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30/01/2019 | FRANCE | N°17-26418

France | France, Cour de cassation, Chambre sociale, 30 janvier 2019, 17-26418


LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE SOCIALE, a rendu l'arrêt suivant :

Attendu, selon l'arrêt attaqué (Aix-en-Provence, 27 juillet 2017), que M. Y... a été engagé le 2 décembre 1991, en qualité de responsable de projet, par la société Eurofrance développement (la société) ; qu'il est, dans le cadre de ses fonctions, intervenu sur le projet de golf de Vidauban, objet d'un contrat de gestion conclu entre la société et la société Le Prince de Provence et a, le 23 juin 2004, été licencié pour faute grave au motif d'un comportement déloyal ; qu'il a saisi la juridiction prud'

homale de demandes formées tant contre son employeur que contre la société...

LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE SOCIALE, a rendu l'arrêt suivant :

Attendu, selon l'arrêt attaqué (Aix-en-Provence, 27 juillet 2017), que M. Y... a été engagé le 2 décembre 1991, en qualité de responsable de projet, par la société Eurofrance développement (la société) ; qu'il est, dans le cadre de ses fonctions, intervenu sur le projet de golf de Vidauban, objet d'un contrat de gestion conclu entre la société et la société Le Prince de Provence et a, le 23 juin 2004, été licencié pour faute grave au motif d'un comportement déloyal ; qu'il a saisi la juridiction prud'homale de demandes formées tant contre son employeur que contre la société Le Prince de Provence, d'abord le 6 mai 2004 en paiement de commissions puis le 5 juillet 2004 en contestation de son licenciement ; qu'en cours d'instance, la société et le salarié sont parvenus à un accord et ont signé le 30 décembre 2005 une transaction, au visa des articles 2044 et suivants du code civil ; que, le même jour, M. Z... en qualité de gérant de la société et le salarié ont signé un document prévoyant notamment que compte tenu des connaissances acquises par lui lors de l'exécution de son contrat de travail, concernant le golf de Vidauban, le salarié se mettrait, à première demande de M. Z..., à disposition de la société Le Prince de Provence, dans les termes de la demande que formulerait cette société pour tout mettre en oeuvre afin de régulariser la situation administrative du golf de Vidauban auprès du maire de la commune ; qu'après une première procédure au cours de laquelle a été homologué le protocole d'accord signé entre les parties, la société a saisi le 9 janvier 2009 la juridiction prud'homale d'une demande tendant à obtenir la résolution de la transaction du 31 décembre 2005 pour inexécution par le salarié et la restitution des sommes et avantages perçus ; que, le salarié ayant soulevé son incompétence, le conseil de prud'hommes s'est, par jugement du 19 novembre 2010, déclaré matériellement compétent pour connaître du litige ;

Sur le premier moyen :

Attendu que le salarié fait grief à l'arrêt de le débouter de ses demandes tendant à obtenir une somme à titre de dommages-intérêts pour harcèlement, violences, intimidations et abus du droit d'ester en justice, alors, selon le moyen, que le droit d'agir en justice peut dégénérer en abus, quand le demandeur sait ses prétentions vouées à l'échec et qu'il engage un litige dans la seule volonté de nuire, qu'en considérant que l'action exercée par la société Eurofrance développement n'avait pas dégénéré en abus de droit après avoir pourtant relevé, d'une part, que les demandes formulées par la société Eurofrance développement auraient pu être développées dans l'instance ayant donné lieu à l'arrêt du 15 octobre 2007 et, d'autre part, que la transaction conclue avec M. Y... aurait dû mettre fin à tout litige, la cour d'appel n'a pas tiré les conséquences légales de ses propres constatations et a violé l'article 1240 du code civil ;

Mais attendu que la cour d'appel, ayant relevé que les circonstances de la cause, et précisément le litige qui s'est noué entre les parties immédiatement après la signature de la transaction, ne permettaient pas de retenir le caractère abusif des actions et moyens développés par la société, a légalement justifié sa décision ;

Sur le second moyen :

