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03/04/2019 | FRANCE | N°18-19339;18-19340

France | France, Cour de cassation, Chambre sociale, 03 avril 2019, 18-19339 et suivant


LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE SOCIALE, a rendu l'arrêt suivant :

Vu leur connexité joint les pourvois n° T 18-19.339 et U 18-19.340 ;

Attendu, selon les jugements attaqués (tribunal d'instance de Nantes, 27 juin 2018), que par accord collectif signé le 4 juin 2004 et modifié le 7 mai 2015, une unité économique et sociale travail temporaire Groupe Randstad a été mise en place ; que cette unité est dotée d'un comité central et de douze comités d'établissement, dont un comité d'établissement Direction ouest ; qu'ayant recueilli 31,37 % des voix au premier tour des

dernières élections au comité d'établissement de la Direction ouest, Force o...

LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE SOCIALE, a rendu l'arrêt suivant :

Vu leur connexité joint les pourvois n° T 18-19.339 et U 18-19.340 ;

Attendu, selon les jugements attaqués (tribunal d'instance de Nantes, 27 juin 2018), que par accord collectif signé le 4 juin 2004 et modifié le 7 mai 2015, une unité économique et sociale travail temporaire Groupe Randstad a été mise en place ; que cette unité est dotée d'un comité central et de douze comités d'établissement, dont un comité d'établissement Direction ouest ; qu'ayant recueilli 31,37 % des voix au premier tour des dernières élections au comité d'établissement de la Direction ouest, Force ouvrière disposait de la possibilité de désigner jusqu'à sept délégués syndicaux d'établissement, sur le fondement des dispositions de l'article L. 2143-3 du code du travail et des dispositions conventionnelles applicables au sein de l'unité économique et sociale ; que, le 17 mars 2016, la fédération des employés et cadres Force ouvrière (la fédération) a procédé à la désignation au sein de la Direction ouest de six délégués syndicaux d'établissement, dont Mmes Y... et O... ; que, le 11 avril 2018, elle a procédé au retrait des désignations de ces dernières ; que, le même jour, le syndicat Force ouvrière groupe Randstad en France (le syndicat) a informé la direction de l'unité économique et sociale de la désignation de Mmes Y... et O..., en qualité de délégué syndical d'établissement sur la Direction ouest ; que, par requêtes déposées le 24 avril 2018, les sociétés composant l'unité économique et sociale (les sociétés) ont saisi le tribunal d'instance de diverses demandes et notamment sollicité l'annulation de la désignation par le syndicat de Mmes Y... et O... en qualité de délégué syndical d'établissement sur la Direction ouest ;

Sur le moyen unique, pris en ses première et troisième branches :

Attendu qu'il n'y a pas lieu de statuer par une décision spécialement motivée sur le moyen annexé, qui n'est manifestement pas de nature à entraîner la cassation ;

Sur le moyen unique, pris en sa deuxième branche :

Attendu que le syndicat et Mmes Y... et O... font grief aux jugements d'annuler la désignation des deux intéressées en qualité de délégué syndical d'établissement sur la région Ouest de l'unité économique et sociale TT Groupe Randstad France, effectuée le 11 avril 2018 par le syndicat alors, selon le moyen, qu'il est interdit au juge de dénaturer les documents de la cause ; que non seulement les statuts du syndicat FO Groupe Randstad, validés par les instances fédérales Force ouvrière, prévoient, en leur article 27, que « la désignation du DSC, des délégués syndicaux, représentants syndicaux au comité central d'entreprise, aux comités ou d'établissement et représentants de sections syndicales est réalisée et portée à la connaissance du chef d'entreprise par la FEC-FO sur proposition du secrétaire après avis des membres du bureau », ce qui implique l'obligation pour l'instance fédérale, liée par la proposition du syndicat FO groupe Randstad, de désigner le salarié sur lequel s'est porté le choix du syndicat, mais de plus, selon les termes mêmes de la « résolution interne du Comité Confédéral National sur les règles de fonctionnement » de la Confédération FO, en date du 25 juin 2009 à valeur statutaire, visée par le jugement attaqué, c'est « sur décision des syndicats ou des sections syndicales », que « les fédérations portent à la connaissance de l'employeur les DS centraux et/ou les DS dans les entreprises organisées régionalement ou sur plusieurs départements » ; qu'en retenant néanmoins qu'il résulte des dispositions statutaires que le rôle du syndicat FO Groupe Randstad se limite à participer à la phase préparatoire de la désignation sans que lui soit conféré un pouvoir de désignation, lequel n'est dévolu qu'à la fédération FEC-FO, le tribunal d'instance a dénaturé les termes clairs et précis de l'article 27 des statuts du syndicat FO Groupe Randstad et, par omission, ceux également clairs et précis de la « résolution interne du Comité Confédéral National sur les règles de fonctionnement » de la Confédération FO, en date du 25 juin 2009, violant ce faisant l'article 1103 du code civil ;

