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31/01/2019 | FRANCE | N°18-11047

France | France, Cour de cassation, Chambre civile 2, 31 janvier 2019, 18-11047


LA COUR DE CASSATION, DEUXIÈME CHAMBRE CIVILE, a rendu l'arrêt suivant :

Sur le moyen unique, pris en ses première, troisième, quatrième et cinquième branches :

Attendu, selon l'arrêt attaqué (Pau, 14 septembre 2017), qu'un arrêt du 4 avril 2013 ayant ordonné « la remise du terrain propriété de Mme Y... Z... en l'état où il se trouvait avant l'exhaussement constaté par l'expert M. C... en limite de la propriété X... », M. X... a fait assigner Mme Y... Z... devant un juge de l'exécution pour obtenir la fixation d'une astreinte ;

Attendu que M. X... fait

grief à l'arrêt d'infirmer le jugement déféré qui avait assorti l'obligation de remi...

LA COUR DE CASSATION, DEUXIÈME CHAMBRE CIVILE, a rendu l'arrêt suivant :

Sur le moyen unique, pris en ses première, troisième, quatrième et cinquième branches :

Attendu, selon l'arrêt attaqué (Pau, 14 septembre 2017), qu'un arrêt du 4 avril 2013 ayant ordonné « la remise du terrain propriété de Mme Y... Z... en l'état où il se trouvait avant l'exhaussement constaté par l'expert M. C... en limite de la propriété X... », M. X... a fait assigner Mme Y... Z... devant un juge de l'exécution pour obtenir la fixation d'une astreinte ;

Attendu que M. X... fait grief à l'arrêt d'infirmer le jugement déféré qui avait assorti l'obligation de remise en état prononcée par la cour d'appel de Pau le 4 avril 2013 à l'encontre de Mme Y... Z... d'une astreinte provisoire de 100 euros par jour de retard et de le débouter de ses demandes alors, selon le moyen :

1°/ que le juge de l'exécution peut assortir d'une astreinte une décision rendue par un autre juge si les circonstances en font apparaître la nécessité et il lui appartient de se prononcer sur la difficulté d'exécution dont il est saisi ; qu'en se fondant pour exclure la nécessité de l'astreinte sur deux difficultés d'exécution tirées d'une imprécision des travaux ordonnés par l'arrêt du 4 avril 2013 et de la décision de Mme Y... Z... d'aménager un lotissement sur son fonds, sans trancher comme elle en avait l'obligation, ces prétendues difficultés pour permettre l'exécution de l'arrêt du 4 avril 2013, la cour d'appel a violé les articles L. 131-1 du code des procédures civiles d'exécution et L. 213-6 de l'organisation judiciaire et méconnu l'étendue de ses pouvoirs ;

2°/ que le juge de l'exécution peut assortir d'une astreinte une décision rendue par un autre juge si les circonstances en font apparaître la nécessité et il lui appartient d'interpréter au besoin la décision ; qu'en se déterminant comme elle l'a fait en raison d'une difficulté d'exécution résultant de la prétendue imprécision de l'arrêt du 4 avril 2013 quant à la nature et à l'ampleur des travaux à effectuer, quand il lui appartenait alors d'interpréter au besoin la décision du 4 avril 2013 pour parvenir à la parfaite exécution des travaux de nature à mettre un terme à l'écoulement préjudiciable des eaux sur le fonds de M. X..., la cour d'appel a violé les articles L. 131-1 du code des procédures civiles d'exécution et L. 213-6 de l'organisation judiciaire et méconnu l'étendue de ses pouvoirs ;

3°/ que le juge de l'exécution peut assortir d'une astreinte une décision rendue par un autre juge si les circonstances en font apparaître la nécessité ; qu'il ne peut se fonder pour exclure cette astreinte sur la volonté unilatérale du défendeur d'exécuter des travaux distincts de ceux qui ont été ordonnés par cette décision au mépris de la chose jugée ; qu'en se fondant pour refuser d'assortir d'une astreinte l'arrêt du 4 avril 2013 ordonnant la suppression de l'exhaussement constaté par l'expert C... en limite de propriété, sur la circonstance que Mme Y... Z... avait décidé d'aménager un lotissement sur sa propriété, que dans ce cadre des travaux de grande ampleur étaient prévus en termes de terrassements et d'assainissement des eaux pluviales dont le coût est estimé à plus de 100 000 euros et qui seraient de nature à modifier la configuration des lieux, la cour d'appel a violé les articles 1351 ancien devenu 1355 du code civil et L. 131-1 du code des procédures civiles d'exécution ;

