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21/02/2019 | FRANCE | N°18-13543

France | France, Cour de cassation, Chambre civile 3, 21 février 2019, 18-13543


LA COUR DE CASSATION, TROISIÈME CHAMBRE CIVILE, a rendu l'arrêt suivant :

Attendu, selon l'arrêt attaqué (Aix-en-Provence, 11 janvier 2018), que, se plaignant de la transformation par la SCI Cerrone et Cie (la SCI) de son lot en chambres meublées, le syndicat des copropriétaires de la communauté immobilière du [...] (le syndicat) l'a assignée en référé ; qu'une ordonnance irrévocable a condamné la SCI à remettre les lieux dans leur état initial et à supprimer un branchement illicite d'eaux usées ; que la SCI a assigné le syndicat, devant le juge du fond, pour voir dÃ

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LA COUR DE CASSATION, TROISIÈME CHAMBRE CIVILE, a rendu l'arrêt suivant :

Attendu, selon l'arrêt attaqué (Aix-en-Provence, 11 janvier 2018), que, se plaignant de la transformation par la SCI Cerrone et Cie (la SCI) de son lot en chambres meublées, le syndicat des copropriétaires de la communauté immobilière du [...] (le syndicat) l'a assignée en référé ; qu'une ordonnance irrévocable a condamné la SCI à remettre les lieux dans leur état initial et à supprimer un branchement illicite d'eaux usées ; que la SCI a assigné le syndicat, devant le juge du fond, pour voir déclarer prescrite l'action du syndicat et non fondées les condamnations mises à sa charge ;

Sur le deuxième moyen, ci-après annexé :

Attendu qu'il n'y a pas lieu de statuer par une décision spécialement motivée sur ce grief qui n'est manifestement pas de nature à entraîner la cassation ;

Mais sur les premier et troisième moyens, réunis :

Vu l'article 460 du code de procédure civile ;

Attendu que la nullité d'un jugement ne peut être demandée que par les voies de recours prévues par la loi ;

Attendu que l'arrêt déclare prescrite l'action en référé du syndicat en suppression du branchement des eaux usées et dit que le juge des référés a ordonné à tort la suppression matérielle des chambres meublées et la remise en état des lieux ;

Qu'en statuant ainsi, la cour d'appel, qui n'était pas saisie d'une voie de recours contre l'ordonnance de référé irrévocable, a violé le texte susvisé ;

PAR CES MOTIFS :

CASSE ET ANNULE, mais seulement en ce qu'il déclare prescrite l'action en référé du syndicat des copropriétaires de l'immeuble [...] aux fins de voir supprimer le branchement des eaux usées de la SCI Cerrone et Cie sur la descente d'eaux pluviales en façade de l'immeuble et dit que le juge des référés a ordonné à tort la suppression matérielle des chambres meublées et la remise des lieux dans leur état initial, l'arrêt rendu le 11 janvier 2018, entre les parties, par la cour d'appel d'Aix-en-Provence ; remet, en conséquence, sur ces points, la cause et les parties dans l'état où elles se trouvaient avant ledit arrêt et, pour être fait droit, les renvoie devant la cour d'appel d'Aix-en-Provence, autrement composée ;

Condamne la SCI Cerrone et Cie aux dépens ;

Vu l'article 700 du code de procédure civile, rejette la demande de la SCI Cerrone et Cie et la condamne à payer au syndicat des copropriétaires de la communauté immobilière du [...] la somme de 3 000 euros ;

Dit que sur les diligences du procureur général près la Cour de cassation, le présent arrêt sera transmis pour être transcrit en marge ou à la suite de l'arrêt partiellement cassé ;

Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, troisième chambre civile, et prononcé par le président en son audience publique du vingt et un février deux mille dix-neuf.

MOYENS ANNEXES au présent arrêt :

Moyens produits par la SCP Foussard et Froger, avocat aux Conseils, pour le syndicat des copropriétaires de la communauté immobilière du [...]

PREMIER MOYEN DE CASSATION :

L'arrêt infirmatif attaqué encourt la censure ;

EN CE QU' il a déclaré prescrite l'action en référé du Syndicat des Copropriétaires de l'immeuble aux fins de voir supprimer le branchement des eaux usées de la SCI CERRONE et CIE sur la descente des eaux pluviales en façade de l'immeuble ;

