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30/01/2019 | FRANCE | N°16-25778

France | France, Cour de cassation, Chambre sociale, 30 janvier 2019, 16-25778


LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE SOCIALE, a rendu l'arrêt suivant :

Attendu, selon l'arrêt attaqué (Versailles, 13 septembre 2016), que Mme Z... a été engagée par la société Tan (la société) le 28 juin 2010 en qualité d'employé de centre de bronzage ; que par lettre recommandée du 21 juin 2013, la société a informé la salariée qu'elle était affectée sur un autre centre de bronzage à compter du 1er juillet 2013 ; que le 12 août suivant, la salariée a saisi la juridiction prud'homale pour obtenir la résiliation judiciaire de son contrat de travail aux torts de l'emplo

yeur ; que le 21 janvier 2016, la société a été placée sous sauvegarde, M. Y...

LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE SOCIALE, a rendu l'arrêt suivant :

Attendu, selon l'arrêt attaqué (Versailles, 13 septembre 2016), que Mme Z... a été engagée par la société Tan (la société) le 28 juin 2010 en qualité d'employé de centre de bronzage ; que par lettre recommandée du 21 juin 2013, la société a informé la salariée qu'elle était affectée sur un autre centre de bronzage à compter du 1er juillet 2013 ; que le 12 août suivant, la salariée a saisi la juridiction prud'homale pour obtenir la résiliation judiciaire de son contrat de travail aux torts de l'employeur ; que le 21 janvier 2016, la société a été placée sous sauvegarde, M. Y... étant désigné en qualité d'administrateur judiciaire de la société et la société SMJ étant désignée ès qualités ;

Sur les premier et deuxième moyens :

Attendu qu'il n'y a pas lieu de statuer par une décision spécialement motivée sur les moyens ci-après annexés, qui ne sont manifestement pas de nature à entraîner la cassation ;

Sur le troisième moyen :

Attendu que la société fait grief à l'arrêt de dire que la résiliation du contrat de travail devait produire les effets d'un licenciement sans cause réelle et sérieuse et de la condamner en conséquence à verser à la salariée certaines sommes au titre de l'indemnité de préavis, des congés payés afférents, de l'indemnité de licenciement, de l'indemnité pour licenciement sans cause et réelle sérieuse et des congés payés alors, selon le moyen :

1°/ que la rupture d'un contrat de travail produit les effets d'un licenciement sans cause réelle et sérieuse si et seulement si les manquements constatés à l'encontre de l'employeur sont suffisamment graves et rendent impossible la poursuite de la relation contractuelle de travail ; qu'en l'espèce, pour dire que la rupture du contrat de travail devait produire les effets d'un licenciement sans cause réelle et sérieuse, la cour d'appel a retenu que l'employeur avait imposé à la salariée un rythme de travail anormalement important, que celle-ci n'avait pas pu bénéficier de la visite médicale dès après son embauche, ou encore qu'elle n'avait pu bénéficier d'aucune pause au cours de sa journée de travail ; que de tels éléments, à la supposer avérés, dès lors que la salariée a continué à exécuter sa prestation de travail sans discontinuer jusqu'en 2013, ne rendait pas impossible la poursuite de la relation contractuelle de travail ; qu'en statuant comme elle l'a fait, sans tirer les conséquences qui s'évinçaient de ses propres constatations, la cour d'appel a violé les dispositions de l'article 1184 du code civil et de l'article L. 1221-1 du code du travail ;