Mais attendu que le tribunal n'a pas dénaturé tant l'article 27 des statuts du syndicat FO Groupe Randstad que la résolution interne du comité confédéral national du 25 juin 2009 en décidant que, pour les entreprises comportant plusieurs établissements implantés dans plusieurs départements, la désignation est assurée par la fédération ; que le moyen n'est pas fondé ;

PAR CES MOTIFS :

REJETTE les pourvois ;

Vu l'article 700 du code de procédure civile, rejette les demandes ;

Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, chambre sociale, et prononcé par le président en son audience publique du trois avril deux mille dix-neuf.

MOYENS ANNEXES au présent arrêt :

Moyen produit au pourvoi n° T 18-19.339 par la SCP Lyon-Caen et Thiriez, avocat aux Conseils, pour le syndicat Force ouvrière Groupe Randstad France et Mme Y....

Ce moyen reproche au jugement attaqué d'avoir rejeté la demande du syndicat FO Groupe Randstad France tendant à ce qu'il soit sursis à statuer dans l'attente du rendu de l'arbitrage de la Commission des conflits de la Confédération Force ouvrière, ou en cas de recours, jusqu'au rendu de la décision du Comité confédéral national de Force ouvrière et d'avoir annulé la désignation de Madame L... Y... en qualité de déléguée syndicale d'établissement sur la région Ouest de l'unité économique et sociale TT Groupe Randstad France, effectuée le 11 avril 2018 par le syndicat FO Groupe Randstad ;

AUX MOTIFS QUE sur la demande d'annulation de la désignation par le syndicat FO GROUPE Randstad EN FRANCE de Madame Y... en qualité de déléguée syndicale d'établissement sur la région Ouest en date du 11 avril 2018, aux termes de l'article L.2143-3 du code du travail, "chaque organisation syndicale représentative dans l'entreprise ou l'établissement d'au moins cinquante salariés, qui constitue une section syndicale, désigne parmi les candidats aux élections professionnelles qui ont recueilli à titre personnel et dans leur collège au moins 10 % des suffrages exprimés au premier tour des dernières élections au comité d'entreprise ou de la délégation unique du personnel ou des délégués du personnel, quel que soit le nombre de votants, dans les limites fixées à l'article L.2I43-J2, un ou plusieurs délégués syndicaux pour la représenter auprès de l'employeur..." ; qu'ayant recueilli 31,37 % des voix au premier tour des dernières élections au comité d'établissement de la Direction Ouest, Force ouvrière dispose de la possibilité de désigner jusqu'à 7 délégués syndicaux d'établissement, sur le fondement des dispositions de l'article L.2143-3 du code du travail et des dispositions conventionnelles applicables au sein de l'UES TT Groupe Randstad France ; que le 17 mars 2016, la FEC FO a procédé à la désignation au sein de la Direction Ouest de 6 délégués syndicaux d'établissement, dont Madame L... Y... ; que le 11 avril 2018, elle a procédé au retrait de la désignation de Madame Y... et le même jour, le syndicat Force ouvrière GROUPE Randstad EN FRANCE a informé la direction de l'UES TT Groupe Randstad France de la désignation de Madame Y... en qualité de déléguée syndicale d'établissement sur la Direction Ouest ; que de jurisprudence constante, seul le syndicat ayant désigné un délégué syndical est habilité à procéder à sa révocation et l'éventuel conflit entre une confédération-syndicale et une organisation syndicale qui lui est affiliée en matière de désignation d'un délégué syndical est résolu dès lors que l'un des syndicats justifie, soit des dispositions statutaires déterminant l'entité ayant qualité pour procéder à une telle désignation, soit de la décision prise par l'organisation syndicale d'affiliation pour régler le conflit conformément aux dispositions statutaires prévues à cet effet ; que ce n'est que subsidiairement que le critère chronologique, tenant à la validité de la première désignation, doit être appliqué (Soc., 29 oct. 2010, n° 09-67.696 et n° 09-68.207) ; que cette solution a été récemment étendue au cas de dépôts concurrents de listes de candidats lors des élections professionnelles par deux entités syndicales affiliées à la même confédération (Soc., 24 janvier 2018, n° 16-22.168) ; qu'il appartient donc aux syndicats de justifier devant le juge et de manière alternative, soit des statuts lorsque ceux-ci déterminent l'entité ayant qualité pour désigner les délégués syndicaux, soit de la décision rendue par l'organe des conflits ; qu'à défaut, le juge doit appliquer la règle chronologique de la première désignation ; qu'aussi, contrairement à ce que soutiennent Madame Y... et le syndicat FO GROUPE Randstad EN FRANCE, ce raisonnement n'interdit pas au juge du contentieux électoral de statuer dès lors que l'un des deux éléments de justification susvisés lui est soumis ; qu'en revanche, de tels éléments s'imposent à lui, ce qui réduit par-conséquent sa marge d'appréciation et ce faisant, son intervention contentieuse ; que dès lors, la résolution d'un tel différend peut parfaitement avoir lieu devant le tribunal si l'un des syndicats justifie de statuts lui conférant le pouvoir de désignation susvisé, sans qu'il soit nécessaire de justifier d'une décision rendue par l'organe des conflits ; que ce n'est que dans l'hypothèse où les statuts conféreraient à chacune des entités un pouvoir concurrent de désignation des délégués qu'une décision de la Commission des conflits serait nécessaire ; que dans ce cas, le tribunal devrait effectivement surseoir à statuer le temps que l'organe susvisé règle le conflit ; que la jurisprudence invoquée n'étant applicable qu'à la condition qu'il existe un lien d'affiliation entre les différentes entités syndicales, il y a lieu dans un premier temps de déterminer si le syndicat FO Randstad est bien affilié à la fédération FEC-FO ;
. que l'adhésion ne peut être contestée au cas particulier ;

