LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE CRIMINELLE, a rendu l'arrêt suivant :
Statuant sur les pourvois formés par :
- M. P... E...,
- la société G...,
contre l'arrêt de la cour d'appel de CHAMBÉRY, chambre correctionnelle, en date du 13 décembre 2017, qui, pour infractions au code de l'urbanisme, infraction au code de l'environnement et infraction au code forestier, a condamné le premier à 50 000 euros d'amende dont 35 000 euros avec sursis, la seconde à 100 000 euros d'amende dont 60 000 euros avec sursis, a ordonné la remise en état des lieux sous astreinte et a prononcé sur les intérêts civils ;
La COUR, statuant après débats en l'audience publique du 15 janvier 2019 où étaient présents dans la formation prévue à l'article 567-1-1 du code de procédure pénale : M. Soulard, président, Mme Méano, conseiller rapporteur, M. Pers, conseiller de la chambre ;
Greffier de chambre : M. Bétron ;
Sur le rapport de Mme le conseiller référendaire MÉANO, les observations de la société civile professionnelle GATINEAU et FATTACCINI, avocat en la Cour, et les conclusions de M. l'avocat général LAGAUCHE ;
Joignant les pourvois en raison de la connexité ;
Vu le mémoire produit commun aux demandeurs ;
Attendu qu'il résulte de l'arrêt attaqué et des pièces de procédure qu'entre 2011 et 2014, plusieurs constats d'infractions ont été établis par la Direction départementale des territoires et l'Office national de l'eau et des milieux aquatiques, à l'encontre de M. P... E..., dirigeant de la société G..., dans le cadre de travaux réalisés par ces derniers sur trois sites distincts : aux lieux-dits "[...]" et "[...]" et sur des parcelles appartenant à des propriétaires privés sur la commune de Groisy, au lieu-dit "[...]"; que M. E... et la société G... ont été poursuivis devant le tribunal correctionnel, notamment pour exhaussement irrégulier du sol, exécution de travaux en violation de Plan d'occupation des sols (POS) de la commune de Charvonnex et du Plan local d'urbanisme (PLU) de la commune de Groisy et déversement de substance nuisible dans les eaux souterraines, superficielles ou de la mer ; que le tribunal a déclaré les prévenus coupables, les a condamnés à certaines peines et à verser des dommages et intérêts aux parties civiles ainsi que, pour deux des propriétaires concernés par les faits intervenus à Groisy, a condamné les prévenus à réparer en nature leur préjudice par la remise en état de leur parcelle, à défaut d'acte notarié de vente de leur parcelle régularisé entre les parties dans le délai de six mois; que les prévenus, le procureur de la République et certaines parties civiles ont relevé appel de cette décision ;
En cet état ;
Sur le premier moyen de cassation, pris de la violation des articles 6, § 1 de la Convention européenne des droits de l'homme, préliminaire, 591 et 593 du code de procédure pénale, défaut de motifs, manque de base légale ;
"en ce que l'arrêt attaqué a rejeté l'exception de nullité de la procédure soulevée in limine litis par M. E... et par la société Gimbert, portant sur la violation de leur droit à un procès équitable, et plus particulièrement du principe de l'égalité des armes et du droit à un tribunal impartial ;
"aux motifs que il est fait état de nombreux accusateurs présents lors de l'audience de première instance, membres de l'administration, venus en assistance du ministère public, de l'existence d'un procès-verbal d'infraction réalisé par l'administration la veille de l'audience, le 2 octobre 2017, versé le jour de l'audience, d'un manque d'impartialité des agents de la DDT, la direction départementale des territoires, au vu de l'existence d'un litige en cours sur le problème du récépissé de l'installation classée ICPE, et, enfin, de l'intervention d'un manque d'humanité dans le traitement du prévenu lors de l'audience de première instance au vu de propos tenus à son encontre et de la non prise en compte de son grand âge, étant né [...] , pour le faire asseoir au vu de la longueur de l'instruction du dossier ; qu'en réponse, il apparaît, au vu nombre et de la nature différente des infractions reprochées, concernant tant le code forestier, que le code de l'urbanisme et le code de l'environnement, que l'établissement des infractions a donné lieu à chaque fois à intervention d'une administration différente, variable selon la spécificité desdites infractions ; qu'il en est résulté la rédaction, à chaque fois, de procès-verbaux qui ont été régulièrement versés en procédure et auxquels les prévenus et leur défense ont pu avoir accès préalablement à la tenue de l'audience, ce qui suffit pour constater que le principe de l'égalité des armes a été parfaitement respecté, en l'espèce, l'audition des différentes administrations à l'audience ne faisant que reprendre le contenu des procès-verbaux préalablement communiqués et pouvant donner lieu à tout questionnement utile de la part des prévenus et de leurs défenseurs, le mot de la fin revenant, de toute façon, à la juridiction au niveau de la prise en compte des moyens de preuve présentés ; qu'il en est de même pour le procès-verbal dressé la veille, qui a donné lieu à remise contradictoire aux prévenus et à leurs défenseurs le jour de l'audience, pouvant alors donner lieu à discussion contradictoire devant la juridiction ; que les reproches faits au niveau de l'impartialité apparaissent comme étant trop flous, s'agissant d'une réflexion générale, sans éléments concrets réellement démontrés, et en conséquence, là encore, le droit au procès équitable et le principe de l'égalité des armes ont été parfaitement respectés ; qu'enfin, sur le déroulement de l'audience, il était parfaitement possible au prévenu ou à sa défense de solliciter, à tout moment, la bienveillance du tribunal au sujet de problèmes rencontrés éventuellement par le prévenu, en lien avec une santé physique défaillante ; que dès lors, l'exception de nullité sera rejetée ;
