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20/03/2019 | FRANCE | N°17-85246

France | France, Cour de cassation, Chambre criminelle, 20 mars 2019, 17-85246


LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE CRIMINELLE, a rendu l'arrêt suivant :

N° K 17-85.246 FS-P+B+I

N° 318

VD1
20 MARS 2019

REJET

M. SOULARD président,

R É P U B L I Q U E F R A N Ç A I S E
________________________________________

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS
_________________________

LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE CRIMINELLE, en son audience publique tenue au Palais de Justice à PARIS, a rendu l'arrêt suivant :

Non-admission et rejet sur les pourvois formés par M. U... B..., M. R... B..., Mme E... O..., la société Nivern

aise de recyclage, Me Q... S... en sa qualité de liquidateur judiciaire de M. R... B...,
Me Y..., en sa qualité de liquida...

LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE CRIMINELLE, a rendu l'arrêt suivant :

N° K 17-85.246 FS-P+B+I

N° 318

VD1
20 MARS 2019

REJET

M. SOULARD président,

R É P U B L I Q U E F R A N Ç A I S E
________________________________________

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS
_________________________

LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE CRIMINELLE, en son audience publique tenue au Palais de Justice à PARIS, a rendu l'arrêt suivant :

Non-admission et rejet sur les pourvois formés par M. U... B..., M. R... B..., Mme E... O..., la société Nivernaise de recyclage, Me Q... S... en sa qualité de liquidateur judiciaire de M. R... B...,
Me Y..., en sa qualité de liquidateur judiciaire de la société Nivernaise de recyclage, contre l'arrêt de la cour d'appel de Bourges, en date du 27 juillet 2017, qui a condamné le premier, pour complicité de recel, à deux ans d'emprisonnement avec sursis et 5 000 euros d'amende, le deuxième, pour recel, à deux ans d'emprisonnement avec sursis et 5 000 euros d'amende, la troisième, pour abus de confiance, à dix-huit mois d'emprisonnement et 1 500 euros d'amende, la quatrième, pour recel, à 10 000 euros d'amende, et a prononcé sur les intérêts civils ;

La COUR, statuant après débats en l'audience publique du 30 janvier 2019 où étaient présents : M. Soulard, président, Mme Zerbib, conseiller rapporteur, Mme de la Lance, M. Germain, Mme Planchon, MM. Larmanjat, d'Huy, Wyon, conseillers de la chambre, Mmes Chauchis, Pichon, M. Ascensi, Mme Fouquet, conseillers référendaires ;

Avocat général : M. Bonnet ;

Greffier de chambre : M. Bétron ;

Sur le rapport de Mme le conseiller ZERBIB, les observations de la société civile professionnelle SPINOSI et SUREAU, de la société civile professionnelle LYON-CAEN et THIRIEZ, de la société civile professionnelle CÉLICE, SOLTNER, TEXIDOR et PÉRIER, de la société civile professionnelle BARADUC, DUHAMEL et RAMEIX, avocats en la Cour, et les conclusions de M. l'avocat général BONNET ;

Joignant les pourvois en raison de la connexité ;

Vu les mémoires produits, en demande et en défense ;

Sur les pourvois de MM. U... B..., R... B..., la société Nivernaise de recyclage, Me Q... S... en sa qualité de liquidateur judiciaire de M. R... B..., Me Y..., en sa qualité de liquidateur judiciaire de la société Nivernaise de recyclage :

Sur le premier moyen de cassation :

Sur le second moyen de cassation :

Les moyens étant réunis :

Vu l'article 567-1-1 du code de procédure pénale ;

Attendu que les moyens ne sont pas de nature à être admis ;

Sur le pourvoi de Mme O... ;

Sur le premier moyen de cassation pris de la violation des articles 314-1 du code pénal, 2, 388, 512, 591 et 593 du code de procédure pénale :

"en ce que l'arrêt attaqué, infirmant partiellement le jugement entrepris, a déclaré recevable l'action civile exercée par la société Harsco Minerals France devenue Harsco Metals et Minerals France à l'encontre de l'ensemble des prévenus condamnés pénalement ;