QUE, sur le sursis à statuer, l'article 378 du code de procédure civile dispose que "la décision de sursis suspend le cours de l'instance pour le temps ou jusqu'à la survenance de l'événement qu'elle détermine " ; que le juge apprécie souverainement l'opportunité du sursis à statuer ; qu'en l'espèce, il résulte notamment de l'article 27 des statuts du syndicat FO GROUPE Randstad EN FRANCE que "la désignation du DSC, des délégués syndicaux, représentants syndicaux au Comité Central d'Entreprise, aux Comités d'établissement et Représentants de Sections Syndicales est réalisée et portée à la connaissance du chef d'entreprise par la FEC-FO sur proposition du secrétaire après avis des membres du bureau " ; que la désignation des délégués et représentants syndicaux est donc réalisée par la fédération FEC-FO ; que cette dernière est également chargée de la porter à la connaissance de la direction de l'entreprise ; qu'au demeurant, cette règle ne fait que préciser celle qui émane du niveau confédéral, selon une résolution interne votée le 25 mars 2009 qui précise que "pour les entreprises comportant plusieurs établissements implantés dans plusieurs départements, la désignation (hors du niveau départemental) est assurée par la fédération après consultation des syndicats avec information aux unions départementales" ; qu'à cet égard, la jurisprudence a retenu que cette résolution confédérale à valeur statutaire s'impose à tout syndicat membre de la confédération (Soc. 8 décembre 2010, P n° 10-60.244) ; qu'il en résulte donc que les statuts ne confèrent pas au syndicat FO Randstad un tel pouvoir de désignation, dans la mesure où son rôle en la matière est restreint à la seule proposition de son secrétaire émise après avis des membres du bureau ; que le syndicat FO Randstad n'intervient donc qu'en amont de la désignation, ne participant de facto qu'à sa phase préparatoire ; que si le syndicat FO Randstad possède un rôle substantiel dans la procédure précédant la désignation proprement dite, cette faculté ne va pas jusqu'à lui octroyer la possibilité de désigner lui-même un délégué syndical ; qu'il n'est donc pas nécessaire de soumettre la solution du litige à une décision d'arbitrage confédérale ; qu'au surplus, de manière superfétatoire, selon les statuts de la FEC FO, le bureau fédéral soumet à la Commission des conflits confédérale tout différend pouvant intervenir entre un syndicat et la fédération ; qu'il revient à cette Commission de préparer la décision du Conseil national ou de la Commission administrative ; que le syndicat FO GROUPE Randstad EN FRANCE a saisi la Commission des conflits confédérale d'un recours en avril 2018 ; que d'une part, il ressort d'un courrier adressé par le secrétaire confédéral de la Commission à Madame B... le 16 avril 2018 que la Commission des conflits ne se réunira que si la commission exécutive confédérale le décide, après présentation du dossier -la date de réunion de la commission exécutive confédérale n'étant en outre pas encore arrêtée ; que la prise de décision par la Commission des conflits confédérale sur ce conflit apparaît dès lors aléatoire et peut dépasser un temps raisonnable ; que d'autre part, la prolongation du litige pour une durée indéterminée entraînerait des conséquences préjudiciables pour l'UES TT GROUPE Randstad que d'abord, les négociations relatives à l'institution d'un Comité Social et Economique sont paralysées en raison de la désignation par la confédération Force ouvrière de deux délégations distinctes, l'une pour la fédération FEC-FO et l'autre pour le syndicat FO Randstad, Mesdames Y... et O... étant membres de cette dernière ; qu'en outre, compte-tenu de l'existence de deux délégués syndicaux centraux concurrents au sein d'une même confédération, l'un sous l'étiquette de la fédération FEC-FO et l'autre sous l'étiquette du syndicat FO Randstad, l'entreprise ne peut allouer les moyens budgétaires au délégué syndical central alors même qu'un accord-cadre sur le droit syndical au sein de l'UES en date du 12 novembre 2012 l'y contraint ; qu'enfin, les statuts de la fédération ne sont pas opposables à l'employeur ; qu'il y a lieu en conséquence de rejeter la demande de sursis à statuer dans l'attente du rendu de l'arbitrage de la Commission des conflits de la Confédération ou, en cas de recours, jusqu'au rendu de la décision du Comité confédéral national ;

