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07/02/2019 | FRANCE | N°17-26246

France | France, Cour de cassation, Chambre civile 3, 07 février 2019, 17-26246


LA COUR DE CASSATION, TROISIÈME CHAMBRE CIVILE, a rendu l'arrêt suivant :

Attendu, selon l'arrêt attaqué (Orléans, 10 avril 2017), que, par acte du 28 août 1997, la société civile immobilière de la Forêt (la SCI) a donné à bail commercial un ensemble immobilier à destination de centre équestre à la société à responsabilité limitée Les Ecuries de la Forêt (la SARL) dont Marjorie Z... et M. X..., son conjoint, étaient cogérants ; qu'elle a fait édifier sur une de ses parcelles une maison d'habitation donnée en location à Marjorie Z... par bail d'habitation du 25

septembre 2004 ; que, par lettre du 25 mai 2011, Marjorie Z... a déclaré résil...

LA COUR DE CASSATION, TROISIÈME CHAMBRE CIVILE, a rendu l'arrêt suivant :

Attendu, selon l'arrêt attaqué (Orléans, 10 avril 2017), que, par acte du 28 août 1997, la société civile immobilière de la Forêt (la SCI) a donné à bail commercial un ensemble immobilier à destination de centre équestre à la société à responsabilité limitée Les Ecuries de la Forêt (la SARL) dont Marjorie Z... et M. X..., son conjoint, étaient cogérants ; qu'elle a fait édifier sur une de ses parcelles une maison d'habitation donnée en location à Marjorie Z... par bail d'habitation du 25 septembre 2004 ; que, par lettre du 25 mai 2011, Marjorie Z... a déclaré résilier le bail commercial pour raisons de santé ; qu'elle est décédée le [...] ; que, par lettre du 25 juin 2011, la SCI a donné son accord à la SARL sur la rupture anticipée de ce bail, la résiliation devant prendre effet six mois plus tard ; que la SARL s'est maintenue sur les lieux et que, par déclaration du 16 janvier 2014, M. X... et la SARL ont saisi le tribunal paritaire des baux ruraux en reconnaissance d'un bail rural, depuis juin 2011, sur les parcelles et bâtiments ;

Sur le premier moyen, ci-après annexé :

Attendu que M. X... et la SARL font grief à l'arrêt de déclarer irrecevables leurs demandes relatives au bail sur la maison d'habitation ;

Mais attendu, d'une part, qu'ayant relevé que le bail d'habitation avait été conclu le 25 septembre 2004 sur la maison nouvellement construite et que l'action en requalification avait été introduite le 16 janvier 2014, la cour d'appel, sans statuer sur le fond ni excéder ses pouvoirs, en a exactement déduit que les demandes relatives au bail ayant pour objet cette maison étaient irrecevables comme tardives ;

Attendu, d'autre part, qu'ayant relevé que le bail commercial avait été conclu le 28 août 1997 et résilié amiablement le 25 mai 2011, que le bail d'habitation avait été conclu le 25 septembre 2004 sur la maison construite après démolition d'un bâtiment vétuste, que Marjorie Z..., cogérante de la SARL exploitant le centre équestre, avait accompli les démarches en vue de cette opération, que son compagnon et elle-même, jusqu'à son décès, avaient occupé la maison avec leur enfant, les loyers étant réglés par le couple et que M. X... y habitait toujours et réglait les loyers, la cour d'appel, qui n'a pas dénaturé les conclusions dont elle était saisie et qui n'était pas tenue de suivre les parties dans le détail de leur argumentation, a retenu souverainement que le bail d'habitation se substituait au bail commercial initial et était opposable tant à la SARL qu'à ses cogérants et exactement que sa conclusion constituait le point de départ du délai de prescription de l'action en reconnaissance d'un bail rural ;

D'où il suit que le moyen n'est pas fondé ;

Sur le second moyen, ci-après annexé :

Attendu que M. X... et la SARL font grief à l'arrêt de dire qu'ils sont sans droit ni titre sur les installations équestres en l'absence de bail rural ;

