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23/01/2019 | FRANCE | N°17-21966

France | France, Cour de cassation, Chambre sociale, 23 janvier 2019, 17-21966


LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE SOCIALE, a rendu l'arrêt suivant :

Attendu, selon l'arrêt attaqué (Poitiers, 24 mai 2017), que M. X... engagé le 4 mai 1998 en qualité de délégué commercial par la société Y... et Cie aux droits de laquelle se trouve la société Groupe Y... industrie, occupant en dernier lieu le poste de directeur national des ventes, a été licencié le 7 février 2014 pour insuffisance professionnelle ; qu'il a saisi la juridiction prud'homale ;

Sur le premier moyen :

Attendu que le salarié fait grief à l'arrêt de dire le licenciement fondé

sur une cause réelle et sérieuse, en conséquence de le débouter de ses demandes d'ind...

LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE SOCIALE, a rendu l'arrêt suivant :

Attendu, selon l'arrêt attaqué (Poitiers, 24 mai 2017), que M. X... engagé le 4 mai 1998 en qualité de délégué commercial par la société Y... et Cie aux droits de laquelle se trouve la société Groupe Y... industrie, occupant en dernier lieu le poste de directeur national des ventes, a été licencié le 7 février 2014 pour insuffisance professionnelle ; qu'il a saisi la juridiction prud'homale ;

Sur le premier moyen :

Attendu que le salarié fait grief à l'arrêt de dire le licenciement fondé sur une cause réelle et sérieuse, en conséquence de le débouter de ses demandes d'indemnisation afférentes à un licenciement dépourvu de cause réelle et sérieuse et à un licenciement brutal et vexatoire, alors, selon le moyen, que la cour d'appel s'est prononcée au visa de conclusions déposées le 29 septembre 2016 par le salarié, en renvoyant expressément à ces conclusions déposées et oralement reprises, quant aux moyens et à l'argumentation des parties ; qu'en statuant ainsi, tandis que le salarié avait régulièrement déposé des conclusions récapitulatives complétant son argumentation, postérieurement au 29 décembre 2016, et qui avaient été visées par le greffe le 29 mars 2017, la cour d'appel a violé l'article 455 du code de procédure civile ;

Mais attendu que la cour d'appel a statué au vu des prétentions et moyens des parties auxquels celles-ci s'étaient référées à l'audience du 29 mars 2017 ; que le moyen qui critique une erreur purement matérielle, n'est pas fondé ;

Sur le deuxième moyen :

Attendu que le salarié fait grief à l'arrêt, de dire le licenciement fondé sur une cause réelle et sérieuse et en conséquence de le débouter de ses demandes à ce titre, alors, selon le moyen :

1°/ que pour statuer sur un licenciement prononcé en raison d'une insuffisance de résultats, il appartient au juge de vérifier que les objectifs fixés au salarié sont réalistes et réalisables, peu important que les objectifs aient été définis par l'employeur, dans le cadre de son pouvoir de direction, ou résulte d'un accord des parties ; qu'en l'espèce, en retenant que le salarié n'avait pas fait valoir auprès de son employeur que les objectifs qui lui avaient été fixés lors de l'entretien du 8 mars 2013 étaient irréalisables en raison des moyens insuffisants mis à sa disposition ou des difficultés de la conjoncture, la cour d'appel a statué par un motif inopérant et privé sa décision de base légale au regard des articles L. 1235-1 et L. 1235-2 du code du travail ;

2°/ que le défaut de réponse à conclusions équivaut à un défaut de motifs ; qu'en l'espèce, le salarié faisait bien valoir dans ses écritures que « la baisse de chiffre d'affaires de l'année 2012 s'explique par un positionnement fort de l'entreprise sur le segment du négoce qui subit une chute importante du marché du neuf, outre un référencement important tel que Chausson Matériaux, alors même que cette décision était prise de concert avec la direction générale. La société sait parfaitement, par ailleurs, que le taux de remise moyen a augmenté afin de rester positionné sur un marché en forte chute et de faire face à la concurrence. Quant aux actions de référencement, en début d'année 2013, il a été fixé trois nouveaux référencements en cible et en cours d'année la direction a fait le choix de se rétracter sur l'un d'eux, en l'occurrence Caseo, les deux autres référencements ciblés ont été réalisés en 2013 » ; qu'en affirmant de manière péremptoire, pour débouter le salarié de ses demandes au titre de la requalification de son licenciement pour insuffisance professionnelle en licenciement sans cause réelle et sérieuse, que le salarié n'a pas fait valoir auprès de son employeur que les objectifs qui lui étaient fixés étaient irréalisables, en raison de moyens insuffisants mis à sa disposition ou des difficultés de la conjoncture, sans répondre à ce moyen opérant du salarié dont il résultait bien qu'il invoquait de telles difficultés et que les objectifs qui lui étaient fixés n'étaient pas réalisables, la cour d'appel a violé l'article 455 du code de procédure civile ;