2°/ que la rupture d'un contrat de travail produit les effets d'un licenciement sans cause réelle et sérieuse si et seulement si les manquements constatés à l'encontre de l'employeur sont suffisamment graves et rendent impossible la poursuite de la relation contractuelle de travail ; que les juges sont tenus de motiver leur décision ; qu'en l'espèce, pour dire que la rupture du contrat de travail devait produire les effets d'un licenciement sans cause réelle et sérieuse, la Cour d'appel a retenu que l'employeur avait imposé à la salariée un rythme de travail anormalement important, que celle-ci n'avait pas pu bénéficier de la visite médicale dès après son embauche, que le délai de prévenance dans la mise en oeuvre de la clause de mobilité était insuffisant, ou encore qu'elle n'avait pu bénéficier d'aucune pause au cours de sa journée de travail ; que pourtant, la cour d'appel n'a à aucun moment justifié sa décision quant à la question de déterminer si les éléments reprochés, à les supposer avérés, étaient suffisamment graves pour justifier que la rupture du contrat de travail soit imputée aux torts exclusifs de l'employeur ; qu'en statuant comme elle l'a fait, la cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard des dispositions de l'article 1184 du code civil et de l'article L. 1221-1 du code du travail ;

Mais attendu qu'ayant retenu que les manquements de la société étaient graves et récurrents, qu'ils avaient trait aux conditions de travail quotidien de la salariée et constituaient un harcèlement moral dont les effets sur la santé de la salariée étaient incontestables dès lors que l'annonce le 21 juin 2013 de sa mutation l'avait conduite, après les autres manquements endurés, à sa dépression, la cour d'appel a pu en déduire que la poursuite du contrat de travail était impossible et que la résiliation judiciaire de son contrat de travail aux torts de l'employeur devait être prononcée ; que le moyen n'est pas fondé ;

PAR CES MOTIFS :

REJETTE le pourvoi ;

Condamne la société Tan, M. Y... ès qualités et la société SMJ ès qualités aux dépens ;

Vu l'article 700 du code de procédure civile, condamne in solidum la société Tan, M. Y... ès qualités et la société SMJ ès qualités à payer à Mme Z... la somme de 3 000 euros ;
Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, chambre sociale, et prononcé par le président en son audience publique du trente janvier deux mille dix-neuf.

MOYENS ANNEXES au présent arrêt :

Moyens produits par la SCP Thouvenin, Coudray et Grévy, avocat aux Conseils, pour la société Tan, M. Y..., ès qualités et la société SMJ, ès qualités.

PREMIER MOYEN DE CASSATION :

Le moyen fait grief à l'arrêt attaqué d'avoir condamné la société Tan à verser à la salariée 15 000 euros de dommages et intérêts au titre du harcèlement moral et de l'exécution déloyale du contrat de travail ainsi que 2 500 euros au titre de l'article 700 du Code de procédure civile.