4°/ qu'en se fondant pour refuser d'assortir d'une astreinte la décision ordonnant la suppression de l'exhaussement constaté par l'expert C... en limite de propriété aux fins de faire cesser l'écoulement des eaux sur le fonds de M. X..., sur la circonstance que Mme Y... Z... a sollicité et obtenu l'autorisation d'aménager un lotissement sur sa propriété, composé de six lots, que dans ce cadre des travaux de grande ampleur sont prévus tant en termes de terrassements que d'assainissement des eaux pluviales et que ces travaux dont le coût est estimé à plus de 100 000 euros vont sensiblement modifier la configuration des lieux, sans constater la certitude de ces travaux futurs ni relever qu'ils seront effectivement de nature à mettre un terme à l'écoulement des eaux sur le fonds de M. X..., la cour d'appel a violé les articles L. 131-1 du code des procédures civiles d'exécution et 640, alinéa 3, du code civil ;

Mais attendu qu'ayant relevé que la situation avait évolué depuis le prononcé de l'arrêt, que Mme Y... Z... avait sollicité et obtenu l'autorisation d'aménager un lotissement sur sa propriété, que dans ce cadre, des travaux de grande ampleur étaient prévus, tant en termes de terrassements que d'assainissement des eaux pluviales, et que ces travaux allaient sensiblement modifier la configuration des lieux, c'est sans encourir les griefs du moyen que la cour d'appel, dans l'exercice de son pouvoir souverain d'appréciation de la valeur et de la portée des éléments de fait et de preuve qui lui étaient soumis et abstraction faite des motifs critiqués par les première et troisième branches du moyen, en a déduit qu'il n'apparaissait ni nécessaire, ni opportun de fixer une astreinte ;

D'où il suit que le moyen n'est pas fondé ;

Et attendu qu'il n'y a pas lieu de statuer par une décision spécialement motivée sur le moyen unique annexé, pris en sa deuxième branche, qui n'est manifestement pas de nature à entraîner la cassation ;

PAR CES MOTIFS :

REJETTE le pourvoi ;

Condamne M. X... aux dépens ;

Vu l'article 700 du code de procédure civile, rejette les demandes ;

Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, deuxième chambre civile, et prononcé par le président en son audience publique du trente et un janvier deux mille dix-neuf.

MOYEN ANNEXE au présent arrêt :

Moyen produit par la SCP Waquet, Farge et Hazan, avocat aux Conseils, pour M. X...

Il est fait grief à l'arrêt attaqué d'avoir infirmé le jugement déféré qui avait assorti l'obligation de remise en état prononcée par la Cour d'appel de Pau le 4 avril 2013 à l'encontre de Mme Y... Z... d'une astreinte provisoire de 100 euros par jour de retard et d'avoir débouté M. X... de ses demandes ;

Aux motifs que M. X... demande pour l'essentiel à la cour de préciser les contours de l'obligation faite à Mme Y... Z... par l'arrêt du 4 avril 2013, de l'assortir d'une astreinte de 1 000 € par jour de retard, et de désigner un technicien ou expert avec mission de vérifier si les travaux ont été réalisés. Mme Y... Z... soutient que l'arrêt du 4 avril 2013 n'a pas défini les travaux à réaliser et qu'il doit être interprété comme mettant à sa charge une obligation d'arrêter l'écoulement des eaux de sa propriété sur la propriété X.... Elle demande à être autorisée à réaliser les travaux prévus au projet de lotissement Xoriak, dont elle soutient qu'ils remédieront à la difficulté. Aux termes de l'article L 131-1 alinéa 2 du code des procédures civiles d'exécution, le juge de l'exécution peut assortir d'une astreinte une décision rendue par un autre juge si les circonstances en font apparaître la nécessité. L'arrêt du 4 avril 2013 a ordonné « la remise du terrain propriété de Mme Y... Z... en l'état où il se trouvait avant l'exhaussement constaté par l'expert M. C... en limite de la propriété X... », sans fixer de délai d'exécution ni d'astreinte. L'expert M. C... a conclu dans son rapport que la propriété Y... Z... avait été rehaussée de manière significative dans sa partie sud, c'est-à-dire le long d'une bande parallèle à la limite avec la propriété X.... Il a cependant estimé que cet exhaussement n'avait pas eu pour effet d'envoyer des eaux vers la propriété X.... La cour a considéré, à l'inverse de l'expert, et en se fondant sur les éléments fournis par M. X... que la surélévation du terrain avait créé une pente qui n'existait pas auparavant et que cette pente « inversée » constituait une modification de la situation des lieux entraînant nécessairement une aggravation de la servitude du fonds inférieur de M. X..., les eaux pluviales s'écoulant naturellement dans le sens de la pente. Il n'est pas contesté que l'arrêt du 4 avril 2013 n'a toujours pas été exécuté. Les travaux réalisés par Mme Y... Z... le 17 décembre 2013, qui ont consisté en un reprofilage d'un nouveau talus et en la création d'une tranchée le long du garage de M. X..., non seulement ne correspondent pas à ce qui était préconisé par l'arrêt, mais n'ont, au surplus, pas remédié au problème d'écoulement des eaux. Cependant, deux difficultés d'exécution se posent :