3°/ que l'obligation de veiller au maintien de la capacité des salariés à occuper un emploi relève de l'initiative de l'employeur ; qu'en retenant, par des motifs inopérants, que le salarié n'a pas exprimé un besoin de formation, sauf en 2007 en souhaitant une « formation commune avec l'équipe des DR et des commerciaux, pour management et animation de l'équipe commerciale », demande non renouvelée ensuite, ce qui sous-entend qu'il ne l'estimait plus nécessaire et ne l'autorise donc pas à reprocher à son employeur un manque de formation à l'origine de son insuffisance professionnelle, tandis qu'il lui appartenait de rechercher si l'employeur avait, spontanément, veillé à adapter le salarié à son emploi comme le lui impose ses obligations légales, la cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard de l'article L. 6321-1 du code du travail ;

4°/ que le juge a l'obligation de ne pas dénaturer les documents de la cause ; qu'en l'espèce, le salarié faisait valoir à l'appui de la pièce n° 32 qu'il avait demandé à bénéficier de formations lors des entretiens d'évaluation de 2005, 2006, 2007 et 2010 ; qu'en affirmant pourtant que le salarié n'a pas exprimé un besoin de formation, sauf en 2007 en souhaitant une « formation commune avec l'équipe des DR et des commerciaux, pour management et animation de l'équipe commerciale », sans renouveler cette demande ensuite, la cour d'appel a dénaturé une pièce du salarié, et ainsi violé l'article 1134 du code civil, devenu article 1103, ensemble le principe faisant interdiction aux juges du fond de dénaturer les documents de la cause ;

Mais attendu qu'appréciant souverainement la valeur et la portée des éléments de fait et de preuve qui lui étaient soumis, la cour d'appel a constaté, hors toute dénaturation, répondant aux conclusions, que les défaillances professionnelles du salarié, qui avait participé aux réunions de formation organisées depuis 2005, étaient établies et étaient à l'origine de la baisse du chiffre d'affaires de l'entreprise ; qu'elle a ainsi légalement justifié sa décision ;

Sur le troisième moyen :

Attendu que le salarié fait grief à l'arrêt de rejeter ses demandes au titre d'une rupture brutale et vexatoire du contrat de travail, alors, selon le moyen, que la preuve des faits juridiques peut se faire par tout moyen et que le principe suivant lequel nul ne peut se constituer une preuve à soi-même n'est pas applicable à la preuve des faits juridiques ; qu'en l'espèce, pour écarter les prétentions du salarié au titre des circonstances brutales et vexatoires de la rupture, la cour d'appel a par principe refusé tout effet probant à une pièce du salarié, soit un courriel qu'il avait adressé le 10 janvier 2014 à l'employeur, au motif qu'on ne peut se constituer une preuve à soi-même ; qu'en statuant de la sorte, la cour d'appel a violé ce principe, ensemble l'article 1315 du code civil, devenu l'article 1353 ;

Mais attendu que le moyen, qui ne tend qu'à remettre en cause l'appréciation par la cour d'appel des éléments de preuve qui lui étaient soumis, n'est pas fondé ;

PAR CES MOTIFS :

REJETTE le pourvoi ;

Condamne M. X... aux dépens ;

Vu l'article 700 du code de procédure civile, rejette les demandes ;

Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, chambre sociale, et prononcé par le président en son audience publique du vingt-trois janvier deux mille dix-neuf.

MOYENS ANNEXES au présent arrêt :

.

Moyens produits par la SCP Rocheteau et Uzan-Sarano, avocat aux Conseils, pour M. X....