"1°) alors que la procédure pénale doit être équitable et contradictoire et préserver l'équilibre des droits des parties ; que le principe d'égalité des armes, élément du procès équitable, implique l'obligation d'offrir à chaque partie une possibilité raisonnable de présenter sa cause dans des conditions qui ne la placent pas dans une situation de net désavantage par rapport à son adversaire ; qu'en considérant que le fait pour les prévenus de se retrouver confrontés à quatre représentants de la DDT s'associant au procureur de la République dans une démarche de parties poursuivantes, et de ne prendre connaissance d'un procès-verbal d'infraction réalisé la veille par les inspecteurs, que le jour de l'audience, ne plaçait pas les prévenus dans une situation de net désavantage par rapport à ses adversaires, lacour d'appel a méconnu le droit à un procès équitable et le principe de l'égalité des armes, et privé sa décision de toute base légale ;
"2°) alors que le défaut d'impartialité des enquêteurs constitue une cause de nullité de la procédure lorsqu'il a eu pour effet de porter atteinte au caractère équitable et contradictoire de la procédure ou de compromettre l'équilibre des droits des parties ; que les juges du fond sont par ailleurs tenus de répondre aux chefs péremptoires des conclusions des parties ; que dans leurs conclusions régulièrement déposées, les prévenus avaient dénoncé l'impartialité des agents de la DDT qui avaient participé à l'enquête, lesquels appartenaient tous au pôle environnement de la DDT, placé sous l'autorité directe du préfet, alors même que ce dernier était l'adversaire de M. E... et de la société E... dans une procédure pendante devant le tribunal administratif relative à la contestation de récépissé de l'ICPE ; qu'en se bornant à affirmer que ce grief était trop flou et sans éléments concrets, sans même rechercher si le fait que la DDT soit à la fois partie enquêtrice au procès pénal et adversaire de M. E... et de la société E... sur le plan administratif, n'était pas de nature à faire naître un doute objectivement justifié sur l'impartialité de ses agents et à porter atteinte au droit à un procès équitable, la cour d'appel n'a pas légalement justifié sa décision au regard des textes visés au moyen" ;
Sur le moyen, pris en sa première branche :
Attendu que, pour écarter le moyen de nullité de la procédure tiré de la violation du principe de l'égalité des armes, en ce que d'une part, M. E... s'était trouvé à l'audience face au procureur de la République ainsi qu'à quatre représentants de la DDT s'associant dans une démarche de parties poursuivantes, d'autre part, un procès-verbal d'infraction réalisé la veille de l'audience du tribunal lui avait été communiqué seulement le jour de celle-ci, l'arrêt attaqué retient qu'au vu du nombre et de la nature différente des infractions reprochées, concernant tant le code forestier que le code de l'urbanisme et le code de l'environnement, l'établissement des infractions a donné lieu à l'intervention d'une administration différente, variable selon la spécificité desdites infractions et qu'il en est résulté la rédaction de procès-verbaux qui ont été régulièrement versés en procédure, auxquels les prévenus et leur défense ont pu avoir accès préalablement à la tenue de l'audience et ont donc pu en débattre contradictoirement lors de celle-ci, ce qui suffit pour constater que le principe d'égalité des armes a été parfaitement respecté, l'audition des différentes administrations à l'audience ne faisant que reprendre le contenu des procès-verbaux préalablement communiqués et pouvant donner lieu à tout questionnement utile de la part des prévenus et de leurs défenseurs ; que les juges ajoutent qu'il en est de même pour le procès-verbal dressé la veille, qui a donné lieu à remise contradictoire aux prévenus et à leurs défenseurs le jour de l'audience, pouvant alors donner lieu à discussion contradictoire devant la juridiction ;
Attendu qu'en se déterminant ainsi, la cour d'appel a justifié sa décision ;
D'où il suit que le grief n'est pas encouru ;
Sur le moyen, pris en sa seconde branche :
Attendu que, pour écarter le moyen de nullité de la procédure tiré de la partialité des agents du pôle environnement de la DTT en raison d'un contentieux opposant ce dernier au prévenu devant la juridiction administrative, l'arrêt retient que les reproches faits au niveau de l'impartialité apparaissent comme étant trop flous, s'agissant d'une réflexion générale, sans éléments concrets réellement démontrés ;
Attendu que par ces énonciations, la cour d'appel a justifié sa décision ;
D'où il suit que le moyen doit être écarté ;
Sur le deuxième moyen de cassation, pris de la violation des articles L. 216-6 du code de l'environnement, 591 et 593 du code de procédure pénale, défaut de motifs, défaut de réponse à conclusions, manque de base légale ;
"en ce que l'arrêt attaqué a déclaré M. E... et la société E... coupables du délit de déversement de substances nuisibles dans les eaux du ruisseau local « La Copette » et les a condamnés respectivement à une peine d'amende de 50 000 euros dont 35 000 euros assortis d'un sursis simple, et de 100 000 euros, dont 60 000 euros assortis d'un sursis simple et prononcé sur les intérêts civils ;
"aux motifs propres que l'infraction de déversement de substances nuisibles dans les eaux du ruisseau local « La Copette », résulte des constatations faites par les services de l'ONEMA le 17 janvier 2013, faisant état de l'affaissement d'un talus dans le cours d'eau ayant obstrué le ruisseau sur plus de 20 mètres de long, ayant entraîné un colmatage du fond et une retenue d'eau dûment mesurés, sur une profondeur de 1,50 mètre, ayant profondément modifié l'écosystème aquatique, le prévenu M. E..., intervenant alors èsqualité de gérant de la société, ne contestant pas sa responsabilité dans la survenance des faits, expliquant avoir procédé à un remblaiement d'une partie des parcelles pour créer la carrière et le chemin d'accès et avoir utilisé le reste du terrain pour stocker provisoirement des matériaux, posés trop près de la berge, dont le volume avait entraîné l'affaissement du terrain naturel dans le ruisseau ; que dès lors, la culpabilité des deux prévenus sera retenue sur ce chef de prévention, confirmant ainsi le jugement entreprise sur ce point ;
