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15/05/2019 | FRANCE | N°18-18111

France | France, Cour de cassation, Chambre civile 1, 15 mai 2019, 18-18111


LA COUR DE CASSATION, PREMIÈRE CHAMBRE CIVILE, a rendu l'arrêt suivant :

Sur le moyen unique :

Attendu, selon l'arrêt attaqué (Paris, 10 avril 2018), que M. L..., se disant né le [...] à Cotonou au Bénin, alors que ce territoire était français, de D... L..., né [...] à Allada (Bénin), et de I... N..., née [...] à Ouidah (Bénin), a, par requête du 20 juillet 2016, sollicité un jugement supplétif d'acte de naissance, faisant valoir qu'il disposait d'une identité certaine mais que son acte de naissance ne se trouvait ni dans les registres de l'état civil des Fra

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LA COUR DE CASSATION, PREMIÈRE CHAMBRE CIVILE, a rendu l'arrêt suivant :

Sur le moyen unique :

Attendu, selon l'arrêt attaqué (Paris, 10 avril 2018), que M. L..., se disant né le [...] à Cotonou au Bénin, alors que ce territoire était français, de D... L..., né [...] à Allada (Bénin), et de I... N..., née [...] à Ouidah (Bénin), a, par requête du 20 juillet 2016, sollicité un jugement supplétif d'acte de naissance, faisant valoir qu'il disposait d'une identité certaine mais que son acte de naissance ne se trouvait ni dans les registres de l'état civil des Français nés et établis hors de France ni dans les registres de l'état civil du Bénin ;

Attendu qu'il fait grief à l'arrêt de rejeter sa demande alors, selon le moyen, que les juges du fond ne peuvent statuer par voie de simple affirmation sans procéder à l'analyse même sommaire des éléments de preuve produits au soutien de la prétention d'une partie ; qu'en l'espèce, en se bornant à relever que l'inscription sur les listes électorales du 6e arrondissement de Paris et la délivrance d'une carte d'électeur ne seraient pas de nature à établir son identité, tout comme ne permettraient pas davantage d'établir la réalité de l'identité de M. L... l'extrait du registre du commerce et des sociétés selon lequel l'intéressé aurait créé une société sous cette identité, les relevés de la Caisse nationale d'assurance vieillesse et l'avis d'impôt sur les revenus 2015, la cour d'appel, en procédant par voie de simple affirmation sans jamais avoir examiné même sommairement ces différents documents pourtant de nature à faire la preuve de l'identité civile de M. L..., a violé l'article 455 du code de procédure civile ;

Mais attendu que, selon l'article 46 du code civil, lorsqu'il n'aura pas existé de registres, ou qu'ils seront perdus, la preuve en sera reçue tant par titres que par témoins ; que, dans ces cas, les mariages, naissances et décès pourront être prouvés tant par les registres et papiers émanés des pères et mères décédés, que par témoins ;

Et attendu que l'arrêt relève que les actes de naissance des enfants de M. L... comportent des mentions différentes s'agissant du père déclaré, que l'inscription sur les listes électorales de Paris et la délivrance d'une carte d'électeur ne sont pas de nature à établir son identité mais seulement une possession d'état de Français, sous réserve qu'il s'agisse bien de la même personne, que l'extrait du registre du commerce et des sociétés selon lequel l'intéressé aurait créé une société sous cette identité, les relevés de la Caisse nationale d'assurance vieillesse et l'avis d'impôt sur les revenus 2015 ne permettent pas d'établir la réalité de l'identité dont il se réclame et enfin, que l'absence de documents militaires français ne prouve pas la disparition du dossier le concernant mais seulement qu'il n'a jamais été appelé sous les drapeaux ou exempté comme il le prétend ; que de ces énonciations et constatations, la cour d'appel, qui a analysé les éléments de preuve soumis à son examen, a souverainement déduit que M. L... ne rapportait pas la preuve de sa date de naissance et de son identité exacte, de sorte qu'il ne remplissait pas les conditions pour obtenir un jugement supplétif d'acte de naissance ; que le moyen n'est pas fondé ;

PAR CES MOTIFS :

REJETTE le pourvoi ;

Condamne M. L... aux dépens ;

Vu l'article 700 du code de procédure civile, rejette sa demande ;

Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, première chambre civile, et prononcé par le président en son audience publique du quinze mai deux mille dix-neuf.

MOYEN ANNEXE au présent arrêt :

Moyen produit par la SCP Spinosi et Sureau, avocat aux Conseils, pour M. L...

Il est reproché à l'arrêt attaqué d'avoir rejeté les demandes de M. L... visant à ordonner la transcription du dispositif de l'arrêt dans les registres de l'état civil en retenant qu'il était né le [...] à Cotonou (Bénin), fils de D... L... et de I... N... ;