PREMIER MOYEN DE CASSATION :

Il est fait grief à la décision attaquée D'AVOIR dit le licenciement fondé sur une cause réelle et sérieuse, D'AVOIR en conséquence débouté M. X... de ses demandes d'indemnisation afférentes à un licenciement dépourvu de cause réelle et sérieuse et à un licenciement brutal et vexatoire, D'AVOIR dit n'y avoir lieu à l'application de l'article L. 1235-4 du code du travail, D'AVOIR débouté M. X... de ses demandes au titre de la nullité de la clause de non-concurrence et de L'AVOIR débouté de sa demande en tout état de cause au titre de l'indemnité compensatrice de non-concurrence ;

AU VISA des conclusions déposées au greffe le 29 septembre 2016 par M. X... ;

ALORS QUE la cour d'appel s'est prononcée au visa de conclusions déposées le 29 septembre 2016 par M. X..., en renvoyant expressément à ces conclusions déposées et oralement reprises, quant aux moyens et à l'argumentation des parties (cf. arrêt p. 3 et 4) ; qu'en statuant ainsi, tandis que M. X... avait régulièrement déposé des conclusions récapitulatives complétant son argumentation, postérieurement au 29 décembre 2016, et qui avaient été visées par le greffe le 29 mars 2017 (cf. production), la cour d'appel a violé l'article 455 du code de procédure civile.

DEUXIEME MOYEN DE CASSATION :

Il est fait grief à la décision attaquée, infirmative de ce chef, D'AVOIR dit le licenciement fondé sur une cause réelle et sérieuse et D'AVOIR en conséquence débouté M. X... de ses demandes d'indemnisation afférentes à un licenciement dépourvu de cause réelle et sérieuse ;