Attendu que le salarié fait grief à l'arrêt de le débouter de sa demande tendant à voir constater la résiliation judiciaire du contrat de travail conclu avec la société, tel qu'il a résulté, le 16 janvier 2006, de la mise en oeuvre de la promesse d'embauche du 30 décembre 2005 et de rejeter sa demande consécutive tendant à voir condamner in solidum les sociétés Eurofrance développement, Le Prince de Provence, MM. A... et Z... au paiement d'une somme à titre de dommages-intérêts en réparation de la perte de chance subie par lui en l'absence de respect de leurs obligations contractuelles, alors, selon le moyen, que l'autorité de la chose jugée s'attache au dispositif des décisions judiciaires devenues définitives, qu'en l'espèce, par un jugement du 19 novembre 2010, le conseil de prud'hommes de Cannes a retenu sa compétence pour connaître de la promesse d'embauche du 30 novembre 2005, qu'en jugeant dès lors que ladite promesse « ne relevait pas de la compétence du conseil de prud'hommes, et ne formalisait donc pas un contrat de travail de droit privé », la cour d'appel a méconnu le principe de l'autorité de la chose jugée ensemble l'article 1355 du code civil ;

Mais attendu que l'autorité de chose jugée n'a lieu qu'à l'égard de ce qui fait l'objet d'un jugement et a été tranché dans son dispositif ;

Et attendu que le conseil de prud'hommes s'étant borné, dans le dispositif du jugement du 19 novembre 2010, à se déclarer matériellement compétent pour connaître du litige qui lui était soumis, lequel ne se limitait pas au sort de la prétendue promesse d'embauche du 30 novembre 2005, la cour d'appel n'a pas méconnu l'autorité de chose jugée attachée à cette décision en retenant que les termes « se mettra, à première demande de M. Z..., à disposition de la SARL Le Prince de Provence, dans les termes de la demande que formulera cette société pour tout mettre en oeuvre afin de régulariser la situation administrative du golf de Vidauban auprès du maire de la commune » ne caractérisaient pas la proposition d'un emploi salarié ni la date d'entrée en fonction et ne caractérisaient donc pas une promesse d'embauche valant contrat de travail ;

D'où il suit que le moyen n'est pas fondé ;

PAR CES MOTIFS :

REJETTE le pourvoi ;

Condamne M. Y... aux dépens ;

Vu l'article 700 du code de procédure civile, rejette les demandes ;

Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, chambre sociale, et prononcé par le président en son audience publique du trente janvier deux mille dix-neuf.

MOYENS ANNEXES au présent arrêt :

.

Moyens produits par la SARL Cabinet Briard, avocat aux Conseils, pour M. Y....

Premier moyen de cassation

Il est fait grief à l'arrêt attaqué d'avoir débouté M. Y... de ses demandes tendant à obtenir une somme de 500.000 euros à titre de dommages et intérêts pour harcèlement, violences, intimidations et abus du droit d'ester en justice ;

Aux motifs que « les griefs formulés par M. Y... concernent les prétentions et arguments développés par la société Eurofrance Développement tout au long des procédures qui ont opposé les parties, lui faisant grief notamment d'avoir développé contre lui la « théorie du complot », ou encore d'avoir prétendu mensongèrement que la baisse de son chiffre d'affaires résulterait de l'inexécution par lui de ses obligations au titre de la transaction ; que M. Y... soutient que la société Eurofrance Développement a abusé de son droit d'ester en justice en ayant intenté la présente action de mauvaise foi, la sachant être vouée à l'échec, et dans le but de lui nuire ; qu'ester en justice, développer des moyens et arguments au soutien de ses prétentions, et exercer une voie de recours, constituent un droit fondamental reconnu à toute personne titulaire de la capacité à agir ; que ce droit ne dégénère en abus donnant naissance à une créance indemnitaire que s'il est exercé de manière fautive, en raison notamment de l'intention malveillante dont il est animé ; qu'en l'espèce, les circonstances de la cause, et précisément le litige qui s'est noué entre les parties immédiatement après la signature de la transaction, ne permettent pas de retenir le caractère fautif des actions et moyens développés par la société Eurofrance Développement ; que la demande doit être rejetée » ;