- d'une part, contrairement à ce que soutient M. X..., l'arrêt du 4 avril 2013 est imprécis quant à la nature et à l'ampleur des travaux à effectuer ; en effet, M. C... n'a pas répondu à la question de savoir quels étaient les travaux propres à remédier aux désordres, estimant que ce chef de mission était sans objet, compte-tenu de ses conclusions mettant hors de cause Mme Y... Z... ; les éléments contenus dans le corps du rapport d'expertise sont insuffisants pour déterminer avec précision ces travaux, l'expert s'étant borné à donner des indications sur la largeur de la bande de remblai (15 à 25 m dans le quart sud-ouest, et 5 à 10 m dans le quart sud-est) mais n'ayant fourni aucune précision quant à la profondeur de celui-ci,

- d'autre part, la situation a évolué depuis le prononcé de l'arrêt ; en effet, Mme Y... Z... a sollicité et obtenu l'autorisation d'aménager un lotissement sur sa propriété, composé de six lots ; dans ce cadre, des travaux de grande ampleur sont prévus, tant en termes de terrassements que d'assainissement des eaux pluviales ; ces travaux dont le coût est estimé à plus de 100.000 € vont sensiblement modifier la configuration des lieux.
Compte-tenu de ces circonstances, il n'apparaît ni nécessaire, ni opportun de fixer une astreinte. Il n'y a pas davantage lieu de faire droit aux demandes de l'intimée, tendant notamment à se voir autoriser à effectuer des travaux, dès lors que s'il appartient au juge de l'exécution d'interpréter les décisions dont il lui est demandé d'assurer l'exécution, il ne peut cependant, sous couvert de cette interprétation en modifier le sens ou la portée. Il convient par conséquent de réformer le jugement déféré et de débouter les parties de l'ensemble de leurs demandes ;

1°- Alors que le juge de l'exécution peut assortir d'une astreinte une décision rendue par un autre juge si les circonstances en font apparaître la nécessité et il lui appartient de se prononcer sur la difficulté d'exécution dont il est saisi ; qu'en se fondant pour exclure la nécessité de l'astreinte sur deux difficultés d'exécution tirées d'une imprécision des travaux ordonnés par l'arrêt du 4 avril 2013 et de la décision de Mme Y... Z... d'aménager un lotissement sur son fonds, sans trancher comme elle en avait l'obligation, ces prétendues difficultés pour permettre l'exécution de l'arrêt du 4 avril 2013, la Cour d'appel a violé les articles L 131-1 du code des procédures civiles d'exécution et L 213-6 de l'organisation judiciaire et méconnu l'étendue de ses pouvoirs ;

