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03/04/2019 | FRANCE | N°18-16661

France | France, Cour de cassation, Chambre civile 1, 03 avril 2019, 18-16661


LA COUR DE CASSATION, PREMIÈRE CHAMBRE CIVILE, a rendu l'arrêt suivant :

Attendu, selon l'arrêt attaqué, que U... X... est décédé le [...] , laissant pour lui succéder, V... T..., son épouse, et leurs trois enfants, R..., Q... et K... ; que ce dernier est décédé le [...] , laissant pour héritiers, Mme N..., son épouse, et leurs trois enfants, G..., I... et A... (les consorts X...) ; que V... T... est décédée le [...] , laissant pour héritiers ses deux fils, R... et Q..., et ses trois petits enfants G..., I... et A... ; que M. R... X... a assigné les consorts X... en

ouverture des opérations de comptes, liquidation et partage de la commun...

LA COUR DE CASSATION, PREMIÈRE CHAMBRE CIVILE, a rendu l'arrêt suivant :

Attendu, selon l'arrêt attaqué, que U... X... est décédé le [...] , laissant pour lui succéder, V... T..., son épouse, et leurs trois enfants, R..., Q... et K... ; que ce dernier est décédé le [...] , laissant pour héritiers, Mme N..., son épouse, et leurs trois enfants, G..., I... et A... (les consorts X...) ; que V... T... est décédée le [...] , laissant pour héritiers ses deux fils, R... et Q..., et ses trois petits enfants G..., I... et A... ; que M. R... X... a assigné les consorts X... en ouverture des opérations de comptes, liquidation et partage de la communauté ayant existé entre ses père et mère, ainsi que de leurs successions ;

Sur le moyen unique, pris en sa troisième branche, ci-après annexé :

Attendu qu'il n'y a pas lieu de statuer par une décision spécialement motivée sur ce grief qui n'est manifestement pas de nature à entraîner la cassation ;

Sur le moyen unique, pris en sa première branche :

Attendu que les consorts X... font grief à l'arrêt d'accueillir la demande de M. R... X... au titre d'une créance de salaire différé à l'égard de la succession de U... X..., alors, selon le moyen, que la créance de salaire différé est une dette non pas du propriétaire du fonds rural mais de l'exploitant de sorte que le bénéficiaire d'un contrat de salaire différé est créancier de l'exploitant et exerce son droit au cours du règlement de la succession de celui-ci ; qu'en estimant néanmoins que la demande présentée par M. R... X... au titre d'une créance de salaire différé était recevable, après avoir relevé l'existence d'une attestation immobilière constatant la transmission des droits du fait du décès de l'exploitant et constaté que les héritiers avaient fait le choix, après un partage partiel, de rester dans l'indivision pour le surplus des biens, ce dont il résultait que le règlement de la succession de l'exploitant avait déjà été clôturé, la cour d'appel, qui n'a pas déduit les conséquences légales de ses propres constatations, a violé les articles L. 321-13 et L. 321-17 du code rural et de la pêche maritime ;

Mais attendu, qu'ayant souverainement estimé que la succession de U... X..., en raison du maintien prolongé de l'indivision entre les héritiers, n'avait pas été encore réglée, la cour d'appel en a déduit que M. R... X... était recevable à exercer son droit de créance sur le fondement de l'article L. 321-13 du code rural et de la pêche maritime ; que le moyen n'est pas fondé ;

Mais sur la deuxième branche du moyen :

Vu l'article L. 321-13 du code rural et de la pêche maritime ;

Attendu qu'il résulte de ce texte que le bénéfice du salaire différé est subordonné à la condition que celui qui y prétend rapporte la preuve de ce qu'il n'a reçu aucune contrepartie pour sa collaboration à l'exploitation ;