Aux motifs que, « l'article 46 du code civil dispose que « Lorsqu'il n'aura pas existé de registres, ou qu'ils seront perdus, la preuve en sera reçue tant par titres que par témoins ; et, dans ces cas, les mariages, naissances et décès, pourront être prouvés tant par les registres et papiers émanés des pères et mères décédés, que par témoins » ;

qu'il résulte de l'article 55 du code civil que « Lorsqu'une naissance n'a pas été déclarée dans le délai légal, l'officier de l'état civil ne peut la relater sur ses registres qu'en vertu d'un jugement rendu par le tribunal de l'arrondissement dans lequel est né l'enfant, et mention sommaire est faite en marge à la date de la naissance. Si le lieu de la naissance est inconnu, le tribunal compétent est celui du domicile du requérant. Le nom de l'enfant est déterminé en application des règles énoncées aux articles 311-21 et 311-23 » ;

que M. U... L... soutient que son acte de naissance ne se trouve ni dans les registres du service central de l'état civil des Français nés et établis hors de France, ni dans les registres de l'état civil du Bénin, mais que son identité étant certaine, la reconstitution de son acte de naissance doit être ordonnée ainsi que sa transcription dans les registres de l'état civil français ;

que c'est par des motifs exacts et pertinents que les premiers juges ont retenu que M. U... L... ne rapportait pas la preuve de son identité exacte ; que l'absence d'un acte de naissance au service de l'état civil de Nantes sous l'identité déclarée par l'intéressé n'établit pas à elle seule l'absence ou la perte de cet acte mais seulement que sa naissance n'a pas été déclarée ou transcrite et qu'il ne s'est pas vu reconnaître ou attribuer la nationalité française ; que les actes de naissance de ses enfants comportent des mentions différentes s'agissant du père déclaré ; que l'absence de documents militaires français ne prouve pas la disparition du dossier le concernant mais seulement qu'il n'a jamais été appelé sous les drapeaux ou exempté comme il le prétend ; que l'inscription sur les listes électorales de Paris (6e arrondissement) et la délivrance d'une carte d'électeur ne sont pas de nature à établir son identité mais seulement une possession d'état de Français sous réserve qu'il s'agisse bien de la même personne ; que l'extrait du registre du commerce et des sociétés selon lequel l'intéressé aurait créé une société sous cette identité, les relevés de la caisse nationale d'assurance vieillesse et l'avis d'impôt sur les revenus 2015 ne permettent pas d'établir la réalité de l'identité dont il se réclame ; qu'il ne donne aucune explication convaincante sur l'absence de toute trace d'acte de naissance le concernant ; que les demandes de M. U... L... sont rejetées et que l'ordonnance est confirmée » ;

Et aux motifs du premier juge, éventuellement adoptés, que :

« comme l'indique à juste titre le procureur de la République, le requérant ne rapporte pas la preuve de son identité exacte qui ne ressort que de ses propres déclarations, les documents ci-dessus détaillés n'étant pas de nature à en rapporter la preuve certaine, dès lors qu'en outre le requérant établit qu'il a sollicité des archives du ministère de la défense la communication des documents militaires le concernant, mais que ce service, par lettres des 4 février et 27 mars 2016, rapporte n'avoir pu retrouver aucun dossier au regard des pièces produites, et que de surcroît le requérant produit les actes de naissance de ses enfants E... née le [...] à Paris XIIIe et Q... né le [...] à Paris XIe, dont il ressort qu'E... est fille de U... T... L..., né le [...] à Tohonou (Dahomey) tandis que Q... est le fils de U... T... F... L..., né le [...] à Cotonou (Dahomey).

Dans ces conditions, et même si le requérant fait valoir à l'audience qu'il vit en France depuis 1957, qu'il était en possession d'une carte nationale d'identité française perdue à une date qu'il ne peut préciser à l'occasion d'un déménagement, la demande devra être rejetée dès lors qu'il n'existe aucune certitude sur la réalité de son état civil » (ordonnance, p. 2-3) ;

Alors que les juges du fond ne peuvent statuer par voie de simple affirmation, sans procéder à l'analyse même sommaire des éléments de preuve produits au soutien de la prétention d'une partie ; qu'en l'espèce, en se bornant à relever que l'inscription sur les listes électorales du 6ème arrondissement de Paris et la délivrance d'une carte d'électeur ne seraient pas de nature à établir son identité, tout comme ne permettraient pas davantage d'établir la réalité de l'identité de M. L... l'extrait du registre du commerce et des sociétés selon lequel l'intéressé aurait créé une société sous cette identité, les relevés de la caisse nationale d'assurance vieillesse et l'avis d'impôt sur les revenus 2015, la cour d'appel, en procédant par voie de simple affirmation sans jamais avoir examiné même sommairement ces différents documents pourtant de nature à faire la preuve de l'identité civile de M. L..., a violé l'article 455 du code de procédure civile.


Synthèse
Formation : Chambre civile 1
Numéro d'arrêt : 18-18111
Date de la décision : 15/05/2019
Sens de l'arrêt : Rejet
Type d'affaire : Civile

Analyses

ETAT CIVIL - Acte de l'état civil - Jugement supplétif - Conditions - Preuve de l'existence de l'événement - Appréciation souveraine

POUVOIRS DES JUGES - Appréciation souveraine - Etat civil - Acte de l'état civil - Jugement supplétif - Conditions - Preuve de l'existence de l'événement

La preuve de l'existence de l'événement pour lequel il est demandé un jugement supplétif, en application de l'article 46 du code civil, est appréciée souverainement par les juges du fond


Références :

article 46 du code civil

Décision attaquée : Cour d'appel de Paris, 10 avril 2018


Publications
Proposition de citation : Cass. Civ. 1re, 15 mai. 2019, pourvoi n°18-18111, Bull. civ.
Publié au bulletin des arrêts des chambres civiles

Composition du Tribunal
Président : Mme Batut
Avocat(s) : SCP Spinosi et Sureau

Origine de la décision
Date de l'import : 23/07/2019
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CCASS:2019:18.18111
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