AUX MOTIFS QUE Sur l'inobservation des dispositions légales et conventionnelles en matière de temps et de durée du travail : s'agissant tout d'abord du rappel de salaire dû pour le dimanche, la société TAN objecte justement que le code du travail ne prévoit pas de compensation en cette matière et que Mme Z... ne peut être fondée à exciper, de ce chef, que des dispositions de la convention de l'esthétique et du cosmétique, entrée en vigueur le 12 juin 2012 seulement, laquelle stipule en effet qu'une majoration salariale de 50 %est due au salarié, alors que la précédente convention ne comportait aucune disposition particulière ; la société TAN fait valoir qu' à compter du mois de juin 2012, elle a versé, à Mme Z... précisément, une " majoration de week end , qui n'existait pas antérieurement et qui correspond, au regard des heures effectuées, au règlement et au montant de la somme conventionnellement due au titre des heures effectuées le dimanche ; Mme Z... ne saurait donc reprocher à la société TAN de ne pas lui avoir réglé son dû ; il n'en demeure pas moins que la société TAN ne disposait d'aucune autorisation préfectorale l'autorisant à ouvrir son commerce le dimanche - ainsi qu'elle en convient, ayant prétendument cru , dans un premier temps, qu'elle n'en avait pas besoin, puis, ayant formé une demande d'autorisation dont elle ne conteste pas qu'elle n'a été suivie d'aucun effet; que cette violation des dispositions légales n'a pas d'incidence présentement sur le rappel de salaire requis par l'appelante mais sera évoquée dans la discussion ci-après relative à la bonne foi de la société TAN, contestée par Mme Z... ; cette dernière expose, ensuite, que la société TAN lui a souvent fait effectuer des journées de travail dépassant la durée maximale de 10 heures fixée par l'article L 3121-34 du code du travail, sans, de surcroît, que soit respectée la pause obligatoire prévue par l'article L 3121-33, d'une durée de 20 minutes, toutes les 6 heures ; l'appelante fonde ses prétentions sur les plannings hebdomadaires, adressés, environ toutes les deux semaines, par l'employeur luimême, aux salariés ; la société TAN conteste les indications tirées de ces plannings par Mme Z..., en faisant valoir des contestations sans fondement ; que, conformément aux indications de l'appelante, il apparaît -ainsi que l'a, d'ailleurs, retenu le conseil de prud'hommes- qu'il n'était pas rare pour celle-ci de devoir effectuer plus de 10 heures de travail (12h30) dans une journée, et ce, sans aucune pause ; en effet, la cour fait siens les motifs pertinents des premiers juges, non contestés devant elle, qui ont retenu que le centre de bronzage était ouvert en continu et que la société TAN ne démontre pas que Mme Z..., seule hôtesse d'accueil lorsqu'elle travaillait la journée entière, était remplacée pour pouvoir prendre sa pause ; qu'elle observe, de plus, que la société TAN prétend justifier les temps de pause, en produisant un tableau (sa pièce 7), différent des plannings versés par la salariée, dépourvus de tout caractère officiel voire authentique et, en tout état de cause, ne portant mention d'aucune pause ; ces manquements de la société TAN qui, tous deux, tendent à alourdir la charge de travail de la salariée sont donc caractérisés ; en revanche, la cour ne suit pas Mme Z... dans son reproche visant le complément des indemnités journalières , versé par le régime de prévoyance ; si Mme Z... allègue, en effet, un certain retard dans la perception des sommes correspondantes, aucun élément n'établît que la cause de ce retard soit imputable à la société TAN ; qu'en outre, Mme Z... soutient qu'elle devrait encore recevoir une somme de 2001 euros à ce titre, mais ne prouve pas davantage que la société TAN serait débitrice de cette somme alors qu'elle ne démontre pas, ni n'allègue que son employeur l'aurait, lui-même, perçue de l'organisme de prévoyance ; Sur le harcèlement moral, l'exécution déloyale du contrat de travail et la résiliation du contrat de travail : Mme Z... conclut qu'elle a été victime d'un harcèlement moral de la part de son employeur, celui-ci procédant des modalités imposées en matière de durée de travail, qui viennent d'être analysées, comme des conditions relatives à l'organisation de son emploi du temps, à l'absence de visite médicale et à sa mutation pour le centre de Saint Germain En Laye ; il est vrai, que l'avenant précité au contrat de travail de Mme Z... stipule que qu'en cas de modification, l'emploi du temps de la salariée doit être porté à sa connaissance 7 jours avant ; les pièces produites démontrent, cependant, que cette stipulation était rarement observée -cette inobservation accroissant la pression et la tension résultant, déjà, en eux-mêmes ; un tel contexte colore aussi le reproche fait à la société TAN par Mme Z..., en matière