"et aux motifs eventuellement adoptés que les avocats de la société E... et de M. E... ont demandé au tribunal correctionnel de constater que le ministère public ne rapporte pas la preuve d'une pollution du cours d'eau « La Copette », et de constater qu'en tout état de cause, si les faits devaient être établis, le fondement des poursuites aurait dû être l'article L. 432-2 du code de l'environnement et en conséquence, de relaxer l'entreprise E... et M. E... du chef de poursuite sur le fondement de l'article L. 216-6 du code de l'environnement ; que l'article L. 216-6 du code de l'environnement sanctionne le fait de, sans autorisation, jeter, déverser ou laisser s'écouler dans les eaux superficielles ou souterraines, directement ou indirectement, une ou des substances quelconques dont l'action ou les réactions entraînent, même provisoirement, des effets nuisibles sur la santé ou des dommages à la flore ou à la faune ; qu'il convient de préciser que ce texte punit les rejets intentionnels et non intentionnels ; que le fait de demander une autorisation n'est pas une condition pour caractériser ou non l'infraction ; qu'elle permet seulement d'exonérer l'auteur de cette responsabilité en cas d'autorisation pour réaliser des rejets ; que s'agissant de l'application de l'article L. 432-2 du code de l'environnement dans la partie « Protection de la faune piscicole et de son habitat », l'article L. 216-6 du code de l'environnement exclut effectivement l'hypothèse des faits ayant entraîné des dommages relatifs à la nourriture des poissons, lesquels font l'objet d'une répression spéciale ; mais qu'en l'espèce, le procèsverbal de l'ONEMA du 17 janvier 2013 vise un « remblai de terre et d'argile » mais aussi « un fond bétonné », dont l'utilisation a été reconnue par M. E... et M. Y..., ayant créé un colmatage du lit du ruisseau « La Copette », et une retenue d'eau ; que l'atteinte principale et directe est celle concernant le substrat du cours d'eau, les biocénoses aquatiques et plus généralement l'équilibre de l'éco-système, et non pas une atteinte exclusive aux poissons ou à sa nutrition ; que cette pollution et le lien de causalité entre le dommage et l'action des prévenus ont aussi été constatés par l'agent assermenté M. S... qui, dans son procès-verbal dressé le 10 février 2014, indique que « l'exhaussement présente une loupe de glissement d'une surface estimée à 80 m² » et par les gendarmes qui, dans leur procès-verbal n°4474/2013, relèvent que le remblai s'est écoulé dans le cours d'eau provoquant une retenue d'eau et colmatant son lit ; que par conséquent, le procureur de la République a rapporté la preuve de la pollution du ruisseau suite à l'affaissement du remblai en raison des travaux réalisés par M. E... et la société E... et les a, à juste titre, poursuivis sur le fondement de l'article L. 216-6 du code de l'environnement ; qu'il y a donc lieu de les déclarer coupables ;
"1°) alors que l'article L. 216-6 du code de l'environnement incrimine le fait de jeter, déverser ou laisser d'écouler, dans les eaux superficielles, souterraines, une ou des substances quelconques dont l'action ou les réactions entraînent, même provisoirement, des effets nuisibles sur la santé ou des dommages à la flore ou à la faune ; qu'il en résulte que ce délit ne peut être constitué que si le déversement incriminé a eu effectivement des effets nuisibles sur la santé, ou bien a causé des dommages à la flore ou à la faune ; qu'après avoir expressément constaté que les faits reprochés étaient exclusivement liés à l'affaissement du terrain naturel dans le ruisseau, soit un simple écoulement de terre, la cour d'appel se borne à relever une modification de l'écosystème aquatique ; qu'en prononçant ainsi sans constater que le déversement de terre en cause avait provoqué des effets nuisibles sur la santé ou des dommages à la flore ou à la faune, au sens de l'article L. 216-6 du code de l'environnement, la cour d'appel a méconnu les dispositions précitées et privé sa décision de toute base légale ;
"2°) alors que les juges du fond sont tenus de répondre aux chefs péremptoires des conclusions des parties ; que dans leurs conclusions régulièrement déposées, M. E... et la société E... avaient invoqué l'étude réalisée par un hydrogéologue renommé dans le ressort de la cour d'appel de Chambéry, qui s'était déplacé sur site les 4 mai et 10 juillet 2017, afin de vérifier la matérialité des infractions reprochées sur la rivière « La Copette », au regard de la motivation du jugement du tribunal correctionnel d'Annecy du 1er juillet 2016 ; que cette étude technique poussée, excluait l'existence d'une quelconque infraction au code de l'environnement, et concluait explicitement à l'absence de « tout impact significatif » dans le cours d'eau ainsi qu'à l'absence de tout « impact possible sur la faune piscicole » ; qu'en se bornant à confirmer la culpabilité des prévenus du chef de ce délit de déversement de substances nuisibles, en s'abstenant de tout motif sur les conclusions de cette étude de nature à remettre en cause l'existence de l'infraction reprochée, ne fût-ce que pour l'écarter, la cour d'appel n'a pas légalement justifié sa décision au regard des textes visés au moyen" ;
Attendu que, pour déclarer les prévenus coupables de déversement de substance nuisible dans les eaux souterraines, superficielles ou de la mer, l'arrêt énonce que l'infraction résulte des constatations faites par les services de l'ONEMA et faisant état de l'affaissement d'un talus dans le cours d'eau ayant obstrué le ruisseau sur plus de vingt mètres de long, ayant entraîné un colmatage du fond et une retenue d'eau dûment mesurés, sur une profondeur de 1,50 mètre, ayant profondément modifié l'écosystème aquatique, M. E... ne contestant pas sa responsabilité dans la survenance des faits, expliquant avoir procédé à un remblaiement d'une partie des parcelles pour créer la carrière et le chemin d'accès, et avoir utilisé le reste du terrain pour stocker provisoirement des matériaux, posés trop près de la berge, dont le volume avait entraîné l'affaissement du terrain naturel dans le ruisseau ;
