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07/05/2019 | FRANCE | N°18-83077

France | France, Cour de cassation, Chambre criminelle, 07 mai 2019, 18-83077


LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE CRIMINELLE, a rendu l'arrêt suivant :

Statuant sur le pourvoi formé par :

- M. E... X...,
- La Société nationale des chemins de fer Français (SNCF) mobilités, parties civiles,

contre l'arrêt de la cour d'appel de PARIS, chambre 2-7, en date du 23 mars 2018, qui les a déboutés de leurs demandes après relaxe de M. R... A... des chefs d'outrage et d'entrave à la circulation d'un train et constatation de l'extinction de l'action publique ;

La COUR, statuant après débats en l'audience publique du 12 mars 2019 où étaient pr

ésents dans la formation prévue à l'article 567-1-1 du code de procédure pénale : M. Soul...

LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE CRIMINELLE, a rendu l'arrêt suivant :

Statuant sur le pourvoi formé par :

- M. E... X...,
- La Société nationale des chemins de fer Français (SNCF) mobilités, parties civiles,

contre l'arrêt de la cour d'appel de PARIS, chambre 2-7, en date du 23 mars 2018, qui les a déboutés de leurs demandes après relaxe de M. R... A... des chefs d'outrage et d'entrave à la circulation d'un train et constatation de l'extinction de l'action publique ;

La COUR, statuant après débats en l'audience publique du 12 mars 2019 où étaient présents dans la formation prévue à l'article 567-1-1 du code de procédure pénale : M. Soulard, président, M. Bonnal, conseiller rapporteur, M. Straehli, conseiller de la chambre ;

Greffier de chambre : Mme Darcheux ;

Sur le rapport de M. le conseiller Bonnal, les observations de la société civile professionnelle COUTARD et MUNIER-APAIRE, Me HAAS, avocats en la Cour, et les conclusions de M. l'avocat général LAGAUCHE ;

Vu les mémoires en demande et en défense et les observations complémentaires produits ;

Sur le moyen unique de cassation, pris de la violation des articles 222-13 et R. 625-2 du code pénal, 6, § 1, de la Convention européenne des droits de l'homme, préliminaire, 8, 591 et 593 du code de procédure pénale, le principe de la contradiction, défaut de motifs, manque de base légale ;

"en ce que l'arrêt attaqué a dit que les faits de violences sur une personnes chargée de mission de service public suivie d'une incapacité n'excédant pas 8 jours constituaient la contravention de violences involontaires prévue par l'article R. 625-2 du code pénal et que l'action publique se trouvait prescrite de ce chef et débouté les exposants du surplus de leurs demandes ;