de visite médicale, l'employeur n'ayant fait passer aucune visite à l'intéressée, qu'il s'agisse de son embauche ou, par la suite, de la visite biennale ; la société TAN prétend avoir tenté vainement de s'adresser à divers organismes de médecine du travail et n'avoir pu adhérer à l'un d'eux que le 31 janvier 2012 ; elle ne produit, toutefois, aucune pièce à l'appui de ses affirmations et ne conteste pas, en tout état de cause, l'absence de visite médicale qui lui est imputée ; Mme Z... se plaint également à juste titre des conditions de la mutation qui, de Bourg la Reine à Saint Germain en Laye, lui a été notifiée le 24 juin pour le 1er juillet 2013, au motif que le centre de Bourg la Reine avait été vendu le 21 juin et que la société TAN n'entendait pas se séparer d'elle -prétendant aujourd'hui seulement que l'article L 1224-1du code de travail n'était pas applicable- ; en effet, si le contrat de la salariée comporte une clause de mobilité sur les Hauts de Seine et les Yvelines, la société TAN se devait de respecter un délai de prévenance qui, de sept jours en l'espèce, était insuffisant, d'autant que la salariée n'avait nullement été préparée par son employeur à ce brusque changement de ses conditions de travail ; le bouleversement de la vie personnelle de la salariée et la nécessaire organisation nouvelle qui s'en suivaient, exigeaient l'octroi d'un délai plus long que celui infligé à l'appelante, lequel méconnaissait les intérêts de celle-ci supposer que l'article L 1224 1 ne sont pas applicable, cette dernière ne saurait, de bonne foi, exciper de la clause de mobilité, dès lors qu'aucune circonstance susceptible de justifier une telle brutalité et une telle rapidité, n'est alléguée ; enfin, la cour ne retiendra plus, à la charge de l'employeur, la faute tirée du manque d'éléments fournis à la salariée à propos du calcul de la part variable, dès lors que postérieurement au jugement dont appel qui ordonnait à la société TAN de communiquer ses éléments à Mme Z..., la société TAN a produit ces éléments ; que si Mme Z... continue à critiquer ceux-ci, elle ne démontre pas en quoi ils seraient insuffisants ; cette régularisation ne fait pas disparaître, pour autant, le fait qu'antérieurement à la décision, la société TAN n'avait pas opéré , comme elle le devait, cette communication sollicitée par la salariée le 18 septembre 2013 et que, sur ce point, différent et moins lourd de conséquences que les précédents, la société TAN était également défaillante ; en définitive, les rythmes de travail imposés à Mme Z... étaient illicitement lourds et inhabituels; qu'en effet, le travail dominical dont la société TAN prétend dans ses conclusions qu'il était conforme au souhait de la salariée était surtout conforme au voeu de la société TAN qui, dans sa demande d'autorisation d'ouverture dominicale à l'administration, faisait état du risque de cessation des paiements encouru par l'entreprise, en cas de refus de sa demande; que si la société TAN joignait à celle-ci des attestations de salariés, dont Mme Z..., une telle présentation relativisait la spontanéité des attestations en cause ; qu'en obligeant Mme Z... à travailler le dimanche alors même qu'elle n'y était pas autorisée, la société TAN a fait preuve, envers Mme Z..., de mauvaise foi dans l'exécution du contrat, ne visant par tous moyens que son seul intérêt ; il résulte des énonciations qui précèdent que les violations et manquements imputables à la société TAN, ont eu pour effet de créer une charge de travail anormalement lourde, sans pause, sans visite médicale, le dimanche, en faisant usage de de traitements, irrespectueux de la personne de Mme Z... ; l'ensemble de ces éléments caractérise des conditions de travail dont Mme Z... soutient à bon droit qu'elles relèvent du harcèlement moral car les effets de ces conditions de travail sur son état de santé ne sont pas contestables puisque, du jour de l'annonce de sa mutation le 21 juin 2013, l'appelante a été placée en arrêt maladie pour « anxiété dépression en relations avec activités professionnelles , ; que cette concomitance établit le lien entre l'état de santé de la salariée et l'annonce de sa mutation ; l'ensemble des manquements ci-dessus constituent aussi une exécution déloyale du contrat de travail, en ce qu'ils sont, comme déjà dit, l'expression par la société TAN d'un intérêt pris en faveur de son seul avantage, au mépris de celui de la salariée ; pour autant, le préjudice consécutif à cette exécution déloyale n'apparaît pas, au cas d'espèce, différent de celui constitué par le harcèlement moral, de sorte qu'une seule indemnité sera allouée ; au regard de sa durée et de sa nature, le préjudice ainsi lié à la fois au harcèlement moral et à l'exécution contractuelle déloyale, sera justifiée par l'allocation de la somme de 15 000 euros ;

