La jurisprudence francophone des Cours suprêmes


recherche avancée

14/03/2019 | FRANCE | N°17-31761

France | France, Cour de cassation, Chambre civile 2, 14 mars 2019, 17-31761


LA COUR DE CASSATION, DEUXIÈME CHAMBRE CIVILE, a rendu l'arrêt suivant :

Sur le moyen unique :

Attendu, selon l'arrêt attaqué (Toulouse, 2 novembre 2017), qu'à la suite d'un contrôle de son activité, la SELAS Cedibio Unilabs (la société) a reçu notification par la caisse primaire d'assurance maladie de la Haute-Garonne (la caisse), de six indus au titre de la facturation irrégulière d'actes de biologie au cours de la période du 29 novembre 2009 au 28 février 2013 ; que la société a saisi d'un recours une juridiction de sécurité sociale ;

Attendu que la s

ociété fait grief à l'arrêt de la condamner à rembourser à la caisse les sommes ind...

LA COUR DE CASSATION, DEUXIÈME CHAMBRE CIVILE, a rendu l'arrêt suivant :

Sur le moyen unique :

Attendu, selon l'arrêt attaqué (Toulouse, 2 novembre 2017), qu'à la suite d'un contrôle de son activité, la SELAS Cedibio Unilabs (la société) a reçu notification par la caisse primaire d'assurance maladie de la Haute-Garonne (la caisse), de six indus au titre de la facturation irrégulière d'actes de biologie au cours de la période du 29 novembre 2009 au 28 février 2013 ; que la société a saisi d'un recours une juridiction de sécurité sociale ;

Attendu que la société fait grief à l'arrêt de la condamner à rembourser à la caisse les sommes indûment perçues, alors, selon le moyen :

1°/ que l'annexe n° 1 de la Charte du contrôle de l'activité des professionnels de santé par l'assurance maladie autorise expressément, pour l'activité objet d'un contrôle, qui n'est ni frauduleuse ni abusive, une "interprétation (...) extensive" de la nomenclature concernée, autrement dit, par définition, une interprétation s'affranchissant des termes exprès de la liste ; qu'en l'espèce, les actes de biologie délocalisée visés par les contrôles litigieux et accomplis dans des établissements de santé étaient, ainsi que l'a admis l'arrêt attaqué, nécessaires et urgents et le principe de leur réalisation dans des établissements de santé, pour des motifs d'urgence, d'ores et déjà reconnu par le législateur ; que, pour déclarer cependant pareilles prestations non facturables à l'assurance maladie, l'arrêt attaqué s'est interdit toute interprétation extensive de la nomenclature des actes de biologie médicale au prétexte que lesdites prestations n'y étaient pas inscrites ; qu'en statuant ainsi, la cour d'appel a violé l'article L. 162-1-7 du code de la sécurité sociale et, par refus d'application, l'annexe n° 1 de la Charte du contrôle de l'activité des professionnels de santé par l'assurance maladie ;

2°/ que l'article L. 6211-18 du code de la santé publique issu de l'ordonnance n° 2010-49 du 13 janvier 2010 habilite sans restriction, en cas d'urgence, "un établissement de santé", et nécessairement son propre personnel, à réaliser des actes de biologie délocalisée, tout en prévoyant par ailleurs de manière distincte un texte d'application concernant les autres lieux de réalisation de ces actes ainsi que les catégories de professionnels de santé habilités à intervenir dans ce cadre ; qu'en affirmant que les actes urgents de biologie délocalisée visés par les contrôles litigieux concernant la période de novembre 2009 à février 2013, pratiqués dans des établissements de santé, étaient postérieurs à la mise en oeuvre effective des dispositions distinctes précitées subordonnées à l'intervention d'un texte d'application, en l'occurrence publié en 2014, la cour d'appel a violé l'article L. 6211-18 du code de la santé publique ;

3°/ que, en cause d'appel, l'exposante faisait valoir que "l'article L. 6211-18 du code de la santé publique prévoyait déjà que les établissements de santé étaient habilités à réaliser des actes de biologie délocalisée", qu'il aurait été "aberrant" que ceux-ci fussent "habilités à pratiquer cette procédure mais" pas "(leur) personnel" et d'"attendre plus de quatre ans" pour que l'arrêté d'application du 13 août 2014 confirmât ce que le texte précité "prévoyait déjà, soit que les établissements de santé et leur personnel (étaient) parfaitement autorisés à effectuer des actes de biologie médicale décentralisée" ; qu'elle soulignait ainsi explicitement qu'avant l'arrêté publié en 2014, l'article L. 6211-18 du code de la santé publique était applicable s'agissant des établissements de santé et de leur personnel ; qu'en affirmant cependant que l'exposante reconnaissait que ce texte n'était pas applicable à défaut de publication de l'arrêté, la cour d'appel a dénaturé le contenu clair et précis de ses écritures en violation de l'article 4 du code de procédure civile ;

Mais attendu qu'ayant rappelé que l'article L. 162-1-7 du code de la sécurité sociale subordonne la prise en charge de tout acte ou prestation par l'assurance maladie réalisé par un professionnel de santé, à son inscription sur une liste, l'arrêt constate que les actes de biologie délocalisée n'étaient pas inscrits sur la nomenclature des actes de biologie médicale ;

Qu'en l'état de ces seules énonciations et constatations, la cour d'appel en a déduit, à bon droit, et abstraction faite des autres motifs surabondants critiqués par les deuxième et troisième branches du moyen, que les actes de biologie litigieux ne pouvaient être pris en charge par l'assurance maladie, de sorte que l'action en remboursement de la caisse était fondée ;

D'où il suit que le moyen n'est pas fondé ;

PAR CES MOTIFS :

REJETTE le pourvoi.