Attendu qu'en l'état de ces motifs procédant de son appréciation souveraine des faits et circonstances de la cause et des éléments de preuve contradictoirement débattus, et d'où il résulte que l'affaissement du terrain provoqué par les travaux réalisés par les prévenus a entraîné, même provisoirement, des dommages à la flore ou à la faune, la cour d'appel, qui a répondu comme elle le devait aux chefs péremptoires des conclusions dont elle était saisie, a justifié sa décision ;
D'où il suit que le moyen ne saurait être accueilli ;
Sur le troisième moyen de cassation, pris de la violation des articles 111-4 du code pénal, L. 421-2, L. 421-4, L. 424-1, L. 480-4, R. 421-23 f du code de l'urbanisme, 591 et 593 du code de procédure pénale, défaut et contradiction de motifs, manque de base légale ;
"en ce que l'arrêt attaqué a confirmé le jugement du tribunal correctionnel d'Annecy en toutes ses dispositions sur l'action publique, sauf sur les faits délictuels de dégradation du bien d'autrui et d'infractions aux dispositions du POS de 1993 de la commune de Charvonnex dans l'affaire du lieu-dit « [...] », et sur les faits contraventionnels d'exécution de travaux nuisibles à l'eau et d'émission de bruits troublant le voisinage, et a déclaré M. E... et la société Entreprise E... coupables de réalisation irrégulière d'exhaussement du sol sans déclaration préalable concernant les parcelles [...] , [...] et [...] C au lieu-dit « [...] » à Charvonnex avant de les condamner respectivement à une peine d'amende de 50 000 euros dont 35 000 euros assortis d'un sursis simple, et de 100 000 euros, dont 60 000 euros assortis d'un sursis simple, et de prononcer sur les intérêts civils ;
"aux motifs propres que sur les faits de réalisation irrégulière d'exhaussement du sol, sans déclaration préalable, résultant du stockage de roches, de matériaux inertes et de matériaux divers sur une hauteur excédant deux mètres et sur une superficie de 5527 m², ils font suite à l'existence de constatations faites par la DDT et par les services de gendarmerie à la suite de leur transport en date du 6 février 2014 ayant fait état d'un stockage de roches et de matériaux inertes avec précision des mesures pour chaque type de matériaux entreposés ; qu'à ce stade, le conseil des prévenus soulève une exception de nullité, in limine litis, résultant de la violation du principe non bis in idem et du principe général du droit « specialia generalibus derogant », dans le cadre des infractions concernant les faits reprochés au lieu-dit « [...] », faisant état de l'existence d'une double poursuite, résultant, d'un côté, de l'utilisation de l'article L. 160-3 du code de l'urbanisme, devenu depuis L. 610-3 du code de l'urbanisme, relatifs à l'ouverture, l'extension et les modifications aux conditions d'exploitation des établissements dangereux, insalubres ou incommodes, prévoyant une sanction fondée sur le code de l'environnement, et de l'autre côté, de l'existence de dispositions prévoyant qu'une infraction commise par une ICPE, donnera lieu à une sanction fondée sur le code de l'environnement, considérant ainsi qu'il existe deux qualifications différentes ; qu'en réponse, il ne saurait y avoir double poursuite puisque l'infraction précédemment reprochée, au titre des installations classées, était un problème d'exploitation d'une installation classée sans déclaration préalable, ce qui visait une poursuite ayant un but totalement différent de la présente, visant, elle, un problème d'exécution de travaux par suite du stockage de matériaux inertes, alors même qu'il n'y avait pas, en l'espèce, en outre, retenue des deux qualifications prononcées ; que dès lors l'exception de nullité sera rejetée ; que les faits reprochés aux deux prévenus apparaissent comme étant parfaitement constitués au vu des constatations faites par la DDT et par les services de gendarmerie, dans leurs procès-verbaux, aboutissant à la constatation du dépassement des normes prévues initialement par les textes légaux en matière d'exhaussement ; que la culpabilité des deux prévenus sera donc retenue au vu des constatations effectuées, quand bien même M. E... conteste les faits reprochés ;
"et aux motifs adoptés que sur l'infraction d'exhaussement ou d'affouillement du sol sans déclaration préalable, le conseil de M. E... et de la société soutient qu'il n'existe pas de remblai élevant le sol, mais seulement un dépôt de matériel ; qu'effectivement, la loi pénale est d'interprétation restrictive ; qu'ainsi, le dépôt temporaire de matériaux non inertes ne correspond ni à un exhaussement du sol, ni même à des travaux, tels que prévus par l'article R. 421-23 f du code de l'urbanisme ; que par conséquent, les prévenus seront relaxés de ce chef ;
"1°) alors que par une requête en rectification d'erreur matérielle déposée le 19 mars 2018 au greffe de la cour d'appel de Chambéry, les demandeurs ont sollicité de la cour d'appel de Chambéry qu'elle rectifie l'erreur purement matérielle affectant le dispositif du jugement du tribunal correctionnel d'Annecy du 1er juillet 2016, en ce qu'il a omis au titre de l'action publique dans la liste des relaxes prononcées, l'infraction d'exhaussement du sol sans déclaration préalable sur le site de « [...] », tant pour M. E... que pour la société E... ; que le bien-fondé du moyen étant lié à la décision à intervenir de la cour d'appel de Chambéry sur cette requête en rectification d'erreur matérielle, les exposants sollicitent de la Cour qu'elle veuille bien surseoir à statuer sur le pourvoi dans l'attente de cette décision ;