Alors que le droit d'agir en justice peut dégénérer en abus, quand le demandeur sait ses prétentions vouées à l'échec et qu'il engage un litige dans la seule volonté de nuire ; qu'en considérant que l'action exercée par la société Eurofrance Développement n'avait pas dégénéré en abus de droit après avoir pourtant relevé, d'une part, que les demandes formulées par la société Eurofrance Développement auraient pu être développées dans l'instance ayant donné lieu à l'arrêt du 15 octobre 2007 et, d'autre part, que la transaction conclue avec M. Y... aurait dû mettre fin à tout litige, la cour d'appel n'a pas tiré les conséquences légales de ses propres constatations et a violé l'article 1240 du code civil.

Second moyen de cassation

Il est également fait grief à l'arrêt attaqué d'avoir débouté M. Y... de sa demande tendant à voir constater la résiliation judiciaire du contrat de travail conclu avec la société Eurofrance Développement, tel qu'il a résulté, le 16 janvier 2006, de la mise en oeuvre de la promesse d'embauche du 30 décembre 2005 et d'avoir rejeté sa demande consécutive tendant à voir condamner in solidum les sociétés Eurofrance Développement, Le Prince de Provence, Messieurs A... et Z... au paiement de la somme de 633.473,50 euros à titre de dommages et intérêts en réparation de la perte de chance subie par Monsieur Y... en l'absence de respect de leurs obligations contractuelles ;

Aux motifs que « la cour retient en effet que les termes « se mettra, à première demande de M. Z..., à disposition de la SARL Le Prince de Provence, dans les termes de la demande que formulera cette société pour tout mettre en oeuvre afin de régulariser la situation administrative du golf de Vidauban auprès du maire de la commune » ne caractérise pas la proposition d'un emploi salarié, ni la date d'entrée en fonction, et ne caractérisent donc pas une promesse d'embauche valant contrat de travail ; qu'au surplus, il résulte du jugement du conseil de prud'hommes du 19 novembre 2010, rendu initialement clans la présente instance sur la compétence, que M. Y... avait alors prétendu au soutien de son exception d'incompétence que « la transaction et son annexe sont deux actes juridiques distincts, l'annexe étant un accord intervenu entre les parties afin d'organiser les relations professionnelles entre elles pour l'avenir et toute contestation relative à cet accord est du ressort du tribunal de grande instance » ; que ce faisant M. Y... avait lui-même admis que cet accord ne relevait pas de la compétence du conseil de prud'hommes, et ne formalisait donc pas un contrat de travail de droit privé ; qu'il y a lieu dès lors de rejeter l'ensemble des demandes formées par M. Y... de ce chef » ;

Alors que l'autorité de la chose jugée s'attache au dispositif des décisions judiciaires devenues définitives ; qu'en l'espèce, par un jugement du 19 novembre 2010, le conseil de prud'hommes de Cannes a retenu sa compétence pour connaître de la promesse d'embauche du 30 novembre 2005 ; qu'en jugeant dès lors que ladite promesse « ne relevait pas de la compétence du conseil de prud'hommes, et ne formalisait donc pas un contrat de travail de droit privé » (arrêt attaqué, page 15), la cour d'appel a méconnu le principe de l'autorité de la chose jugée ensemble l'article 1355 du code civil.


Synthèse
Formation : Chambre sociale
Numéro d'arrêt : 17-26418
Date de la décision : 30/01/2019
Sens de l'arrêt : Rejet
Type d'affaire : Sociale

Références :

Décision attaquée : Cour d'appel d'Aix-en-Provence, 27 juillet 2017


Publications
Proposition de citation : Cass. Soc., 30 jan. 2019, pourvoi n°17-26418


Composition du Tribunal
Président : M. Huglo (conseiller doyen faisant fonction de président)
Avocat(s) : SARL Cabinet Briard, SCP Gatineau et Fattaccini, SCP Piwnica et Molinié

Origine de la décision
Date de l'import : 15/09/2022
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CCASS:2019:17.26418
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