QUE, sur le fond, la compétence de désignation des délégués et représentants syndicaux restant dévolue statutairement à la fédération FEC-FO, c'est à tort que le syndicat GROUPE Randstad EN FRANCE a désigné Madame L... Y... en tant que représentante syndicale d'établissement FO pour la région Ouest ; qu'en conséquence, il y a lieu d'annuler cette désignation effectuée le 11 avril 2018 ;

ALORS D'UNE PART QU'en cas de différend entre syndicats affiliés à la même confédération concernant la capacité de désignation ou de révocation d'un représentant syndical dans une entreprise, il revient à la seule procédure prévue par les statuts auxquels les syndicats en litige ont adhéré, de régler ledit différend ; qu'en se prononçant lui-même sur la portée des différentes règles statutaires régissant l'exercice des prérogatives syndicales respectives des syndicats FO Groupe Randstad et FEC-FO au sein de l'unité économique et sociale TT Groupe Randstad, en refusant de surseoir à statuer dans l'attente du rendu de l'arbitrage de la commission des conflits confédérale FO qu'il constatait être déjà saisie du litige opposant les deux syndicats, le Tribunal d'instance a excédé ses pouvoirs et violé le principe de la liberté syndicale, ensemble les articles L.2131-2 du Code du travail et 378 du Code de procédure civile ;

ALORS, D'AUTRE PART, et en tout état de cause, QU'il est interdit au juge de dénaturer les documents de la cause ; que non seulement les statuts du syndicats FO Groupe Randstad, validés par les instances fédérales Force ouvrière, prévoient, en leur article 27, que « la désignation du DSC, des délégués syndicaux, représentants syndicaux au comité central d'entreprise, aux comités ou d'établissement et représentants de sections syndicales est réalisée et portée à la connaissance du chef d'entreprise par la FEC-FO sur proposition du secrétaire après avis des membres du bureau », ce qui implique l'obligation pour l'instance fédérale, liée par la proposition du syndicat FO groupe Randstad, de désigner le salarié sur lequel s'est porté le choix du syndicat, mais de plus, selon les termes mêmes de la « résolution interne du Comité Confédéral National sur les règles de fonctionnement » de la Confédération FO, en date du 25 juin 2009 à valeur statutaire, visée par le jugement attaqué, c'est « sur décision des syndicats ou des sections syndicales », que « les fédérations portent à la connaissance de l'employeur les DS centraux et/ou les DS dans les entreprises organisées régionalement ou sur plusieurs départements » ; qu'en retenant néanmoins qu'il résulte des dispositions statutaires que le rôle du syndicat FO Groupe Randstad se limite à participer à la phase préparatoire de la désignation sans que lui soit conféré un pouvoir de désignation, lequel n'est dévolu qu'à la fédération FEC-FO, le Tribunal d'instance a dénaturé les termes clairs et précis de l'article 27 des statuts du syndicat FO Groupe Randstad et, par omission, ceux également clairs et précis de la « résolution interne du Comité Confédéral National sur les règles de fonctionnement » de la Confédération FO, en date du 25 juin 2009, violant ce faisant l'article 1103 du Code civil ;