AUX MOTIFS QUE, sur le licenciement, l'insuffisance de résultats ne peut à elle seule caractériser une cause réelle et sérieuse de licenciement, sauf si des objectifs commerciaux, réalisables et compatibles avec le marché et les moyens du salarié concerné lui ont été préalablement fixés par l'employeur, ce contexte devant être vérifié par la cour ; l'incapacité du salarié à exercer ses fonctions constitue une cause réelle et sérieuse de licenciement, l'employeur devant invoquer des faits objectifs, précis et vérifiables ; l'insuffisance professionnelle devient fautive si elle procède d'une abstention volontaire ou d'une mauvaise volonté délibérée du salarié ; la lettre de licenciement qui fixe les limites du litige opposant les parties a énoncé plusieurs griefs qui seront examinés au visa de l'article L. 1235-1 du code du travail, le doute profitant au salarié ; en l'espèce, après avoir rappelé à M. X... que ses missions de directeur national des ventes lui imposaient de contribuer à la définition et la mise en oeuvre de la stratégie commerciale de l'entreprise et d'assurer l'encadrement, le pilotage, le suivi et le contrôle des équipes commerciales placées sous sa responsabilité, qu'il avait bénéficié, comme l'ensemble des membres de l'équipe de direction d'un accompagnement de conseils en stratégie commerciale et marketing en mars 2004 et décembre 2008 outre un accompagnement sur le commercial opérationnel en 2013, que par le passé, des dysfonctionnements dans l'exercice de ses prestations contractuelles avaient été constatés, que son attention avait ainsi été attirée sur le caractère satisfaisant de ses prestations lors des entretiens e 2009, 2011 et 2012 et qu'en dépit de ces alertes, il avait persisté dans certaines anomalies, la société GMI a reproché au salarié : - s'agissant de sa contribution à la définition et la mise en oeuvre de la stratégie commerciale de l'entreprise : de ne pas jouer le rôle moteur attendu de sa fonction de directeur national des ventes, de ne pas contribuer à la réflexion de l'entrepris quant aux pistes à mettre en oeuvre pour améliorer son positionnement concurrentiel, de ne pas s'être emparé des dépôts de bilan de certains concurrents pour jouer son rôle de force de proposition, de ne pas faire bénéficier la direction générale de retour d'informations précis et ponctuels, de ne pas se livrer à un travail d'analyse sur les problématiques identifiées dans le cadre des dossiers relevant de sa responsabilité, de ne pas adresser dans les meilleurs délais une information synthétique et organisée sur ces problématiques, les informations délivrées étant trop tardives et pas suffisamment étayées sur un plan quantitatif pour permettre à la direction générale de prendre position ; - s'agissant de sa mission d'encadrement et de suivi des équipes commerciales : de ne pas s'assurer de la maîtrise des fondamentaux (tarifs, produits et procédures) par les commerciaux récemment engagés avant de les laisser partir sur le terrain, de les laisser ainsi partir insuffisamment préparés au contact avec les clients, d'être insuffisant dans leur suivi et d'être ainsi dans l'impossibilité d'évaluer leurs aptitudes professionnelles en cours de période d'essai et de fournir, durant cette période, à la direction générale, un avis éclairé sur leurs compétences, d'avoir un contrôle et un suivi de l'activité des équipes commerciales insatisfaisant, alors qu'elles ne respectaient pas toujours les consignes données par la direction générale en matière de prospection et de politique tarifaire, de ne pas parvenir à obtenir de ses équipes un retour ponctuel de leur plan de tournée et de leur synthèse d'activité hebdomadaire, de ne pas avoir mis en place d'instruments de planification d'actions et de suivi du travail accompli, cette carence lui rendant impossible le contrôle efficace de ses équipes et des résultats de l'action commerciale, de ne pas avoir suivi sur ce point les recommandations faites au cours des deux derniers entretiens d'évaluation (suivi mensuel ou trimestriel avec vérification de l'évolution des indicateurs de performance des commerciaux) et être dans l'impossibilité de prendre des mesures de pilotage appropriées, de ne pas avoir une communication toujours pertinente avec les membres de ses équipes, et de leur transmettre notamment des informations réservées aux responsables ou aux acteurs de niveau national, ce qui révélait un défaut de maîtrise des différents plans de communication interne à l'entreprise ; la société GMI a considéré que ces différents dysfonctionnements avaient eu pour conséquence la non atteinte des objectifs quantitatifs et qualitatifs fixés lors du dernier entretien d'évaluation du 8 mars 2013 s'agissant notamment u chiffre d'affaires par matériaux, du taux moyen de remise par matériaux, des actions de référencement, que les anomalies listées entraînaient également des perturbations dans le fonctionnement de l'entreprise, que les équipes s'estimaient mal encadrées en raison de son management déficient, qu'il en résultait un taux de rotation des commerciaux anormalement élevé, que plusieurs secteurs fonctionnaient au ralenti, alors même que les régions concernées représentaient un fort potentiel commercial, que les opportunités de croissance représentées par la disparition de certains concurrents n'avaient pas été saisies, que la perte de dynamisme avait un impact négatif sur l'image de la société ; M. X... soutient qu'il n'a jamais reçu de fiche de poste, qu'il n'a pas bénéficié de formation spécifique aux fonctions de directeur national des ventes, que les faits reprochés n'ont jamais fait l'objet de reproches formels ou d'avertissements ; il considère que la société GMI ne démontre pas que les manquements reprochés sont directement ou indirectement responsables des mauvaises performances e la société alors que d'autres facteurs d'ordre commercial, tarifaire, qualité produits, services, etc. peuvent les expliquer ; il souligne que le chiffre des commandes a par ailleurs fortement progressé depuis juillet 2013, soit 7 mois avant son licenciement ; il ajoute que le motif du licenciement doit revêtir un degré de gravité suffisant rendant impossible, sans dommage pour l'entreprise, la poursuite de la relation de travail et justifiant ainsi sa rupture, et que selon lui, les griefs allégués ne satisfont pas à ce degré de gravité ; il considère que 50 cadres ont quitté l'entreprise depuis 2013 et que son licenciement traduit la volonté de l'employeur de se débarrasser de l'ensemble de l'ancienne équipe commerciale, dont il faisait partie, la société GMI ne voulant pas intégrer cette équipe dans la nouvelle stratégie de vente décidée par la direction ; les premiers juges ont retenu que M. X... avait reçu une fiche de poste, qu'il avait bénéficié des formations nécessaires à l'exécution de ses missions, que les manquements visé »s dans la lettre de licenciement concernaient les fonctions occupées par le salarié, que les remarques figurant dans les entretiens d'évaluation et les pièces produites aux débats caractérisaient la réalité des griefs, que les faits reprochés étaient objectifs, mais qu'en revanche, en l'absence de reproche formel ou d'avertissement antérieur, et la preuve du lien de causalité direct ou indirect entre ces manquements et la baisse de performance de la société n'étant pas rapportée, la société GMI ne pouvait se prévaloir de carences d'une gravité suffisante pour licencier M. X... ; la cour observe tout d'abord que la société GMI ne s'est pas prévalue d'un motif disciplinaire de licenciement et a seulement considéré, dans la lettre de licenciement, en visant des insuffisances précises, que M. X... avait, de manière récurrente, démontré son incapacité à assumer ses fonctions, ce qui l'empêchait d'atteindre les objectifs fixés et fondait un licenciement pour insuffisance professionnelle ; par ailleurs, M. X... précise que dès le 8 janvier 2014, M. Fabrice Y... l'a convoqué de manière informelle et lui a demandé de quitter l'entreprise et de ne plus se présenter dans son bureau, mais ne soutient pas, la cour l'ayant invité à l'audience à éclaircir cette prétention éventuelle, qu'il a subi un licenciement verbal antérieurement à l'engagement de la procédure de licenciement ; de même, M. X... considère que le sms reçu de M. B..., directeur des ressources humaines de la société GMI, le 31 janvier 2014 donc antérieurement à la notification du licenciement, caractérise la fragilité des griefs invoqués par son employeur pour rompre le contrat de travail pour insuffisance professionnelle ; or, si un procès-verbal