"aux motifs que c'est également aux termes d'une exacte appréciation que le tribunal a déclaré la constitution de partie civile de la société Aperam Alloys Imphy recevable et déclaré les personnes condamnées responsables à hauteur de 80% du préjudice subi par la société Aperam Alloy Imphy ; qu'il n'y a pas lieu de réduire davantage encore les prétentions à réparation des parties civiles, dans la mesure où les préjudices invoqués sont principalement imputables aux infractions pénales commises intentionnellement par les consorts B... ; que s'agissant de la société Harsco, la cour relève que cette dernière a réitéré devant la juridiction de jugement sa constitution de partie civile à l'encontre de l'ensemble des prévenus renvoyés devant le tribunal, ses conclusions ayant régulièrement été transmises à l'ensemble des parties concernées ; que c'est à bon droit que la société Harsco soutient au visa des dispositions des articles 87 et 418 du code de procédure pénale, que la désignation des victimes dans l'acte de prévention n'est pas limitative et ne lie pas la juridiction de jugement ; que la chambre criminelle considère en effet que la décision de la juridiction d'instruction statuant sur la recevabilité d'une constitution de partie civile n'acquiert aucune autorité de chose jugée quant à l'exercice de l'action civile devant la juridiction de jugement ; que le tribunal ne pouvait donc pas déclarer irrecevable la constitution de partie civile de la société Harsco à l'encontre de MM. R... B..., U... B..., Mme E... O... et la société nivernaise de recyclage, au seul motif que cette société n'était expressément visée dans la prévention comme victime des agissements de ces derniers ; qu'en conséquence, la constitution de partie civile de la société Harsco sera déclarée recevable dans son intégralité, à l'encontre de l'ensemble des personnes condamnées ; qu'au vu de ces éléments, la cour infirmera le jugement déféré en ces seules dispositions ayant déclaré irrecevable la constitution de partie civile de la société Harsco à l'encontre de MM. R... B..., U... B..., Mme O... et la société nivernaise de recyclage ; que la cour confirmera pour le surplus l'ensemble des dispositions civiles du jugement déféré, y compris le renvoi sur intérêts civils ;

"1°) alors que les juges ne peuvent statuer que sur les faits dont ils sont saisis ; qu'en l'espèce, il résulte des termes de l'ordonnance de renvoi que Mme O... était poursuivie pour des faits d'abus de confiance au préjudice de la société Aperam Alloys Imphy, pour avoir détourné des métaux qui lui avaient été remis afin de les transporter entre différents sites de cette société ; qu'il résulte de l'ordonnance entreprise que le magistrat instructeur a estimé qu'aucun préjudice ne pouvait être invoqué par la société Harsco Metals et Minerals France, son employeur, lequel ne pouvait prétendre avoir subi un préjudice que concernant les abus de confiance d'un autre salarié, M. I..., lequel avait détourné des résidus de métaux, que son employeur était chargé de gérer pour le compte d'Aperam Alloys Imphy ; que la société Harsco Metals et Minerals France qui n'a pu que constater que l'ordonnance de renvoi ne la visait pas comme victime des faits commis par Mme O... et qui n'a pas interjeté appel de l'ordonnance entreprise, afin de contester les limites de l'ordonnance de renvoi, ne pouvait plus prétendre avoir subi un préjudice concernant des faits dont les juges du fond n'étaient pas saisis ; qu'en estimant recevable l'action civile de la société Harsco Metals et Minerals à l'encontre de Mme O..., la cour d'appel a méconnu les articles 388 et 512 du code de procédure pénale ;

"2°) alors que les juges ne peuvent statuer que sur les faits dont ils sont saisis ; qu'en déclarant recevable l'action civile de la société Harsco Metals et Minerals France, l'employeur de Mme O..., aux seuls motifs que peuvent se constituer partie civile devant les juges du fond les personnes qui n'ont pas été visées comme victimes par l'ordonnance de renvoi, sans avoir recherché s'il résultait des faits visés dans l'ordonnance de renvoi que la société Harsco Metals et Minerals France pouvait être considérée comme la détentrice des métaux détournés au moment de leur remise à Mme O..., comme tel était le cas des détournements de métaux commis par M. I... qui avaient été remis à la société Harsco Metals et Minerals France avant d'être détournés par ce salarié, la cour d'appel a méconnu les articles 388 et 512 du code de procédure pénale ;