"2°) alors que dans l'hypothèse où la chambre criminelle n'estimerait pas nécessaire de surseoir à statuer dans l'attente de cette décision, il est constant que tout jugement ou arrêt doit comporter les motifs propres à justifier la décision ; que la contradiction entre les motifs et le dispositif équivaut à leur absence ; qu'il résulte des motifs du jugement du tribunal correctionnel d'Annecy que les premiers juges ont entendu relaxer les prévenus de l'infraction d'exhaussement du sol sans déclaration préalable sur le site de « [...] » ; qu'après avoir énoncé, dans ses motifs, que la culpabilité des prévenus devait être retenue du chef d'exhaussement du sol sans déclaration préalable sur le site de « [...] », l'arrêt attaqué a confirmé, dans son dispositif le jugement du tribunal correctionnel d'Annecy en toutes ses dispositions sur l'action publique à l'exception des quatre relaxes supplémentaires qu'elle avait prononcées et qui venaient s'ajouter à celles déjà prononcées par les juges de première instance parmi lesquelles figurait l'infraction d'exhaussement du sol sans déclaration préalable sur le site de « [...] » ; qu'en l'état de cette contradiction entre les motifs et le dispositif, la cour d'appel n'a pas donné de base légale à sa décision et méconnu l'article 593 du code de procédure pénale ;
"3°) alors que la loi pénale est d'interprétation stricte ; que le simple dépôt temporaire de roches et de matériaux n'entraînant aucune modification du terrain naturel d'origine, ne constitue ni un affouillement, ni un exhaussement du sol au sens de l'article R. 421-23 f du code de l'urbanisme ; qu'ainsi et en tout état de cause, la cour d'appel ne pouvait sans méconnaître le texte précité et le principe d'interprétation stricte de la loi pénale, déclarer les prévenus coupables d'exhaussement du sol sans déclaration préalable de ce chef" ;
Sur le moyen, pris en sa première branche :
Attendu que le grief, qui ne critique aucune disposition de l'arrêt attaqué, ne peut qu'être écarté ;
Sur le moyen, pris en sa deuxième branche :
Attendu que l'arrêt, dans ses motifs, retient que la culpabilité des deux prévenus pour l'infraction d'exhaussement irrégulier du sol au lieu-dit "[...]" à Charvonnex sera retenue au vu des constatations effectuées, quand bien même M. E... conteste les faits reprochés, et dans son dispositif, confirme le jugement du tribunal correctionnel en toutes ses dispositions sur l'action publique, sauf sur certaines infractions parmi lesquelles ne figure pas le délit précité, de sorte qu'aucune contradiction n'existe entre les motifs et le dispositif ;
D'où il suit que le grief n'est pas encouru ;
Sur le moyen, pris en sa troisième branche :
Attendu que, pour déclarer le prévenu coupable d'exhaussement irrégulier du sol au lieu-dit "[...]" à Charvonnex, l'arrêt énonce que cette infraction est parfaitement constituée au vu des constatations de la DDT et des services de la gendarmerie faisant état du stockage de roches et de matériaux inertes, précisant les mesures pour chaque type de matériaux entreposés et relevant le dépassement des normes prévues initialement par les textes légaux en matière d'exhaussement ;
Attendu que par ces énonciations, d'où il résulte que le niveau des terrains a été surélevé par le stockage de roches et matériaux inertes, sans déclaration préalable, la cour d'appel a justifié sa décision ;
D'où il suit que le moyen doit être écarté ;
Sur le cinquième moyen, pris de la violation des articles L. 480-4, L. 480-5, L. 480-7 du code de l'urbanisme, 591 et 593 du code de procédure pénale, défaut de motifs, défaut de réponse à chef péremptoire des conclusions, manque de base légale ;
"en ce que l'arrêt attaqué a ordonné la remise en état des lieux à la charge de la société G.. en ce qui concerne les faits intervenus au lieu-dit « [...] » à Charvonnex, dans un délai de six mois à compter du jour où le présent arrêt deviendra définitif, sous astreinte de 50 euros par jour de retard ;
"aux motifs que sur les deux infractions au code de l'urbanisme reprochées tant à M. E... qu'à la personne morale, la société G.., d'une part, de réalisation irrégulière d'affouillement ou d'exhaussement du sol, et d'autre part, sur l'infraction au plan d'occupation des sols de la commune du 12 juillet 1993 en ses dispositions applicables à la zone ND ; qu'elles résultent tout d'abord, du procès-verbal établi par le représentant de la DDT, en date des 17 janvier 2013 et 10 février 2014, faisant état d'un transport sur les lieux le 10 février 2014, et constatant l'exécution de travaux de remblais et de création d'une plate-forme, sur les parcelles [...] et [...] , et la réalisation d'un exhaussement irrégulier du sol en matériaux inertes sur une superficie de 800 m² et d'une hauteur supérieure à 2 mètres, sans autorisation administrative préalable, les parcelles étant situées en zone ND du Plan d'Occupation des Sols de la commune interdisant toutes constructions sur cette zone qui ne sont pas à usage pastoral, forestier ou agricole ; qu'elles résultent ensuite de la reconnaissance des faits par le prévenu M. E..., organe représentant de la société G.., qui a reconnu avoir procédé au remblaiement des deux parcelles [...] et [...] , sans autorisation préalable, alors qu'il en fallait une à partir de 100 m², et a reconnu savoir que les travaux étaient interdits puisque les parcelles étaient classées en zone ND sur le Plan d'occupation des sols de la commune ; que dès lors, la culpabilité des deux prévenus sera retenue sur ces deux chefs de prévention, confirmant ainsi le jugement entreprise sur ces points ; [
] Sur la remise en état des lieux, il convient, au vu de l'absence de tout lieu clairement défini et identifiable permettant sur le département de la Haute Savoie de procéder à l'entrepôt de déchets inertes pour les entrepreneurs de travaux publics, au vu de l'antériorité du dépôt au plan d'occupation des sols et au vu de l'absence d'éléments préexistants sur l'état exact des lieux avant le 6 février 2014, à la « [...] », de prononcer une remise en état des lieux, à la charge de la société G.., mais uniquement en ce qui concerne les faits intervenus au lieu-dit « [...] », à Charvonnex, et les faits intervenus au lieu-dit « [...] » à Groisy, remise en état devant intervenir dans le délai de six mois à compter du jour où le présent arrêt deviendra définitif, sous astreinte de 50 euros par jour de retard ;