ALORS, ENFIN, et en tout état de cause, QUE le syndicat FO Groupe Randstad et la salariée exposante soutenaient que les mêmes règles statutaires s'appliquaient pour le retrait de la désignation d'un délégué syndical ou représentant syndical que pour sa désignation, ce qui interdisait à la fédération FEC-FO de révoquer un mandat syndical au sein de l'unité économique et sociale sans qu'une proposition en ce sens n'émane du syndicat FO Groupe Randstad et sans avoir procéder à la consultation de ce dernier ; qu'ils faisaient valoir que ces règles n'avaient pas été respectées par la Fédération lors du retrait de son mandat à Madame Y..., notifié par lettre du 11 avril 2018 adressée à l'employeur, de sorte qu'il n'avait eu d'autre choix que de rétablir Madame Y... dans son mandat antérieur de déléguée syndicale en exerçant ainsi le pouvoir qui lui était statutairement conféré par ses propres statuts et les règles statutaires confédérales ; qu'en se bornant à retenir de façon inopérante, à l'appui de sa décision d'annulation, que la « compétence de désignation » des délégués syndicaux restant dévolue statutairement à la fédération FEC-FO, c'est à tort que le syndicat FO Groupe Randstad a désigné Madame Y... en tant que déléguée syndicale d'établissement FO pour la région Ouest, sans rechercher si la lettre du syndicat FO Groupe Randstad en date du 11 avril 2018 n'emportait pas simplement confirmation de Madame Y... dans son mandat existant, le Tribunal d'instance a privé sa décision de base légale au regard de l'article L.2143-3 du Code du travail. Moyen produit au pourvoi n° U 18-19.340 par la SCP Lyon-Caen et Thiriez, avocat aux Conseils, pour le syndicat Force ouvrière Groupe Randstad France et Mme O....

Ce moyen reproche au jugement attaqué d'avoir rejeté la demande du syndicat FO Groupe Randstad France tendant à ce qu'il soit sursis à statuer dans l'attente du rendu de l'arbitrage de la Commission des conflits de la Confédération Force ouvrière, ou en cas de recours, jusqu'au rendu de la décision du Comité confédéral national de Force ouvrière et d'avoir annulé la désignation de Madame K... O... en qualité de déléguée syndicale d'établissement sur la région Ouest de l'unité économique et sociale TT Groupe Randstad France, effectuée le 11 avril 2018 par le syndicat FO Groupe Randstad, ainsi que d'avoir condamné ce syndicat à payer respectivement aux sociétés composant l'unité économique et sociale TT GROUPE Randstad et à la Fédération FEC-FO la somme de 500 euros en application de l'article 700 du Code de procédure civile ;

