LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE SOCIALE, a rendu l'arrêt suivant :
Sur le moyen unique, ci-après annexé :
Attendu que sous le couvert de griefs non fondés de violation de la loi, de manque de base légale, de méconnaissance de l'objet du litige et de violation du principe de la contradiction, le moyen ne tend qu'à remettre en cause l'appréciation souveraine de la cour d'appel qui a constaté que l'employeur n'avait pas tenté d'aménager les postes disponibles au sein du groupe conformément aux préconisations du médecin du travail ;
PAR CES MOTIFS :
REJETTE le pourvoi ;
Condamne la société Gefco France aux dépens ;
Vu l'article 700 du code de procédure civile, condamne la société Gefco France à payer à la SCP Ghestin la somme de 3 000 euros ;
Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, chambre sociale, et prononcé par le président en son audience publique du treize mars deux mille dix-neuf.
MOYEN ANNEXE au présent arrêt :
Moyen produit par la SCP Gatineau et Fattaccini, avocat aux Conseils, pour la société Gefco France.
IL EST FAIT GRIEF à l'arrêt attaqué d'AVOIR confirmé le jugement en ce qu'il a dit et jugé que le licenciement pour inaptitude et impossibilité de reclassement était sans cause réelle et sérieuse, en ce qu'il a fixé le salaire mensuel de M. W... à la somme de 1 547 euros brut, en ce qu'il a condamné la société Gefco à verser à Maître Christophe Fortin la somme de 1 000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile, en ce qu'il a débouté la société Gefco de sa demande formulée au titre de l'article 700 du code de procédure civile et l'a condamnée aux entiers dépens d'instance, d'AVOIR condamné la société Gefco France, venant aux droits de la société Gefco, à payer à M. W... la somme de 10 448,99 € à titre d'indemnité pour licenciement sans cause réelle et sérieuse, d'AVOIR ordonné le remboursement à Pôle Emploi des indemnités de chômage éventuellement payées au salarié du jour du licenciement au jour du présent arrêt, dans la limite de trois mois d'indemnités de chômage, d'AVOIR condamné la société Gefco France aux dépens d'appel et à payer à M. W... la somme de 2 500 € sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile pour les frais exposés en cause d'appel et non compris dans les dépens ;
AUX MOTIFS QUE « Sur l'obligation de reclassement :
Qu'aux termes de l'article L 1226-2 du code du travail, à l'issue des périodes de suspension du contrat de travail consécutives à une maladie ou un accident, si le salarié est déclaré par le médecin du travail inapte à reprendre l'emploi qu'il occupait précédemment, l'employeur est tenu de lui proposer un autre emploi approprié à ses capacités, compte tenu des conclusions écrites du médecin du travail et des indications qu'il formule sur l'aptitude du salarié à exercer l'une des tâches existantes dans l'entreprise et aussi comparable que possible à l'emploi précédemment occupé, au besoin par la mise en oeuvre de mesures telles que mutations, transformations de postes de travail ou aménagement du temps de travail ;
Qu'en l'espèce, la S.A. Gefco a identifié deux postes d'agent administratif et un poste d'agent de courses disponibles et les a soumis au médecin du travail ; que celui-ci a maintenu ses conclusions antérieures selon lesquelles U... W... ne pouvait travailler qu'une dizaine d'heures par semaine, mais n'a formulé aucune contre-indication à l'un de ses postes ; que la société s'est abstenue de les proposer au salarié ; que la lettre de licenciement justifie l'impossibilité de reclasser ce dernier exclusivement par le fait que ces trois postes sont à temps plein et qu'aucun aménagement d'horaire n'est envisageable sur ces postes ; qu'il n'y a donc pas lieu d'examiner les raisons tirées de l'absence de compétence et de l'absence de mobilité du salarié qui ne sont apparues qu'en cours de procédure et qui, si elles avaient été pertinentes, auraient rendu sans objet la consultation du médecin du travail le 19 décembre 2012 ; que la S.A. Gefco a recherché le reclassement de U... W... à organisation constante alors que son choix de ne pas occuper de salarié à temps partiel ne peut prévaloir sur l'obligation que lui faisait l'article L 1226-2 du code du travail d'aménager les trois postes identifiés afin que la durée du travail correspondante soit compatible avec les conclusions du médecin du travail ;