ET AUX MOTIFS EVENTUELLEMENT ADOPTES QUE il résulte des dispositions de l'article L3121-34 du Code du travail la durée journalière de travail ne peut excéder heures par jour. Par ailleurs, l'article L3121-33 prévoit une pause de vingt minutes au-delà de six heures de travail. II est établi que le centre de bronzage était ouvert en continu, qu'un seul salarié y était affecté et l'employeur ne démontre pas qu'une personne venait remplacer la salariée pour lui permettre d'effectuer sa pause. Les plannings (pièce 17) démontrent que Madame Z... a été amenée à travailler plus de 10 heures par jour et que les pauses ne pouvaient être prises. La véracité de la pièce 17 ne saurait être critiquée dans la mesure où l'employeur s'est appuyé sur elle pour contester des horaires du dimanche prétendument accomplis par la salariée le dimanche. Ce grief est donc établi, étant précisé que cela n'était pas très fréquent.

1-ALORS QUE, ne constituent un harcèlement moral que les agissements répétés de harcèlement moral qui ont pour objet ou pour effet une dégradation de ses conditions de travail susceptible de porter atteinte aux droits et à la dignité du salarié, d'altérer sa santé physique ou mentale ou de compromettre son avenir professionnel ; qu'un rythme de travail important ou encore une charge de travail anormalement lourde ne constituent pas en tant que tels un harcèlement moral s'ils ne remplissent pas les conditions ainsi énoncées; qu'en l'espèce, pour dire que la salariée avait subi un harcèlement moral, la Cour d'appel a seulement relevé que le rythme de travail de la salariée illicitement lourd et inhabituel ; Qu'en statuant ainsi, la Cour d'appel n'a pas légalement justifié sa décision au regard des articles L. 1152-1 du Code du travail et 1134 a. 3 du Code civil.

2-ALORS surtout QU'en constatant seulement que la concomitance du jour de l'annonce de la mutation le 21 juin 2013 et de l'arrêt maladie pour « anxiété dépression en relations avec activités professionnelles » établit le lien entre l'état de santé de la salariée et l'annonce de sa mutation, sans constater le lien entre l'état de santé et les autres faits répétés susceptibles de caractériser le harcèlement quand seuls des faits répétés peuvent être retenus, la cour d'appel a encore privé sa décision de base légale au regard des articles L. 1152-1 du Code du travail et 1134 a. 3 du Code civil.

3-ALORS ENSUITE QUE, en matière de harcèlement, s'il appartient au salarié de produire les éléments de nature à laisser présumer l'existence d'un harcèlement moral, il incombe à l'employeur de démontrer que ses décisions sont justifiées par des éléments objectifs étrangers à tout harcèlement moral ; que les juges sont tenus d'apprécier si les éléments produits par les parties sont établis ; que l'employeur soutenait, dans ses écritures, et sur chacun des points retenus, pièces à l'appui, que les faits étaient justifiés par des éléments étrangers à tout harcèlement ; qu'en statuant comme elle l'a fait, sans examiner les éléments apportés par l'employeur pour justifier par des éléments objectifs les agissements qui lui étaient reprochés, la Cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard des articles L. 1152-1 et L. 1154-1 du Code du travail.

4-QU'AU SURPLUS, en affirmant que les pièces produites par l'employeur ne faisaient apparaitre aucun temps de pause, alors que précisément les plannings produits par lui faisaient apparaitre ces temps de pause, la Cour d'appel a dénaturé les pièces produites par l'employeur, en violation de l'article 1134 du Code civil.

DEUXIEME MOYEN DE CASSATION :

Le moyen fait grief à l'arrêt attaqué d'avoir condamné la société Tan à payer 15 000 euros de dommages et intérêts au titre du harcèlement moral et de l'exécution déloyale du contrat de travail ainsi que 2 500 euros au titre de l'article 700 du Code de procédure civile.