"alors que si les juges du fond apprécient librement le choix de prononcer une mesure de remise en état, il leur appartient toutefois de répondre aux chefs péremptoires des conclusions des parties de nature à écarter la possibilité du prononcé de cette mesure ; que dans leurs conclusions régulièrement déposées, M. E... et la société E... avaient invoqué l'impossibilité de remise en état du site conformément au POS, lequel était devenu caduc du fait de la loi ALUR et du retour au RNU pour la commune depuis le mois de février 2017 ; qu'en se bornant à prononcer la remise en état des lieux concernant les faits intervenus au lieu-dit « [...] », sans répondre à ce chef péremptoire des conclusions de nature à écarter toute remise en état du fait de la compatibilité des travaux d'exhaussement avec les règles actuelles du RNU désormais applicables, la cour d'appel n'a pas légalement justifié sa décision et méconnu les textes visés au moyen" ;
Attendu que les demandeurs ne sauraient se faire un grief de ce que la cour d'appel n'a pas répondu au chef péremptoire de leurs conclusions qui faisait valoir que la remise en état concernant les faits intervenus au lieu-dit "[...]" était impossible du fait de la caducité du plan d'occupation des sols de la commune, dès lors qu'une telle mesure était en tout état de cause justifiée par le délit d'exhaussement irrégulier du sol pour lequel la culpabilité était par ailleurs prononcée s'agissant de faits intervenus sur les mêmes surfaces ;
D'où il suit que le moyen n'est pas fondé ;
Sur le quatrième moyen de cassation, pris de la violation des articles L. 421-2, L. 421-4, L. 424-1, R. 421-23, L. 480-4, L. 480-5, L. 480-7, L. 160-1 du code de l'urbanisme (devenu L. 610-1), 591 et 593 du code de procédure pénale, défaut et contradiction de motifs, manque de base légale ;
"en ce que l'arrêt confirmatif attaqué a déclaré M. E... et la société E... coupables de réalisation irrégulière d'exhaussement du sol, et d'infractions au PLU de la commune concernant les différentes parcelles situées sur la commune de Groisy au lieu-dit « [...] », et les a condamnés respectivement à une peine d'amende de 50 000 euros dont 35 000 euros assortis d'un sursis simple, et de 100 000 euros, dont 60 000 euros assortis d'un sursis simple, ainsi qu'à la remise en état des lieux, et prononcé sur les intérêts civils ;
"aux motifs que sur les infractions au code de l'urbanisme, à savoir d'une part, les travaux d'exhaussement de sol, et d'autre part, d'infractions au plan local d'urbanisme ou au plan d'occupation des sols ; que le prévenu M. E... déposait une déclaration préalable à la mairie de Groisy pour la réalisation d'un exhaussement de sol sur les terrains visés ci-dessus au titre du défrichement, appartenant à plusieurs propriétaires privés, et se voyait alors sollicité de fournir les accords écrits des différents propriétaires ; que sur l'infraction de travaux d'exhaussement du sol sans autorisation préalable, que les faits reprochés résultent tout d'abord des deux procès-verbaux dressés par les services de la DDT, successivement les 26 août 2014 et 30 janvier 2015, ayant constaté la réalisation au départ, d'un remblaiement d'une surface de 4 722 m², représentant une longueur d'environ 150 m, sur une largeur de 8 m, et d'une hauteur minimale de 5 mètres, représentant alors un volume d'environ 6000 m3, puis la seconde fois, la poursuite des travaux de remblaiement du site, la comparaison des photos prises lors des deux transports, montrant qu'il y avait eu augmentation de la surface et de la hauteur des remblais, avec un volume passé alors à 10 000 m3 ; que les faits reprochés résultent également de la reconnaissance des faits par le prévenu, confirmant ne pas avoir eu d'autorisation valide, ainsi que la poursuite des travaux, et justifiant son attitude par l'absence de décharge pour des déchets inertes sur le secteur ; que dès lors, la culpabilité des deux prévenus sera retenue sur ce chef de prévention, confirmant le jugement entrepris sur ce point ; que sur l'infraction d'exécution de travaux en méconnaissance du plan local d'urbanisme de la commune de Groisy ; que les faits reprochés résultent tout d'abord également des deux procès-verbaux en date des 26 août 2014 et 30 janvier 2015 de la DDT, ayant constaté dans un premier temps, l'existence de la réalisation du remblai sur une surface de 4722 m², puis, dans un second temps, le passage du remblai à un stade supérieur, avec un volume estimé alors à 10 000 m², alors que les parcelles se trouvaient en zone N du Plan local d'urbanisme de la commune ne permettant pas ce type de travaux ; que les faits reprochés résultent, d'autre part, de la reconnaissance des faits par le prévenu ; que dès lors, la culpabilité des deux prévenus sera retenue sur ce chef de prévention, confirmant ainsi le jugement entrepris sur ce point ; [
] Sur la remise en état des lieux, il convient, au vu de l'absence de tout lieu clairement défini et identifiable permettant sur le département de la Haute Savoie de procéder à l'entrepôt de déchets inertes pour les entrepreneurs de travaux publics, au vu de l'antériorité du dépôt au plan d'occupation des sols et au vu de l'absence d'éléments préexistants sur l'état exact des lieux avant le 6 février 2014, à la « [...] », de prononcer une remise en état des lieux, à la charge de la société G.., mais uniquement en ce qui concerne les faits intervenus au lieu-dit « [...] », à Charvonnex, et les faits intervenus au lieu-dit « [...] » à Groisy, remise en état devant intervenir dans le délai de six mois à compter du jour où le présent arrêt deviendra définitif, sous astreinte de 50 euros par jour de retard ;