Qu'en conséquence, la S.A. Gefco a méconnu l'étendue de son obligation de reclassement ; que le licenciement de U... W... est sans cause réelle et sérieuse ;
Sur les dommages-intérêts pour licenciement sans cause réelle et sérieuse :
Que U... W... qui a été licencié sans cause réelle et sérieuse, alors qu'il avait plus de deux ans d'ancienneté dans une entreprise occupant habituellement au moins onze salariés, est en droit de prétendre, en application de l'article L 1235-3 du code du travail, à une indemnité qui ne peut être inférieure aux salaires des six derniers mois ; que U... W..., qui a été placé en invalidité (2ème catégorie), ne communique aucune pièce démontrant l'existence d'un élément particulier de préjudice justifiant une indemnisation supérieure au minimum légal défini ; qu'au vu de l'attestation destinée à Pôle Emploi qu'a établie l'employeur, ce minimum s'élève, en l'espèce, à la somme de 10 448,99 € ;
Attendu en outre qu'en application des dispositions de l'article L 1235-4 du code du travail, il convient d'ordonner le remboursement à Pôle Emploi par la S.A.S. Gefco France, venant aux droits de la S.A. Gefco, des indemnités de chômage éventuellement payées à U... W... du jour du licenciement au jour du présent arrêt, dans la limite de trois mois d'indemnités de chômage » ;
ET AUX MOTIFS EVENTUELLEMENT ADOPTES QUE « Sur la recherche de reclassement et le licenciement :
En droit:
L'article L.1226-2 du Code du travail dispose que lorsque, à l'issue des périodes de suspension du contrat de travail consécutives à une maladie ou un accident non professionnel, le salarié est déclaré inapte par le médecin du travail à reprendre l'emploi qu'il occupait précédemment, l'employeur lui propose un autre emploi approprié à ses capacités. Cette proposition prend en compte les conclusions écrites du médecin du travail et les indications qu'il formule sur l'aptitude du salarié à exercer l'une des tâches existantes dans l'entreprise.
L'emploi proposé est aussi comparable que possible à l'emploi précédemment occupé, au besoin par la mise en oeuvre de mesures telles que mutations, transformations de postes de travail ou aménagement du temps de travail.
En fait:
M. W... a été déclaré inapte à exercer son poste d'agent de parc le 15 octobre 2012, deuxième visite. Cependant, il était précisé dans l'avis d'inaptitude du médecin du travail « pourrait effectuer quelques heures par semaine, un poste sans manutention, sans effort physique, de type administratif (accueil, contrôle). «
La SA Gefco avait identifier trois postes de type administratif à temps plein présentés au Médecin du service de santé au travail, reclassement pouvant être envisagé tout en respectant la restriction d'une dizaine d'heures de travail par semaine.
La SAGefco a reçu M. W..., lui précisant avoir identifié des postes de type administratif mais que ceux -ci ne correspondaient pas aux préconisations du Médecin du service de santé au travail et a prononcé son licenciement pour inaptitude non professionnelle le 5 février 2013.
L'emploi de reclassement doit être aussi comparable que possible à l'emploi précédemment occupé, au besoin par la mise en oeuvre telle que mutation, transformation de poste ou aménagement du temps de travail. Il ne doit en principe entraîner aucune modification du contrat de travail du salarié reconnu inapte. Toutefois, si le seul poste disponible emporte une telle modification, il doit être proposé à l'intéressé.
En l'espèce, la SA Gefco, bien qu'ayant identifié des postes de travail compatibles aux préconisations du Médecin du service de santé au travail et limitant l'activité hebdomadaire à une dizaine d'heures par semaine, s'est abstenue de les proposer au salarié et de mettre en oeuvre des transformations lui permettant l'éventuel accès à l'un de ces postes.
En conséquence, le Conseil constate que la SA Gefco, bien qu'ayant identifié des postes de reclassement, n'est pas allée au bout de sa démarche de recherche de reclassement en ne proposant pas une modification du contrat de travail de M. W... et considère le licenciement dépourvu de cause réelle et sérieuse.
Il conviendra de réparer le préjudice subi par M. W... en lui allouant des dommages-intérêts à hauteur de 9 282 euros net correspondant à six mois de salaire.