Attendu que, pour accueillir la demande de M. R... X..., l'arrêt se borne à relever qu'il est attesté par la fiche de reconstitution de carrière établie par la MSA que celui-ci a travaillé en tant que participant aux travaux à l'exploitation agricole de son père du 18 mai 1961 au 31 octobre 1962, puis du 1er mai 1964 au 31 décembre 1964 et, en tant qu'aide familial, du 1er janvier 1965 au 31 décembre 1969 ;

Qu'en se déterminant ainsi, sans constater l'absence corrélative de rémunération de M. R... X..., la cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard du texte susvisé ;

PAR CES MOTIFS :

CASSE ET ANNULE, mais seulement en ce qu'il dit que M. R... X... dispose d'une créance de salaire différé à l'égard de la succession de U... X... pour les périodes du 18 mai 1961 au 31 octobre 1962, du 1er mai 1964 au 31 décembre 1964 et du 1er janvier 1965 au 31 décembre 1969, l'arrêt rendu le 28 février 2018, entre les parties, par la cour d'appel d'Aix-en-Provence ; remet, en conséquence, sur ce point, la cause et les parties dans l'état où elles se trouvaient avant ledit arrêt et, pour être fait droit, les renvoie devant la cour d'appel d'Aix-en-Provence, autrement composée ;

Condamne M. R... X... aux dépens ;

Vu l'article 700 du code de procédure civile, rejette les demandes ;

Dit que sur les diligences du procureur général près la Cour de cassation, le présent arrêt sera transmis pour être transcrit en marge ou à la suite de l'arrêt partiellement cassé ;

Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, première chambre civile, et prononcé par le président en son audience publique du trois avril deux mille dix-neuf.

MOYEN ANNEXE au présent arrêt :

Moyen produit par la SCP Marc Lévis, avocat aux Conseils, pour MM. Q..., G..., I... et A... X... et Mme N...

Il est reproché à l'arrêt attaqué d'avoir dit que Monsieur R... X... est créancier de salaire différé à l'égard de la succession de U... X... pour la période allant du 18 mai l961 au 31 octobre 1962, pour la période du 1er mai 1964 au 31 décembre 1964 et pour la période allant du 1er janvier 1965 au 31 décembre 1969, d'avoir ordonné l'ouverture des opérations de compte, liquidation et partage de la succession des biens dépendant de la communauté des biens meubles et acquêts ayant existé entre U... X... et son épouse V... T..., de la succession de U... X... et de la succession de V... T... et d'avoir commis Maître J... C..., [...] pour procéder aux opérations de partage.

1°) AUX MOTIFS QUE « en application de l'article 815 du Code civil, nul ne peut être contraint à demeurer dans l'indivision et le partage peut toujours être provoqué, à moins qu'il n'y ait été sursis par jugement ou convention ; que le règlement d'une succession se déroule en plusieurs étapes ; que l'indivision n'est qu'une étape transitoire dans le règlement de la succession qui s'achève avec le partage du patrimoine ; qu'en l'espèce, il est produit aux débats un acte de notoriété en date du 19 septembre 1983 et une attestation immobilière datée du 20 janvier 1984 s'agissant de la succession de U... X... publiée au Bureau des hypothèques d'Aix-en-Provence le 27 février 1984 ; que cette attestation immobilière est un acte déclaratif constatant la transmission des droits du fait du décès et démontre que la succession de U... X... a été ouverte mais non encore réglée puisque que les héritiers ont fait le choix de rester dans l'indivision ; que l'action en partage étant un droit impératif et imprescriptible, Monsieur R... X... est fondé à solliciter l'ouverture des opérations de compte, liquidation et partage de la succession de U... X..., jusque-là jamais réglée ; qu'il y a donc lieu de réformer le jugement entrepris sur ce point et d'ordonner l'ouverture des opérations de compte, liquidation et partage de la succession de U... X... mais également de la succession de V... T..., eu égard aux désaccords existants entre les parties et aux diligences accomplies en vue d'un partage amiable non abouties » ;