Mais attendu qu'ayant retenu exactement que la charge de la preuve d'un bail statutaire et d'une manifestation de volonté certaine du propriétaire de mettre son bien à la disposition d'un exploitant agricole incombe à celui qui s'en prévaut et, souverainement, qu'à la suite de la résiliation amiable du bail commercial, acceptée le 25 juin 2011, la SCI avait laissé la SARL occuper provisoirement les locaux précédemment loués au-delà du délai de délaissement qui avait été conventionnellement fixé à six mois à compter de l'acceptation de la résiliation, puis tenté d'obtenir l'exécution de l'engagement de libérer les locaux, la cour d'appel a pu en déduire que, dans un tel contexte, le maintien dans les lieux à titre de simple tolérance et le règlement d'une somme en contrepartie ne suffisaient pas à caractériser un bail rural ;

D'où il suit que le moyen n'est pas fondé ;

PAR CES MOTIFS :

REJETTE le pourvoi ;

Condamne M. X... et la société Les Ecuries de la Forêt aux dépens ;

Vu l'article 700 du code de procédure civile, rejette les demandes ;

Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, troisième chambre civile, et prononcé par le président en son audience publique du sept février deux mille dix-neuf.

MOYENS ANNEXES au présent arrêt :

.

Moyens produits par la SCP Garreau, Bauer-Violas et Feschotte-Desbois, avocat aux Conseils, pour M. X... et la société Les Ecuries de la forêt.

PREMIER MOYEN DE CASSATION :

Le moyen reproche à l'arrêt attaqué d'avoir dit la Sarl Les Écuries de la Forêt et M. Bertrand X... irrecevables en leurs demandes relatives au bail sur la maison d'habitation et d'avoir confirmé en toutes ses dispositions le jugement ayant débouté la Sarl Les Écuries de la Forêt et M. Bertrand X... de leurs demandes, constaté que la maison d'habitation sise sur la parcelle [...] [en réalité, 30] fait l'objet d'un bail d'habitation en date du 25 septembre 2004 et, de ce fait, l'absence de bail rural sur les installations équestres et la maison d'habitation ;

AUX MOTIFS QUE

« sur la prescription :

Attendu que l'intimée soutient devant la cour que les appelants disposaient, conformément aux dispositions de l'article 2224 du code civil, d'un délai de cinq ans à compter de la conclusion des conventions litigieuses pour en solliciter la requalification en bail rural et que la demande formée le 16 janvier 2014 serait irrecevable comme prescrite ;

Attendu que selon l'article 2224 précité, les actions personnelles ou mobilières se prescrivent par cinq ans à compter du jour où le titulaire d'un droit a connu ou aurait dû connaître les faits lui permettant de l'exercer ;

Attendu que pour pouvoir examiner le bien-fondé de cette fin de non-recevoir, il convient d'analyser les différentes conventions qui ont été conclues entre les parties ;

Attendu, en premier lieu, qu'entre la SCI de la FORET et la SARL Les ECURIES DE LA FORET, représentée par Marjorie Z... et M. X..., un bail commercial a été signé le 28 août 1997 qui a porté sur les parcelles [...] et [...] , situées sur la commune de [...], désignées comme "un corps de bâtiment à usage d'écuries comprenant également un "club house", deux chambres, sanitaires, vestiaires, sellerie, bureau, boxes, graineterie, un hangar à usage de dépôt de paille et une maison d'habitation vétuste", ces locaux devant être exclusivement consacrés "à l'activité équestre : cours, stage, achat ou vente de chevaux et toute activité se reportant à l'équitation" ; que la SARL LES ECURIES DE LA FORET a bénéficié à compter du 7 mars 2000, pour la poursuite de son activité, de la mise à disposition par la SCI DE LA FORET de deux autres parcelles [...] et [...] , contigus aux précédentes, sans nouvelle convention ;

