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06/03/2019 | FRANCE | N°17-18260

France | France, Cour de cassation, Chambre sociale, 06 mars 2019, 17-18260


LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE SOCIALE, a rendu l'arrêt suivant :

Sur le second moyen :

Attendu, selon l'arrêt attaqué (Toulouse, 17 mars 2017), que M. A... a été engagé, à compter du 12 mars 2007, par la société Image du troisième millénaire aux droits de laquelle se trouve la société LCI E-Learning et Training Solutions, en qualité d'ingénieur étude et développement ; qu'il occupait en dernier lieu le poste d'expert "e-learning" ; qu'il a été élu délégué du personnel le 24 janvier 2014 ; qu'il a pris acte de la rupture de son contrat de travail par lettre

du 27 avril 2015 et a saisi la juridiction prud'homale ;

Attendu que le salarié ...

LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE SOCIALE, a rendu l'arrêt suivant :

Sur le second moyen :

Attendu, selon l'arrêt attaqué (Toulouse, 17 mars 2017), que M. A... a été engagé, à compter du 12 mars 2007, par la société Image du troisième millénaire aux droits de laquelle se trouve la société LCI E-Learning et Training Solutions, en qualité d'ingénieur étude et développement ; qu'il occupait en dernier lieu le poste d'expert "e-learning" ; qu'il a été élu délégué du personnel le 24 janvier 2014 ; qu'il a pris acte de la rupture de son contrat de travail par lettre du 27 avril 2015 et a saisi la juridiction prud'homale ;

Attendu que le salarié fait grief à l'arrêt de dire que le contrat de travail a été rompu par une prise d'acte produisant les effets d'une démission, alors, selon le moyen :

1°/ que tout changement des conditions de travail, notamment de fonctions, peut constituer un manquement de l'employeur faisant obstacle à la poursuite du contrat de travail d'un salarié bénéficiant de la protection spéciale attachée à l'exercice d'un mandat ; qu'en l'espèce, il était constant que M. A... exerçait un mandat de représentation et bénéficiait de la protection spéciale afférente, et qu'il se plaignait d'une modification de ses responsabilités et fonctions ; qu'à cet égard, la cour d'appel a relevé que le directeur général adjoint avait répondu aux alertes de M. A... par un courriel en date du 2 février 2015, pour lui indiquer qu'il avait bien intégré son souhait de retrouver une activité d'études et de développement, et que « ce courriel explicite que les attributions du salarié ne présentaient pas un caractère définitif et étaient en lien avec des difficultés conjoncturelles. » ; qu'il résultait de ces constatations que les missions du salarié avaient bien comme ce dernier le soutenait, serait-ce temporairement et pour des raisons conjoncturelles, été modifiées unilatéralement par l'employeur, ce qui, s'agissant d'un salarié protégé, constituait un manquement de l'employeur de nature à faire obstacle à la poursuite du contrat ; qu'en affirmant néanmoins que les griefs développés par M. A... ne justifiaient pas la rupture immédiate du contrat de travail et que la prise d'acte devait être analysée comme une démission, la cour d'appel n'a pas tiré les conséquences légales de ses propres constatations et a violé les articles L. 1231-1, L. 1237-9 et L. 1235-1 du code du travail ;

2°/ que tout changement de conditions de travail, notamment de fonctions, peut constituer un manquement de l'employeur faisant obstacle à la poursuite du contrat d'un salarié bénéficiant de la protection spéciale attachée à l'exercice d'un mandat ; qu'en l'espèce, la cour d'appel a relevé que le directeur général adjoint avait répondu aux alertes de M. A... par un courriel en date du 2 février 2015, pour lui indiquer qu'il avait bien intégré son souhait de retrouver une activité d'études et de développement, et que « ce courriel explicite que les attributions du salarié ne présentaient pas un caractère définitif et étaient en lien avec des difficultés conjoncturelles. » ; qu'en statuant comme elle l'a fait, sans rechercher, à tout le moins, si de tels changements ne suffisaient pas, compte tenu du statut de salarié protégé de M. A..., à justifier l'imputabilité de la prise d'acte à l'employeur, la cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard des articles L. 1231-1, L. 1237-9 et L. 1235-1 du code du travail ;

