LA COUR DE CASSATION, DEUXIÈME CHAMBRE CIVILE, a rendu l'arrêt suivant :
Sur le moyen unique, pris en sa première branche :
Vu l'article R. 713-4 du code de la consommation ;
Attendu, selon le jugement attaqué, rendu en dernier ressort, que les sociétés CA Consumer Finance et Société européenne de développement du financement (les sociétés) ont formé un recours contre la décision d'une commission de surendettement ayant déclaré recevable la demande de M. et Mme Q... tendant au traitement de leur situation financière ;
Attendu que pour déclarer M. Q... irrecevable en sa demande, le juge du tribunal d'instance s'est fondé sur les observations écrites des sociétés qui n'avaient pas comparu à l'audience ;
Qu'en statuant ainsi, sans s'assurer que ces observations avaient été adressées avant l'audience à M. Q..., le juge du tribunal d'instance a violé le texte susvisé ;
PAR CES MOTIFS, et sans qu'il y ait lieu de statuer sur les autres branches du moyen :
CASSE ET ANNULE, mais seulement en ce qu'il a déclaré M. Q... irrecevable en sa demande tendant au traitement de sa situation de surendettement, le jugement rendu le 31 janvier 2018, entre les parties, par le juge du tribunal d'instance de Villejuif ; remet, en conséquence, sur ce point, la cause et les parties dans l'état où elles se trouvaient avant ledit jugement et, pour être fait droit, les renvoie devant le juge du tribunal d'instance de Bobigny ;
Condamne les sociétés CA Consumer Finance et Société européenne de développement du financement aux dépens ;
Vu l'article 700 du code de procédure civile, condamne les sociétés CA Consumer Finance et Société européenne de développement du financement à payer à M. et Mme Q... la somme globale de 3 000 euros ;
Dit que sur les diligences du procureur général près la Cour de cassation, le présent arrêt sera transmis pour être transcrit en marge ou à la suite du jugement partiellement cassé ;
Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, deuxième chambre civile, et prononcé par le président en son audience publique du onze avril deux mille dix-neuf.
MOYEN ANNEXE au présent arrêt :
.Moyen produit par la SCP Zribi et Texier, avocat aux Conseils, pour M. et Mme Q....
M. et Mme Q... font grief au jugement attaqué
D'AVOIR reçu partiellement le recours formé par les sociétés Crédit Agricole Consumer Finance et SEDEF et déclaré M. Q... irrecevable en sa demande tendant au traitement de sa situation de surendettement ;
AUX MOTIFS QU'« il ressort de l'état des créances que les époux Q... ont déclaré un passif de 275 632,62 € composé d'une dette de prêt à l'égard de l'ancien employeur de M. Q... pour 8 387 €, d'une dette de crédit immobilier de 29 494,10 €, d'une dette bancaire de 361,58 €, de 36 crédits à la consommation pour un encours de 234 711,32 €, dont 21 crédits souscrits entre 2014 et 2016, date de dépôt de la demande de traitement de la situation de surendettement pour un montant en capital de 188 800 € ; que les mensualités contractuelles cumulées étaient évaluées par la commission à la somme de 9 670,92 €, alors que les débiteurs disposent de retraites de 4 868 € en 2016 ; qu'il était retenu un taux d'endettement de 204 % ; que le principal du passif a été constitué dans les deux dernières années avant le départ en retraite des débiteurs exerçant, pour M. Q..., la profession de photographe à la Banque de France et, pour Mme Q..., celle de cadre administratif dans le secteur bancaire ; que le couple déclare que M. Q... aurait souscrit ces crédits à la consommation, soit en son nom personnel, soit en imitant la signature de son épouse comme cocontractant, pour faire face à son propre endettement au titre des crédits antérieurs et que M. Q... aurait ignoré les agissements de ce dernier jusqu'à un incident cardiaque subi par M. Q... avant la constitution du dossier auprès de la commission de surendettement ; qu'il ressort des pièces communiquées par la société SEDEF que différents prêts personnels étaient souscrits au nom des deux époux en 2012, 2013, le 23 mars 2015 puis le 7 décembre 2015 ; qu'une déclaration de ressources et charges était signée au nom des débiteurs à chaque souscription de crédit ; que si des charges étaient déclarées au cours des 4 premiers crédits pour 335 €, 314 €, 175 € et 509 €, il n'était signalé aucune charge de crédit à la consommation en décembre 2015 ; que, de même, l'examen des déclarations de ressources et charges déposées auprès de la société Crédit Agricole Consumer Finance le 26 janvier 2015 et 8 janvier 2015 laisse apparaître qu'aucune