"et aux motifs éventuellement adoptés que sur l'infraction d'exhaussement ou d'affouillement du sol sans déclaration préalable, la société E... fait valoir qu'elle a déposé trois déclarations préalables au titre du code de l'urbanisme et qu'elles ont été accordées par la mairie ; qu'il ressort de celle du 7 juin 2013 (pièce 56 de E...) portant notamment sur les parcelles [...] (propriété de M. K...)et 2312 (propriété d'Area) que les travaux déclarés par la société G.. avaient pour objet l'assainissement d'un pré avec du drainage et le remblaiement d'un talus pour faciliter l'exploitation encombrée d'arbres le long de l'autoroute, sous réserve du respect du droit des tiers ; que celle du 9 novembre 2013 (pièce 57 de E...) portant notamment sur les parcelles [...], [...] et [...] ne concerne pas la présente affaire puisque les terrains ne sont pas visés dans la prévention ; que celle du 18 juin 2014 (pièces D2 de l'enquête de gendarmerie) a fait l'objet d'un classement sans suite le 13 octobre 2014 pour défaut de maîtrise, comme cela a été rappelé dans la genèse de l'affaire ; que c'est le 19 mars 2015 seulement que le maire de Groisy a pris un arrêté de « non opposition à la déclaration préalable » du 24 février 215 (pièce D3 de l'enquête de gendarmerie), valant régularisation de l'opération au titre du code de l'urbanisme suite à l'arrêté municipal interruptif des travaux ayant constaté une exhaussement supérieur à 2 mètres sur une longueur de 150 mètres et une largeur de 8 mètres, soit une surface de 1200 m² ; que cependant, il convient de rappeler qu'à cette date du 19 mars 2015, et encore jusqu'à la semaine avant l'audience du 29 avril 2016, la société E... n'avait pas fourni les accords écrits des divers propriétaires des terrains alors que l'arrêté municipal n°2015-94 (pièce D 5 de l'enquête de gendarmerie), autorisait les travaux sous réserve du respect du droit des tiers et du rétablissement du chemin longeant l'aire d'autoroute ; qu'enfin, comme les gendarmes l'ont relevé et le représentant de la DDT à l'audience, la dernière déclaration ne régularise pas les parcelles [...] (propriété Area), 1757 (propriété Nicolin), 594 (propriété Duret), 2275 (propriété Alaman), puisque la société E... a réalisé des travaux au-delà de ses déclarations préalables, et que, ainsi, les exhaussements sont non conformes aux déclarations ; que compte-tenu de ces éléments, il convient donc de constater que pour la période du 1er janvier 2012 au 19 mars 2015, les travaux d'exhaussement réalisés par l'G... sur les parcelles litigieuses ont bien été réalisées sans déclaration préalable, ce que M. E... n'a pas contesté ; qu'en conséquence, il convient de déclarer la société G.. et M. E... coupables de ces faits pour la période du 1er janvier 2012 au 19 mars 2015 ; que sur l'infraction d'exécution de travaux en méconnaissance du PLU ; qu'en application de l'article L. 123-1 du code de l'urbanisme, le PLU de Groisy (pièce D 1 de l'enquête de gendarmerie), divise en zones le territoire de la commune ; que les indices U/UX, correspondant aux zones urbaines, AU aux zones à urbaniser et N aux zones naturelles et forestières ; que les parcelles cadastrées [...], [...], [...], [...], [...], [...], [...], [...], [...] et [...] sont classées « Nr » et les parcelles [...], [...] et [...] classées « N » ; que dans l'ensemble de la zone N, les affouillements et exhaussements nécessaires et indispensables aux constructions et installations autorisées sont possibles s'ils ne portent pas atteinte au site ; que plus particulièrement, la zone Nr admet également, en terme d'occupation et d'utilisation du sol, les remblais inertes et les exhaussements du sol de plus de 10 m² de surface et de 2 mètres de hauteur, selon une mise en forme finale présentant des talus et des formes adoucis, et une végétalisation conforme à celle existante aux abords ; que toutefois, les rives naturelles des cours d'eau doivent être maintenues en espace libre de toute construction et de tout remblai en respectant un recul vis-à-vis des cours d'eau à adapter en fonction des situations topographiques ; que M. Debruille, inspecteur de l'ONEMA, a constaté l'existence d'un exutoire en béton et une accumulation d'eau importante le long du remblai ; qu'il a aussi constaté que le remblai était situé sur la source du ruisseau de la Chanaz et que la buse avait une longueur de 105 mètres de long ; que M. E... a reconnu devant l'agent assermenté avoir construit cette buse ; que par conséquent, le cours du ruisseau a été détourné par l'G... en infraction aux dispositions du PLU de Groisy ; que par ailleurs, les constatations faites par les gendarmes et les agents verbalisateurs ont démontré que l'exhaussement n'était pas nécessaire et indispensable aux constructions et installations autorisées dans la zone concernée et qu'il porte atteinte au site puisqu'il a été constaté que les matériaux étaient en train de glisser sur plusieurs mètres à l'intérieur des boisements périphériques, ce qui va conduire à la mort des arbres concernés par asphyxie, que ces travaux de remblaiement ont eu des impactes négatifs irrémédiables sur la faune et la flore, notamment sur le ruisseau, et que le parcours VTT et le sentier bordant l'autoroute avaient disparu malgré l'injonction du maire de rétablir le chemin ; qu'en outre, il s'agit en réalité d'une zone de stockage définitif des remblais et déchets inertes, ainsi le site est définitivement modifié, avec les conséquence sur le milieu naturel rappelées ci-dessus ; qu'en conséquence, il convient de déclarer M. E... et la société G.. coupables de ces faits ;