"3°) alors qu'à tout le moins, l'abus de confiance ne peut causer de préjudice personnel et direct qu'au propriétaire des biens ou à son détenteur ; qu'en se contentant de constater que le tribunal ne pouvait déclarer la constitution de partie civile de la société Harsco Metals et Minerals France irrecevable, au seul motif que cette société n'était pas expressément visée comme victime dans l'ordonnance de renvoi, sans dire en quoi cette société avait subi un préjudice personnel résultant directement des faits constitutifs des abus de confiance commis par Mme O..., la cour d'appel a privé sa décision de base légale" ;

Attendu qu'il résulte de l'arrêt attaqué et des pièces de procédure que la société Harsco a conclu avec la société Aperam une convention par laquelle elle s'est engagée à acheminer en différents sites de cette société des déchets de métaux de prix appartenant à cette dernière ; que Mme O..., chauffeur salarié de la société Harsco, en charge de ces convoyages, a déchargé ces marchandises, environ une fois par semaine sur une période de plus de deux ans, sur le site de la société Nivernaise de recyclage, à laquelle elle les a vendues ; que le tribunal a déclaré irrecevable la constitution de partie civile formalisée à l'audience par la société Harsco ;

Attendu que, pour infirmer le jugement en ce qu'il a retenu cette irrecevabilité de constitution de partie civile au motif que la société Harsco n'était pas expressément visée dans l'ordonnance de renvoi comme victime de l'abus de confiance commis par son chauffeur salarié, l'arrêt énonce notamment que la désignation des victimes dans la prévention, non limitative, ne lie pas la juridiction de jugement et que la société Harsco justifie d'un intérêt à agir d'ordre pécuniaire ;

Attendu qu'en statuant ainsi, et dès lors que l'abus de confiance peut préjudicier et ouvrir droit à réparation, non seulement aux propriétaires, mais encore aux détenteurs et possesseurs des biens détournés, victimes d'un préjudice résultant directement de l'ensemble des éléments constitutifs de l'infraction, la cour d'appel, qui a relevé l'existence d'une convention par laquelle la société, partie civile, était détentrice précaire, le temps de leur transport, des chutes de métaux, dont elle a été privée, et qu'elle a déclaré avoir remboursé à sa cliente, et qui n'avait pas, à ce stade, à analyser davantage la nature du préjudice invoqué découlant de la poursuite, a justifié sa décision ;

D'où il suit que le moyen doit être écarté ;

Sur le second moyen de cassation pris de la violation des articles 2 du code de procédure pénale, 1382, devenu 1240, du code civil et 593 du code de procédure pénale ;

"aux motifs qu'au vu de ces éléments, la cour infirmera le jugement déféré en ces seules dispositions ayant déclaré irrecevable la constitution de partie civile de la société Harsco à l'encontre de MM. R... B..., U... B..., Mme O... et la société Nivernaise de recyclage ; que la cour confirmera pour le surplus l'ensemble des dispositions civiles du jugement déféré, y compris le renvoi sur intérêts civils ;

"alors que, lorsque plusieurs fautes ont concouru à la production du dommage, la responsabilité de leurs auteurs se trouve engagée dans une mesure dont l'appréciation appartient souverainement aux juges du fond ; qu'en ne recherchant pas si la société Harsco n'avait pas commis une faute ayant contribué à son préjudice en ne s'assurant pas de la bonne exécution des transports, une telle faute ayant déjà été retenue à l'encontre de la société Aperam, la cour d'appel n'a pas justifié sa décision" ;