AUX MOTIFS énoncés au premier moyen

ET AUX MOTIFS QUE l'ensemble des manquements ci-dessus constituent aussi une exécution déloyale du contrat de travail, en ce qu'ils sont, comme déjà dit, l'expression par la société TAN d'un intérêt pris en faveur de son seul avantage, au mépris de celui de la salariée ; pour autant, le préjudice consécutif à cette exécution déloyale n'apparaît pas, au cas d'espèce, différent de celui constitué par le harcèlement moral, de sorte qu'une seule indemnité sera allouée ; au regard de sa durée et de sa nature, le préjudice ainsi lié à la fois au harcèlement moral et à l'exécution contractuelle déloyale, sera justifiée par l'allocation de la somme de 15 000 euros

1-ALORS QUE l'exécution fautive du contrat étant déduite des faits de harcèlement, la cassation à intervenir sur le premier moyen entrainera par voie de conséquence la cassation du chef de cette exécution fautive, en application de l'article 624 du code de procédure civile.

2-ALORS aussi QUE en matière d'exécution fautive du contrat de travail, la preuve incombe au salarié qui l'invoque ; qu'en déduisant des faits allégués par la salariée l'existence d'une exécution déloyale du contrat, sans examiner les éléments apportés par l'employeur pour justifier par des éléments objectifs les faits qui lui étaient reprochés, la Cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard des articles 1134 et 1147 du code civil, ensemble de l'article L. 1222-1 du code du travail

3-QU'AU SURPLUS, en affirmant que les pièces produites par l'employeur ne faisaient apparaitre aucun temps de pause, alors que précisément les plannings produits par lui faisaient apparaitre ces temps de pause, la Cour d'appel a dénaturé les pièces produites par l'employeur, en violation de l'article 1134 du Code civil.

TROISIEME MOYEN DE CASSATION :

Le moyen fait grief à l'arrêt attaqué d'avoir dit que la résiliation du contrat de travail devait produire les effets d'un licenciement sans cause réelle et sérieuse et d'avoir condamné en conséquence la société exposante à verser à la salariée les sommes de 3135,80 euros au titre de l'indemnité de préavis, de 313,58 euros au titre des congés payés afférents, de 1 907,61 euros au titre de l'indemnité de licenciement, de 12 000 euros au titre d'indemnité pour licenciement sans cause et réelle sérieuse, de 1 758,18 euros au titre des congés payés, et de 2 500 euros au titre de l'article 700 du Code de procédure civile.

AUX MOTIFS énoncés au premier moyen

Et AUX MOTIFS QUE les manquements litigieux justifient la résiliation du contrat de travail qu'en effet, les manquements de la société TAN sont graves et récurrents, ils ont trait aux conditions de travail quotidien de la salariée et leur conséquences insidieuses sont de celles qui ne se révèlent que lorsqu'elles deviennent insupportables ; en l'espèce, c'est bien l'annonce le 21 juillet 2013 de sa mutation qui, après les autres manquements endurés, a conduit Mme Z... à sa dépression ; la poursuite du contrat de travail s'avère désormais impossible et la résiliation de son contrat doit donc être prononcée.

AUX MOTIFS ENCORE QUE Sur les conséquences de la résiliation contractuelle : la résiliation du contrat produit les effets d'un licenciement sans cause réelle et sérieuse et emporte en conséquence l'allocation des sommes de 3135,80 euros au titre de l'indemnité de préavis, - outre 313,58 euros de congés payés afférents - et de 1907,61 euros au titre de l'indemnité de licenciement, conformément aux conclusions de l'appelante ; au titre de l'indemnité pour licenciement sans cause réelle et sérieuse, la cour, au regard du jeune âge de Mme Z..., née [...] , et de l'absence d 'élément sur la situation actuelle et les recherches éventuelles d'emploi de celle-ci, évalue à 12 000 euros le montant de l'indemnité litigieuse ; enfin, Mme Z... réclame le paiement d'une indemnité de congés payés correspondant à 23,96 jours acquis au 1er juin 2013, soit 1758,18 euros ; que, de son côté, la société TAN n'apporte aucune contradiction à cette demande qui sera de son côté accueillie comme dit ci-après dispositif ; la publication dans la presse du présent arrêt n'a pas lieu d'être ordonnée ; les intérêts au taux légal courront compter de ce jour pour toutes les condamnations à caractère indemnitaire, les autres sommes allouées, notamment les indemnités de rupture produisant intérêts à compter de la réception par la société TAN de sa convocation devant le bureau de conciliation du conseil de prud'hommes ; la société TAN devra remettre à Mme Z... un certificat de travail et une attestation Pôle emploi, comme le réclame l'appelante ; qu'il n'y a pas lieu, toutefois, d'assortir cette mesure, d'une astreinte ; la société TAN sera condamnée aux dépens et verser à Mme Z... la somme requise de 2500 euros en vertu des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile.

