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30/01/2019 | FRANCE | N°17-28905

France | France, Cour de cassation, Chambre sociale, 30 janvier 2019, 17-28905


LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE SOCIALE, a rendu l'arrêt suivant :

Sur le moyen unique :

Vu l'article L. 1132-1 du code du travail, ensemble les articles L. 4121-1 et L. 4121-2 du même code ;

Attendu que l'employeur, tenu envers ses salariés d'une obligation de sécurité en matière de protection de la santé et de la sécurité des travailleurs, notamment en matière de discrimination, doit répondre des agissements des personnes qui exercent, de fait ou de droit, une autorité sur les salariés ;

Attendu, selon l'arrêt attaqué, rendu sur renvoi après cassati

on (Soc., 20 mai 2015, pourvoi n° 14-13357), que Mme Y..., employée en qualité d'agent ...

LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE SOCIALE, a rendu l'arrêt suivant :

Sur le moyen unique :

Vu l'article L. 1132-1 du code du travail, ensemble les articles L. 4121-1 et L. 4121-2 du même code ;

Attendu que l'employeur, tenu envers ses salariés d'une obligation de sécurité en matière de protection de la santé et de la sécurité des travailleurs, notamment en matière de discrimination, doit répondre des agissements des personnes qui exercent, de fait ou de droit, une autorité sur les salariés ;

Attendu, selon l'arrêt attaqué, rendu sur renvoi après cassation (Soc., 20 mai 2015, pourvoi n° 14-13357), que Mme Y..., employée en qualité d'agent polyvalent par l'association Stade poitevin tennis club, a, après avoir dénoncé par lettre du 1er avril 2010 à son employeur des faits de discrimination, saisi la juridiction prud'homale ;

Attendu que pour débouter Mme Y... de sa demande en paiement de dommages-intérêts en réparation de ses préjudices moral et financier pour discrimination et violation par l'employeur de son obligation de sécurité, l'arrêt retient que les faits dénoncés ont été commis par des bénévoles de l'association qui apportaient leur aide en cuisine à l'occasion de la soirée et que rien ne permet en l'occurrence d'affirmer que ceux-ci se trouvaient sous la subordination hiérarchique de l'association, que la responsabilité de l'employeur ne saurait être engagée à raison de faits fautifs commis envers sa salariée par des personnes avec lesquelles il n'apparaît lié par aucun lien de préposition, que pour autant l'employeur n'est pas demeuré sans réaction à la suite de cet incident puisqu'il a fait procéder à une enquête interne tout en invitant son personnel à prendre toutes les précautions nécessaires dans leurs relations avec la salariée ;

Qu'en statuant ainsi, par des motifs impropres à caractériser l'absence d'autorité de droit ou de fait exercée sur la salariée par les auteurs d'agissements discriminatoires alors qu'elle avait constaté que l'insulte à connotation sexiste, proférée par un bénévole, et le jet par d'autres de détritus sur la salariée avaient eu lieu à l'occasion d'une soirée organisée par l'employeur dans les cuisines du restaurant de l'association en présence d'un salarié de l'entreprise, tuteur devant veiller à l'intégration de la salariée titulaire d'un contrat de travail s'accompagnant d'un contrat d'aide à l'emploi, sans que celui-ci réagisse, la cour d'appel, qui n'a pas tiré les conséquences légales de ses constatations, a violé les textes susvisés ;

PAR CES MOTIFS :

CASSE ET ANNULE, en toutes ses dispositions, l'arrêt rendu le 21 septembre 2016, entre les parties, par la cour d'appel de Limoges ; remet, en conséquence la cause et les parties dans l'état où elles se trouvaient avant ledit arrêt et, pour être fait droit, les renvoie devant la cour d'appel de Bourges ;

Condamne l'association Stade poitevin tennis club aux dépens ;

Vu l'article 700 du code de procédure civile, condamne l'association Stade poitevin tennis club à payer à la SCP Monod, Colin et Stoclet la somme de 3 000 euros ;

Dit que sur les diligences du procureur général près la Cour de cassation, le présent arrêt sera transmis pour être transcrit en marge ou à la suite de l'arrêt cassé ;

Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, chambre sociale, et prononcé par le président en son audience publique du trente janvier deux mille dix-neuf.

MOYEN ANNEXE au présent arrêt :

Moyen produit par la SCP Monod, Colin et Stoclet, avocat aux Conseils, pour Mme Y...

