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13/02/2019 | FRANCE | N°18-10258

France | France, Cour de cassation, Chambre civile 1, 13 février 2019, 18-10258


LA COUR DE CASSATION, PREMIÈRE CHAMBRE CIVILE, a rendu l'arrêt suivant :

Attendu, selon l'arrêt attaqué (Douai, 19 octobre 2017), qu'un jugement a prononcé le divorce de M. L... et de Mme S... ;

Sur le premier moyen, ci-après annexé :

Attendu que Mme S... fait grief à l'arrêt de rejeter sa demande de prestation compensatoire ;

Attendu qu'ayant constaté que le revenu disponible de Mme S..., ainsi que la valeur de son patrimoine, étaient supérieurs à ceux de M. L... et que ni l'un ni l'autre ne justifiait de ses droits prévisibles à retraite, la cour d

'appel en a exactement déduit que le divorce ne créait pas, au détriment de l'épouse, ...

LA COUR DE CASSATION, PREMIÈRE CHAMBRE CIVILE, a rendu l'arrêt suivant :

Attendu, selon l'arrêt attaqué (Douai, 19 octobre 2017), qu'un jugement a prononcé le divorce de M. L... et de Mme S... ;

Sur le premier moyen, ci-après annexé :

Attendu que Mme S... fait grief à l'arrêt de rejeter sa demande de prestation compensatoire ;

Attendu qu'ayant constaté que le revenu disponible de Mme S..., ainsi que la valeur de son patrimoine, étaient supérieurs à ceux de M. L... et que ni l'un ni l'autre ne justifiait de ses droits prévisibles à retraite, la cour d'appel en a exactement déduit que le divorce ne créait pas, au détriment de l'épouse, une disparité dans leurs conditions de vie respectives ; que le moyen qui, en sa première branche, est inopérant et, en sa seconde branche, critique des motifs erronés mais surabondants, ne peut être accueilli ;

Sur le second moyen, ci-après annexé :

Attendu qu'il n'y a pas lieu de statuer par une décision spécialement motivée sur ce moyen qui n'est manifestement pas de nature à entraîner la cassation ;

PAR CES MOTIFS :

REJETTE le pourvoi ;

Condamne Mme S... aux dépens ;

Vu l'article 700 du code de procédure civile, rejette sa demande et la condamne à payer à M. L... la somme de 3 000 euros ;

Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, première chambre civile, et prononcé par le président en son audience publique du treize février deux mille dix-neuf.

MOYENS ANNEXES au présent arrêt :

Moyens produits par la SCP Waquet, Farge et Hazan, avocat aux Conseils, pour Mme S...

PREMIER MOYEN DE CASSATION :
:

IL EST FAIT GRIEF à l'arrêt attaqué D'AVOIR dit que la rupture du mariage ne créait pas dans les conditions de vie respectives des parties une disparité devant être compensée au profit de Mme S... ET D'AVOIR débouté l'ex-épouse de sa demande de prestation compensatoire ;

AUX MOTIFS QUE « Mme S... a produit à la procédure une déclaration sur l'honneur. M. L... n'a pas produit à la procédure la déclaration sur l'honneur susvisée. Il ressort de ces déclarations, des explications fournies et des pièces produites les éléments suivants : le mariage a duré 28 ans et la vie commune après le mariage 23 ans. Les époux ont eu ensemble 3 enfants ;

Situation de Mme S..., âgée de 50 ans, salariée :

- état de santé : sans particularité,

- qualification professionnelle: non justifiée, elle déclare être titulaire d'un BTS d'assistante de direction,

- situation professionnelle actuelle: assistante commerciale,

Ressources mensuelles personnelles:

- 2007: 1.043 euros,

- 2008 : 1.013 euros,

- 2009 à 2011 : 991 euros,

- 2012: chômage de décembre 2012 à juin 2013 : 962 euros/mois.

