LA COUR DE CASSATION, PREMIÈRE CHAMBRE CIVILE, a rendu l'arrêt suivant :
Sur le moyen unique, pris en sa première branche :
Vu l'article 847 du code civil ;
Attendu que les dons et legs faits au fils de celui qui se trouve successible à l'époque de l'ouverture de la succession sont toujours réputés faits avec dispense du rapport et que le père, venant à la succession du donateur, n'est pas tenu de les rapporter ;
Attendu, selon l'arrêt attaqué, que R... C... et K... W... sont décédés respectivement les [...], laissant pour leur succéder leurs trois enfants, M..., J... et Z... ;
Attendu que, pour dire que le notaire commis devra, dans le projet liquidatif, prendre en compte la donation de 58 000 euros faite par R... C... et K... W... à leurs trois enfants, l'arrêt retient que c'est à chacun d'eux qu'ils ont entendu donner cette somme, peu important que M. M... C... ait préféré faire remettre celle-ci à ses propres enfants ;
Qu'en statuant ainsi, alors qu'elle avait constaté que les défunts avaient gratifié le fils et la fille de M. M... C..., la cour d'appel a violé le texte susvisé ;
Et vu les articles L. 411-3 du code de l'organisation judiciaire et 1015 du code de procédure civile ;
PAR CES MOTIFS et sans qu'il y ait lieu de statuer sur l'autre branche du moyen :
CASSE ET ANNULE, mais seulement en ce qu'il dit que le notaire commis devra prendre en compte dans son projet d'état liquidatif la donation de 58 000 euros faite par R... C... et K... W... à M. M... C..., l'arrêt rendu le 5 décembre 2017, entre les parties, par la cour d'appel de Rennes ;
DIT n'y avoir lieu à renvoi ;
Rejette la demande de M. Z... C... et de Mme J... C... aux fins de prise en compte par le notaire de la somme de 58 000 euros remise aux enfants de M. M... C... ;
Laisse à chacune des parties la charge de ses propres dépens ;
Vu l'article 700 du code de procédure civile, rejette les demandes ;
Dit que sur les diligences du procureur général près la Cour de cassation, le présent arrêt sera transmis pour être transcrit en marge ou à la suite de l'arrêt partiellement cassé ;
Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, première chambre civile, et prononcé par le président en son audience publique du six mars deux mille dix-neuf.
MOYEN ANNEXE au présent arrêt :
Moyen produit par la SCP Didier et Pinet, avocat aux Conseils, pour M. M... C...
Il est fait grief à l'arrêt infirmatif attaqué d'avoir dit que le notaire commis devra prendre en compte dans un projet d'état liquidatif la donation de 58.000 € faite par R... C... et K... W..., épouse C..., à chacun de leurs trois enfants, M. M... C..., Mme J... C..., M. Z... C... ;
AUX MOTIFS QUE Mme J... C... et M. Z... C..., qui déclarent avoir reçu chacun une somme de 58.000 € de la part de leurs parents en avril ou mai 2010, soutiennent que leur frère, M. M... C..., a reçu la même somme ; que ce dernier prétend que ses parents ont alors fait un don manuel non à lui-même, mais à ses deux enfants, T... et G..., en deux versements de 29.000 € chacun tirés le 21 avril 2010 sur un compte des époux C... W... à l'ordre de T... C... et G... C..., ainsi que sur des déclarations en ce sens de dons manuels à l'administration fiscale en dates des 4 et 17 mai 2010 ; que, toutefois, les documents intitulés « U... M... », « U... J... » et « H... Z... », dont il est constant qu'ils sont d'une écriture identique, et non contesté qu'il s'agit de celle de R... C... ou de K... W..., mentionnent, pour le premier « Retrait Plan Rivage 58.000 € » pour le second « mai 2010 58.000 € » et pour le troisième « 21.4.2010 Retrait Plan Rivage 58.000 € », ce dont il résulte que l'intention des époux C... W... était alors de gratifier chacun de leurs trois enfants de la même somme, 58.000 € ; que, dans un courrier du 5 décembre 2012 à sa soeur, Mme J... C... , M. M... C... écrivait notamment que lorsque son père, en avril 2010, lui avait fait part de son intention de lui donner une somme importante pour son fils T..., lui-même avait aussitôt répondu : « il faudra partager et donner la même chose à Z... et J... », sans d'ailleurs évoquer à ce moment sa fille G... ; qu'il sera encore rappelé que R... C... ou K... W... avaient souhaité, en rédigeant leurs testaments, maintenir une stricte égalité entre leurs trois enfants ; qu'il se déduit de ce qui précède que c'est à chacun de leurs trois enfants qu'ils ont entendu donner la somme de 58.000 €, certainement le 21 avril 2010, peu important de ce point de vue que M. M... C... ait préféré la faire remettre à ses propres enfants ; que cette donation devra en conséquence être prise en compte par le notaire liquidateur ;
1°) ALORS QUE les donations qui ont été consenties par le défunt aux enfants d'un cohéritier ne sont pas rapportables à la succession ; qu'en jugeant que M. M... C... était tenu de rapporter à la succession la somme de 58.000 € après avoir cependant constaté que cette somme avait été versée par les défunts à ses enfants T... et G... C... , ce dont il résulte que M. M... C... n'était pas tenu à rapport de ce chef, la cour d'appel a violé l'article 847 du code civil ;
2°) ALORS QU'est dépourvu de tout effet la copie d'un testament dont il n'est pas établi qu'elle est la reproduction fidèle et durable d'un document original ayant existé jusqu'au jour du décès du testateur ; qu'en l'espèce, la cour d'appel a jugé que les testaments olographes datés du 12 juillet 2002, produits par M. Z... C... et Mme J... C... , étaient dépourvus de tout effet dès lors que ces derniers ne rapportaient pas la preuve qu'ils constituaient la reproduction fidèle et durable d'un document original ayant existé jusqu'au jour du décès des de cujus ; qu'en se fondant pourtant sur ces testaments olographes pour juger que M. M... C... s'était vu gratifié, le 21 avril 2010, d'une donation de 58.000 € à l'instar de son frère et de sa soeur dès lors que les de cujus y avaient exprimé leur souhait de maintenir une stricte égalité entre les trois enfants, quand il résulte de ses propres constatations que ces pièces ne faisaient pas la preuve de la reproduction durable de la volonté des testateurs à cette date, la cour d'appel a violé l'ancien article 1348 du code civil et l'article 895 du même code.