Mais attendu que la cour d'appel, qui a constaté que le salarié n'avait jamais cessé d'exercer une activité de recherche développement, que ses responsabilités n'avaient pas été réduites et que la modification de ses attributions avait un caractère temporaire, a pu en déduire l'absence de manquement suffisamment grave pour empêcher la poursuite du contrat de travail ; que le moyen n'est pas fondé ;

Et attendu qu'il n'y a pas lieu de statuer par une décision spécialement motivée sur le premier moyen, ci-après annexé, qui n'est manifestement pas de nature à entraîner la cassation ;

PAR CES MOTIFS :

REJETTE le pourvoi ;

Condamne M. A... aux dépens ;

Vu l'article 700 du code de procédure civile, rejette les demandes ;

Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, chambre sociale, et prononcé par le président en son audience publique du six mars deux mille dix-neuf.

MOYENS ANNEXES au présent arrêt :

Moyens produits par la SCP Rocheteau et Uzan-Sarano, avocat aux Conseils, pour M. A....

PREMIER MOYEN DE CASSATION :

Il est fait grief à l'arrêt attaqué D'AVOIR dit que le contrat de travail a été rompu par une prise d'acte produisant les effets d'une démission, et débouté en conséquence M. A... de l'intégralité de ses demandes, et D'AVOIR en outre condamné M. A... à payer à la société LCI E Learning et Training solutions les sommes de 11 139 euros à titre d'indemnité compensatrice de préavis, et de 3 000 euros sur le fondement des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile ;

ALORS QUE toute décision doit être signée par le président et par le greffier ; qu'à défaut, la décision est nulle ; qu'en l'espèce, l'arrêt n'est signé ni par le président de la cour d'appel ni par le greffier ; que dès lors, la cour d'appel a violé les articles 456 et 458 du code de procédure civile.

SECOND MOYEN DE CASSATION :

Il est fait grief à l'arrêt attaqué D'AVOIR dit que le contrat de travail a été rompu par une prise d'acte produisant les effets d'une démission, et débouté en conséquence M. A... de l'intégralité de ses demandes, et D'AVOIR en outre condamné M. A... à payer à la société LCI E Learning et Training solutions les sommes de 11 139 euros à titre d'indemnité compensatrice de préavis, et de 3 000 euros sur le fondement des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile ;