"aux motifs que : « les enregistrements de vidéo protection montraient le 21 juillet à 6 heures 42 une bousculade au bout du quai, mais les faits de violences n'étaient pas visibles ; que M. Z... T..., contrôleuse de la SNCF, déclarait que l'individu le plus énervé proférait des insultes, avait brandi et jeté le journal dans la figure de M. E... X... ; puis « après être descendu du train, il s'est rapproché de mon collègue et lui a porté un coup de poing au visage et un coup de pied » ; il continuait à l'insulter (« fils de pute », « j'aurai ta peau »
), les autres ayant « un rôle passif » ; que M. V... K..., employé à la SNCF, indiquait que l'homme le plus grand de type métis avait jeté son journal au visage du contrôleur et lui avait porté un coup au visage dan qu'il « puisse dire s'il s'agissait d'un coup de poing ou d'une gifle » ; le seul geste qu'il avait vu de la part du contrôleur était sa réaction quand il avait reçu le journal : « il a écarté le journal en plein vol et a peut-être levé le pied, ce qui pourrait correspondre au geste dont parle son frère » ; que pour M. F... J..., agent d'escale, la personne de grande taille avait « mis un revers avec sa main droite » au contrôleur qui était tombé et avait voulu revenir vers son agresseur ; son frère était « un gros provocateur » ; que M. Q... A..., volleyeur professionnel comme son frère, était entendu comme témoin ; qu'il indiquait notamment que le contrôleur avait dit qu'ils devaient descendre et que c'était toujours la même chose avec « ces gens-là », que le contrôleur, sur le quai, avait tenté de porter un coup de pied à son frère qui était sur le marchepied, qu'il était revenu vers son frère dont le bras s'était « allongé vers le visage du contrôleur », qui était tombé quelques secondes plus tard ; celui-ci les avait insulté et ils avaient répondu ; que M. H... expliquait qu'il était monté en voiture 17 avec ses amis, qu'il avait entendu parler d'une majoration qu'R... acceptait de payer, que le contrôleur avait « pété un câble », disant que « c'était toujours pareil avec nous » et qu'il allait arrêter le train ; R... rétorquait qu'il n'était pas « comme les autres » et lui montrait le journal ; le contrôleur insultait ses deux amis de « fils de pute » ; que le témoin ajoutait : « Il a essayé de porter un coup de pied à R... sans toutefois parvenir à le toucher. J'ai vu R... avoir un mouvement que j'analyse comme étant un réflexe, sans pouvoir dire que c'était un coup de poing » ; qu'entendu en garde à vue, M. R... A... déclarait notamment qu'il comptait prendre un billet à bord du train, que le contrôler avait essayé de le sortir du train en disant « c'est toujours pareil avec vous », qu'il avait répondu qu'il n'était pas un voyou et avait jeté son journal dans sa direction, que le contrôleur avait tenté de lui mettre un coup de pied et lui-même avait « fait un geste de dégagement », que le contrôleur l'avait insulté de « fils de pute » et s'était roulé par terre ; qu'il ne reconnaissait pas les faits reprochés ; qu'en confrontation, M. R... A... maintenait ses déclarations, reconnaissant avoir repoussé le contrôleur au niveau du cou tandis que MM. K... et J... disaient l'avoir vu porter « un coup de poing » ; qu'à l'audience devant le tribunal correctionnel, le prévenu contestait toujours avoir porté un coup de poing, qu'il ne se souvenait pas des mots prononcés, expliquant qu'il était très énervé et avait ressenti de la frustration quand le contrôleur avait dit « c'est toujours pareil avec vous » ; que devant la cour, il indiquait avoir fait un geste réflexe au moment où le pied du contrôleur était parti ; que devant la cour, l'avocat général s'en est rapporté sur l'infraction de violence sur personne chargée d'une mission de service public suivie d'une incapacité n'excédant pas 8 jours en relevant de façon pertinente que s'il est sûr que M. X... a été blessé, le certificat médical retenant 4 jours d'ITT, et que le prévenu a fait un geste dans sa direction, de nombreuses questions restent sans réponse certaine quant au geste précis effectué, aux conséquences de celui-ci et son lien avec la chute, comme sur la tentative de coup de pied du contrôleur antérieure au geste en question ; que sur ce dernier point, les propos concordants du prévenu, de son frère et de son ami sont confortés par ceux de M. K... ; que la description du geste effectué par M. R... A... varie sensiblement selon les auditions : « coup de poing », « coup de poing et de pied », « coup de poing ou gifle », « revers » pour M. J... qui a modifié le terme en confrontation, « bras allongé », « mouvement réflexe » ; que le conseil du prévenu a fait valoir à l'audience que l'élément intentionnel du délit n'était pas caractérisé et qu'en cas de violences involontaires, il conviendrait d'en tirer les conséquences ; qu'en effet, face aux déclarations discordantes et parfois contradictoires figurant au dossier, un doute persiste sur le caractère volontaire du coup porté, ce qui doit bénéficier au prévenu ; que les faits peuvent ainsi constituer la contravention de violences involontaires prévue par l'article R. 625-2 du code pénal ; mais que l'action publique se trouve prescrite de ce chef puisque plus d'une année s'est écoulée entre les actes d'appel datant d'avril 2016 et les citations devant la cour intervenues en novembre 2017 » ;

"1°) alors que l'insuffisance ou la contradiction des motifs équivaut à leur absence ; qu'en retenant, pour requalifier en contravention de blessures involontaires le délit de violences volontaires reproché au prévenu, qu'un doute persistait sur le caractère volontaire du coup porté tout en constatant, d'une part, que les témoins entendus au cours de l'enquête avaient fait état d'un « coup de poing », d'une « gifle », d'un « revers » ou d'un « bras allongé » sans en exclure le caractère volontaire et que seul un témoin avait évoqué un « mouvement réflexe » et, d'autre part, que le prévenu lui-même avait déclaré, au cours de sa garde à vue, avoir « fait un geste de dégagement » et avait reconnu, en confrontation, avoir repoussé le contrôleur au niveau du cou, la cour d'appel a statué par des motifs contradictoires et, à tout le moins, insuffisants faute de s'être expliquée sur les éléments permettant d'étayer sa conviction ;