- 2014: 1.491 euros,

- 2015 : 1.308 euros,

- 2016: 1.316 euros,

- 2017 : salaire de 1.243 euros + 236,92 euros de prestations CAF,

Charges mensuelles actuelles auxquelles s'ajoutent les frais courants :

- loyer: 1.175 euros/mois,

- remboursement d'emprunts personnels : non justifiés,

Patrimoine personnel :

- portefeuille de titres Crédit du Nord: 34.002 euros en octobre 2016 (non déclaré dans l'attestation sur l'honneur mais pièce produite),

- épargne livret A: 4.600 euros (déclaration sur l'honneur),

- épargne PEA: 17.411 euros (déclaration sur l'honneur),

- épargne CARDIF: 15.250 euros (déclaration sur l'honneur),

- épargne entreprise: 19.097 euros + 13.687 euros (déclaration sur l'honneur),

- épargne banque populaire: 19.224 euros (déclaration sur l'honneur),

Que les conséquences des choix professionnels faits par l'un des époux pendant la vie commune pour l'éducation des enfants et du temps qu'il faudra encore y consacrer ou pour favoriser la carrière de son conjoint au détriment de la sienne:

- employée de juillet 1986 à décembre 1992,

- chômage de mars 1993 à janvier 1996 et arrêt de travail de février 1996 à novembre 2002 à mettre en perspective avec les enfants du couple nées en 1992, 1994 et 1997,

- assistante de direction au sein de la société EVANDIS FINANCES NORD de décembre 2002 à décembre 2011,

- chômage de décembre 2012 à juin 2013,

- agent administratif à la CPAM de janvier à avril 2014,

- assistante commerciale à compter de juin 2014 en CDI temps partiel,

- chômage de juin à septembre 2015,

- assistante commerciale à compter de décembre 2015 en CDI temps partiel, puis à compter de septembre 2016 à temps complet,

Droits à la retraite :

- points cumulés de 1986 à 2011 : 1407.14 points ARRCO et 362 points ARGIC,

- aucun point cumulé de 1997 à 2002, soit pendant 6 ans.

La vocation successorale ne constitue pas un droit prévisible. Toutefois, les biens propres ou personnels appartenant à un époux seulement en nue-propriété doivent être pris en compte pour déterminer le droit à une prestation compensatoire et son montant. S'agissant de biens immobiliers appartenant à un époux en nue-propriété seulement, il y a lieu de tenir compte de leur caractère difficilement négociable sur le marché et du fait qu'en principe les loyers générés sont présumés acquis et encaissés par l'usufruitier. En l'espèce, Mme S... a reçu de sa mère (usufruitière née [...] - 79 ans) la donation en nue-propriété

- d'un immeuble situé [...] ([...]), évalué à 350.000 euros en pleine propriété en 2011,

- d'un portefeuille d'actions dont la valeur n'est pas précisée ; toutefois il s'agit d'un quasi-usufruit dont la vocation successorale est très incertaine.

Il n'est pas justifié par M. L... qu'elle ferait ménage commun avec son nouveau compagnon qui dispose de sa propre résidence suivant les pièces produites.

Situation de M. L..., âgé de 53 ans :

- état de santé : sans particularité,

- qualification professionnelle : non justifiée,

Situation professionnelle :

- président salarié en contrat à durée indéterminée à la SAS DIAPASON en qualité de formateur depuis le 20 février 2017,

- travailleur indépendant du 1er décembre 2003 jusqu'au 21 mars 2016 : radiation justifiée,

ressources mensuelles antérieures :

- en 2007 : 8.607 euros (salaire).

- en 2008 : 4.584 euros (salaire),

- en 2009 : 8.000 euros (salaire),

- en 2010: 8.500 euros (salaire),

- en 2011 : 5.550 euros (salaire),

- en 2012: 218 euros (salaire) + 886 euros de capitaux mobiliers (année du dépôt de bilan de la société EVANDIS NORD et de l'emprunt à ses parents de 100.000 euros injectés dans le compte courant de cette dernière),

- en 2013 : 2.795 euros (salaire) + 974 euros de capitaux mobiliers,

- en 2014 : 867 euros de capitaux mobiliers,

- en 2015 : 1.596 euros (salaire) + 716 euros de capitaux mobiliers,

- en 2016: 1.625 euros (salaire) + 713 euros de capitaux mobiliers,

- en 2017 : salaire: 1.735 euros et revenus fonciers déficitaires : - 379,50 euros,

Charges mensuelles retenues par le premier juge non contesté :

- charges et impôts courants,

- loyer : 1 277 euros,

Patrimoine personnel :

- épargne salariale EVANDIS FINANCES NORD débloquée en 2012 et versée sur le compte joint des parties : 8.853.77 euros,

- épargne APRIL RETRAITE débloquée en décembre 2012 : 27.301 euros, - parts FCPI : 3.669 euros en décembre 2015 (= 1.325 euros + 2.344 euros),

- rachat assurance vie CARDIF en octobre 2012 : 6.036 euros,

- épargne salariale SARL EVANDIS NORD (retraite) en septembre 2016 :

21.102 euros,

50 % des parts de la société EVANDIS PATRIMOINE (capital social : 5.000 euros) dont il est co-gérant avec son associé selon les documents comptables produits au 31 décembre 2012 (résultats annuels de la société: 30.000 euros à 38.000 euros de 2010 à 2012, les pièces produites ne permettent pas de connaître le sort des bénéfices de cette société),

- passif RSI : 48 732 euros en septembre 2017,

- droits à la retraite : aucun élément produit.