d'huissier de justice en date du 12 février 2014 a constaté que le 21 janvier 2014, M. X... avait effectivement reçu de M. B... un message lui demandant si « 3 mois de préavis et 100000 euros avec clause de non concurrence sur 2014 » serait acceptable, ce message se concluait par « Fabrice n'est pas informé de cet échange », ce qui ne permet pas de retenir que les représentants légaux de la société GMI étaient décidés à négocier le départ de M. X... et à renoncer aux griefs reprochés, cette décision ne relevant pas du responsable des ressources humaines ; c'est donc sans pertinence que M. X... relève que M. B... a signé la lettre de licenciement, cette intervention, contrairement à celle discutée précédemment, étant conforme aux fonctions occupées par l'intéressé ; M. X... soutient vainement ne pas avoir reçu de fiche de poste ; en effet, les avenants signés successivement par M. X... et consacrant ses promotions en qualité de directeur de région (2003), directeur des ventes région sud (2004) puis directeur national des ventes, ont listé, de manière très détaillée, les éléments de rémunération variable, appréciés selon la réalisation des objectifs fixés, tout aussi détaillés, et le dernier avenant de 2005 a expressément prévu que les clauses non modifiées du contrat initial et des avenants restaient inchangées ; il s'en déduit que M. X... ne pouvait ignorer qu'il était chargé de deux missions principales, à savoir, d'une part la définition et la mise en oeuvre de la stratégie commerciale de l'entreprise, et, d'autre part, l'encadrement et le suivi des équipes commerciales, étant observé que l'avenant de 2004, dont les termes n'ont pas été sur ces points modifiés par l'avenant de 2005, a tout particulièrement énoncé les éléments définissant ces deux missions principales ; ainsi, même si la remise effective de la fiche concernée (pièce 7 de la société GMI) n'est pas établie, M. X... était parfaitement informé de la nature et de l'étendue de ses missions contractuelles et l'ensemble des griefs visés dans la lettre de licenciement correspondent aux missions contractuelles du salarié ; la société GMI justifie également de la participation de M. X... aux réunions de formation organisées depuis octobre 2005, dont celle de « direction commerciale », tenue le 4 octobre 2005 et à l'occasion de laquelle les missions de la direction commerciale ont été discutées, les réunions postérieures et pluri-annuelles étant consacrées au « management par cohésion » et aux « comités stratégiques », et complétant et réactualisant l'information du salarié sur le contenu et le déroulement de ses missions ; de même la cour dispose de l'ensemble des entretiens d'évaluation de M. X..., tenus entre 2007 et 2013, pour l'activité des années 2006 à 2012 ; leur examen relève que M. X... ne bénéficiait pas, à partir de 2009 notamment, d'une évaluation élogieuse, de nombreux points étant notés « à améliorer » que la plupart des objectifs n'étaient pas atteints, et que de nouveau objectifs lui ont été fixés, leur réalisation étant attendue dans le délai d'un an ; M. X... n'a pas contesté ces évaluations, ni les objectifs s'y trouvant énoncés, et n'a pas fait valoir auprès de son employeur un manque de formation à l'origine de son insuffisance professionnelle ; les pièces versées aux débats permettent de retenir qu'en 2012 et 2013, M. X... a adressé à M. Fabrice Y..., directeur général, des récapitulatifs hebdomadaires des « points marquants » mais seulement pour 14 semaines en 2012 et 17 semaines en 2013 et parfois avec retard ; la société GMI justifie qu'en réponse à ces envois, M. Fabrice Y..., par mails et plus particulièrement à partir du 7 mars 2013, parfois à plusieurs reprises par semaine, et jusqu'à l'engagement de la procédure de licenciement, a interrogé M. X... sur de nombreux points, en lui demandant notamment de compléter son information, de commenter les « points marquants » relevés, de définir des stratégies, de faire preuve de réactivité et d'occuper les secteurs délaissés par les concurrents ; les réponses partielles de M. X..., comme d'ailleurs les récapitulatifs des « points marquants » s'analysent comme de simples constats, soit de la situation, soit des demandes de la direction générale, et non comme la mise en oeuvre de moyens efficaces satisfaisant aux exigences du poste de directeur national des ventes occupé par le salarié et aux attentes expressément énoncées du directeur général ; ainsi, les premiers griefs, précisément développés dans la lettre de licenciement et concernant le manque de contribution à la définition et la mise en oeuvre de la stratégie commerciale de l'entreprise sont objectifs, vérifiés, réels et sérieux ; M. X... ne conteste pas la rotation importante des salariés de l'entreprise représentant la force de vente, dès lors qu'il liste, depuis 2012, les noms et dates de départ des intéressés, en soulignant que cette rotation a persisté après son licenciement et ne peut donc lui être imputée ; toutefois, la société GMI lui objecte à juste titre, la cour ayant déjà validé cette analyse dans les motifs précédents, que ses fonctions incluaient l'organisation administrative et l'animation des équipes et que ses responsabilités de directeur national des ventes lui imposaient de coordonner et de dynamiser l'équipe de force de vente, de lui donner une cohésion et de garantir sa performance, missions et objectifs que les formations déjà discutées avaient souligné comme priorité de l'entreprise ; les mails de M. Fabrice Y... déjà discutés ont également pointé très précisément les actions devant être menées par M. X... pour rendre opérationnels et compétitifs les commerciaux sur le terrain, surtout pour les nouveaux salariés embauchés, et de justifier de leur mise en oeuvre ; or, en réponse, M. X... s'est limité, ainsi que déjà retenu, à un constat de la situation en cours sans réaction efficace ; il est démontré plus particulièrement qu'entre 2012 et 2013 plus de 20 nouveaux responsables de secteur ont rejoint la société et qu'une majorité n'a pas poursuivi son contrat de travail ; or M. X... justifie seulement avoir suivi l'évaluation et l'intégration de 8 d'entre eux (ses pièces 33 à 41) et s'appuie seulement sur 3 attestations d'anciens collaborateurs témoignant de son implication, ce qui ne suffit pas compte tenu des effectifs précités des commerciaux pour résister aux griefs visés par la société GMI et dont la réalité est établie ; la persistance de la rotation du personnel commercial après le licenciement, peut révéler une défaillance du nouveau directeur des ventes mais n'exonère pas M. X... de ses propres manquements, et en tout cas ne l'autorise pas à expliquer, par simple affirmation et en contradiction avec la courte durée de certains ces nouveaux contrats de travail des commerciaux de son équipe, que ce turnover traduit la volonté de la société GMI d'évincer l'ancienne équipe commerciale ; en outre la société GMI lui rétorque exactement que cette rotation en personnel a été réduite de 41% à 28,5% depuis son licenciement ; ainsi, les deuxièmes griefs, concernant l'encadrement et le suivi des équipes commerciales, sont objectifs et précis, vérifiés, réels et sérieux ; enfin la société GMI établit qu'en 2013, M. X... a été particulièrement incapable de suivre les directives réitérées par M. Fabrice Y... sur la stratégie SY et qu'il s'est contenté de lui répondre « la stratégie est très claire » ; la société GMI justifie également, que le marché global de la fenêtre a reculé de 12,9% en 7 ans sur le territoire national mais que la baisse de son chiffre d'affaires de 20,5% a dépassé cette moyenne, la courbe s'étant en revanche inversée depuis 2014 donc après le licenciement du salarié ; les manquements de M. X... étant établis, la société GMI est fondée à se prévaloir d'un lien de causalité entre ces défaillances professionnelles du directeur national des ventes et la baisse du chiffre d'affaires de l'entreprise ; M. X... conteste sans pertinence cette analyse en arguant par simple affirmation qu'un défaut de qualité des produits ou de prix non concurrentiels, ces objections n'ayant pas été utilement opposées aux critiques et directives de M. Fabrice Y... durant l'exécution du contrat de travail ; la cour a d'ailleurs déjà retenu que M. X... n'avait pas considéré les objectifs fixés réalisables ; en conséquence de ces motifs, compte tenu du poste à haute responsabilité occupé par M. X... et sans avoir à discuter plus amplement certains des autres griefs, la cour dit le licenciement fondé sur une cause réelle et sérieuse et réforme la décision déférée ;