"2°) alors en tout état de cause que les juges ne peuvent prononcer d'office la prescription de l'action publique sans avoir permis aux parties d'en débattre ; qu'en relevant d'office la prescription de l'action publique après avoir disqualifié le délit de violences volontaires reproché au prévenu en la contravention de violences involontaires, sans avoir préalablement invité les parties à présenter leurs observations sur ce moyen, la cour d'appel a méconnu les textes et le principe ci-dessus mentionnés" ;

Attendu qu'il résulte de l'arrêt attaqué et des pièces de procédure qu'à la suite d'un incident avec un agent de la Société nationale des chemins de fer Français (SNCF), M. X..., au départ d'un train, M. A... a été poursuivi devant le tribunal correctionnel notamment du chef de violences volontaires ayant entraîné une incapacité de travail inférieure ou égale à huit jours sur personne chargée d'une mission de service public ; qu'il a relevé appel du jugement qui l'a déclaré coupable de ce délit et a prononcé sur les demandes civiles de M. X... et de la SNCF mobilités ;

Attendu que, pour dire que les faits constituaient non pas le délit de violences volontaires mais la contravention de blessures involontaires, constater l'acquisition de la prescription de l'action publique du chef de cette infraction et débouter les parties civiles de leurs demandes, l'arrêt, après avoir relevé que les constatations médicales étaient compatibles avec les violences alléguées, rappelle les déclarations du prévenu, qui, tout en contestant avoir porté un coup de poing, a reconnu, pendant l'enquête, avoir fait "un geste de dégagement", alors que M. X... tentait de lui donner un coup de pied, et "avoir repoussé le contrôleur au niveau du cou" et, à l'audience, "avoir fait un geste réflexe au moment où le pied du contrôleur était parti", puis résume les dépositions des témoins, qui ont chacun décrit le geste du prévenu différemment, comme un "coup de poing", une "gifle", un "revers de la main droite", un "mouvement réflexe" ou un bras "allongé vers le visage du contrôleur" ; que les juges relèvent le caractère discordant et parfois contradictoire de ces dépositions et ajoutent que les déclarations du prévenu, de son frère et de leur ami sur le fait que le contrôleur aurait tenté de donner un coup de pied au premier nommé sont confortées par la déposition d'un agent de la SNCF ; qu'ils en déduisent qu'un doute persiste sur le caractère volontaire du coup porté ;

Attendu qu'en statuant ainsi et dès lors que, d'une part, il se déduit des motifs de l'arrêt qu'elle a, au terme d'une appréciation souveraine des faits et circonstances contradictoirement débattus devant elle, constaté que la preuve du caractère volontaire du geste en cause n'avait pas été rapportée, de sorte que la qualification délictuelle sous laquelle lesdits faits avaient été poursuivis ne pouvait être retenue, d'autre part, le conseil du prévenu avait, au cours des débats, observé qu'il conviendrait de tirer les conséquences d'une requalification de ces faits en violences involontaires, soumettant ainsi au débat notamment la question de la prescription de la contravention qui pouvait seule être dans ce cas relevée, la cour d'appel n'a méconnu aucun des textes visés au moyen, lequel doit être écarté ;

Et attendu que l'arrêt est régulier en la forme ;

REJETTE le pourvoi ;

DIT n'y avoir lieu à application de l'article 618-1 du code de procédure pénale ;

Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, chambre criminelle, et prononcé par le président le sept mai deux mille dix-neuf ;

En foi de quoi le présent arrêt a été signé par le président, le rapporteur et le greffier de chambre.


Synthèse
Formation : Chambre criminelle
Numéro d'arrêt : 18-83077
Date de la décision : 07/05/2019
Sens de l'arrêt : Rejet
Type d'affaire : Criminelle

Références :

Décision attaquée : Cour d'appel de Paris, 23 mars 2018


Publications
Proposition de citation : Cass. Crim., 07 mai. 2019, pourvoi n°18-83077


Composition du Tribunal
Président : M. Soulard (président)
Avocat(s) : Me Haas, SCP Coutard et Munier-Apaire

Origine de la décision
Date de l'import : 29/12/2022
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CCASS:2019:18.83077
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