Le premier juge a retenu la vie maritale de M L..., élément qu'il ne remet pas en cause devant la cour. M. L... justifie n'avoir aucune part sociale dans les sociétés EVANDIS FINANCES 77 et ADFI CONSElLS.

Il n'est pas justifié aux débats qu'il détiendrait des parts dans la société EVANDIS SAMBRE HAJNAUT qui a fait l'objet d'une dissolution au 31 janvier 2016. La société EVANDIS NORD a fait l'objet d'une liquidation judiciaire dont il n'est pas justifié par Mme S... qu'elle aurait été clôturée pour extinction du passif avec un actif subsistant La société EVANDIS FINANCES (SIREN 449 848 324) a fait l'objet d'une dissolution et d'une clôture de liquidation au 4 janvier 2013. M. L... est le seul associé de la société EVANDIS COURTAGE au capital de 1.000 euros. La société EVANDIS PATRIMOINE est évoquée plus haut (50 % des parts, capital social de 5.000 euros). S'agissant du patrimoine indivis entre les époux : aucun projet de liquidation n'est produit, les parties ne précisent pas la valeur des immeubles indivis ni leurs droits dans chacun de ces derniers, à l'exception de la résidence principale. Il convient de déplorer qu'en dépit du fait que le premier juge ait souligné un manque de transparence sur la situation des parties, ces dernières, et notamment Mme S..., n'a pas pris soin de justifier de la hauteur de ses droits indivis dans les immeubles locatifs et de la valeur vénale de ses derniers. A défaut d'éléments contraires, il convient de considérer que les revenus locatifs ont bénéficié aux deux conjoints avant leur séparation en 2012.

Les biens indivis sont les suivants :

- résidence principale du couple située [...] à Bondues (Nord) : 60 % revenant à M. L... et 40 % revenant à Mme S..., vendu à hauteur de 575.000 euros selon montant retenu par le premier juge qui indique que cette somme a permis de solder les prêts afférents ; toutefois les parties qui ne contestent pas le prix de vente retenu par le premier juge ne justifient pas du boni subsistant après l'apurement des prêts évoqués ;

- immeuble locatif [...] à Tourcoing grevé d'un prêt (capital restant dû en août 2016: 36.349 euros) ;

- immeuble locatif [...] à Halluin grevé d'un prêt (capital restant dû en août 2016 : 92.236 euros) ;

- immeuble locatif [...] à Halluin grevé d'un prêt (capital restant dû en août 2016: 13.144 euros + 53.190 euros) ;

- clôture PEA en novembre 2013 versé sur compte joint des parties : 18.000 euros.

En prenant en compte l'ensemble de ces éléments, notamment le niveau de qualification professionnelle de Mme S... avant son mariage et abstraction faite des donations qu'elle a pu recevoir en nue-propriété, il est manifeste qu'elle bénéficie à ce jour d'une épargne et de droit indivis conséquents. Son union avec M. L... lui a donc permis d'acquérir un patrimoine auquel elle n'aurait pu prétendre par ses seules capacités professionnelles et d'épargne. Les droits qu'elle va manifestement retirer de ses parts dans l'indivision compensent largement les 9 années consacrées à l'éducation de ses enfants. En parallèle, les sociétés créées par M. L... ont fait l'objet de liquidation judiciaire ou amiable ou ne développent manifestement pas de revenus ou de dividendes lui permettant d'accroître son patrimoine. Au regard de l'ensemble de ces éléments. Mme S... ne rapporte pas la preuve que la rupture du mariage crée dans les conditions de vie respectives des parties une disparité devant être compensée » ;