1°) ALORS QUE pour statuer sur un licenciement prononcé en raison d'une insuffisance de résultats, il appartient au juge de vérifier que les objectifs fixés au salarié sont réalistes et réalisables, peu important que les objectifs aient été définis par l'employeur, dans le cadre de son pouvoir de direction, ou résulte d'un accord des parties ; qu'en l'espèce, en retenant que M. X... n'avait pas fait valoir auprès de son employeur que les objectifs qui lui avaient été fixés lors de l'entretien du 8 mars 2013 étaient irréalisables en raison des moyens insuffisants mis à sa disposition ou des difficultés de la conjoncture, la cour d'appel a statué par un motif inopérant et privé sa décision de base légale au regard des articles L. 1235-1 et L. 1235-2 du code du travail ;

2°) ALORS QUE le défaut de réponse à conclusions équivaut à un défaut de motifs ; qu'en l'espèce, M. X... faisait bien valoir dans ses écritures que « la baisse de chiffre d'affaires de l'année 2012 s'explique par un positionnement fort de l'entreprise sur le segment du négoce qui subit une chute importante du marché du neuf, outre un référencement important tel que Chausson Matériaux, alors même que cette décision était prise de concert avec la direction générale. La société GMI sait parfaitement, par ailleurs, que le taux de remise moyen a augmenté afin de rester positionné sur un marché en forte chute et de faire face à la concurrence. Quant aux actions de référencement, en début d'année 2013, il a été fixé trois nouveaux référencements en cible et en cours d'année la direction a fait le choix de se rétracter sur l'un d'eux, en l'occurrence Caseo, les deux autres référencements ciblés ont été réalisés en 2013 » (conclusions de M. X... p. 26 in fine) ; qu'en affirmant de manière péremptoire, pour débouter M. X... de ses demandes au titre de la requalification de son licenciement pour insuffisance professionnelle en licenciement sans cause réelle et sérieuse, que le salarié n'a pas fait valoir auprès de son employeur que les objectifs qui lui étaient fixés étaient irréalisables, en raison de moyens insuffisants mis à sa disposition ou des difficultés de la conjoncture, sans répondre à ce moyen opérant du salarié dont il résultait bien qu'il invoquait de telles difficultés et que les objectifs qui lui étaient fixés n'étaient pas réalisables, la cour d'appel a violé l'article 455 du code de procédure civile ;