AUX MOTIFS QUE sur la demande d'annulation de la désignation par le syndicat FO GROUPE Randstad EN FRANCE de Madame O... en qualité de déléguée syndicale d'établissement sur la région Ouest en date du 11 avril 2018, aux termes de l'article L.2143-3 du code du travail, "chaque organisation syndicale représentative dans l'entreprise ou l'établissement d'au moins cinquante salariés, qui constitue une section syndicale, désigne parmi les candidats aux élections professionnelles qui ont recueilli à titre personnel et dans leur collège au moins 10 % des suffrages exprimés au premier tour des dernières élections au comité d'entreprise ou de la délégation unique du personnel ou des délégués du personnel, quel que soit le nombre de votants, dans les limites fixées à l'article L.2I43-J2, un ou plusieurs délégués syndicaux pour la représenter auprès de l'employeur..." ; qu'ayant recueilli 31,37 % des voix au premier tour des dernières élections au comité d'établissement de la Direction Ouest, Force ouvrière dispose de la possibilité de désigner jusqu'à 7 délégués syndicaux d'établissement, sur le fondement des dispositions de l'article L.2143-3 du code du travail et des dispositions conventionnelles applicables au sein de l'UES TT Groupe Randstad France ; que le 17 mars 2016, la FEC FO a procédé à la désignation au sein de la Direction Ouest de 6 délégués syndicaux d'établissement, dont madame K... O... ; que le 11 avril 2018, elle a procédé au retrait de la désignation de madame O... et le même jour, le syndicat Force ouvrière GROUPE Randstad EN FRANCE a informé la direction de l'UES TT Groupe Randstad France de la désignation de madame O... en qualité de déléguée syndicale d'établissement sur la Direction Ouest ; que de jurisprudence constante, seul le syndicat ayant désigné un délégué syndical est habilité à procéder à sa révocation et l'éventuel conflit entre une confédération-syndicale et une organisation syndicale qui lui est affiliée en matière de désignation d'un délégué syndical est résolu dès lors que l'un des syndicats justifie, soit des dispositions statutaires déterminant l'entité ayant qualité pour procéder à une telle désignation, soit de la décision prise par l'organisation syndicale d'affiliation pour régler le conflit conformément aux dispositions statutaires prévues à cet effet ; que ce n'est que subsidiairement que le critère chronologique, tenant à la validité de la première désignation, doit être appliqué (Soc., 29 oct. 2010, n° 09-67.696 et n° 09-68.207) ; que cette solution a été récemment étendue au cas de dépôts concurrents de listes de candidats lors des élections professionnelles par deux entités syndicales affiliées à la même confédération (Soc., 24 janvier 2018, n° 16-22.168) ; qu'il appartient donc aux syndicats de justifier devant le juge et de manière alternative, soit des statuts lorsque ceux-ci déterminent l'entité ayant qualité pour désigner les délégués syndicaux, soit de la décision rendue par l'organe des conflits ; qu'à défaut, le juge doit appliquer la règle chronologique de la première désignation ; qu'aussi, contrairement à ce que soutiennent Madame O... et le syndicat FO GROUPE Randstad EN FRANCE, ce raisonnement n'interdit pas au juge du contentieux électoral de statuer dès lors que l'un des deux éléments de justification susvisés lui est soumis ; qu'en revanche, de tels éléments s'imposent à lui, ce qui réduit par-conséquent sa marge d'appréciation et ce faisant, son intervention contentieuse ; que dès lors, la résolution d'un tel différend peut parfaitement avoir lieu devant le tribunal si l'un des syndicats justifie de statuts lui conférant le pouvoir de désignation susvisé, sans qu'il soit nécessaire de justifier d'une décision rendue par l'organe des conflits ; que ce n'est que dans l'hypothèse où les statuts conféreraient à chacune des entités un pouvoir concurrent de désignation des délégués qu'une décision de la Commission des conflits serait nécessaire ; que dans ce cas, le tribunal devrait effectivement surseoir à statuer le temps que l'organe susvisé règle le conflit ; que la jurisprudence invoquée n'étant applicable qu'à la condition qu'il existe un lien d'affiliation entre les différentes entités syndicales, il y a lieu dans un premier temps de déterminer si le syndicat FO Randstad est bien affilié à la fédération FEC-FO ;
. que l'adhésion ne peut être contestée au cas particulier ;

