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10/04/2019 | FRANCE | N°18-10183

France | France, Cour de cassation, Chambre civile 1, 10 avril 2019, 18-10183


LA COUR DE CASSATION, PREMIÈRE CHAMBRE CIVILE, a rendu l'arrêt suivant :

Attendu, selon l'arrêt attaqué, que, par bons de commande datés des 27 novembre et 24 décembre 2013, signés à l'issue d'un démarchage à domicile, M. I... (l'emprunteur) a conclu avec la société Sungold agence française de l'habitat (le vendeur) deux contrats de fourniture et d'installation de panneaux solaires, financés par deux prêts souscrits auprès de la société Sygma banque, aux droits de laquelle vient la société BNP Paribas Personal Finance (le prêteur) ; que, soutenant que les contrats

avaient été conclus en violation des dispositions du code de la consommati...

LA COUR DE CASSATION, PREMIÈRE CHAMBRE CIVILE, a rendu l'arrêt suivant :

Attendu, selon l'arrêt attaqué, que, par bons de commande datés des 27 novembre et 24 décembre 2013, signés à l'issue d'un démarchage à domicile, M. I... (l'emprunteur) a conclu avec la société Sungold agence française de l'habitat (le vendeur) deux contrats de fourniture et d'installation de panneaux solaires, financés par deux prêts souscrits auprès de la société Sygma banque, aux droits de laquelle vient la société BNP Paribas Personal Finance (le prêteur) ; que, soutenant que les contrats avaient été conclus en violation des dispositions du code de la consommation relatives au démarchage, l'emprunteur a assigné le vendeur et la banque en nullité des contrats de vente et des contrats de crédit affectés et en paiement de dommages-intérêts ; que, le vendeur ayant été placé en liquidation judiciaire, son liquidateur, M. N..., a été attrait en la cause ;

Sur le troisième moyen, ci-après annexé :

Attendu qu'il n'y a pas lieu de statuer par une décision spécialement motivée sur ce moyen qui n'est manifestement pas de nature à entraîner la cassation ;

Sur le deuxième moyen, ci-après annexé :

Attendu que l'emprunteur fait grief à l'arrêt de rejeter sa demande visant à faire produire à la résolution des contrats de vente tous ses effets, ce qui incluait l'obligation pour le vendeur de lui restituer le prix et la fixation de sa créance au passif de la procédure collective ;

Attendu que, l'annulation d'une vente entraînant de plein droit la remise des parties en l'état où elles se trouvaient antérieurement à sa conclusion, la cour d'appel n'était pas tenue, à défaut de demande expresse en ce sens, d'ordonner la restitution du prix en même temps que la reprise de la chose vendue ; que le moyen n'est pas fondé ;

Mais sur le moyen relevé d'office, après avis donné aux parties conformément à l'article 1015 du code de procédure civile :

Vu les articles L. 311-31, devenu L. 312-48, et L. 311-2, devenu L. 312-55, du code de la consommation, ensemble l'article 1147 du code civil, dans sa rédaction antérieure à celle issue de l'ordonnance n° 2016-131 du 10 février 2016 ;

Attendu qu'il résulte de ces textes qu'est privé de sa créance de restitution le prêteur qui verse les fonds sans procéder préalablement aux vérifications nécessaires qui lui auraient permis de constater que le contrat principal de démarchage à domicile était affecté d'une cause de nullité, au regard des exigences de l'article L. 121-23 du code de la consommation, dans sa rédaction antérieure à celle issue de l'ordonnance n° 2016-301 du 14 mars 2016 ;

Attendu qu'après avoir constaté l'absence, dans les contrats de vente, des mentions exigées par ce dernier texte et, en conséquence, prononcé leur nullité, l'arrêt condamne l'emprunteur à restituer à la banque les capitaux empruntés ;

Qu'en statuant ainsi, la cour d'appel a violé les textes susvisés ;

PAR CES MOTIFS et sans qu'il y ait lieu de statuer sur le premier moyen :