3°) ALORS QUE l'obligation de veiller au maintien de la capacité des salariés à occuper un emploi relève de l'initiative de l'employeur ; qu'en retenant, par des motifs inopérants, que M. X... n'a pas exprimé un besoin de formation, sauf en 2007 en souhaitant une « formation commune avec l'équipe des DR et des commerciaux, pour management et animation de l'équipe commerciale », demande non renouvelée ensuite, ce qui sous-tend qu'il ne l'estimait plus nécessaire et ne l'autorise donc pas à reprocher à son employeur un manque de formation à l'origine de son insuffisance professionnelle, tandis qu'il lui appartenait de rechercher si l'employeur avait, spontanément, veillé à adapter le salarié à son emploi comme le lui impose ses obligations légales, la cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard de l'article L. 6321-1 du code du travail ;

4°) ET ALORS QUE le juge a l'obligation de ne pas dénaturer les documents de la cause ; qu'en l'espèce, M. X... faisait valoir à l'appui de la pièce n° 32 qu'il avait demandé à bénéficier de formations lors des entretiens d'évaluation de 2005, 2006, 2007 et 2010 ; qu'en affirmant pourtant que M. X... n'a pas exprimé un besoin de formation, sauf en 2007 en souhaitant une « formation commune avec l'équipe des DR et des commerciaux, pour management et animation de l'équipe commerciale », sans renouveler cette demande ensuite, la cour d'appel a dénaturé la pièce n° 32 du salarié (comptes-rendus d'entretien d'évaluation, production), et ainsi violé l'article 1134 du code civil, devenu article 1103, ensemble le principe faisant interdiction aux juges du fond de dénaturer les documents de la cause.