AUX MOTIFS QUE Sur la rupture du contrat de travail : M. A... fait grief à son employeur d'avoir modifié unilatéralement ses fonctions alors qu'il bénéficiait du statut de salarié protégé. Il souligne que la fiche de poste annexée à son contrat de travail précise que ses fonctions d'ingénieur études et développement comportent un rôle d'expert technique, de développeur et de veille technologique, nécessitant des compétences fonctionnelles d'organisation, de communication, management d'une équipe et compétences techniques, que par avenant du ter juillet 2013 il a été positionné sur un poste d'expert e-learning qu'il occupait en réalité depuis de nombreuses années, et que son employeur a modifié ses fonctions dans le courant de l'année 2013, ses fonctions d'expert e-learning étant progressivement supprimées au profit d'un poste intégrateur flash, jusqu'à ce que début 2015, il soit définitivement privé de ses responsabilités. Il soutient que la prise d'acte aux torts de son employeur était donc justifiée mais, étant salarié protégé, la conséquence doit être qu'elle produit les effets d'un licenciement nul. La société LCI E Learning et Training solutions réplique que M. A... tente tirer prétexte d'une simple fluctuation de la répartition de ses tâches dans le cadre de ses fonctions pour lui imputer la rupture du contrat de travail à ses torts, et ne démontre pas en quoi son employeur a modifié unilatéralement ses conditions de travail. Elle soutient que M. A... n'avait pas de fonctions d'encadrement au sens propre du terme, qu'il assurait l'encadrement technique d'une équipe d'informaticiens dans le cadre de projets clients. Ses activités étaient toujours dépendantes des projets en cours, et il arrivait que d'autres activités entrant dans le périmètre de ses fonctions ou en rapport avec ses compétences lui soient confiées. Elle souligne que M. A... ne s'est jamais plaint avant le 30 janvier 2015 d'une modification des conditions d'exécution de son contrat de travail. Si au moment de la prise d'acte, il avait temporairement pour principale activité l'intégration flash, il ne s'agissait ni d'une activité exclusive, ni d'une affectation définitive, mais d'une attribution liée à la situation des projets en cours. Elle soutient que cette prise d'acte participait d'une politique de désorganisation complète de la société, mise en oeuvre par M. K..., licencié pour faute grave le 26 mars 2015, alors qu'il en était encore le responsable opérationnel, pour détourner les actifs humains, techniques et financiers au bénéfice d'une société concurrente, la société Ninoxe, que messieurs A... et J... ont rejoint après leur départ volontaire. Cette prise d'acte était en réalité une posture opportuniste de M. A... pour réaliser un projet personnel préparé de longue date. Elle souligne que si dans un premier temps M. A... a été embauché par la société Soliantis, le 14 mai 2015, ce contrat e pris fin le 10 août 12015 et a été suivi d'un contrat de travail à durée indéterminée en date du 11 août 2015 avec la société Ninoxe, laquelle avait été créée en avril 2014 par M. Y..., son ancien cadre, la société Ninoxe étant la principale bénéficiaire de la politique de sous-traitance "débridée" de M. K... avant son départ de la société. La prise d'acte s'analyse comme un mode de rupture du contrat de travail, à l'initiative du salarié, qui se fonde sur des manquements imputés à son employeur dans l'exécution de ses obligations. Elle ne produit les effets d'un licenciement sans cause réelle et sérieuse que si les manquements reprochés sont actuels et d'une gravité incompatible avec la poursuite du contrat de travail. Dans le cas contraire, elle produit les effets d'une démission. Il incombe au salarié d'établir la matérialité des faits qu'il invoque. Dans sa lettre de prise d'acte, en date du 27 avril 2015, laquelle ne lie pas le litige, M. A... reproche à son employeur la diminution progressive, depuis le rachat par la société LCI, de son activité de recherche d'ingénieur études et développement, pour disparaître au profit d'une activité d'intégrateur flash à plein temps, son poste étant vidé de sa substance, n'ayant plus aucune activité d'expertise, de conseil, de recherche, de développement et de veille technologique, ni de fonction d'encadrement, ce qui constitue une modification unilatérale de son contrat de travail. Il résulte de la "fiche de fonction ingénieur informatique" annexée au contrat de travail, qui y fait expressément référence, que l'ingénieur informatique "assure une expertise informatique, développe des applications et est un soutien technique pour les autres fonctions" de la société. Cette fiche précise sa place dans l'organisation de la société en distinguant les situations dites "hors projet" pour l'exercice desquelles "l'ingénieur informatique est placé sous l'autorité du directeur des opérations", des situations "dans le cadre d'un projet'', où son supérieur hiérarchique direct est le chef de projet, et "dans le cadre desquelles il peut devenir chef de projet et encadrer techniquement une équipe d'informaticiens". Les fonctions d'encadrement prévues par le contrat de travail, qui n'ont pas été modifiées par les deux avenants, ne prévoient donc des fonctions d'encadrement que sous l'aspect technique et dans le cadre de certains projets. Par ailleurs le contrat de travail prévoit expressément, que les attributions de M. A... ne sont pas les mêmes selon qu'un projet est:- à concevoir, puisqu'il a alors un "rôle d'expert technique", ou - à développer, ayant alors un "rôle de développeur", ou enfin qu'il assure une mission de "veille technologique et innovation". M. A... ne justifie pas avoir, avant ses courriels en date des 30 janvier 2015 et 2 février 2015, fait état à l'égard de son supérieur hiérarchique, de ce qu'il se retrouverait cantonné à des tâches inférieures à sa qualification professionnelle. De plus, contrairement à ce qu'il soutient, le directeur général adjoint lui a répondu par courriel en date du 2 février 2015, avoir bien intégré son souhait de retrouver une activité d'études et de développement: "Comme tu le sais actuellement le planning de production nécessite ta compétence en développement flash. Néanmoins j'attire ton attention sur la nécessité de continuer à générer du CA. La période n'est pas très propice à de la RetD mais la piste d'améliorer la production interne retient toute mon attention. C'est pourquoi dès le retour de O..., nous allons étudier les possibilités de répondre favorablement à tes attentes et dans quels délais". Ce courriel explicite, au contraire, que les attributions du salarié ne présentaient pas un caractère définitif, et étaient en lien avec des difficultés conjoncturelles. Or M. A... avait connaissance de celles-ci en sa qualité de délégué du personnel. En outre son contrat de travail prévoyait que ses attributions puissent être modulées en fonction de l'existence ou non d'un projet relevant de sa compétence. Si M. A... justifie avoir, peu