Que le bail commercial a été dénoncé le 25 mai 2011, par Mme Marjorie Z..., agissant en qualité de co-gérante de la SARL LES ECURIES DE LA FORET, résiliation anticipée qui a été acceptée le 25 juin 2011 par la SCI de LA FORET, dans une lettre contresignée par M. X... ;

Que la SARL LES ECURIES DE LA FORET et son gérant, M. X..., qui se sont maintenus dans les lieux après cette date pour y poursuivre l'activité de centre équestre, dans les locaux objets du bail commercial résilié ainsi que dans ceux mis à leur disposition à compter du 7 mars 2000, ne demandent pas une requalification du bail commercial en bail rural mais revendiquent le bénéfice du statut du fermage pour régir les relations entre les parties, à partir de la résiliation du bail commercial ; que leur action, qui est née à compter du [...] et a été engagée le [...] , relativement aux locaux servant à l'activité de Centre équestre, n'est donc pas prescrite ;

Attendu, en second lieu, qu'un bail d'habitation a été conclu le 25 septembre 2004 entre la SCI de LA FORET et Mme Marjorie Z... portant sur une maison d'habitation située sur la parcelle [...] , construite après démolition de la maison d'habitation vétuste qui y figurait ;

Qu'il est constant que M. X..., compagnon de Mme Z..., a occupé la maison nouvellement construite avec celle-ci et leur enfant commun et que les loyers mensuels ont été réglés de manière régulière avec le compte joint du couple ; que d'ailleurs, M. X..., auquel le bail a été transféré après le décès de sa concubine, le [...] , en application de l'article 14 de la loi du 6 juillet 1989, occupe toujours les lieux loués et continue à régler le loyer ; qu'il ne peut donc sérieusement prétendre que le bail qui perdure toujours, ne lui a pas été opposable dès sa conclusion ;

Que ce bail est également opposable à la SARL LES ECURIES DE LA FORET ; qu'il ressort, en effet, des éléments de la cause que Marjorie Z... et M. X... étaient les deux seuls associés et les gérants de la SARL LES ECURIES DE LA FORET à l'époque de sa conclusion ; que cette opération s'est réalisée dans la suite immédiate de l'acquisition par la SCI de la FORET de deux autres parcelles mises à disposition de la SARL pour agrandir le Centre équestre et en parfaite transparence à l'égard de cette dernière ;

Que c'est bien Mme Marjorie Z..., alors co-gérante de la SARL appelante, qui a effectué les démarches en vue de l'obtention du permis de démolir l'ancienne maison vétuste et du permis de construire la nouvelle maison d'habitation, située sur la parcelle [...], ce que M. X..., également cogérant de la SARL, occupant du bien et exploitant du Centre équestre, n'a pu ignorer ;

Que c'est donc avec justesse, au regard des circonstances particulières de la conclusion du bail et des relations étroites unissant les parties, que la SCI Intimée, suivie en cela par le premier juge, soutient que la conclusion d'un bail d'habitation sur la maison d'habitation nouvellement construite, venant se substituer au bail commercial en ce qu'il portait sur la parcelle accueillant la maison, était parfaitement connue de la SARL LES ECURIES DE LA FORET et de ses deux co-gérants ;

Que la SARL LES ECURIES DE LA FORET et M. X... qui n'ont pas agi, en temps utile, à l'encontre de la SCI de la FORET pour contester la conclusion de ce bail et obtenir une éventuelle indemnité d'éviction au titre du bail commercial consenti, ne sont plus recevables à agir pour revendiquer le bénéfice d'un bail rural relativement à la maison d'habitation, leur action étant prescrite ;

Que la fin de non-recevoir tirée de la prescription sera donc rejetée en ce qu'elle vise la réclamation d'un bail rural relativement aux locaux exploités en Centre Equestre mais accueillie en ce qu'elle concerne la réclamation d'un bail rural relativement à la maison d'habitation construite sur les 3100 m2 de la parcelle [...] ; » (arrêt, p. 6, al. 3 à p. 8, al. 4) ;

ET AUX MOTIFS EVENTUELLEMENT ADOPTES QUE

« Sur l'existence d'un bail rural

En vertu des dispositions de l'article L. 411-1 du Code rural et de la pêche maritime : « Toute mise à disposition à titre onéreux d'un immeuble à usage agricole en vue de l'exploiter pour y exercer une activité agricole définie à l'article L. 311-1 est régie par les dispositions du présent titre, sous les réserves énumérées à l'article L. 411-2. Cette disposition est d'ordre public.