1) ALORS QUE les critères d'évaluation du montant de la prestation compensatoire doivent être distingués des conditions de son octroi ; que si les droits que retirent les époux de la liquidation du régime matrimonial doivent être pris en compte dans la fixation du montant de la prestation compensatoire, ils ne doivent pas être pris en considération dans l'appréciation de l'existence d'une disparité créée par la rupture du mariage ; que la cour d'appel ne pouvait déduire l'absence de disparité dans les conditions de vie respectives des époux du seul fait que les droits que Mme S... allait retirer de ses parts dans l'indivision compenseraient les années consacrées à l'éducation de ses enfants et que son union avec M. L... lui avait permis d'acquérir un patrimoine auquel elle n'aurait pu prétendre par ses seules capacités professionnelles et d'épargne ; qu'en rejetant la demande de prestation compensatoire de Mme S... par ces motifs, la cour d'appel a violé les articles 270 et 271 du code civil ;

2) ALORS QUE la prestation compensatoire a pour objectif de compenser la disparité résultant de la rupture du mariage et non la disparité résultant du choix fait par le couple pendant la durée du mariage ; que les circonstances antérieures, et notamment l'appartenance à une catégorie socio-professionnelle ou les différences de revenus existant entre les ex-époux antérieurement au prononcé du divorce ne doivent pas être prises en compte dans l'appréciation de l'existence d'une disparité créée par le divorce ; qu'en justifiant l'absence de disparité dans les conditions de vie des époux par le fait que l'union de Mme S... avec M. L... lui avait permis d'acquérir un patrimoine auquel elle n'aurait pu prétendre par ses seules capacités professionnelles et d'épargne et que les droits qu'elle allait retirer de la liquidation du régime matrimonial compensaient les années consacrées à l'éducation de enfants du couple, la cour d'appel s'est fondée sur des circonstances antérieures au prononcé du divorce pour rejeter la demande de prestation compensatoire et a ainsi violé les articles 270 et 271 du code civil.

SECOND MOYEN DE CASSATION :
:

IL EST FAIT GRIEF à l'arrêt attaqué D'AVOIR débouté Mme S... de sa demande de prestation compensatoire ET D'AVOIR limité la contribution à l'entretien et à l'éducation de Bérénice et Donatienne à la somme de 150 € par enfant et par mois ;

AUX MOTIFS QUE « M. L... justifie n'avoir aucune part sociale dans les sociétés EVANDIS FINANCES 77 et ADFI CONSElLS. Il n'est pas justifié aux débats qu'il détiendrait des parts dans la société EVANDIS SAMBRE HAJNAUT qui a fait l'objet d'une dissolution au 31 janvier 2016. La société EVANDIS NORD a fait l'objet d'une liquidation judiciaire dont il n'est pas justifié par Mme S... qu'elle aurait été clôturée pour extinction du passif avec un actif subsistant. La société EVANDIS FINANCES (SIREN 449 848 324) a fait l'objet d'une dissolution et d'une clôture de liquidation au 4 janvier 2013. M. L... est le seul associé de la société EVANDIS COURTAGE au capital de 1.000 euros. La société EVANDIS PATRIMOINE est évoquée plus haut (50 % des parts, capital social de 5.000 euros) » ;

ALORS QUE Mme S... faisait valoir d'une part, que la société Evandis Finances existait toujours comme le prouvait son référencement et le rapport officiel sur le site société.com (conclusions d'appel, p. 11), et d'autre part que les sociétés Evandis Finances 77 et ADFI Conseil, qui produisaient d'importants bénéfices, étaient des franchisés de la société Evandis Finances, ce qui n'était pas contesté par la partie adverse (conclusions d'appel, p. 12 à 14) ; qu'en jugeant que les sociétés créées par M. L... soit ont fait l'objet de liquidation judiciaire ou amiable, soit développent des revenus ou des dividendes ne lui permettant manifestement pas d'accroître son patrimoine, sans s'expliquer sur les éléments soulevés par Mme S..., la cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard des articles 270 et 271 du code civil.


Synthèse
Formation : Chambre civile 1
Numéro d'arrêt : 18-10258
Date de la décision : 13/02/2019
Sens de l'arrêt : Rejet
Type d'affaire : Civile

Références :

Décision attaquée : Cour d'appel de Douai, 19 octobre 2017


Publications
Proposition de citation : Cass. Civ. 1re, 13 fév. 2019, pourvoi n°18-10258


Composition du Tribunal
Président : Mme Batut (président)
Avocat(s) : SCP Monod, Colin et Stoclet, SCP Waquet, Farge et Hazan

Origine de la décision
Date de l'import : 15/09/2022
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CCASS:2019:18.10258
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