Attendu que la cour d'appel a accueilli la constitution de partie civile de la société Harsco sans retenir à charge de cette dernière, en l'état du dossier qui lui était soumis, une faute ayant concouru à la production du dommage tirée de ce qu'elle n'aurait pas suffisamment veillé à la sécurité du transport des déchets de métaux exécuté par sa salariée et qui justifierait un partage de responsabilité ;

Attendu que le moyen, prématuré, est inopérant dès lors que les juges n'ont pas encore statué sur la demande d'évaluation du préjudice de la société Harsco ;

Et attendu que l'arrêt est régulier en la forme ;

Par ces motifs :

Sur les pourvois de MM. U... B..., R... B..., la société Nivernaise de recyclage, Me Q... S... en sa qualité de liquidateur judiciaire de M. R... B..., Me Y..., en sa qualité de liquidateur judiciaire de la société Nivernaise de recyclage :

Les DECLARE non admis ;

Sur le pourvoi de Mme O... ;

Le REJETTE ;

FIXE à 2 500 euros la somme globale que MM. U... B..., R... B..., la société Nivernaise de Recyclage, Me Q... S... en sa qualité de liquidateur judiciaire de M. R... B..., Me Y..., en sa qualité de liquidateur judiciaire de la Société Nivernaise de Recyclage, devront payer, à la société Aperam Alloys Imphy, anciennement Arcelor Mittal, en application de l'article 618-1 du code de procédure pénale ;

FIXE à 2 500 euros la somme que Mme O... devra payer à la société Aperam Alloys Imphy, anciennement Arcelor Mittal, en application de l'article 618-1 du code de procédure pénale :

Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, chambre criminelle, et prononcé par le président le vingt mars deux mille dix-neuf ;

En foi de quoi le présent arrêt a été signé par le président, le rapporteur et le greffier de chambre.


Synthèse
Formation : Chambre criminelle
Numéro d'arrêt : 17-85246
Date de la décision : 20/03/2019
Sens de l'arrêt : Non-admission et rejet
Type d'affaire : Criminelle

Analyses

ACTION CIVILE - Recevabilité - Exclusion - Cas - Existence d'une relation contractuelle (non)

ABUS DE CONFIANCE - Action civile - Recevabilité - Conditions - Préjudice - Préjudice direct - Exclusion - Cas - Existence d'une relation contractuelle (non)

L'abus de confiance peut ouvrir droit à réparation, non seulement aux propriétaires, mais encore aux détenteurs et possesseurs des biens détournés, victimes d'un préjudice résultant de l'ensemble des éléments constitutifs de l'infraction. Justifie en conséquence sa décision la cour d'appel qui déclare recevable la constitution de partie civile d'une société de transport liée à une autre société par une convention d'acheminement de marchandises appartenant à cette dernière, dont elle a la détention précaire pendant le temps du transport, et qui sont détournées au cours de leur convoyage par son chauffeur salarié


Références :

article 2 du code de procédure pénale

Décision attaquée : Cour d'appel de Bourges, 27 juillet 2017

Sur l'existence d'une relation contractuelle insuffisante à exclure la recevabilité d'une constitution de partie civile, à rapprocher : Crim., 21 novembre 2018, pourvoi n° 17-81096, Bull. crim. 2018, n° 193 (1) (rejet)Sur le préjudice de la société d'assurance du fait de l'abus de confiance de son mandataire, à rapprocher :Crim., 11 décembre 2013, pourvoi n° 12-86624, Bull. crim. 2013, n° 251 (cassation partielle)

arrêt cité


Publications
Proposition de citation : Cass. Crim., 20 mar. 2019, pourvoi n°17-85246, Bull. crim.Bull. crim. 2019, n° 56
Publié au bulletin des arrêts de la chambre criminelle Bull. crim. 2019, n° 56

Composition du Tribunal
Président : M. Soulard
Avocat(s) : SCP Spinosi et Sureau, SCP Lyon-Caen et Thiriez, SCP Célice, Soltner, Texidor et Périer, SCP Baraduc, Duhamel et Rameix

Origine de la décision
Date de l'import : 24/03/2020
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CCASS:2019:17.85246
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