ALORS QUE la créance de salaire différé est une dette non pas du propriétaire du fonds rural mais de l'exploitant de sorte que le bénéficiaire d'un contrat de salaire différé est créancier de l'exploitant et exerce son droit au cours du règlement de la succession de celui-ci ; qu'en estimant néanmoins que la demande présentée par M. R... X... au titre d'une créance de salaire différé était recevable, après avoir relevé l'existence d'une attestation immobilière constatant la transmission des droits du fait du décès de l'exploitant et constaté que les héritiers avaient fait le choix, après un partage partiel, de rester dans l'indivision pour le surplus des biens, ce dont il résultait que le règlement de la succession de l'exploitant avait déjà été clôturé, la cour d'appel, qui n'a pas déduit les conséquences légales de ses propres constatations, a violé les articles L. 321-13 et L. 321-17 du code rural et de la pêche maritime ;

2°) AUX MOTIFS QUE « il est attesté par la fiche de reconstitution de carrière établie par la MSA que Monsieur R... X... a travaillé en tant que participant aux travaux à l'exploitation agricole de son père U... X... pour la période allant du 18 mai 1961 au 31 octobre 1962, toujours en tant que participant aux travaux pour la période du 1er mai 1964 au 31 décembre 1964 et en tant qu'aide familial pour la période allant du 1er janvier 1965 au 31 décembre 1969. Si les consorts X... contestent la fin de cette dernière période estimant que Monsieur R... X... s'est arrêté juste après son mariage en février 1969, ils ne parviennent pas à le démontrer. Monsieur R... X... avance que cette créance s'évalue à hauteur de 92 620 euros sans pour autant avancer ni le moindre calcul ni indice ; qu'il y a donc lieu de réformer le jugement entrepris sur ce point et de retenir le principe même de la créance sur les dites périodes et de charger le notaire désigné aux opérations de compte, liquidation et partage d'évaluer cette créance de salaire différée » ;

ALORS QUE les descendants d'un exploitant agricole qui, âgés de plus de dix-huit ans, participent directement et effectivement à l'exploitation, sans être associés aux bénéfices ni aux pertes et qui ne reçoivent pas de salaire en argent en contrepartie de leur collaboration, sont réputés légalement bénéficiaires d'un contrat de travail à salaire différé ; qu'en retenant le principe d'une créance de salaire différé en faveur de M. R... X... sans constater que ce dernier avait rapporté la preuve de l'absence de contrepartie à sa collaboration, la cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard de l'article L. 321-13 du code rural et de la pêche maritime ;

3°) AUX MOTIFS QUE « Monsieur R... X... avance que cette créance s'évalue à hauteur de 92620 euros sans pour autant avancer ni le moindre calcul ni indice ; qu'il y a donc lieu de réformer le jugement entrepris sur ce point et de retenir le principe même de la créance sur les dites périodes et de charger le notaire désigné aux opérations de compte, liquidation et partage d'évaluer cette créance de salaire différée » ;

ALORS QUE en chargeant le notaire désigné aux opérations de compte, liquidation et partage d'évaluer la créance de salaire différé réclamée par M. R... X..., la cour d'appel qui s'est dessaisie et a délégué ses pouvoirs au notaire liquidateur, quand il lui incombait de trancher elle-même la contestation sur l'existence et le montant de la créance de salaire différé litigieuse, a méconnu son office et a violé l'article 4 du code civil.


Synthèse
Formation : Chambre civile 1
Numéro d'arrêt : 18-16661
Date de la décision : 03/04/2019
Sens de l'arrêt : Cassation partielle
Type d'affaire : Civile

Références :

Décision attaquée : Cour d'appel d'Aix-en-Provence, 28 février 2018


Publications
Proposition de citation : Cass. Civ. 1re, 03 avr. 2019, pourvoi n°18-16661


Composition du Tribunal
Président : Mme Batut (président)
Avocat(s) : SCP Garreau, Bauer-Violas et Feschotte-Desbois, SCP Marc Lévis

Origine de la décision
Date de l'import : 15/09/2022
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CCASS:2019:18.16661
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