de temps après, adressé les 16 février 2015 et 6 mars 2015, deux autres courriels à son supérieur hiérarchique, indiquant, dans le dernier, réitérer sa demande tout en faisant état d'un appauvrissement de ses missions et responsabilités, pour autant il ne mentionne pas de projet précis dont il aurait été écarté. La cour constate par ailleurs que ce courriel a, ainsi que le souligne l'employeur, précédé de trois semaines son absence du 30 mars au 27 avril 2015 (absence paternité suivie d'un congé parental et de congés payés), étant souligné que la lettre de prise d'acte est du 27 avril 2015. En dehors de ces 4 courriels sur une période de 35 jours, M. A... ne justifie pas de demandes liées à ce qu'il présente comme une dévalorisation de ses attributions. M. A... n'établit pas davantage que depuis le rachat par le groupe LCI, soit depuis le 21 décembre 2012, son contrat de travail ait été vidé de sa substance: l'attestation de M. J..., peu précise (datée du 26 mars 2015, ce directeur de production y écrit que M. A... "effectue à temps plein des tâches d'un intégrateur flash et cela depuis plusieurs mois") est contredite par celle de M. T... qui atteste avoir constaté que M. A... a toujours travaillé sur plusieurs projets e-learning, en précisant ce qu'il y faisait. Quant à l'attestation de M. K... "ex-directeur", en date du 23 avril 2015, celle-ci est dépourvue de caractère probant, en l'absence de toute objectivité de ce témoin. L'employeur justifie en effet que M. A... a assisté M. K... lors de l'entretien préalable à licenciement le 23 mars 2015, et a ensuite établi à son bénéfice une attestation en date du 8 avril 2015, complétée par une deuxième attestation en date du 20 mai 2015, et que M. K..., licencié pour faute grave par lettre en date du 26 mars 2015, a saisi le conseil de prud'hommes. De plus, la société LCI verse aux débats les plannings de M. A... sur les années 2012 à 2015 (pièces 15), dont la teneur n'est pas contestée par M. A..., qui mettent en évidence que ce dernier a eu à traiter des projets sortant du contexte de production habituel, pouvant s'apparenter à de la RetD, sur lesquels il y avait un travail de recherche de solutions techniques et/ou technologiques, et de projets sur lesquels il pouvait y avoir de la RetD. La cour constate que contrairement aux affirmations de M. A..., ces plannings ne mettent pas en évidence après l'année 2012 (le rachat étant intervenu en fin d'année) une déclassification des attributions du salarié, puisqu'en 2013 et surtout en 2014, les projets relevant de sa compétence d'ingénieur ont représenté une part importante de son travail, et qu'en 2015, sur le premier trimestre, une part plus importante de son travail qu'au cours du premier trimestre 2012. En outre, M. A... est désigné comme expert e-learning sur les contrats conclus par la société LCI, le 2 mai 2012 avec la société Alstom Transport, le 21 mai 2013, avec la société Renault, et le 26 mai 2014 avec la société Horiba. Enfin et surtout la société LCI met en évidence, par les comptes rendus des réunions des délégués du personnel, auxquelles M. A... participait, et notamment ceux des 26 juin et 8 septembre 2014, que les difficultés économiques rencontrées par la société LCI ont été évoquées, ainsi que leurs incidences sur le nombre de salariés, et les choix de gestion alors faits par M. K..., responsable opérationnel (recours à la sous-traitance, départs volontaires favorisés sous forme de ruptures conventionnelles, dont ceux de messieurs Y..., C..., G...). La société LCI justifie que M. K... auquel il a été fait notamment grief, dans la lettre de licenciement en date du 26 mars 2015, un recours à la sous-traitance extérieure avec perte de clients et un manque de loyauté (création d'une société concurrente) a adressé, le 19 octobre 2014, à M. A... une invitation à rejoindre son réseau professionnel sur Linkedin "O... K... PDG cherche entreprise à racheter", et que suite à sa rupture conventionnelle en date du 8 janvier 2004, M. Y... (son ex salarié) a créé le 1er avril 2004 la société Ninoxe, qui après avoir été brièvement fournisseur de la société LCI, en 2014 et 2015, ainsi que cela résulte des extraits de compte tiers certifiés conformes, a, peu de temps après sa prise d'acte, embauché M. A... dans le cadre d'un contrat de travail à durée indéterminée en date du 11 août 2015. La prise d'acte en date du 27 avril 2015, a ainsi été consécutive à une absence de l'entreprise durant 28 jours, et été suivie d'une courte embauche, le 10 mai 2015, dans le cadre d'un contrat à durée déterminée ayant pour terme le 10 août 2015, par la société Soliantis, dirigée l'ancien employeur de M. A.... La chronologie des échanges entre les parties entre le 30 janvier et le 27 avril 2015, faisant suite à une année 2014 au cours de laquelle les difficultés de l'entreprise avaient été évoquées à plusieurs reprises lors des réunions de délégués du personnel auquel M. A... participait, année au cours de laquelle la société Ninoxe avait été créée, par une personne qu'il connaissait pour avoir ainsi que cela résulte de l'organigramme de la société i3M, été salarié, en charge de la branche aéronautique et défense, qui employait également M. C..., présent sur le même organigramme comme "expert 3D", met en évidence que l'embauche le 11 août 2015 de M. A... par la société Ninoxe est en lien étroit d'une part avec les difficultés économiques réelles de la société LCI et d'autre part le relationnel noué entre plusieurs anciens salariés de la société LCI, ayant créé de nouvelles sociétés, avec corrélativement la perte de clients importants. Les griefs développés par M. A... à l'encontre de son employeur ne justifiaient pas une rupture immédiate du contrat de travail. Sa prise d'acte doit en conséquence être analysée comme produisant les effets d'une démission. La décision des premiers juges sera en conséquence infirmée et M. A... débouté de ses demandes liées à la rupture de son contrat de travail. Sur les demandes reconventionnelles de la société LCI : La société LCI soutient d'une part que M. A... aurait dû respecter un préavis et d'autre part que la rupture de son contrat de travail s'inscrit dans le cadre une politique de déstabilisation de l'entreprise sur les plans financier, technique et commercial menée par M. K... ancien propriétaire / dirigeant de la société i3M demeuré ensuite responsable de l'activité opérationnelle, et seul responsable du management des salariés, qui lui a causé préjudice. M. A... ne s'explique pas sur l'absence d'exécution de préavis, autrement que par les manquements qu'il impute à son employeur, dont la matérialité n'est pas retenue par la cour. Sa prise d'acte produisant les effets d'une démission, il est redevable du délai de préavis de trois mois prévu par l'article 15 de la convention collective, quelle que soit la partie qui dénonce le contrat. Son salaire brut moyen étant de 3 713 euros, il sera en conséquence condamné au paiement de la somme de 11 139 euros.