II en est de même, sous réserve que le cédant ou le propriétaire ne démontre que le contrat n'a pas été conclu en vue d'une utilisation continue ou répétée des biens et dans l'intention de faire obstacle à l'application du présent titre :

- de toute cession exclusive des fruits de l'exploitation lorsqu'il appartient à l'acquéreur de les recueillir ou de les faire recueillir,

- des contrats conclus en vue de la prise en pension d'animaux par le propriétaire d'un fonds à usage agricole lorsque les obligations qui incombent normalement au propriétaire du fonds en application des dispositions du présent titre sont mises à la charge du propriétaire des animaux.

La preuve de l'existence des contrats visés dans le présent article peut être apportée par tous moyens. »

(
)

En vertu de l'article L. 311-1 du même code :

« Sont réputées agricoles toutes les activités correspondant à la maîtrise et à l'exploitation d'un cycle biologique de caractère végétal ou animal et constituant une ou plusieurs étapes nécessaires au déroulement de ce cycle ainsi que les activités exercées par un exploitant agricole qui sont dans le prolongement de l'acte de production ou qui ont pour support l'exploitation. Les activités de cultures marines sont réputées agricoles, nonobstant le statut social dont relèvent ceux qui les pratiquent. R en est de même des activités de préparation et d'entraînement des équidés domestiques en vue de leur exploitation, à l'exclusion des activités de spectacle (...) ».

Enfin, en vertu de l'article 1271 du Code civil :

« La novation s'opère de trois manières :

1° Lorsque le débiteur contracte envers son créancier une nouvelle dette qui est substituée à l'ancienne, laquelle est éteinte ;

2° Lorsqu'un nouveau débiteur est substitué à l'ancien qui est déchargé par le créancier ;

3° Lorsque, par l'effet d'un nouvel engagement, un nouveau créancier est substitué à l'ancien, envers lequel le débiteur se trouve déchargé. »

Il est constant que les juges du fond disposent d'un pouvoir souverain pour apprécier l'intention des parties et que la novation qui peut intervenir tant par changement de l'obligation que par changement de créancier ou de débiteur à l'obligation, n'a pas à être expresse et il suffit qu'elle soit claire et non équivoque.

En l'espèce, s'agissant de la maison d'habitation, si le bail commercial dont bénéficiait la S.A.R.L. LES ECURIES DE LA FORET a commencé à courir du 1er septembre 1997 et portait aussi notamment sur la maison d'habitation sise sur la parcelle [...] , il est établi que :

- la maison d'habitation a fait l'objet d'un bail d'habitation consenti à Mme Marjorie Z... le 25 septembre 2004,

- Mme Marjorie Z..., en sa qualité de gérante de la S.A.R.L. LES ECURIES DE LA FORET, avait toute qualité pour résilier partiellement le bail commercial et M. X... ne peut valablement soutenir avoir ignoré cette résiliation partielle et la conclusion du bail d'habitation le 25 septembre 2004, occupant toujours les lieux avec l'enfant commun depuis cette date et réglant des loyers avec le compte commun (pièce n° 18) ;

Aussi, en concluant un bail d'habitation sur la maison d'habitation nouvellement construite, les parties ont nécessairement entendu résilier le bail commercial en ce qu'il portait sur la parcelle accueillant cette maison ;

(
)

En conséquence, il résulte de ce qui précède que la maison d'habitation fait l'objet d'un bail d'habitation en date du 25 septembre 2014 (
)