AUX MOTIFS QUE « la Sci Cerrone et Cie soulève la prescription de l'action du syndicat ayant abouti à la délivrance d'une ordonnance de référé rendue par le tribunal de grande instance de Nice en date du 26 février 2013 ; que la cour est certes saisie au fond sur appel du jugement en date du 18 avril 2016 el le syndicat fait le choix de s'abstenir de formuler devant elle des demandes reconventionnelles en condamnation ; que le juge du fond, saisi après l'intervention du juge des référés, doit vérifier le bien-fondé de la décision prise par celui-ci en fait comme en droit ; qu'ainsi, la fin de non recevoir tirée de la prescription peut être examinée ; qu'en application de l'article 42 alinéa 1 de la loi du 10 juillet 1965, les actions personnelles nées de l'application cette loi entre entre un copropriétaire et le syndicat se prescrivent par un délai de dix ans, l'article 2224 du code civil dans sa rédaction issue de la loi du 17 juin 2008 étant inapplicable en cette matière ; qu'en l'occurrence, le syndicat des copropriétaires de l'immeuble [...] a le 20 décembre 2012 fait assigner en référé la Soi Cortone et Cie aux fins d'obtenir la cessation par la Soi Cerrone et Cie d'une part de la location de chambres meublés et d'autre part du branchement d'évacuation des eaux usées sur la descente des eaux pluviales en façade de l'immeuble ; qu'or, ainsi qu'il sera examiné ci-dessous, il est reproché à la Sci Cerrone et Cie des baux conclus en 2010 et 2013 de sorte que la prescription de ce chef n'est pas acquise ; qu'en revanche, il est établi par une attestation de l'auteur de la Sci Cerrone et Cie, M. P..., que le branchement litigieux existait dès octobre 2002 ; que ce témoignage n'est pas utilement contredit pas les simples photographies du syndicat qui n'a eu recours ni à un huissier, ni à un technicien ; que dès lors, il doit être retenu que la prescription est acquise sur ce point » ;

ALORS QUE, premièrement, en vertu d'un principe que rappelle l'article 460 du code de procédure civile, une décision de justice, fût-elle rendue par le juge des référés, ne peut être anéantie que par le biais de l'exercice d'une voie de recours, telle que prévue par la loi ; que si même les demandes portées devant le juge du fond ont des affinités avec les demandes portées devant le juge des référés et auxquelles le juge des référés a fait droit, le juge du fond ne connait pas la décision du juge des référés par le truchement d'une voie de recours prévue par la loi ; que par suite, il était interdit à la Cour d'appel d'AIX-EN-PROVENCE, juge du fond, de considérer que la demande portée devant le juge des référés devait être déclarée prescrite ; qu'en décidant le contraire, la Cour d'appel d'AIX-EN-PROVENCE a violé le principe suivant lequel une décision ne peut être anéantie que dans le cadre de l'exercice d'une voie de recours et l'article 460 du code de procédure civile ;

ALORS QUE, deuxièmement, et en tout cas, il appartient au juge saisi de la demande, et à lui seul, d'apprécier le bien-fondé d'une fin de non-recevoir susceptible de lui être opposée ; qu'ainsi, le juge du fond ne pouvait se prononcer sur la fin de non-recevoir qui aurait pu être opposée à la demande du Syndicat des copropriétaires devant le juge des référés ; qu'en décidant le contraire, les juges du fond ont violé l'article 122 du code de procédure civile.

DEUXIÈ

ME MOYEN DE CASSATION :

L'arrêt infirmatif attaqué encourt la censure ;

EN CE QU' il a déclaré prescrite l'action en référé du Syndicat des copropriétaires de l'immeuble aux fins de voir supprimer le branchement des eaux usées de la SCI CERRONE et CIE sur la descente des eaux pluviales en façade de l'immeuble ;

AUX MOTIFS QUE « la Sci Cerrone et Cie soulève la prescription de l'action du syndicat ayant abouti à la délivrance d'une ordonnance de référé rendue par le tribunal de grande instance de Nice en date du 26 février 2013 ; que la cour est certes saisie au fond sur appel du jugement en date du 18 avril 2016 el le syndicat fait le choix de s'abstenir de formuler devant elle des demandes reconventionnelles en condamnation ; que le juge du fond, saisi après l'intervention du juge des référés, doit vérifier le bien-fondé de la décision prise par celui-ci en fait comme en droit ; qu'ainsi, la fin de non recevoir tirée de la prescription peut être examinée ; qu'en application de l'article 42 alinéa 1 de la loi du 10 juillet 1965, les actions personnelles nées de l'application cette loi entre entre un copropriétaire et le syndicat se prescrivent par un délai de dix ans, l'article 2224 du code civil dans sa rédaction issue de la loi du 17 juin 2008 étant inapplicable en cette matière ; qu'en l'occurrence, le syndicat des copropriétaires de l'immeuble [...] a le 20 décembre 2012 fait assigner en référé la Soi Cortone et Cie aux fins d'obtenir la cessation par la Soi Cerrone et Cie d'une part de la location de chambres meublés et d'autre part du branchement d'évacuation des eaux usées sur la descente des eaux pluviales en façade de l'immeuble ; qu'or, ainsi qu'il sera examiné ci-dessous, il est reproché à la Sci Cerrone et Cie des baux conclus en 2010 et 2013 de sorte que la prescription de ce chef n'est pas acquise ; qu'en revanche, il est établi par une attestation de l'auteur de la Sci Cerrone et Cie, M. P..., que le branchement litigieux existait dès octobre 2002 ; que ce témoignage n'est pas utilement contredit pas les simples photographies du syndicat qui n'a eu recours ni à un huissier, ni à un technicien ; que dès lors, il doit être retenu que la prescription est acquise sur ce point » ;