Condamne la SELAS Cedibio-Unilabs aux dépens ;

Vu l'article 700 du code de procédure civile, rejette la demande de la SELAS Cedibio-Unilabs et la condamne à payer à la caisse primaire d'assurance maladie de la Haute-Garonne la somme de 3 000 euros ;

Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, deuxième chambre civile, et prononcé par le président en son audience publique du quatorze mars deux mille dix-neuf.

MOYEN ANNEXE au présent arrêt :

.

Moyen produit par la SCP Thouvenin, Coudray et Grévy, avocat aux Conseils, pour la société Cedibio-Unilabs.

Le moyen reproche à l'arrêt attaqué d'avoir confirmé six décisions de la commission de recours amiable d'un organisme social (la CPAM de la Haute-Garonne) et d'avoir par conséquent condamné un professionnel de santé (la société Cedibio Unilabs, l'exposante) à payer la somme de 392 781,73 € au titre d'indus correspondant à la facturation d'actes de biologie médicale ;

AUX MOTIFS QUE, en application de l'article L. 133-4 du code de la sécurité sociale, la sécurité sociale était en droit de réclamer restitution à un professionnel de prestations remboursées dès lors que les règles de tarification n'avaient pas été scrupuleusement respectées, ou que la prise en charge par l'organisme social ne devait pas intervenir ; que cette action en restitution n'était pas subordonnée à la preuve de la mauvaise foi ou de la fraude commise par le professionnel de santé ; que l'article L. 6211-18 du code de la santé publique permettait la réalisation d'actes de biologie médicale en dehors du laboratoire, notamment pour des motifs liés à l'urgence, dans un établissement de santé ; que dans sa rédaction applicable à l'espèce, ce texte disposait : « La phase analytique d'un examen de biologie médicale ne (pouvait) être réalisée en dehors d'un laboratoire de biologie médicale qu'au cas où elle (était) rendue nécessaire par une décision thérapeutique urgente. Dans ce cas, la phase analytique (était) réalisée : (
) 2° Soit, pour des motifs liés à l'urgence, dans des lieux déterminés par décret en Conseil d'Etat (
) Les catégories de professionnels de santé habilités à réaliser la phase analytique en dehors d'un laboratoire d'analyse de biologie médicale (étaient) fixées par arrêté du ministre chargé de la santé » ; que la société Cedibio reconnaissait que ce texte, créé par l'ordonnance du 13 janvier 2010, n'était pas applicable au jour du contrôle à défaut de publication de l'arrêté d'application qui n'avait été publié que le 13 août 2014 et qui précisait notamment les catégories de professionnels de santé habilités à réaliser les prélèvements en vue d'un examen de biologie médicale, la phase analytique des examens de biologie et les lieux de réalisation ; que dès lors, même si l'ordonnance de 2010 reconnaissait le principe de la biologie délocalisée, il n'appartenait pas à la société Cedibio d'anticiper sur sa mise en oeuvre qui n'avait été effective qu'en 2014, soit postérieurement aux actes incriminés ; que la prise en charge par la CPAM d'actes de biologie médicale délocalisée dont il n'était contesté ni la nécessité, ni l'urgence ni la qualité, n'était pas liée au principe de la continuité des soins ; que la société Cedibio soutenait également qu'il appartenait à la Caisse de procéder à une interprétation extensive de la nomenclature, considérant d'une part la publication du texte adoptant le principe de la biologie délocalisée, d'autre part l'urgence de ces actes sur des nouveau-nés, et enfin l'absence de fraude ou d'abus ; que l'article L. 162-1-7 du code de la sécurité sociale subordonnait la prise en charge de tout acte ou prestation par l'assurance maladie réalisé par un professionnel de santé, à son inscription sur une liste, la nomenclature des actes de biologie médicale (article L. 162-1-7 du code de la sécurité sociale) ; que les actes de biologie délocalisée n'étaient pas inscrits sur cette liste ; que l'obligation d'interprétation visée à l'annexe 1 de la Charte de contrôle de l'activité des professionnels de santé, invoquée par l'exposante, ne pouvait trouver à s'appliquer en l'espèce au regard des termes clairs et précis de la nomenclature ; qu'en effet, s'agissant d'un cas non prévu, il n'était pas susceptible d'interprétation (arrêt attaqué, p. 6, in fine, et p. 7) ;