M. Bernard X... et la S.A.RL. LES ECURIES DE LA FORET seront donc déboutés de leurs demandes ; » (jugement, p. 6 à p. 7, antépénultième al. et p. 8, al. 2 et 3) ;

1°) ALORS QU'une cour d'appel qui décide que la demande dont elle est saisie est irrecevable, excède ses pouvoirs en statuant ensuite au fond ; qu'en l'espèce, la cour d'appel a déclaré la Sarl les Écuries de la Forêt et M. Bertrand X... irrecevables en leurs demandes relatives au bail sur la maison d'habitation ; qu'en rejetant ensuite cette demande au fond, en confirmant, « en toutes ses dispositions », le jugement qui avait débouté la Sarl les Écuries de la Forêt et M. Bertrand X... de leurs demandes, constaté que la maison d'habitation sise sur la parcelle [...] fait l'objet d'un bail d'habitation en date du 25 septembre 2004 et, de ce fait, l'absence de bail rural sur la maison d'habitation, et en rejetant « l'ensemble » des demandes des exposants, la cour d'appel a excédé ses pouvoirs, en violation des articles 122 et 562 du code de procédure civile ;

2°) ALORS QUE les actes sous seing privé n'ont de date contre les tiers, et ne peuvent leur être opposables, que du jour où ils ont été enregistrés, du jour de la mort de celui ou de l'un de ceux qui l'ont souscrits, ou du jour où leur substance est constatée dans les actes dressés par des officiers publics ; qu'en l'espèce, il était constant d'une part, que le bail d'habitation entre la Sci de la Forêt et Marjorie Z... prétendument conclu le 25 septembre 2004 avait été constaté par acte sous seing privé et, d'autre part, qu'aucune des hypothèses visées à l'article 1328 n'était remplie à la date de sa conclusion ; qu'en retenant, pour juger que ce bail était opposable dès sa conclusion à M. X... et à la Sarl les Ecuries de la Forêt, que M. X..., compagnon de Mme Z..., avait occupé la maison nouvellement construite avec celle-ci et leur enfant commun, quand elle constatait que la parcelle sur laquelle était située la maison faisait partie de l'objet du bail commercial conclu le 28 août 1997 entre la Sci et la Sarl, la cour d'appel a statué par des motifs inopérants et violé l'article 1328 ancien du code civil, devenu l'article 1377 du même code ;

3°) ALORS QU'en se bornant à retenir, pour juger que ce bail était opposable dès sa conclusion aux exposants, que c'était Marjorie Z..., alors co-gérante de la Sarl appelante, qui avait effectué les démarches en vue de l'obtention du permis de démolir 1'ancienne maison vétuste et du permis de construire la nouvelle maison d'habitation, située sur la parcelle [...] , ce que M. X..., également cogérant de la Sarl, occupant du bien et exploitant du Centre équestre, n'aurait pu ignorer sans rechercher, ainsi qu'elle y était invitée (conclusions d'appel des exposants, p. 17, al. 3 et s.), si ce n'était pas en tant que cogérante de la Sarl que Marjorie Z... avait demandé ces permis et, en conséquence, si, ainsi que cela ressortait des permis eux-mêmes, ceux-ci n'avaient pu être obtenus que parce que la maison était nécessaire à la Sarl pour son activité agricole, la parcelle [...] se trouvant en zone NC ne permettant que les constructions nécessaires à une exploitation agricole, ce dont il s'inférait nécessairement que M. X... n'avait pu se douter que les permis avaient été demandés, à titre personnel, par sa compagne, afin de lui permettre de conclure un bail d'habitation sur la maison, la cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard de l'article 1328 ancien du code civil, devenu l'article 1377 du même code ;