TROISIEME MOYEN DE CASSATION :

Il est fait grief à la décision attaquée D'AVOIR débouté M. X... de ses demandes d'indemnisation afférentes aux conditions brutales et vexatoires de la rupture du contrat de travail ;

AUX MOTIFS QUE M. X... soutient que dès le 8 janvier 2014, M. Fabrice Y... lui a demandé de quitter son poste et l'entreprise, que le 9 janvier 2014 il a fait verrouiller la porte de son bureau, couper sa boîte mail, suspendre sa ligne téléphonique et informer les commerciaux et les clients de son départ de l'entreprise, que le 17 janvier 2014 il l'a reçu lors d'un entretien informel pour négocier une rupture amiable moyennant le versement d'une somme de 65.000 euros net et qu'après l'entretien préalable officiel, M. B... responsable ressources humaines, lui a proposé de négocier son départ moyennant le versement d'une indemnité de 100.000 euros outre de 3 mois de salaire au titre du préavis ; pour établir son éviction, M. X... s'appuie sur sa pièce 18, à savoir un mail qu'il a adressé à M. Fabrice Y... le 10 janvier 2014, et qui n'a pas d'effet probant, nul ne pouvant se constituer une preuve à soi-même ; M. X... produit également l'attestation de M. C..., aux termes de laquelle, le 9 janvier 2014, alors qu'une réunion de l'équipe commerciale avait été prévue par et avec M. X..., M. Fabrice Y... est venu annoncer que l'intéressé ne faisait plus partie de l'entreprise ; cette attestation isolée et insuffisamment circonstanciée ne démontre pas la réalité des faits allégués par M. X... ; en outre, la société GMI justifie que M. C... a été recruté par le nouvel employeur de M. X... en 2016, ce qui fragilise l'impartialité du témoin ; la cour a déjà répondu sur l'intervention de M. B... en cours de procédure de licenciement ; enfin M. X... ne pouvait pas ignorer que ces insuffisances professionnelles avaient déjà été soulignées par son employeur, notamment lors des entretiens individuels et qu'il ne répondait pas aux relances de M. Fabrice Y... telles que déjà discutées ; en conséquence, les manquements de la société GMI susceptibles d'engager sa responsabilité délictuelle ne sont pas caractérisés et la cour débout M. X... de sa demande d'indemnisation d'un préjudice brutal et vexatoire ;

ALORS QUE la preuve des faits juridiques peut se faire par tout moyen ; que le principe suivant lequel nul ne peut se constituer une preuve à soi-même n'est pas applicable à la preuve des faits juridiques ; qu'en l'espèce, pour écarter les prétentions de M. X... au titre des circonstances brutales et vexatoires de la rupture, la cour d'appel a par principe refusé tout effet probant à la pièce n° 18 de M. X..., soit un courriel qu'il avait adressé le 10 janvier 2014 à M. Y..., au motif que ne peut se constituer une preuve à soi-même ; qu'en statuant de la sorte, la cour d'appel a violé ce principe, ensemble l'article 1315 du code civil, devenu l'article 1353.


Synthèse
Formation : Chambre sociale
Numéro d'arrêt : 17-21966
Date de la décision : 23/01/2019
Sens de l'arrêt : Rejet
Type d'affaire : Sociale

Références :

Décision attaquée : Cour d'appel de Poitiers, 24 mai 2017


Publications
Proposition de citation : Cass. Soc., 23 jan. 2019, pourvoi n°17-21966


Composition du Tribunal
Président : Mme Farthouat-Danon (conseiller doyen faisant fonction de président)
Avocat(s) : SCP Célice, Soltner, Texidor et Périer, SCP Rocheteau et Uzan-Sarano

Origine de la décision
Date de l'import : 15/09/2022
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CCASS:2019:17.21966
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