1°) ALORS QUE tout changement des conditions de travail, notamment de fonctions, peut constituer un manquement de l'employeur faisant obstacle à la poursuite du contrat de travail d'un salarié bénéficiant de la protection spéciale attachée à l'exercice d'un mandat ; qu'en l'espèce, il était constant que M. A... exerçait un mandat de représentation et bénéficiait de la protection spéciale afférente, et qu'il se plaignait d'une modification de ses responsabilités et fonctions ; qu'à cet égard, la cour d'appel a relevé que le directeur général adjoint avait répondu aux alertes de M. A... par un courriel en date du 2 février 2015, pour lui indiquer qu'il avait bien intégré son souhait de retrouver une activité d'études et de développement (arrêt p. 4 § 5), et que « ce courriel explicite que les attributions du salarié ne présentaient pas un caractère définitif et étaient en lien avec des difficultés conjoncturelles. » (arrêt p. 4 § 6) ; qu'il résultait de ces constatations que les missions du salarié avaient bien comme ce dernier le soutenait, serait-ce temporairement et pour des raisons conjoncturelles, été modifiées unilatéralement par l'employeur, ce qui, s'agissant d'un salarié protégé, constituait un manquement de l'employeur de nature à faire obstacle à la poursuite du contrat ; qu'en affirmant néanmoins que les griefs développés par M. A... ne justifiaient pas la rupture immédiate du contrat de travail et que la prise d'acte devait être analysée comme une démission, la cour d'appel n'a pas tiré les conséquences légales de ses propres constatations et a violé les articles L 1231-1, L 1237-9 et L 1235-1 du code du travail ;