4°) ALORS, subsidiairement, à supposer qu'il soit considéré que la cour d'appel aurait implicitement effectué la recherche requise, QU'en retenant, pour juger que ce bail était opposable dès sa conclusion aux exposants, que c'était Marjorie Z..., alors co-gérante de la Sarl appelante, qui avait effectué les démarches en vue de l'obtention du permis de démolir l'ancienne maison vétuste et du permis de construire la nouvelle maison d'habitation, située sur la parcelle [...] , ce que M. X..., également cogérant de la Sarl, occupant du bien et exploitant du Centre équestre, n'aurait pu ignorer, quand il ressortait nécessairement de ces constatations que ces permis avaient été conclus dans le cadre de l'activité de la Sarl pour son activité agricole, de sorte que M. X... n'avait pu avoir connaissance du fait que les permis avaient été demandés, à titre personnel, par sa compagne, afin de lui permettre de conclure un bail d'habitation sur la maison, la cour d'appel n'a pas déduit les conséquences légales de ses constatations, en violation de l'article 1328 ancien du code civil, devenu l'article 1377 du même code ;

5°) ALORS QUE le juge ne peut dénaturer les conclusions des parties ; que dans leurs conclusions d'appel, les exposants soutenaient que la Sci de la Forêt ne rapportait pas la preuve du paiement, avec le compte joint des époux X..., des loyers fixés par le bail d'habitation de 2004 qu'elle invoquait, les paiements évoqués dans la pièce 18 produite par la Sci à l'appui de ses allégations ne visant nullement les loyers de la maison puisqu'ils concernaient des paiements de 350 euros par mois, ce que ne contestait pas la Sci, quand le bail d'habitation prévoyait un loyer de 720 euros par mois ; qu'en retenant, pour considérer que le bail d'habitation serait opposable à M. X... et déclarer son action en revendication d'un bail rural relativement à la maison d'habitation prescrite, « qu'il est constant (
) que les loyers mensuels ont été réglés de manière régulière avec le compte joint du couple », la cour d'appel a dénaturé les conclusions des exposants en méconnaissance de l'article 4 du code de procédure civile ;

6°) ALORS, subsidiairement, QUE la novation est une convention par laquelle les parties décident d'éteindre une obligation ancienne pour la remplacer par une obligation nouvelle ; qu'il s'ensuit qu'il n'y a novation que lorsque l'opération emporte, de manière simultanée et indissociable, l'extinction d'une obligation préexistante et la création d'une obligation nouvelle ; qu'en retenant, pour juger que la conclusion d'un bail d'habitation sur la maison d'habitation nouvellement construite était venue se substituer au bail commercial en ce qu'il portait sur la parcelle accueillant la maison et déclarer l'action des exposants en revendication d'un bail rural relativement à la maison d'habitation prescrite, que la conclusion du bail d'habitation s'était réalisée « dans la suite immédiate » de l'acquisition par la Sci de deux autres parcelles mises à disposition de la Sarl pour agrandir le Centre équestre, quand elle constatait par ailleurs que l'acquisition par la Sci des deux autres parcelles mises à disposition de la Sarl avait eu lieu en mars 2000 tandis que le bail d'habitation avait été conclu plus de quatre ans après, le 25 septembre 2004, ce dont il s'inférait nécessairement qu'il n'y avait pas eu novation, celle-ci supposant, de manière simultanée et indissociable, l'extinction d'une obligation préexistante et la création d'une obligation nouvelle, la cour d'appel n'a pas tiré les conséquences légales de ses constatations, en violation de l'article 1271 ancien du code civil, devenu l'article 1329 du code civil.

SECOND MOYEN DE CASSATION :

Le moyen reproche à l'arrêt confirmatif attaqué d'avoir constaté l'absence de bail rural sur les installations équestres et sur la maison d'habitation, et, en conséquence, d'avoir dit que la Sarl les Ecuries de la Forêt est sans droit ni titre sur les installations équestres appartenant à la Sci de la Forêt, et débouté M. Bernard X... et la Sarl les Ecuries de la Forêt de l'ensemble de leurs demandes ;

AUX MOTIFS QUE

« sur la revendication d'un bail rural sur le centre équestre :

Attendu que pour que le statut du fermage soit applicable, il faut, en vertu de l'article L. 411-1 du code rural et de la pêche maritime, une mise à disposition à titre onéreux d'un immeuble à usage agricole en vue de l'exploiter pour y exercer une activité agricole définie à l'article L. 311-1;