"1°) alors que toute insuffisance de motifs équivaut à leur absence ; qu'il n'est pas contesté que la plupart des parcelles visées à la prévention étaient situées en zone Nr du PLU, secteur dans lequel étaient autorisés les remblais et leur gestion ; que pour déclarer les prévenus coupables d'exécution de travaux en méconnaissance du PLU de la commune de Groisy, la cour d'appel se borne à relever que les parcelles se trouvaient en zone N, sur le PLU de la commune ne permettant pas ce type de travaux ; qu'en justifiant la condamnation des prévenus sur le fondement d'une affirmation erronée, ne prenant pas en compte le véritable secteur dans lequel se trouvait l'essentiel des parcelles visées à la prévention, lequel autorisait les remblais et leur gestion, nonobstant les conclusions expresses des prévenus en ce sens, la cour d'appel n'a pas légalement justifié sa décision de condamnation au regard des textes visés au moyen ;
"2°) alors que si la régularisation de la situation administrative ne fait pas disparaître le fait délictueux, elle fait obstacle au prononcé d'une mesure de remise en état des lieux ; qu'en se bornant à ordonner la remise en état des lieux en ce qui concerne le lieu-dit « [...] » à Groisy, sans prendre en considération les déclarations préalables des 7 juin 2013 et 19 mars 2015 obtenues par les prévenus et valant régularisation, la cour d'appel a méconnu les textes visés au moyen et privé sa décision de base légale" ;
Sur le moyen, pris en sa première branche :
Attendu que, pour déclarer les prévenus coupables d'infraction aux dispositions du PLU concernant les différentes parcelles situées sur la commune de Groisy au lieu-dit « [...] », l'arrêt retient par motifs adoptés que dans l'ensemble de la zone N, les affouillements et exhaussements nécessaires et indispensables aux constructions et installations autorisées sont possibles s'ils ne portent pas atteinte au site et que plus particulièrement, la zone Nr admet également, en termes d'occupation et d'utilisation du sol, les remblais inertes et les exhaussements du sol de plus de 10 m² de surface et de deux mètres de hauteur, selon une mise en forme finale présentant des talus et des formes adoucis et une végétalisation conforme à celle existante aux abords, à condition que les rives naturelles des cours d'eau soient maintenues en espace libre de toute construction et de tout remblai en respectant un recul vis-à-vis des cours d'eau à adapter en fonction des situations topographiques ; que les juges ajoutent que l'inspecteur de l'ONEMA a constaté l'existence d'un exutoire en béton et une accumulation d'eau importante le long du remblai et a aussi relevé que le remblai était situé sur la source du ruisseau de la Chanaz et que la buse construite par M. E... avait une longueur de 105 mètres de long, de sorte que le cours du ruisseau a été détourné par l'G... en infraction aux dispositions du PLU de Groisy ; que les juges retiennent en outre que les constatations faites par les gendarmes et les agents verbalisateurs ont démontré que l'exhaussement n'était pas nécessaire ni indispensable aux constructions et installations autorisées dans la zone concernée et qu'il portait atteinte au site puisqu'il a été constaté que les matériaux étaient en train de glisser sur plusieurs mètres à l'intérieur des boisements périphériques, ce qui allait conduire à la mort des arbres concernés par asphyxie, de sorte que ces travaux de remblaiement ont eu des impacts négatifs irrémédiables sur la faune et la flore, notamment sur le ruisseau ;
Attendu qu'en se déterminant ainsi, la cour d'appel, qui a répondu comme elle le devait aux chefs péremptoires des conclusions dont elle était saisie, a justifié sa décision ;
D'où il suit que le grief n'est pas encouru ;
Mais sur le moyen, pris en sa seconde branche :
Vu l'article L. 480-5, ensemble l'article L. 480-13 du code de l'urbanisme ;
Attendu qu'il résulte de ces textes que, lorsqu'une construction a été édifiée sans autorisation, la délivrance ultérieure d'une autorisation régulière, si elle ne fait pas disparaître l'infraction consommée, fait obstacle à une mesure de démolition ou de remise en état des lieux ;
Attendu que, s'agissant des faits intervenus au lieu-dit "[...]" sur la commune de Groisy, l'arrêt relève que le maire a pris, le 19 mars 2015, un arrêté de non-opposition à la déclaration préalable valant régularisation de l'opération au titre du code de l'urbanisme, sous réserve du droit des tiers et du rétablissement du chemin longeant l'aire d'autoroute, que les propriétaires des différentes parcelles concernées ont fait état de travaux intervenus sans leur accord mais également de l'existence de pourparlers en cours avec le prévenu en vue de l'acquisition de leur parcelle par ce dernier et que la cession de la propriété de l'un d'eux, M. Allaman, est intervenue depuis ;
Mais attendu qu'en ordonnant la remise en état des lieux de toutes les parcelles visées à la prévention, sans rechercher, comme il y était invitée, si pour tout ou partie des terrains, les conditions posées par l'arrêté du 19 mars 2015 pour la régularisation ne s'étaient pas réalisées au jour du prononcé de sa décision, la cour d'appel a méconnu le sens et la portée des textes susvisés et le principe ci-dessus rappelé ;
D'où il suit que la cassation est encourue de ce chef ;
Par ces motifs :
CASSE et ANNULE l'arrêt susvisé de la cour d'appel de Chambéry, en date du 13 décembre 2017, mais en ses seules dispositions relatives à la mesure de remise en état des lieux concernant les faits intervenus au lieu-dit "[...]", toutes autres dispositions étant expressément maintenues ;
Et pour qu'il soit à nouveau statué, conformément à la loi, dans les limites de la cassation ainsi prononcée ;
RENVOIE la cause et les parties devant la cour d'appel de Lyon, à ce désignée par délibération spéciale prise en chambre du conseil ;
ORDONNE l'impression du présent arrêt, sa transcription sur les registres du greffe de la cour d'appel de Chambéry et sa mention en marge ou à la suite de l'arrêt partiellement annulé ;
Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, chambre criminelle, et prononcé par le président le cinq mars deux mille dix-neuf ;
En foi de quoi le présent arrêt a été signé par le président, le rapporteur et le greffier de chambre.