Sur la fixation du salaire
Même si le salaire mensuel brut mentionné sur le bulletin de salaire de M. W... (pièce n° 9 du demandeur) est supérieur, soit 1 8,53 euros brut, le Conseil limite le montant à 1 547 euros brut selon la demande de la partie demanderesse.» ;
1º) ALORS QUE dans le cadre de son obligation de reclassement, l'employeur n'a pas à transformer en temps partiel un emploi disponible à temps complet, lorsque pour être mise en oeuvre, cette transformation aboutit à imposer la création, à côté de l'emploi ainsi transformé, d'un autre poste ; qu'en l'espèce, la société Gefco faisait valoir que le reclassement de M. W..., qui avait été déclaré, le 15 octobre 2012, définitivement inapte « au poste d'Agent de Parc (
) pourrait occuper, quelques heures par semaine, un poste sans manutention, sans effort physique, de type administratif (accueil, contrôle) », s'était avéré impossible en ce que les seuls emplois administratifs disponibles étaient à temps complet et que leur transformation en temps partiel supposait la création d'un nouveau poste ; qu'en reprochant à l'employeur de n'avoir recherché le reclassement du salarié qu'à organisation constante et de ne pas avoir aménagé les postes ainsi identifiés pour les rendre compatibles avec les conclusions du médecin du travail, sans faire ressortir que ces emplois étaient réductibles à une activité à temps partiel ne supposant pas l'embauche parallèle d'un autre salarié pour en occuper la partie restante, la cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard de l'article L. 1226-2 du code du travail dans sa rédaction antérieure à la loi n° 2016-1088 du 8 août 2016 ;
2°) ALORS QUE le juge doit respecter l'objet du litige tel que déterminé par les prétentions respectives des parties ; qu'en l'espèce, dans ses conclusions d'appel (cf. p. 21 et 22), oralement reprises (cf. arrêt p. 4), la société Gefco faisait valoir que le reclassement du salarié inapte sur un poste « sans manutention », « sans effort physique, de type administratif (accueil, contrôle) », «quelques heures par semaine » s'était avéré impossible dès lors que les postes administratifs disponibles supposaient, outre une véritable création de poste pour être rendus compatibles avec les recommandations du médecin du travail, une formation initiale que le salarié ne possédait pas et une mobilité que celui-ci avait expressément refusée ; qu'en réponse, dans ses écritures oralement soutenues (cf. les conclusions d'appel adverses p. 6), le salarié se bornait à reprocher à l'employeur de ne pas lui avoir fait connaître par écrit les motifs s'opposant à son reclassement conformément aux dispositions de l'article L. 1235-2 du code du travail ; qu'en jugeant, pour reprocher à l'employeur de ne pas avoir proposé aux salarié deux postes d'agent administratif et un poste d'agent de courses disponibles, qu'il n'y avait pas lieu d'examiner les justifications prises de l'absence de compétences du salarié et de son refus de mobilité dans la mesure où celles-ci avaient été invoqués en cours de procédure et qu'à les supposer pertinentes, la consultation du médecin du travail sur ces postes aurait été sans objet, circonstances qu'aucune des parties n'invoquait, la cour d'appel a méconnu les limites du litige et violé l'article 4 du code de procédure civile ;
3°) ALORS QUE le juge, qui doit, en toutes circonstances, faire observer et observer lui-même le principe de la contradiction, ne peut fonder sa décision sur les moyens de droit qu'il a relevés d'office sans avoir au préalable invité les parties à présenter leurs observations ; qu'en l'espèce, pour reprocher à l'employeur de ne pas avoir cherché à aménager les postes de nature administrative identifiés dans le cadre de ses recherches de reclassement, la cour d'appel a dit n'y avoir lieu d'examiner les justifications prises de l'absence de compétences du salarié et de son refus de mobilité dans la mesure où celles-ci avaient été invoquées en cours de procédure et qu'à les supposer pertinentes, la consultation du médecin du travail sur ces postes aurait été sans objet, ce qu'aucune des parties n'invoquait ; qu'en relevant ces moyens d'office, sans provoquer les observations des parties, la cour d'appel a violé l'article 16 du code de procédure civile ;
4°) ALORS QUE le fait pour l'employeur d'avoir, dans le cadre de ses recherches de reclassement, sollicité l'avis du médecin du travail sur des postes disponibles, ne le prive pas de la possibilité de démontrer, à tout moment, que ces postes sont incompatibles avec les compétences du salarié et son refus de mobilité ; qu'en l'espèce, la société Gefco faisait valoir, preuves à l'appui (cf. productions n° 9 à 12), que les postes administratifs identifiés à l'issue de ses recherches de reclassement (Agent administratif ventes région à Vénissieux, Agent administratif – Pôle Achats à Gennevilliers, Agent de courses situé à Roissy, tous de niveau Employé) n'avaient pas à être proposés au salarié (Agent Technique de Parc, statut ouvrier) en ce qu'ils supposaient une formation initiale lui faisant défaut et une mobilité que le salarié avait expressément refusée, circonstances qui n'étaient pas discutées par l'intéressé ; qu'en jugeant n'y avoir lieu d'examiner les justifications prises de l'absence de compétences du salarié et de son absence de mobilité dans la mesure où celles-ci avaient été invoquées en cours de procédure et qu'à les supposer pertinentes, la consultation du médecin du travail sur ces postes suite à la déclaration d'inaptitude du salarié aurait été sans objet, la cour d'appel qui a statué par des motifs inopérants, a violé l'article L. 1226-2 du code du travail dans sa rédaction antérieure à la loi n° 2016-1088 du 8 août 2016.