Que la loi n° 2005-157 du 23 février 2005 a complété l'article L. 311-1 en réputant agricoles les "activités de préparation et d'entraînement des équidés domestiques en vue de leur exploitation, à l'exclusion des activités de spectacle" ;

Que la preuve du bail s'établit par tous moyens ; que la charge de la preuve de l'existence du bail incombe à celui qui s'en prévaut et l'occupation des lieux ne suffit pas à établir la preuve du bail qui suppose en particulier que soit établie la volonté du propriétaire de mettre son bien à disposition d'un locataire, son consentement à l'existence d'un bail ;

Attendu qu'il n'est pas contesté, en l'espèce, que l'activité exercée par la SARL LES ECURIES de LA FORET et M. X... dans les lieux litigieux constitue une activité agricole au sens de l'article L. 311-1du code rural et de la pêche maritime, dans sa rédaction applicable au litige ;

Qu'il est exact qu'il n'y a eu entre les parties aucun accord de prorogation du bail commercial ni conclusion d'une convention d'occupation précaire conforme aux dispositions de l'article L. 411-2 du code rural et de la pêche maritime, ce que d'ailleurs la SCI intimée ne [le] soutient plus en appel ;

Qu'il est établi qu'ensuite de la résiliation amiable du bail commercial, acceptée le 25 juin 2011, la SCI de la FORET a laissé la SARL LES ECURIES de la FORET occuper les locaux précédemment loués à usage de centre équestre au-delà du délai de délaissement des lieux qui avait été conventionnellement fixé à six mois à compter de l'acceptation de la résiliation et a donc expiré le 26 décembre 2011 ; qu'elle a perçu des loyers, appelés chaque mois en contrepartie de la "location" jusqu'au mois de novembre 2012 puis appelés comme "indemnités d'occupation" à compter de cette date ;

Que, pour autant, il ne peut être déduit de ces éléments la preuve que la SCI intimée a accepté de consentir à la SARL LES ECURIES de LA FORET et à M. X... une location soumise au statut des baux ruraux sur les locaux litigieux ; qu'il résulte, au contraire, des courriers échangés entre les parties au cours de l'année 2012, que la SCI Intimée a d'emblée tenté d'obtenir l'exécution de l'engagement pris par la co-gérante de la SARL LES ECURIES DE LA FORET le 25 mai 2011, ensuite de la demande de résiliation amiable du bail commercial, de laisser libre les locaux loués dans un délai de 6 mois à compter de la formalisation de leur accord ; qu'ainsi, dans une lettre adressée le 13 février 2012, à la SARL, la gérante de la SCI a rappelé à cette dernière l'engagement pris, non respecté à la date fixée (décembre 2011) et sollicité une rencontre afin de "mettre en place les modalités" du départ de la SARL ; que si par la suite des discussions ont été entamées entre les parties en vue de la vente des biens loués à M. X... et/ou à la SARL appelante, cette discussion n'a pas été suivie d'effet et la SCI de la FORET a fait signifier le 7 novembre 2012 à la SARL un commandement de quitter les lieux avant le 15 janvier 2013, à défaut de quoi elle engagerait toutes procédures judiciaires pour obtenir son expulsion ; que, dans ce contexte, le maintien dans les lieux et le règlement d'un "loyer" et non d'une "indemnité d'occupation" au cours de la période des pourparlers en vue d'une éventuelle vente, ne sont pas suffisants à caractériser les conditions d'un bail rural, à défaut de démonstration d'une volonté certaine et non équivoque du propriétaire de consentir un tel bail ;

Qu'en conséquence, le jugement sera confirmé en ce qu'il a débouté M. X... et la SARL LES ECURIES DE LA FORET de leurs demandes et dit que la SARL les ECURIES DE LA FORET était sans droit ni titre sur les locaux et installations équestres appartenant à la SCI de LA FORET ; » (arrêt, p. 8, al. 5 à p. 9, dernier al.) ;

