LA COUR DE CASSATION, PREMIÈRE CHAMBRE CIVILE, a rendu l'arrêt suivant :
Attendu, selon l'arrêt attaqué, que, le 31 mai 2007, la société HSBC France (la banque) a consenti à M. et Mme X... (les emprunteurs) un découvert autorisé en compte courant, d'un montant de 5 000 euros, d'une durée d'un mois renouvelable par tacite reconduction ; que, le 13 février 2012, la banque a assigné les emprunteurs en paiement d'une certaine somme au titre de ce concours financier ; que les emprunteurs ont soulevé la fin de non-recevoir tirée de la forclusion de l'action ;
Sur les deuxième et troisième moyens, ci-après annexés :
Attendu qu'il n'y pas lieu de statuer par une décision spécialement motivée sur ces moyens, qui ne sont manifestement pas de nature à entraîner la cassation ;
Mais sur le moyen relevé d'office, après avis donné aux parties dans les conditions de l'article 1015 du code de procédure civile :
Vu les articles L. 311-3 et L. 311-37 du code de la consommation, dans leur rédaction antérieure à celle issue de la loi n° 2010-737 du 1er juillet 2010 ;
Attendu que l'ouverture de crédit consentie par une banque à un client sous la forme d'un découvert autorisé en compte, d'un montant inférieur au seuil maximal d'application des dispositions relatives au crédit à la consommation, pour une durée supérieure à trois mois, est soumise à ces dispositions ;
Attendu que, pour déclarer l'action non forclose, l'arrêt relève, d'abord, que le découvert s'élevait, le 29 avril 2008, à la somme de 31 474,13 euros, sans jamais être ramené au montant autorisé pendant les trois mois qui ont suivi ; qu'il retient, ensuite, que le montant du crédit étant supérieur à la somme de 21 500 euros, ce concours n'est pas soumis aux dispositions régissant le crédit à la consommation ;
Qu'en statuant ainsi, alors qu'elle avait relevé que l'autorisation de découvert en compte s'élevait à 5 000 euros, soit un montant inférieur au seuil maximal d'application du régime du crédit à la consommation, la cour d'appel, qui n'a pas tiré les conséquences légales de ses constatations, a violé les textes susvisés ;
Et attendu qu'en application de l'article L. 411-3 du code de l'organisation judiciaire, la Cour de cassation est en mesure, après avis donné aux parties conformément à l'article 1015 du code de procédure civile, de mettre fin au litige par application de la règle de droit appropriée ;
Attendu que l'action en paiement au titre du découvert était forclose au jour de l'assignation délivrée le 13 février 2012 ;
Et attendu qu'en raison de l'indivisibilité existant entre la condamnation à payer une certaine somme au titre du découvert et la condamnation à payer des dommages-intérêts, il y a lieu à cassation de ce dernier chef de dispositif ;
PAR CES MOTIFS et sans qu'il y ait lieu de statuer sur le premier moyen du pourvoi :
CASSE ET ANNULE, mais seulement en ce qu'il rejette la fin de non-recevoir tirée de la forclusion soulevée par M. et Mme X... et les condamne solidairement à payer à la société HSBC France, au titre du découvert, la somme de 95 109,75 euros, avec intérêts au taux légal à compter du 13 février 2012 et capitalisation de ceux-ci, et en ce qu'il condamne la société HSBC France à payer à M. et Mme X... la somme de 10 000 euros à titre de dommages-intérêts, l'arrêt rendu le 10 octobre 2017, entre les parties, par la cour d'appel de Grenoble ;
DIT n'y avoir lieu à renvoi ;
Déclare forclose l'action en paiement de la société HSBC France au titre du compte ouvert le 31 mai 2007 par M. et Mme X... ;
Rejette la demande de dommages-intérêts de M. et Mme X... ;
Condamne la société HSBC France aux dépens ;
Vu l'article 700 du code de procédure civile, rejette les demandes ;
Dit que sur les diligences du procureur général près la Cour de cassation, le présent arrêt sera transmis pour être transcrit en marge ou à la suite de l'arrêt partiellement cassé ;
Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, première chambre civile, et prononcé par le président en son audience publique du six février deux mille dix-neuf.
MOYENS ANNEXES au présent arrêt :
Moyens produits par la SCP Marc Lévis, avocat aux Conseils, pour M. et Mme X...