mention de mensualité de crédit à la consommation n'était effectuée alors qu'une précédente déclaration pour un crédit conclu en 2013 mentionnait une mensualité de 425 € ; que la circonstance de la conclusion de crédits antérieurs et de déclarations de charges incluant des mensualités de crédit jusque 2013 justifie que M. Q... ne pouvait ignore qu'il devait déclarer l'état exact des crédits existants et qu'en omettant volontairement de donner toute information sur les autres crédits à la consommation en cours à la même période, il a consciemment pris le risque de souscrire de nouvelles charges mensuelles de crédit supérieures aux revenus du couple ; que M. Q... a donc pris sciemment le risque de ne pas pouvoir exécuter ses engagements, en fraude aux droits des créanciers ; que Mme Q... déclare avoir ignoré la conclusion de ces engagements à leurs deux noms ; que M. Q... reconnaît avoir imité la signature de son épouse qui n'était pas en mesure de s'apercevoir des sommes empruntées et des mensualités prélevées dès lors que ces opérations étaient effectuées sur son compte personnel ; qu'il ressort des pièces communiquées à la commission que M. Q... disposait d'un compte personnel à la banque de France sur lequel étaient prélevées les mensualités de crédit au profit des sociétés SEDEF, Franfinance, CGL, BNP Paribas Personal Finance, Carrefour Banque, Norrsken Finance, CA Consumer Finance, Cofidis, Banque Casino, Axa Banque Financement, Monabanq, Cora Banque-Révillon et ce pour un montant de 9 571,24 € en septembre 2016 pour des ressources perçues de 2 511,67 € ; que les relevés de compte de Mme Q... sur la même période laissaient apparaître le prélèvement de l'échéance du crédit immobilier de 681,66 € ; qu'il sera observé que le dossier était déposé en novembre 2016 et que M. Q... ; obtenait le déblocage de fonds auprès de la société BNP Paribas Personal Finance des sommes 10 343 € et 9 000 € en août 2016 ; qu'en certifiant sur l'honneur l'exactitude des renseignements donnés, notamment en ce qui concerne les revenus et l'endettement et en souscrivant une partie des crédits au nom de son épouse, M. Q... a donc trompé ses cocontractants tant sur l'étendue du passif contracté que sur les ressources déclarées au nom des époux et la capacité à faire face aux nouveaux crédits ; que dans ces conditions, sa mauvaise foi est avérée » ;
1°) ALORS QUE le tribunal, statuant sur la recevabilité d'une demande de traitement d'une situation de surendettement, doit s'assurer que les parties se sont mutuellement communiquées leurs observations écrites ; qu'en se fondant sur les observations et les pièces produites par les sociétés SEDEF et Crédit Agricole Consumer Finance, sans qu'il ressorte du jugement que ces observations avaient été portées à la connaissance des époux Q..., le tribunal a violé l'article 16 du code de procédure civile, ensemble l'article R. 713-4 du code de la consommation ;
2°) ALORS QUE le débiteur en situation de surendettement est présumé de bonne foi ; que la mauvaise foi suppose d'établir que le débiteur a organisé ou a aggravé intentionnellement son insolvabilité à l'effet d'échapper au règlement de ses dettes ; que le seul fait de souscrire un grand nombre d'emprunts, même en connaissance d'un risque de surendettement, si elle dénote une certaine imprudence, ne suffit pas pour autant à caractériser la mauvaise foi du débiteur s'il n'est pas établi que celui-ci a volontairement adopté ce comportement dans le but d'échapper au paiement d'une partie de ses obligations ; qu'en retenant que M. Q... a consciemment pris le risque de souscrire de nouvelles charges mensuelles de crédit supérieures aux revenus du couple et le risque de ne pas pouvoir exécuter ses engagements, le tribunal, qui a statué par des motifs impropres à établir sa mauvaise foi, a violé l'article L. 711-1 du code de la consommation ;
3°) ALORS QU'en retenant, pour écarter la bonne foi de M. Q..., que celui-ci n'aurait pas déclaré à la société SEDEF et à la société Crédit Agricole Consumer Finance ses charges de crédit et qu'il aurait ainsi trompé ses cocontractants sur l'étendue du passif contracté et sur la capacité à faire face aux nouveaux crédits, après avoir pourtant constaté que ces sociétés lui avaient déjà consenti plusieurs crédits, toujours en cours à la date de conclusions des nouveaux crédits en cause, ce dont il résultait que M. Q... n'avait pas pu délibérément leur cacher une information qu'elle ne pouvait ignorer, le tribunal a violé l'article L. 711-1 du code de la consommation.