ALORS QUE, dans ses conclusions d'appel, la copropriété se prévalait de ce que le branchement des eaux usées sur la canalisation d'évacuation des eaux pluviales, appartenant à la copropriété, était contraire aux dispositions du règlement d'assainissement de la métropole Nice-Côte d'Azur en date du 12 octobre 2012 (conclusions, p. 18, § 2 et s. et p. 19, § 1- 3) ; qu'en s'abstenant de rechercher si, sous cet angle, le fait illicite n'était pas apparu lors de l'entrée en vigueur du règlement et si le point de départ de la prescription de dix ans ne devait être fixé à cette date, les juges du fond ont privé leur décision de base légale au regard de l'article 42 de la loi n°65-557 du 10 juillet 1965.

TROISIEME MOYEN DE CASSATION :

L'arrêt infirmatif attaqué encourt la censure ;

EN CE QU' il a dit que le juge des référés, qui ne pouvait qu'interdire la location de meublés, a ordonné à tort la suppression matérielle des chambres meublées et la remise en état des lieux dans leur état initial ;

AUX MOTIFS QUE « contrairement à ce que soutient la Sci Cerrone et Cie la preuve est rapportée que celle-ci est en infraction avec le règlement de copropriété pour louer en meublé et divisément des chambres de son appartement ; que néanmoins, la transformation matérielle de celui-ci ne peut lui être reprochée puisque le règlement de copropriété prévoit au contraire que chaque propriétaire pourra modifier comme bon lui semble la disposition intérieure de son appartement, sous quelques réserves dont il n'est pas allégué qu'elles seraient applicables à l'espèce ; que l'article 9 de la loi du 10 juillet 1965 prévoit également que chaque copropriétaire use et jouit librement de ses parties privatives sous la condition de ne pas porter atteinte aux droits des autres copropriétaires et à la destination de l'immeuble ; que dès lors, il doit être considéré que le juge des référés ne pouvait que faire interdiction à la Sci Cerrone et Cie de faire la location de chambres meublées et que c'est donc à tort qu'il a ordonné la suppression des chambres meublées et la remise des lieux en leur état initial, étant ajouté au demeurant que la consistance exacte des travaux de transformation n'est pas précisé pas plus que celle des travaux à réaliser pour une mise en conformité de l'appartement » ;

ALORS QUE, premièrement, en vertu d'un principe que rappelle l'article 460 du code de procédure civile, une décision de justice, fut-elle rendue par le juge des référés, ne peut être anéantie que par le biais de l'exercice d'une voie de recours, telle que prévue par la loi ; que si même les demandes portées devant le juge du fond ont des affinités avec les demandes portées devant le juge des référés et auxquelles le juge des référés a fait droit, le juge du fond ne connait pas la décision du juge des référés par le truchement d'une voie de recours prévue par la loi ; qu'à ce titre, il était exclu que la Cour d'appel d'AIX-EN-PROVENCE, juge du fond, puisse porter une appréciation sur la décision du juge des référés et décider qu'elle était juridiquement incorrecte ; qu'en décidant le contraire, à propos de la suppression matérielle des aménagements et de la remise en état des lieux, la Cour d'appel d'AIX-EN-PROVENCE a violé le principe suivant lequel une décision ne peut être anéantie que dans le cadre de l'exercice d'une voie de recours et l'article 460 du code de procédure civile ;

ET ALORS QUE, deuxièmement, la décision rendue par le juge du fond, dès lors qu'elle est incompatible avec ce qu'a pu décider précédemment le juge des référés, peut sans doute mettre un terme aux effets de la décision rendue en référé ; que toutefois cette solution procède d'un effet légalement attaché à la décision rendue par le juge du fond sans que le juge du fond puisse lui-même porter une appréciation sur la décision du juge des référés et décider lui-même qu'elle est juridiquement incorrecte ; qu'à cet égard, l'arrêt attaqué a été rendu en violation des articles 484 et 488 du code de procédure civile.


Synthèse
Formation : Chambre civile 3
Numéro d'arrêt : 18-13543
Date de la décision : 21/02/2019
Sens de l'arrêt : Cassation partielle
Type d'affaire : Civile

Références :

Décision attaquée : Cour d'appel d'Aix-en-Provence, 11 janvier 2018


Publications
Proposition de citation : Cass. Civ. 3e, 21 fév. 2019, pourvoi n°18-13543, Bull. civ.
Publié au bulletin des arrêts des chambres civiles

Composition du Tribunal
Président : M. Chauvin (président)
Avocat(s) : SCP Foussard et Froger, SCP Potier de La Varde, Buk-Lament et Robillot

Origine de la décision
Date de l'import : 12/03/2019
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CCASS:2019:18.13543
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