CASSE ET ANNULE, mais seulement en ce qu'il condamne M. I... à rembourser à la société Sygma banque le montant des crédits affectés, l'arrêt rendu le 8 novembre 2017, entre les parties, par la cour d'appel de Bastia ; remet, en conséquence, sur ce point, la cause et les parties dans l'état où elles se trouvaient avant ledit arrêt et, pour être fait droit, les renvoie devant la cour d'appel d'Aix-en-Provence ;

Condamne la société BNP Paribas Personal Finance aux dépens ;

Vu l'article 700 du code de procédure civile, rejette les demandes ;

Dit que sur les diligences du procureur général près la Cour de cassation, le présent arrêt sera transmis pour être transcrit en marge ou à la suite de l'arrêt partiellement cassé ;

Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, première chambre civile, et prononcé par le président en son audience publique du dix avril deux mille dix-neuf.

MOYENS ANNEXES au présent arrêt :

Moyens produits par la SCP Waquet, Farge et Hazan, avocat aux Conseils, pour M. I....

PREMIER MOYEN DE CASSATION :

IL EST FAIT GRIEF à l'arrêt infirmatif attaqué d'avoir condamné Monsieur I... à rembourser à la société Sygma le montant du crédit affecté et d'avoir rejeté sa demande de dommages-intérêts à l'encontre de cette société;

AUX MOTIFS QUE M. I... fait ensuite valoir que Sygma ne se serait pas suffisamment assurée des garanties de sérieux de Sungold et la régularité de l'opération commerciale ; mais que le contrat de vente contient toutes informations et réserves utiles à ce sujet; d'autre part il n'est pas établi que Sygma aurait dû connaître à l'avance la forte probabilité de l'échec commercial de l'opération; quant au sérieux de la société Sungold, au moment où le contrat a été souscrit rien ne permettait de le mettre en doute ; que M. I... ne saurait reprocher à l'organisme prêteur une tromperie quant à la rentabilité de l'opération, commise de concert avec la société Sungold ; qu'il convient en effet de se reporter aux termes du contrat souscrit auprès de la société Sungold, qui certes après démarchage et distribution de documents propres à obtenir le consentement du client eu égard à la rentabilité de l'opération, précise que le vendeur ne garantit aucunement l'obtention des aides régionales, publiques ou para publiques liées à l'installation objet du contrat, qu'il se borne à prêter son concours à leur obtention lorsqu'elles existent; que le vendeur ne garantit pas davantage l'obtention du crédit d'impôt espéré par le client, en raison de nombreux paramètres conditionnant son attribution et l'évolution de la législation en la matière ; que dès lors, les circonstances que la collectivité territoriale de Corse n'ait pas accordé de subventions et que le crédit d'impôt ait été supprimé à compter du 1er janvier 2014, ne peuvent être retenus comme des fautes contractuelles à la charge du vendeur, qui n'a commis aucune tromperie à l'égard de son client, et encore moins à la charge du prêteur ; que c'est à tort, en quatrième lieu, que M. I... soutient que la société de crédit aurait dû lui proposer un crédit immobilier, s'agissant de la pose de panneaux en toiture, puisque l'article L312-2 du code de la consommation réserve cette option aux crédits supérieurs à 75000 euros ; qu'en cinquième lieu M. I... fait valoir que le prêteur a indûment versé les fonds au vendeur, sur la seule foi d'un certificat de livraison, dont il dénie la signature, et qui n'établirait pas la parfaite exécution des prestations contractuelles ; qu'en vertu de l'article L311-31 du code de la consommation les obligations de l'emprunteur ne prennent effet qu'à compter de la livraison du bien ou de la fourniture de la prestation ; que les certificats de livraison datés des 13 décembre 2013 et 14 janvier 2014, sont revêtus de la signature du client, identiques à celles qui figurent sur les contrats initiaux, précédée de la mention que le bien a été livré et que l'acheteur accepte le déblocage des fonds au profit du vendeur ; que la réalité de la livraison et sa date ressortent également du constat d'huissier du 24 avril 2015, contenant la reconnaissance par M. I... de ce que les installations ont été réalisées début décembre 2013 et fin janvier 2014 ; que l'obligation légale du prêteur était de s'assurer, au vu du certificat de livraison signé par l'acheteur, sans avoir à procéder à de plus amples investigations, de ce que la commande avait été exécutée, avant de débloquer les fonds. La clause du contrat prévoyant ainsi le versement des fonds n'est, contrairement à ce que soutient M. I..., nullement abusive puisqu'elle est conforme à l'article L 311-31 précité ; que, enfin, il convient de souligner que ce n'est qu'au moment de l'introduction de la procédure devant le tribunal d'instance, en novembre 2014, que M. I... a contesté sa signature et le déblocage des fonds ; que les désordres reprochés par le client, les défectuosités de l'installation, apparus postérieurement, ne sont nullement imputables à la banque, qui ne pouvait en outre les connaître au moment du déblocage des fonds ; que c'est donc à tort que le premier juge a estimé que Sygma avait commis une faute en s'abstenant de vérifier la réalisation de toutes les opérations, techniques et administratives, nécessaires à la mise en route de l'installation ; qu'en définitive, la seule faute avérée de la société Sygma est de ne pas avoir justifié de la consultation préalable du FIep ; mais cette faute ne saurait à elle seule présenter un caractère de gravité suffisant pour priver le prêteur de tout droit à remboursement ; qu'en outre cette seule faute, sans aucun lien avec les préjudices allégués par le client, ne peut donner droit à indemnisation de la part de Sygma ;qu'en conséquence de ce qui précède, M. I... devra restituer à Sygma la somme qu'il a reçue au titre du prix de vente, déduction faite des échéances déjà remboursées ;