2°- Alors que les juges du fond ont l'obligation de ne pas dénaturer l'écrit qui leur est soumis ; que pour faire cesser l'écoulement des eaux pluviales sur le fonds de M. X..., l'arrêt du 4 avril 2013 a ordonné la remise du terrain propriété de Mme Y... Z... en l'état où il se trouvait avant l'exhaussement constaté par l'expert M. C... en limite de la propriété X... après avoir précisé dans ses motifs que d'après cet expert, la propriété Y... Z... a été rehaussée de manière significative dans sa partie sud c'est-à-dire le long d'une bande parallèle à la limite de la propriété X... ; cette bande de remblai a une largeur de l'ordre de 15 à 20 mètres linéaires dans le quart sud-ouest et une largeur de l'ordre de 5 à 10 mètres dans le quart sud-est de la parcelle Y... Z... » et que « l'expert conclut que la propriété Y... Z... devait se trouver à l'origine dans la continuité topographique de la propriété X..., c'est-à-dire en forme de cuvette avec un point bas se trouvant approximativement au niveau STP 5 (plan) » ; que les travaux à effectuer ont été ainsi parfaitement définis par l'arrêt du 4 avril 2013 tant en ce qui concerne leur nature à savoir la suppression de l'exhaussement constaté par l'expert C... que dans leur ampleur par l'indication de la largeur de la bande de remblai en limite sud mais aussi de sa profondeur dès lors que l'arrêt précise que la propriété de Mme Y... Z... devra être remise dans son état antérieur aux travaux litigieux et partant dans la continuité topographique de la parcelle de M. X... en forme de cuvette avec un point bas se trouvant approximativement au niveau STP 5 du plan de l'expert ; qu'en énonçant, pour refuser d'assortir cet arrêt d'une astreinte, qu'il serait imprécis quant à la nature et à l'ampleur des travaux à effectuer l'expert n'ayant pas indiqué la profondeur du remblai, la Cour d'appel a méconnu le principe susvisé ;

3°- Alors que le juge de l'exécution peut assortir d'une astreinte une décision rendue par un autre juge si les circonstances en font apparaître la nécessité et il lui appartient d'interpréter au besoin la décision ; qu'en se déterminant comme elle l'a fait en raison d'une difficulté d'exécution résultant de la prétendue imprécision de l'arrêt du 4 avril 2013 quant à la nature et à l'ampleur des travaux à effectuer, quand il lui appartenait alors d'interpréter au besoin la décision du 4 avril 2013 pour parvenir à la parfaite exécution des travaux de nature à mettre un terme à l'écoulement préjudiciable des eaux sur le fonds de M. X..., la Cour d'appel a violé les articles L 131-1 du code des procédures civiles d'exécution et L 213-6 de l'organisation judiciaire et méconnu l'étendue de ses pouvoirs ;

4°- Alors que le juge de l'exécution peut assortir d'une astreinte une décision rendue par un autre juge si les circonstances en font apparaître la nécessité ; qu'il ne peut se fonder pour exclure cette astreinte sur la volonté unilatérale du défendeur d'exécuter des travaux distincts de ceux qui ont été ordonnés par cette décision au mépris de la chose jugée ; qu'en se fondant pour refuser d'assortir d'une astreinte l'arrêt du 4 avril 2013 ordonnant la suppression de l'exhaussement constaté par l'expert C... en limite de propriété, sur la circonstance que Mme Y... Z... avait décidé d'aménager un lotissement sur sa propriété, que dans ce cadre des travaux de grande ampleur étaient prévus en termes de terrassements et d'assainissement des eaux pluviales dont le coût est estimé à plus de 100.000 € et qui seraient de nature à modifier la configuration des lieux, la Cour d'appel a violé les articles 1351 ancien devenu 1355 du code civil et L 131-1 du code des procédures civiles d'exécution ;

5°- Alors qu'en se fondant pour refuser d'assortir d'une astreinte la décision ordonnant la suppression de l'exhaussement constaté par l'expert C... en limite de propriété aux fins de faire cesser l'écoulement des eaux sur le fonds de M. X..., sur la circonstance que Mme Y... Z... a sollicité et obtenu l'autorisation d'aménager un lotissement sur sa propriété, composé de six lots, que dans ce cadre des travaux de grande ampleur sont prévus tant en termes de terrassements que d'assainissement des eaux pluviales et que ces travaux dont le coût est estimé à plus de 100.000 € vont sensiblement modifier la configuration des lieux, sans constater la certitude de ces travaux futurs ni relever qu'ils seront effectivement de nature à mettre un terme à l'écoulement des eaux sur le fonds de M. X..., la Cour d'appel a violé les articles L 131-1 du code des procédures civiles d'exécution et 640 alinéa 3 du code civil.


Synthèse
Formation : Chambre civile 2
Numéro d'arrêt : 18-11047
Date de la décision : 31/01/2019
Sens de l'arrêt : Rejet
Type d'affaire : Civile

Références :

Décision attaquée : Cour d'appel de Pau, 14 septembre 2017


Publications
Proposition de citation : Cass. Civ. 2e, 31 jan. 2019, pourvoi n°18-11047


Composition du Tribunal
Président : Mme Flise (président)
Avocat(s) : SCP Gouz-Fitoussi, SCP Waquet, Farge et Hazan

Origine de la décision
Date de l'import : 15/09/2022
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CCASS:2019:18.11047
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