QUE, sur le sursis à statuer, l'article 378 du code de procédure civile dispose que "la décision de sursis suspend le cours de l'instance pour le temps ou jusqu'à la survenance de l'événement qu'elle détermine " ; que le juge apprécie souverainement l'opportunité du sursis à statuer ; qu'en l'espèce, il résulte notamment de l'article 27 des statuts du syndicat FO GROUPE Randstad EN FRANCE que "la désignation du DSC, des délégués syndicaux, représentants syndicaux au Comité Central d'Entreprise, aux Comités d'établissement et Représentants de Sections Syndicales est réalisée et portée à la connaissance du chef d'entreprise par la FEC-FO sur proposition du secrétaire après avis des membres du bureau " ; que la désignation des délégués et représentants syndicaux est donc réalisée par la fédération FEC-FO ; que cette dernière est également chargée de la porter à la connaissance de la direction de l'entreprise ; qu'au demeurant, cette règle ne fait que préciser celle qui émane du niveau confédéral, selon une résolution interne votée le 25 mars 2009 qui précise que "pour les entreprises comportant plusieurs établissements implantés dans plusieurs départements, la désignation (hors du niveau départemental) est assurée par la fédération après consultation des syndicats avec information aux unions départementales" ; qu'à cet égard, la jurisprudence a retenu que cette résolution confédérale à valeur statutaire s'impose à tout syndicat membre de la confédération (Soc. 8 décembre 2010, P n° 10-60.244) ; qu'il en résulte donc que les statuts ne confèrent pas au syndicat FO Randstad un tel pouvoir de désignation, dans la mesure où son rôle en la matière est restreint à la seule proposition de son secrétaire émise après avis des membres du bureau ; que le syndicat FO Randstad n'intervient donc qu'en amont de la désignation, ne participant de facto qu'à sa phase préparatoire ; que si le syndicat FO Randstad possède un rôle substantiel dans la procédure précédant la désignation proprement dite, cette faculté ne va pas jusqu'à lui octroyer la possibilité de désigner lui-même un délégué syndical ; qu'il n'est donc pas nécessaire de soumettre la solution du litige à une décision d'arbitrage confédérale ; qu'au surplus, de manière superfétatoire, selon les statuts de la FEC FO, le bureau fédéral soumet à la Commission des conflits confédérale tout différend pouvant intervenir entre un syndicat et la fédération ; qu'il revient à cette Commission de préparer la décision du Conseil national ou de la Commission administrative ; que le syndicat FO GROUPE Randstad EN FRANCE a saisi la Commission des conflits confédérale d'un recours en avril 2018 ; que d'une part, il ressort d'un courrier adressé par le secrétaire confédéral de la Commission à Madame B... le 16 avril 2018 que la Commission des conflits ne se réunira que si la commission exécutive confédérale le décide, après présentation du dossier -la date de réunion de la commission exécutive confédérale n'étant en outre pas encore arrêtée ; que la prise de décision par la Commission des conflits confédérale sur ce conflit apparaît dès lors aléatoire et peut dépasser un temps raisonnable ; que d'autre part, la prolongation du litige pour une durée indéterminée entraînerait des conséquences préjudiciables pour l'UES TT GROUPE Randstad que d'abord, les négociations relatives à l'institution d'un Comité Social et Economique sont paralysées en raison de la désignation par la confédération Force ouvrière de deux délégations distinctes, l'une pour la fédération FEC-FO et l'autre pour le syndicat FO Randstad, Mesdames Y... et O... étant membres de cette dernière ; qu'en outre, compte-tenu de l'existence de deux délégués syndicaux centraux concurrents au sein d'une même confédération, l'un sous l'étiquette de la fédération FEC-FO et l'autre sous l'étiquette du syndicat FO Randstad, l'entreprise ne peut allouer les moyens budgétaires au délégué syndical central alors même qu'un accord-cadre sur le droit syndical au sein de l'UES en date du 12 novembre 2012 l'y contraint ; qu'enfin, les statuts de la fédération ne sont pas opposables à l'employeur ; qu'il y a lieu en conséquence de rejeter la demande de sursis à statuer dans l'attente du rendu de l'arbitrage de la Commission des conflits de la Confédération ou, en cas de recours, jusqu'au rendu de la décision du Comité confédéral national ;

QUE, sur le fond, la compétence de désignation des délégués et représentants syndicaux restant dévolue statutairement à la fédération FEC-FO, c'est à tort que le syndicat GROUPE Randstad EN FRANCE a désigné madame K... O... en tant que représentante syndicale d'établissement FO pour la région Ouest ; qu'en conséquence, il y a lieu d'annuler cette désignation effectuée le 11 avril 2018 ;

ALORS D'UNE PART QU'en cas de différend entre syndicats affiliés à la même confédération concernant la capacité de désignation ou de révocation d'un représentant syndical dans une entreprise, il revient à la seule procédure prévue par les statuts auxquels les syndicats en litige ont adhéré, de régler ledit différend ; qu'en se prononçant lui-même sur la portée des différentes règles statutaires régissant l'exercice des prérogatives syndicales respectives des syndicats FO Groupe Randstad et FEC-FO au sein de l'unité économique et sociale TT Groupe Randstad, en refusant de surseoir à statuer dans l'attente du rendu de l'arbitrage de la commission des conflits confédérale FO qu'il constatait être déjà saisie du litige opposant les deux syndicats, le Tribunal d'instance a excédé ses pouvoirs et violé le principe de la liberté syndicale, ensemble les articles L.2131-2 du Code du travail et 378 du Code de procédure civile ;