1°) ALORS QUE commet une faute qui le prive de la possibilité de se prévaloir, à l'égard de l'emprunteur, des effets de la résolution du contrat de prêt, conséquence de celle du contrat principal, le prêteur qui délivre les fonds au vendeur ou au prestataire de services sans s'assurer que celui-ci a exécuté complètement son obligation ; qu'en condamnant Monsieur I... à rembourser la banque sans rechercher, comme elle y était invitée, si la société Sygma n'avait pas commis une faute en s'abstenant, avant de verser les fonds empruntés, de vérifier la régularité de l'opération commerciale, ce qui lui aurait permis de constater qu'elle était affectée de causes de nullité, la cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard des articles L. 311-31 du code de la consommation, dans sa rédaction antérieure à celle issue de l'ordonnance n° 2016-301 du 14 mars 2016 et l'article L. 311-32, devenu L. 312-55 du code de la consommation, ensemble l'article 1147 du code civil dans sa rédaction applicable au litige ;

2°) ALORS QUE les contrats font la loi des parties; qu'en limitant l'obligation de vérification de la banque à celle du visa du certificat de livraison des panneaux, quand le contrat financé par le crédit ne portait pas seulement sur la fourniture de ces panneaux, mais sur la vente de l'électricité qu'ils allaient produire avec mandat donné au vendeur pour conclure les contrats et demander les autorisations requises pour atteindre cet objectif, la cour d'appel a violé le contrat de vente et de prestation de services, ensemble l'article 1134 du code civil dans sa version applicable au litige.

3°) ALORS QUE commet une faute qui le prive de la possibilité de se prévaloir, à l'égard de l'emprunteur, des effets de la résolution du contrat de prêt, conséquence de celle du contrat principal, le prêteur qui délivre les fonds au vendeur ou au prestataire de services sans s'assurer que celui-ci a exécuté complètement son obligation ; qu'en limitant sa recherche de vérification de l'exécution complète du contrat financé à la seule fourniture des panneaux photovoltaïques, sans l'étendre à la totalité des prestations prévues au contrat, à savoir, notamment, la conclusion par le vendeur des contrats requis pour vendre l'électricité produite par les panneaux et la réalisation des démarches d'obtention des autorisations nécessaires, la cour d'appel a violé les articles 1134 et 1147 du code civil dans leur rédaction applicable au litige, ensemble les articles L. 311-31 du code de la consommation, dans sa rédaction antérieure à celle issue de l'ordonnance n° 2016-301 du 14 mars 2016 et L. 311-32, devenu L. 312-55 du code de la consommation ;