ALORS QUE, que pour dire que la résiliation du contrat de travail devait produire les effets d'un licenciement sans cause réelle et sérieuse, la cour d'appel a considéré que les faits de harcèlement moral et d'exécution déloyale du contrat étaient établis ; que la cassation à intervenir sur l'un et/ou l'autre des moyens précédents entrainera par application de l'article 624 du Code de procédure civile, la cassation par voie de conséquence du chef de l'arrêt relatif à la résiliation du contrat de travail

ALORS ENSUITE QUE, la rupture d'un contrat de travail produit les effets d'un licenciement sans cause réelle et sérieuse si et seulement si les manquements constatés à l'encontre de l'employeur sont suffisamment graves et rendent impossible la poursuite de la relation contractuelle de travail ; qu'en l'espèce, pour dire que la rupture du contrat de travail devait produire les effets d'un licenciement sans cause réelle et sérieuse, la Cour d'appel a retenu que l'employeur avait imposé à la salariée un rythme de travail anormalement important, que celle-ci n'avait pas pu bénéficier de la visite médicale dès après son embauche, ou encore qu'elle n'avait pu bénéficier d'aucune pause au cours de sa journée de travail ; que de tels éléments, à la supposer avérés, dès lors que la salariée a continué à exécuter sa prestation de travail sans discontinuer jusqu'en 2013, ne rendait pas impossible la poursuite de la relation contractuelle de travail ; qu'en statuant comme elle l'a fait, sans tirer les conséquences qui s'évinçaient de ses propres constatations, la Cour d'appel a violé les dispositions de l'article 1184 du Code civil et de l'article L. 1221-1 du Code du travail.

ALORS ENFIN QUE, la rupture d'un contrat de travail produit les effets d'un licenciement sans cause réelle et sérieuse si et seulement si les manquements constatés à l'encontre de l'employeur sont suffisamment graves et rendent impossible la poursuite de la relation contractuelle de travail ; que les juges sont tenus de motiver leur décision ; qu'en l'espèce, pour dire que la rupture du contrat de travail devait produire les effets d'un licenciement sans cause réelle et sérieuse, la Cour d'appel a retenu que l'employeur avait imposé à la salariée un rythme de travail anormalement important, que celle-ci n'avait pas pu bénéficier de la visite médicale dès après son embauche, que le délai de prévenance dans la mise en oeuvre de la clause de mobilité était insuffisant, ou encore qu'elle n'avait pu bénéficier d'aucune pause au cours de sa journée de travail ; que pourtant, la Cour d'appel n'a à aucun moment justifié sa décision quant à la question de déterminer si les éléments reprochés, à les supposer avérés, étaient suffisamment graves pour justifier que la rupture du contrat de travail soit imputée aux torts exclusifs de l'employeur ; qu'en statuant comme elle l'a fait, la Cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard des dispositions de l'article 1184 du Code civil et de l'article L. 1221-1 du Code du travail.


Synthèse
Formation : Chambre sociale
Numéro d'arrêt : 16-25778
Date de la décision : 30/01/2019
Sens de l'arrêt : Rejet
Type d'affaire : Sociale

Références :

Décision attaquée : Cour d'appel de Versailles, 13 septembre 2016


Publications
Proposition de citation : Cass. Soc., 30 jan. 2019, pourvoi n°16-25778


Composition du Tribunal
Président : M. Huglo (conseiller doyen faisant fonction de président)
Avocat(s) : SCP Thouvenin, Coudray et Grévy, SCP Yves et Blaise Capron

Origine de la décision
Date de l'import : 15/09/2022
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CCASS:2019:16.25778
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