des relations amicales qu'ils auraient entretenues par le passé avec les époux I..., ne peut être retenu ; qu'aucun lien de causalité entre les dommages causés en 2009 à la porcherie et la décision des preneurs de cesser l'activité porcine ne peut donc être retenu ; que Madame M... a totalement délaissé son activité rurale en janvier 2011 et que si Monsieur X... justifie avoir réglé des loyers aux époux I... jusqu'en avril 2014, aucun document ne vient attester de la poursuite d'une activité d'exploitation agricole par ce dernier ou par l'Earl d'Alias au profit de laquelle les preneurs avaient mis à disposition les biens affermés ; qu'il est seulement dit dans un document daté de juin 2013 qu'à raison des difficultés financières de l'Earl d'Alias, la comptabilité 2011-2012 n'a pu être établie ; que les bailleurs produisent à cet égard un constat dressé par huissier de justice le 17 octobre 2012 et faisant état du mauvais entretien de certaines parcelles, de l'absence de drainage des parties basses et humides et de haies et clôtures en mauvais état ; qu'il sera en conséquence retenu que l'interruption de l'activité d'élevage porcin, qui, à défaut d'une justification dans un manquement des bailleurs à leurs obligations, a relevé d'une initiative des preneurs, a mis en péril l'exploitation du fonds et qu'au surplus, elle a été de nature à terme à priver de leur fonction les bâtiments qui avaient été spécialement aménagés à cette fin puisque, s'agissant d'une exploitation classée soumise à déclaration pour la protection de l'environnement et située à moins de 100 mètres d'une habitation, toute reprise se trouve désormais prohibée par un arrêté du 27 décembre 2013 ; qu'il convient en conséquence de faire droit à la demande des époux I... en prononcé de la résiliation du bail sur le fondement des articles L. 411-27 et L. 411-31 du Code rural et de la pêche maritime et de, débouter Madame M... et Monsieur X..., qui ont libéré les lieux en exécution de l'arrêt du 27 mars 2014, de leur demande en restitution de biens, objet du bail ;

1) Alors que la résiliation d'un bail rural ne peut être prononcée que si les agissements reprochés au preneur sont de nature à compromettre la bonne exploitation du fonds ; que pour prononcer la résiliation d'un bail rural, les juges du fond, qui relèvent le défaut d'exploitation des parcelles ou l'interruption d'une activité, doivent constater que ce fait était de nature à compromettre la bonne exploitation du fonds ; que, pour prononcer la résiliation du bail rural, la Cour d'appel s'est bornée à affirmer que l'interruption de l'élevage porcin avait « mis en péril » l'exploitation du fond sans constater en quoi ces faits étaient de nature à compromettre la bonne exploitation du fonds ; qu'en statuant de la sorte, la Cour d'appel a privé sa décision de toute base légale au regard des articles L 411-27 et L 411-31 du Code rural et de la pêche maritime, ensemble l'article 1766 du Code civil ;

2) Alors que la résiliation d'un bail rural ne peut être prononcée que si les agissements reprochés au preneur sont de nature à compromettre la bonne exploitation du fonds ; que la preuve de ces agissements, qui peut être apportée par tous moyens, ne peut résulter de la seule constatation de l'interruption d'une activité ; qu'en se bornant à énoncer, pour statuer comme elle l'a fait, que l'activité porcine avait été interrompue, sans rechercher, ainsi qu'elle y était invitée, si l'exploitation des autres parcelles et le maintien de l'activité agricole sur ces parcelles ne caractérisaient pas une bonne exploitation du fonds s'opposant pas à la résiliation du bail, la Cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard de l'article L 411-31 du Code rural et de la pêche maritime ;

3) Alors que la résiliation d'un bail rural ne peut être prononcée que si les agissements reprochés au preneur sont de nature à compromettre la bonne exploitation du fonds ; que la charge de la preuve de ces agissements pèse sur le bailleur ; qu'en retenant, pour statuer comme elle l'a fait, qu'« aucun document ne vient attester de la poursuite d'une activité d'exploitation agricole par Monsieur X... » (arrêt p. 7 § 5), la Cour d'appel a fait peser sur les preneurs la charge de la preuve de la bonne exploitation du fonds et, ce faisant, inversé la charge de la preuve en violation des articles L 411-31 du Code rural et de la pêche maritime et 1315 du Code civil ;

4) Alors, en tout état de cause, que la résiliation d'un bail rural ne peut être prononcée si les agissements reprochés au preneur ont pour cause une raison sérieuse et légitime constituée par le défaut d'exécution par le bailleur des grosses réparations lui incombant ; que, pour prononcer la résiliation du bail rural, la Cour d'appel s'est bornée à énoncer que les preneurs ne justifiaient d' « aucune réclamation » (arrêt p. 7 § 2)
effectuée auprès du bailleur pour effectuer les travaux de reprise, sans rechercher si Madame M... n'avait pas été dans l'impossibilité d'utiliser la porcherie fortement endommagée, raison sérieuse et légitime de nature à interrompre l'activité porcine et exclure le prononcé de la résiliation ; qu'en statuant de la sorte, la Cour d'appel a privé sa décision de toute base légale au regard de l'article L 411-31 du Code rural et de la pêche maritime ;

5) Alors, en tout état de cause, que les juges du fond ne peuvent accueillir ou rejeter les demandes dont ils sont saisis sans examiner tous les éléments de preuve qui leur sont fournis par les parties au soutien de leurs prétentions ; qu'en considérant que n'existait aucun lien de causalité entre les dommages causés en 2009 à la porcherie et la décision des preneurs de cesser l'activité porcine, sans pour autant avoir examiné les attestations de Monsieur T... et de Monsieur L..., régulièrement produites aux débats, et qui justifiaient des carences du bailleur, la Cour d'appel, qui a éludé un élément déterminant du débat, a violé les dispositions de l'article 455 du Code de procédure civile.

Le greffier de chambre


Synthèse
Formation : Chambre civile 3
Numéro d'arrêt : 17-31721
Date de la décision : 23/05/2019
Sens de l'arrêt : Rejet
Type d'affaire : Civile

Références :

Décision attaquée : Cour d'appel de Limoges, 26 juin 2017


Publications
Proposition de citation : Cass. Civ. 3e, 23 mai. 2019, pourvoi n°17-31721


Composition du Tribunal
Président : M. Chauvin (président)
Avocat(s) : SCP Lyon-Caen et Thiriez, SCP Nicolaý, de Lanouvelle et Hannotin

Origine de la décision
Date de l'import : 29/12/2022
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CCASS:2019:17.31721
Association des cours judiciaires suprmes francophones
Organisation internationale de la francophonie
Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie. Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie.
Logo iall 2012 website award