4°) ALORS QU'en tout état de cause la résolution ou l'annulation d'un contrat de crédit accessoire, en conséquence de l'annulation du contrat constatant la vente qu'il finançait, emporte pour l'emprunteur l'obligation de rembourser au prêteur le capital prêté ; qu'en condamnant Monsieur I... à rembourser non le montant du capital mais celui du crédit affecté, déduction faite des échéances déjà réglées, la cour d'appel a violé les articles L. 311-31 du code de la consommation, dans sa rédaction antérieure à celle issue de l'ordonnance n° 2016-301 du 14 mars 2016 et L. 311-32, devenu L. 312-55 du code de la consommation, ensemble l'article 1147 du code civil dans sa rédaction applicable au litige.

DEUXIEME MOYEN DE CASSATION :
, subsidiaire

IL EST FAIT GRIEF à l'arrêt attaqué d'avoir rejeté la demande de Monsieur I... visant à voir faire produire à la résolution du contrat de vente tous ses effets, ce qui incluait l'obligation pour le vendeur de restituer le prix et la fixation de la créance de Monsieur I... en découlant au passif de la procédure collective ;

AUX MOTIFS QUE les contrats des 27 novembre et 24 décembre 2013 sont soumis aux dispositions des articles L 121-21 et suivants du code de la consommation, dans leur rédaction antérieure à la loi du 17 mars 2014 ; que l'article L 121-23 prévoit qu'à peine de nullité le contrat doit comporter, notamment, les conditions d'exécution du contrat, les modalités et le délai de livraison des biens, et en cas de vente à crédit le taux nominal de l'intérêt et le taux effectif global de l'intérêt ; que ces mentions font à l'évidence défaut sur les contrats versés aux débats. En conséquence, et sans qu'il y ait lieu à examiner les autres irrégularités examinées par le premier juge, le contrat de vente doit être annulé ; qu'en conséquence, M. I... doit restituer le matériel à la société Sungold ;

ALORS QUE la nullité d'un contrat emporte restitution du prix; que la cour d'appel a prononcé la nullité de la vente tout en rejetant la demande de l'acquéreur visant à se voir restituer le prix de la vente ; qu'en statuant ainsi la cour d'appel a violé les articles 1134 et 1305 du code civil dans leur rédaction applicable au litige.

TROISIEME MOYEN DE CASSATION :

IL EST FAIT GRIEF à l'arrêt attaqué d'avoir fixé la créance de Monsieur I... contre la société Sungold à la somme de 18.000 euros à titre de dommages-intérêts ;

AUX MOTIFS QUE le préjudice de jouissance n'est pas établi, la valeur locative moyenne de sa maison, pas plus que l'intention de louer le bien, ne sont pas établies ;

ALORS QUE le dommage doit être réparé dans son intégralité ; que constitue un préjudice réparable l'impossibilité de jouir normalement de son bien ; que Monsieur I... demandait réparation du préjudice de privation de jouissance normale de son bien, résultant des désordres de sa toiture causé par la société Sungold, ainsi que de l'impossibilité pour lui de vendre sa maison, en raison de ces mêmes dégâts et des actions en justice en cours contre la société Sungold ; qu'en rejetant tout préjudice de cet ordre au motif que la valeur locative du bien, pas plus que l'intention de le louer n'étaient établies, sans examiner les autres préjudices de jouissance invoqués par Monsieur I..., la cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard du principe de réparation intégrale et de l'article 1147 du code civil dans sa rédaction applicable au litige.


Synthèse
Formation : Chambre civile 1
Numéro d'arrêt : 18-10183
Date de la décision : 10/04/2019
Sens de l'arrêt : Cassation partielle
Type d'affaire : Civile

Références :

Décision attaquée : Cour d'appel de Bastia, 08 novembre 2017


Publications
Proposition de citation : Cass. Civ. 1re, 10 avr. 2019, pourvoi n°18-10183


Composition du Tribunal
Président : Mme Batut (président)
Avocat(s) : SCP Célice, Soltner, Texidor et Périer, SCP Waquet, Farge et Hazan

Origine de la décision
Date de l'import : 15/09/2022
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CCASS:2019:18.10183
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