ALORS, D'AUTRE PART, et en tout état de cause, QU'il est interdit au juge de dénaturer les documents de la cause ; que non seulement les statuts du syndicats FO Groupe Randstad, validés par les instances fédérales Force ouvrière, prévoient, en leur article 27, que « la désignation du DSC, des délégués syndicaux, représentants syndicaux au comité central d'entreprise, aux comités ou d'établissement et représentants de sections syndicales est réalisée et portée à la connaissance du chef d'entreprise par la FEC-FO sur proposition du secrétaire après avis des membres du bureau », ce qui implique l'obligation pour l'instance fédérale, liée par la proposition du syndicat FO groupe Randstad, de désigner le salarié sur lequel s'est porté le choix du syndicat, mais de plus, selon les termes mêmes de la « résolution interne du Comité Confédéral National sur les règles de fonctionnement » de la Confédération FO, en date du 25 juin 2009 à valeur statutaire, visée par le jugement attaqué, c'est « sur décision des syndicats ou des sections syndicales », que « les fédérations portent à la connaissance de l'employeur les DS centraux et/ou les DS dans les entreprises organisées régionalement ou sur plusieurs départements » ; qu'en retenant néanmoins qu'il résulte des dispositions statutaires que le rôle du syndicat FO Groupe Randstad se limite à participer à la phase préparatoire de la désignation sans que lui soit conféré un pouvoir de désignation, lequel n'est dévolu qu'à la fédération FEC-FO, le Tribunal d'instance a dénaturé les termes clairs et précis de l'article 27 des statuts du syndicat FO Groupe Randstad et, par omission, ceux également clairs et précis de la « résolution interne du Comité Confédéral National sur les règles de fonctionnement » de la Confédération FO, en date du 25 juin 2009, violant ce faisant l'article 1103 du Code civil ;

ALORS, ENFIN, et en tout état de cause, QUE le syndicat FO Groupe Randstad et la salariée exposante soutenaient que les mêmes règles statutaires s'appliquaient pour le retrait de la désignation d'un délégué syndical ou représentant syndical que pour sa désignation, ce qui interdisait à la fédération FEC-FO de révoquer un mandat syndical au sein de l'unité économique et sociale sans qu'une proposition en ce sens n'émane du syndicat FO Groupe Randstad et sans avoir procéder à la consultation de ce dernier ; qu'ils faisaient valoir que ces règles n'avaient pas été respectées par la Fédération lors du retrait de son mandat à Madame O..., notifié par lettre du 11 avril 2018 adressée à l'employeur, de sorte qu'il n'avait eu d'autre choix que de rétablir Madame O... dans son mandat antérieur de déléguée syndicale en exerçant ainsi le pouvoir qui lui était statutairement conféré par ses propres statuts et les règles statutaires confédérales ; qu'en se bornant à retenir de façon inopérante, à l'appui de sa décision d'annulation, que la « compétence de désignation » des délégués syndicaux restant dévolue statutairement à la fédération FEC-FO, c'est à tort que le syndicat FO Groupe Randstad a désigné Madame O... en tant que déléguée syndicale d'établissement FO pour la région Ouest, sans rechercher si la lettre du syndicat FO Groupe Randstad en date du 11 avril 2018 n'emportait pas simplement confirmation de Madame O... dans son mandat existant, le Tribunal d'instance a privé sa décision de base légale au regard de l'article L.2143-3 du Code du travail.


Synthèse
Formation : Chambre sociale
Numéro d'arrêt : 18-19339;18-19340
Date de la décision : 03/04/2019
Sens de l'arrêt : Rejet
Type d'affaire : Sociale

Références :

Décision attaquée : Tribunal d'instance de Nantes, 27 juin 2018


Publications
Proposition de citation : Cass. Soc., 03 avr. 2019, pourvoi n°18-19339;18-19340


Composition du Tribunal
Président : M. Huglo (conseiller doyen faisant fonction de président)
Avocat(s) : Me Haas, SCP Célice, Soltner, Texidor et Périer, SCP Lyon-Caen et Thiriez

Origine de la décision
Date de l'import : 15/09/2022
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CCASS:2019:18.19339
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