2°) ALORS QUE tout changement de conditions de travail, notamment de fonctions, peut constituer un manquement de l'employeur faisant obstacle à la poursuite du contrat d'un salarié bénéficiant de la protection spéciale attachée à l'exercice d'un mandat ; qu'en l'espèce, la cour d'appel a relevé que le directeur général adjoint avait répondu aux alertes de M. A... par un courriel en date du 2 février 2015, pour lui indiquer qu'il avait bien intégré son souhait de retrouver une activité d'études et de développement (arrêt p. 4 § 5), et que « ce courriel explicite que les attributions du salarié ne présentaient pas un caractère définitif et étaient en lien avec des difficultés conjoncturelles. » (arrêt p. 4 § 6) ; qu'en statuant comme elle l'a fait, sans rechercher, à tout le moins, si de tels changements ne suffisaient pas, compte tenu du statut de salarié protégé de M. A..., à justifier l'imputabilité de la prise d'acte à l'employeur, la cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard des articles L 1231-1, L 1237-9 et L 1235-1 du code du travail ;

3°) ALORS QUE les juges du fond ne peuvent accueillir ou rejeter les demandes dont ils sont saisis sans examiner tous les éléments de preuve qui leur sont soumis par les parties au soutien de leurs prétentions ; qu'en jugeant que les griefs développés par M. A... ne justifiaient pas la rupture immédiate du contrat de travail et que la prise d'acte devait être analysée comme une démission, sans examiner, même sommairement, d'une part, la liste des salariés ayant quitté la société avec les motifs de rupture, non contestée par l'employeur (cf. production n° 5) et, d'autre part, les contrats de travail mentionnant la perte de rémunération subie par M. A... suite à son départ (cf. production n° 6), produits par l'exposant, qui invalidaient totalement la théorie du complot ourdi par plusieurs salariés ayant programmé conjointement leur départ, avancée par l'employeur pour sa défense, la cour d'appel a méconnu les exigences de l'article 6 § 1 de la Convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales et de l'article 455 du code de procédure civile.


Synthèse
Formation : Chambre sociale
Numéro d'arrêt : 17-18260
Date de la décision : 06/03/2019
Sens de l'arrêt : Rejet
Type d'affaire : Sociale

Références :

Décision attaquée : Cour d'appel de Toulouse, 17 mars 2017


Publications
Proposition de citation : Cass. Soc., 06 mar. 2019, pourvoi n°17-18260


Composition du Tribunal
Président : M. Huglo (conseiller doyen faisant fonction de président)
Avocat(s) : SCP Boulloche, SCP Rocheteau et Uzan-Sarano

Origine de la décision
Date de l'import : 15/09/2022
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CCASS:2019:17.18260
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