IL EST FAIT GRIEF à l'arrêt attaqué d'avoir rejeté la demande de Mme C... Y... en paiement de dommages-intérêts en réparation de ses préjudices moral et financier pour discrimination et violation par l'employeur de son obligation de sécurité ;

AUX MOTIFS QUE les faits dont se plaint la salariée sont relatés par elle dans un courrier du 1er avril 2010 adressé à l'employeur et qu'ils se sont déroulés lors de l'open de tennis de mars 2010 lors d'une soirée au cours de laquelle la salariée travaillait dans les cuisines du restaurant de l'association aux côté de bénévoles ; que la salariée indique avoir fait l'objet de propos injurieux de la part d'un dénommé « Léo » qui lui aurait notamment dit « t'en as un sac à foutre », avoir été victime de jets de salade, frites, oeufs frais de la part d'autres bénévoles de l'association, ceci sans réaction de la part de son supérieur hiérarchique, M. Philippe A..., par ailleurs son tuteur chargé notamment de l'accompagner dans son intégration dans l'entreprise, et n'avoir pas été conviée au repas de clôture de l'open de tennis ; que le défaut d'invitation au repas de clôture ne peut pas en lui-même caractériser un comportement discriminatoire à l'égard de la salariée ; que M. B..., présent dans les cuisines au moment des faits, confirme que la salariée a bien été traitée de « sac à foutre » et que cette insulte a bien été accompagnée de jets de détritus sur celle-ci sans réaction de la part de M. A... présent sur les lieux, pour faire cesser cette situation ; que l'insulte « sac à foutre » présente un caractère discriminatoire à raison de sa connotation sexiste et qu'elle tend à porter atteinte à la personne, d'autant qu'elle s'est accompagnée en l'espèce de jets de détritus sur la salariée, de nature à créer un environnement hostile, dégradant, humiliant ou offensant ; mais que cependant, ces faits ont été commis par des bénévoles de l'association qui apportaient leur aide en cuisine à l'occasion de la soirée et rien ne permet d'affirmer que ceux-ci se trouvaient sous la subordination hiérarchique de l'association, de sorte que la responsabilité de l'employeur ne saurait être engagée à raison des faits fautifs commis envers sa salariée par des personnes avec lesquelles il n'apparait lié par aucun lien de préposition ; qu'en outre, l'employeur n'est pas demeuré sans réaction à la suite de cet incident puisqu'il a fait procéder à une enquête interne, tout en invitant son personnel à prendre toutes les précautions nécessaires dans leurs relations avec la salariée, et qu'enfin, la pathologie dépressive dont il est fait état dans les certificats médicaux produits par la salariée n'apparait pas en lien avec une attitude discriminatoire pouvant être imputée à l'employeur ;

1°) ALORS QUE l'employeur engage sa responsabilité à raison d'actes à caractère discriminatoire ou constitutifs de harcèlement moral commis par ses préposés, et ce y compris par des bénévoles liés à l'employeur par un lien de subordination occasionnel ; qu'en l'espèce, la cour d'appel a constaté que les faits reprochés par Mme Y... à l'association Stade poitevin tennis club s'étaient déroulés pendant l'open de tennis de mars 2010 organisé par cette association, lors d'une soirée au cours de laquelle la salariée travaillait dans les cuisines du restaurant de l'association, et que ces agissements discriminatoires avaient été commis par des bénévoles de l'association apportant leur aide en cuisine ; qu'en décidant que la responsabilité de l'association Stade poitevin tennis club ne pouvait être engagée dès lors que les agissements discriminatoires avaient été commis par des bénévoles et que rien ne permettrait d'affirmer qu'ils se seraient trouvés sous la subordination hiérarchique de l'association, cependant que les circonstances de l'intervention de ces bénévoles, relevées par l'arrêt attaqué, permettaient de caractériser un lien de subordination occasionnel, la cour d'appel n'a pas tiré les conséquences légales de ses propres constatations et a violé les dispositions de l'article L. 4121-1 du code du travail, ensemble l'article L. 1132-1 du code du travail ;

2°) ALORS QUE, en tout état de cause, l'employeur est tenu envers ses salariés d'une obligation de sécurité de résultat en matière de protection de leur santé physique et mentale ainsi que de leur sécurité et qu'il n'est pas exonéré de la responsabilité en résultant par l'absence de faute de sa part ou de celle de ses subordonnés ; qu'en rejetant la demande d'indemnisation formée par Mme Y... à raison des agissements discriminatoires dont elle avait été victime, aux motifs inopérants -à les supposer exacts- que les faits auraient été commis par des personnes avec lesquelles il n'apparaît lié par aucun lien de subordination et qu'il ne serait pas demeuré sans réaction à la suite de cet incident, cependant qu'elle constatait par ailleurs que les faits litigieux avaient porté atteinte à la personne de l'exposante, de sorte que la responsabilité de l'employeur était engagée en raison d'un manquement à son obligation de sécurité de résultat, la cour d'appel a violé les dispositions des articles L. 4121-1 et L. 4121-2 du code du travail, ensemble l'article L. 1132-1 du même code.


Synthèse
Formation : Chambre sociale
Numéro d'arrêt : 17-28905
Date de la décision : 30/01/2019
Sens de l'arrêt : Cassation
Type d'affaire : Sociale

Références :

Décision attaquée : Cour d'appel de Limoges, 21 septembre 2016


Publications
Proposition de citation : Cass. Soc., 30 jan. 2019, pourvoi n°17-28905, Bull. civ.
Publié au bulletin des arrêts des chambres civiles

Composition du Tribunal
Président : M. Huglo (conseiller doyen faisant fonction de président)
Avocat(s) : SCP Monod, Colin et Stoclet

Origine de la décision
Date de l'import : 12/02/2019
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CCASS:2019:17.28905
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