PREMIER MOYEN DE CASSATION :
Il est fait grief à l'arrêt attaqué d'avoir rejeté l'exception de forclusion soulevée par M. et Mme X... ;
AUX MOTIFS QUE sur le découvert en compte : que la facilité de caisse de 5000 € consentie aux époux X... le 31 mai 2007 sur leur compte bancaire joint, est, aux termes des conditions générales, accordée pour une durée d'un mois calendaire, renouvelable par tacite reconduction pour la même durée ; qu'elle n'est donc pas soumise au code de la consommation dans sa rédaction applicable au litige, qui exclut de son champ d'application des crédits consentis pour une durée inférieure ou égale à trois mois ; qu'il ressort toutefois des relevés de compte que le montant de 5000 € a été dépassé le 29 avril 2008 (débit de 31.474,13 €) sans jamais être ramené au montant autorisé pendant les trois mois qui ont suivi, puisque le 30 juin 2008 le compte était débiteur de 29.292,59 € ; que le découvert ayant persisté au-delà de trois mois devient une ouverture de crédit soumise aux dispositions des articles L311-1 et suivants du code de la consommation, sous réserve que son montant ne dépasse pas le seuil de 21.500 € ; qu'en l'occurrence, le montant du crédit est supérieur à cette somme, de sorte qu'il n'est pas soumis aux dispositions du code de la consommation et que les époux X... ne sont pas fondés à invoqués la forclusion de l'action ;
ALORS QU' est considéré comme dépassement, au sens du code de la consommation, un découvert tacitement accepté en vertu duquel le prêteur autorise l'emprunteur à disposer de fonds qui dépassent le solde de son compte de dépôt ou de l'autorisation de découvert convenue ; qu'en retenant, pour rejeter l'exception de forclusion soulevée par M. et Mme X..., que le montant du crédit qui correspondait à un découvert en compte courant était supérieur à la somme de 21.500 €, pour en déduire que ce crédit n'était pas soumis aux dispositions du code de la consommation, sans rechercher si les époux X... ne s'étaient pas vus consentir le 31 mai 2007 un concours autorisant un découvert de 5000 €, dont seul le montant devait être pris en considération pour se prononcer utilement sur l'application du régime du crédit à la consommation, la cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard des articles L 311-1, L 311-2, L 311-3 2 du code de la consommation ensemble l'article L 311-37 du même code, dans leur rédaction applicable aux faits de l'espèce .
DEUXIEME MOYEN DE CASSATION :
Il est fait grief à l'arrêt attaqué d'avoir débouté M. et Mme X... de leur demande de réduction de la clause pénale;
AUX MOTIFS QUE sur le prêt : que les époux X... ne contestent pas les sommes dues au titre du prêt à l'exception de l'indemnité contractuelle dont ils demandent la réduction à un euro ; que tout comme en première instance, ils invoquent à l'appui de cette demande, leur situation financière actuelle ; que comme l'a justement rappelé le tribunal, l'indemnité contractuelle de 8% du capital restant dû à la défaillance des emprunteurs est susceptible de réduction si elle apparaît manifestement excessive ; que cette indemnité de 2.305,16 € n'apparaît pas manifestement excessive au regard du préjudice subi par la banque au titre de l'inexécution du prêt de 45.000 € ;
ALORS QUE tout arrêt doit être motivé à peine de nullité et les juges ne peuvent statuer par voie de simple affirmation; qu'en affirmant néanmoins que l'indemnité contractuelle de 8% du capital restant dû soit une somme de 2.305,16 € n'apparaît pas manifestement excessive au regard du préjudice subi par la banque au titre de l'inexécution du prêt de 45.000 €, la cour d'appel a statué par voie de simple affirmation, en violation de l'article 455 du code de procédure civile.
TROISIEME MOYEN DE CASSATION :
Il est fait grief à l'arrêt attaqué d'avoir condamné la banque HSBC à ne payer à M. et Mme X... qu'une somme de 10.000 € à titre de dommages-intérêts ;
AUX MOTIFS QUE sur la responsabilité de la banque : qu'en vertu du principe de non immixtion, le banquier dispensateur de crédit n'a pas de devoir de conseil envers son client ; qu'il est en revanche tenu envers un emprunteur non averti d'une obligation de mise en garde au regard des capacités financières de l'emprunteur et du risque de l'endettement né de l'octroi du prêt ; qu'il n'est pas contesté que seule Karin Y... épouse X... est un emprunteur non averti et qu'elle ne dispose pas de revenus personnels ; que les seules pièces qu'elle produit sont les relevés de deux comptes joints au 2 et 6 novembre 2007 ainsi que le relevé du compte chèques de son époux au 31 octobre 2007 qui, s'ils mentionnent un solde débiteur, ne permettent pas d'apprécier le montant des revenus et de l'endettement au jour de l'octroi du prêt ; qu'elle ne produit en outre aucune pièce justificative de leur patrimoine au jour de la souscription de l'emprunt ; qu'il n'est donc pas démontré qu'il existait un risque d'endettement ni, par conséquent, que la banque a failli à son devoir de mise en garde à l'égard de Karin X... dans l'octroi du prêt ;
ALORS QUE la banque est tenue d'une obligation de mise en garde et de conseil à l'égard de chacun des emprunteurs non avertis au moment de la conclusion du contrat de prêt et doit satisfaire à cette obligation à raison des capacités financières de l'emprunteur et des risques d'endettement nés de l'octroi du prêt ; que la charge de la preuve de l'exécution de cette obligation pèse sur la banque ; qu'en affirmant néanmoins que Mme Karin X... ne démontrait pas que la banque HSBC avait failli à son devoir de mise en garde dans l'octroi du prêt de 45.000 €, la cour d'appel a inversé la charge de la preuve, en violation des articles 1147 et 1315 du code civil, devenus les articles 1217 et 1353 du code civil.