1° ALORS QUE l'annexe n° 1 de la Charte du contrôle de l'activité des professionnels de santé par l'Assurance maladie autorise expressément, pour l'activité objet d'un contrôle, qui n'est ni frauduleuse ni abusive, une « interprétation (
) extensive » de la nomenclature concernée, autrement dit, par définition, une interprétation s'affranchissant des termes exprès de la liste ; qu'en l'espèce, les actes de biologie délocalisée visés par les contrôles litigieux et accomplis dans des établissements de santé étaient, ainsi que l'a admis l'arrêt attaqué, nécessaires et urgents et le principe de leur réalisation dans des établissements de santé, pour des motifs d'urgence, d'ores et déjà reconnu par le législateur ; que, pour déclarer cependant pareilles prestations non facturables à l'assurance maladie, l'arrêt attaqué s'est interdit toute interprétation extensive de la nomenclature des actes de biologie médicale au prétexte que lesdites prestations n'y étaient pas inscrites ; qu'en statuant ainsi, la cour d'appel a violé l'article L. 162-1-7 du code de la sécurité sociale et, par refus d'application, l'annexe n° 1 de la Charte du contrôle de l'activité des professionnels de santé par l'Assurance maladie ;

2° ALORS QUE l'article L. 6211-18 du code de la santé publique issu de l'ordonnance n° 2010-49 du 13 janvier 2010 habilite sans restriction, en cas d'urgence, « un établissement de santé », et nécessairement son propre personnel, à réaliser des actes de biologie délocalisée, tout en prévoyant par ailleurs de manière distincte un texte d'application concernant les autres lieux de réalisation de ces actes ainsi que les catégories de professionnels de santé habilités à intervenir dans ce cadre ; qu'en affirmant que les actes urgents de biologie délocalisée visés par les contrôles litigieux concernant la période de novembre 2009 à février 2013, pratiqués dans des établissements de santé, étaient postérieurs à la mise en oeuvre effective des dispositions distinctes précitées subordonnées à l'intervention d'un texte d'application, en l'occurrence publié en 2014, la cour d'appel a violé l'article L. 6211-18 du code de la santé publique ;

3° ALORS QUE, en cause d'appel (v. ses concl. d'appel de mai 2017, p. 11, avant-dernier alinéa, et p. 12, 2ème et 9ème alinéas, prod.), l'exposante faisait valoir que « l'article L. 6211-18 (du code de la santé publique) prévoyait déjà que les établissements de santé étaient habilités à réaliser des actes de biologie délocalisée », qu'il aurait été « aberrant » que ceux-ci fussent « habilités à pratiquer cette procédure mais » pas « (leur) personnel » et d'« attendre plus de quatre ans » pour que l'arrêté d'application du 13 août 2014 confirmât ce que le texte précité « prévoyait déjà, soit que les établissements de santé et leur personnel (étaient) parfaitement autorisés à effectuer des actes de biologie médicale décentralisée » ; qu'elle soulignait ainsi explicitement qu'avant l'arrêté publié en 2014, l'article L. 6211-18 du code de la santé publique était applicable s'agissant des établissements de santé et de leur personnel ; qu'en affirmant cependant que l'exposante reconnaissait que ce texte n'était pas applicable à défaut de publication de l'arrêté, la cour d'appel a dénaturé le contenu clair et précis de ses écritures en violation de l'article 4 du code de procédure civile.


Synthèse
Formation : Chambre civile 2
Numéro d'arrêt : 17-31761
Date de la décision : 14/03/2019
Sens de l'arrêt : Rejet
Type d'affaire : Civile

Analyses

SECURITE SOCIALE, ASSURANCES SOCIALES - Prestations (dispositions générales) - Prise en charge - Conditions - Inscription sur une liste - Nécessité

SECURITE SOCIALE, ASSURANCES SOCIALES - Prestations (dispositions générales) - Prestations sanitaires - Analyses et examens de laboratoire - Remboursement - Conditions - Inscription à la nomenclature - Inscription à la nomenclature des actes de biologie médicale - Exclusion - Cas - Actes de biologie délocalisée

L'article L. 162-1-7 du code de la sécurité sociale subordonne la prise en charge de tout acte ou prestation par l'assurance maladie réalisé par un professionnel de santé, à son inscription sur une liste. Par suite, c'est à bon droit qu'ayant constaté que les actes de biologie dite délocalisée n'étaient pas inscrits sur la nomenclature des actes de biologie médicale, la cour d'appel en déduit que ces actes ne peuvent être pris en charge par l'assurance maladie


Références :

article L. 162-1-7 du code de la sécurité sociale

Décision attaquée : Cour d'appel de Toulouse, 02 novembre 2017


Publications
Proposition de citation : Cass. Civ. 2e, 14 mar. 2019, pourvoi n°17-31761, Bull. civ.
Publié au bulletin des arrêts des chambres civiles

Composition du Tribunal
Président : Mme Flise
Avocat(s) : SCP Thouvenin, Coudray et Grévy, SCP Foussard et Froger

Origine de la décision
Date de l'import : 13/07/2021
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CCASS:2019:17.31761
Association des cours judiciaires suprmes francophones
Organisation internationale de la francophonie
Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie. Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie.
Logo iall 2012 website award