1°) ALORS QUE la cassation d'une disposition attaquée par un moyen s'étend aux dispositions de l'arrêt attaqué qui se trouvent dans un lien d'indivisibilité ou de dépendance nécessaire avec le chef de dispositif censuré ; que la censure qui interviendra sur le premier moyen de cassation entrainera la cassation des chefs de dispositif attaqués par le présent moyen, par application de l'article 624 du code de procédure civile ;

2°) ALORS QU'en dehors de cas limitativement prévus par l'article L. 411-2 du code rural et de la pêche maritime, toute mise à disposition à titre onéreux d'un immeuble à usage agricole en vue de l'exploiter pour y exercer une activité agricole définie à l'article L. 311-1 est soumise au statut d'ordre public du fermage ; qu'en retenant, pour juger que la Sarl les Ecuries de la Forêt n'était pas titulaire d'un bail rural sur les installations équestres, que le maintien dans les lieux autorisé par le propriétaire, pendant plus de onze mois au-delà du délai de délaissement des lieux convenu à la suite de la résiliation du bail commercial et le règlement, pendant cette période, d'un loyer, étant dû à l'existence de pourparlers en vue d'une éventuelle vente, ne seraient pas suffisants à caractériser les conditions d'un bail rural, à défaut de démonstration d'une volonté certaine et non équivoque du propriétaire de consentir un tel bail, quand elle avait par ailleurs constaté qu'il n'y avait eu entre les parties aucun accord de prorogation du bail commercial ni conclusion d'une convention d'occupation précaire conforme aux dispositions de l'article L. 411-2 du code rural et de la pêche maritime, ce que d'ailleurs la Sci intimée ne soutenait plus en appel, la cour d'appel, qui n'a pas tiré les conséquences légales de ses constatations, a violé les articles L. 411-1 et L. 411-2 de ce code, qui sont d'ordre public ;

3°) ALORS, en tout état de cause, QUE toute mise à disposition à titre onéreux d'un immeuble à usage agricole en vue de l'exploiter pour y exercer une activité agricole définie à l'article L. 311-1 est soumise au statut d'ordre public du fermage ; qu'en retenant, pour juger que la Sarl les Ecuries de la Forêt n'était pas titulaire d'un bail rural sur les installations équestres, que le maintien dans les lieux autorisé par le propriétaire, pendant plus de onze mois, au-delà du délai de délaissement des lieux convenu à la suite de la résiliation du bail commercial et le règlement, pendant cette période, d'un loyer, étant due à l'existence de pourparlers en vue d'une éventuelle vente, ne seraient pas suffisants à caractériser les conditions d'un bail rural, à défaut de démonstration d'une volonté certaine et non équivoque du propriétaire de consentir un tel bail, sans rechercher, ainsi qu'elle y était invitée (conclusions d'appel, p. 7, al. 7 et s.), si la modification unilatérale, par le propriétaire, du montant du loyer à compter du mois de juillet 2011, soit immédiatement après l'accord de résiliation du bail commercial intervenu en juin 2011, ne traduisait pas son intention de conclure un nouveau contrat de bail, rural, avec la Sarl les Ecuries de la Forêt, la cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard de l'article L. 411-1 du code rural et de la pêche maritime.


Synthèse
Formation : Chambre civile 3
Numéro d'arrêt : 17-26246
Date de la décision : 07/02/2019
Sens de l'arrêt : Rejet
Type d'affaire : Civile

Références :

Décision attaquée : Cour d'appel d'Orléans, 10 avril 2017


Publications
Proposition de citation : Cass. Civ. 3e, 07 fév. 2019, pourvoi n°17-26246


Composition du Tribunal
Président : M. Chauvin (président)
Avocat(s) : SCP Garreau, Bauer-Violas et Feschotte-Desbois, SCP Rocheteau et Uzan-Sarano

Origine de la décision
Date de l'import : 15/09/2022
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CCASS:2019:17.26246
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