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17/01/2019 | FRANCE | N°17-27952

France | France, Cour de cassation, Chambre civile 3, 17 janvier 2019, 17-27952


LA COUR DE CASSATION, TROISIÈME CHAMBRE CIVILE, a rendu l'arrêt suivant :

Sur le moyen unique, ci-après annexé :

Attendu, selon l'arrêt attaqué (Dijon, 5 septembre 2017), que la commune de Saint-Dizier, ayant fait construire un centre nautique et confié le lot "revêtements carrelages" à l'entreprise Y..., aujourd'hui en liquidation judiciaire, assurée auprès de la caisse régionale d'assurance mutuelle agricole du Grand-Est (la société Groupama), a, après la condamnation des constructeurs par un jugement du tribunal administratif du 6 juin 2013, assigné la sociét

é Groupama en paiement des condamnations prononcées contre la société Y... ;...

LA COUR DE CASSATION, TROISIÈME CHAMBRE CIVILE, a rendu l'arrêt suivant :

Sur le moyen unique, ci-après annexé :

Attendu, selon l'arrêt attaqué (Dijon, 5 septembre 2017), que la commune de Saint-Dizier, ayant fait construire un centre nautique et confié le lot "revêtements carrelages" à l'entreprise Y..., aujourd'hui en liquidation judiciaire, assurée auprès de la caisse régionale d'assurance mutuelle agricole du Grand-Est (la société Groupama), a, après la condamnation des constructeurs par un jugement du tribunal administratif du 6 juin 2013, assigné la société Groupama en paiement des condamnations prononcées contre la société Y... ;

Attendu que la société Groupama fait grief à l'arrêt de dire qu'elle ne pouvait dénier sa garantie au titre des travaux réalisés au centre nautique et de le condamner à payer diverses sommes à la commune de Saint-Didier ;

Mais attendu qu'ayant retenu que seule l'attestation d'assurance établie le 4 février 2002 et transmise à la commune de Saint-Dizier lui était opposable, que ce document, accolant au mot "carrelage" la mention "y compris étanchéité des sols", qui introduisait une confusion par rapport au libellé du contrat d'assurance, devait s'interpréter en faveur du tiers bénéficiaire de la garantie contre la partie qui l'avait rédigé et que l'activité "étanchéité des sols" n'avait pas été limitée aux seuls ouvrages cités, à savoir les salles de bains, les douches et les cuisines, la cour d'appel pu déduire de ces seuls motifs que l'assureur devait garantir l'activité "carrelage" et "étanchéité" des plages du centre nautique et des piscines ;

D'où il suit que le moyen n'est pas fondé ;

PAR CES MOTIFS :

REJETTE le pourvoi ;

Condamne la caisse régionale d'assurance mutuelle agricole du Grand-Est aux dépens ;

Vu l'article 700 du code de procédure civile rejette la demande de la caisse régionale d'assurance mutuelle agricole du Grand-Est et la condamne à payer à la commune de Saint-Dizier la somme de 3 000 euros ;

Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, troisième chambre civile, et prononcé par le président en son audience publique du dix-sept janvier deux mille dix-neuf.

MOYEN ANNEXE au présent arrêt :

Moyen produit par la SCP Ohl et Vexliard, avocat aux Conseils, pour la caisse régionale d'assurance mutuelle agricole du Grand-Est (Groupama Grand-Est)

Il est fait grief à l'arrêt attaqué d'avoir dit que Groupama Grand Est ne pouvait dénier sa garantie au titre des travaux réalisés au centre nautique de Saint-Dizier et de l'avoir condamnée en paiement de diverses sommes à la commune de Saint-Dizier,

Aux motifs que sur la garantie de l'assureur, la compagnie d'assurance Groupama Grand Est se prévaut de l'exclusion de sa garantie pour l'activité "étanchéité" à l'origine des désordres ; qu'elle rappelle que la cause des infiltrations résulte d'une exécution défectueuse, comme non conforme aux préconisations du fabricant du produit de l'étanchéité, par son assurée ; qu'elle soutient que l'activité "étanchéité des piscines" n'est pas incluse dans l'activité "carrelage" déclarée qui comprend l'étanchéité des sols mais uniquement pour les salles de bains, douches et cuisines, ce qui exclut les piscines ; qu'en outre, les travaux d'étanchéité ne sont pas l'accessoire de la pose des carrelages mais une activité distincte ; qu'elle précise à cet égard que la pose de carrelage n'implique pas nécessairement la réalisation préalable d'une étanchéité et que, dès lors, l'activité "carrelage" n'englobe pas forcément celle d'"étanchéité" ; qu'elle prétend également que le défaut de production des conditions générales applicables au contrat litigieux est sans emport sur la solution du litige puisque ses clauses ne forment qu'un fonds contractuel commun à tous les assurés alors que les conditions particulières permettent quant à elles d'individualiser la garantie d'assurance en fonction de chaque assuré, notamment quant au secteur d'activité professionnel concerné ; que s'agissant plus précisément de la police d'assurance souscrite en 2002, la compagnie Groupama relève qu'elle l'a été pour une année entière et qu'elle ne prévoyait pas les déclarations spécifiques de chaque chantier réalisé par l'assuré ; que de même, l'attestation d'assurance établie le 10 septembre 2007 ne concerne que des chantiers postérieurs et n'a donc aucune incidence sur la solution du litige ; qu'elle ajoute que les termes de la garantie souscrite en 2002 sont clairs et qu'ils n'ont pas besoin d'être interprétés ; que sa responsabilité ne saurait donc être engagée pour défaut d'information lequel ne pourrait, en tout état de cause, donner lieu à l'indemnisation que d'une perte de chance ; qu'elle prétend ensuite n'avoir pas renoncé, en prenant la direction du procès, aux exceptions dont elle n'avait pas connaissance à ce moment là, qu'elle a notifié son refus de garantie à la société Y... par lettre recommandée en date du 11 septembre 2008, soit dès qu'elle a été en possession d'éléments suffisants, à savoir les premières conclusions de l'expert, pour lui permettre de prendre position sur ses garanties ; qu'elle conteste dès lors toute faute de sa part ; que la commune de Saint Dizier expose quant à elle qu'elle dispose d'une action directe contre l'assureur de la société Y... sur le fondement de l'article L. 124-3 du code des assurances ; que l'exclusion de garantie au titre de l'activité "étanchéité" lui est inopposable au regard des dispositions du contrat d'assurance, des travaux confiés à la société Y... et de la jurisprudence qui impose à l'assureur de fournir une information claire et précise au bénéfice du tiers bénéficiaire de la garantie ; qu'elle estime que seule l'attestation d'assurance du 4 février 2002 lui est opposable et qu'elle vise bien l'étanchéité, aucune exclusion n'ayant été formulée, contrairement à ce qui ressort de l'attestation d'assurance établie le 10 septembre 2007 ; que l'activité "étanchéité" revêt un caractère accessoire à la pose de carrelage de sorte que les travaux d'étanchéité, formant corps avec la dite pose, étaient bien couverts par la police d'assurance ; qu'elle ajoute que la compagnie Groupama Grand Est a manqué à son obligation d'information claire et précise à son endroit et que, ce faisant, elle a engagé sa responsabilité sur le fondement de l'article 1382 du code civil ; qu'en toute hypothèse, les dispositions contractuelles doivent s'interpréter en faveur du bénéficiaire de la garantie, soit du maître de l'ouvrage ; qu'enfin, ayant pris la direction du procès, l'assureur a renoncé à se prévaloir de toutes exceptions dès lors qu'il disposait, dès l'origine, de l'ensemble des données du litige, notamment des pièces contractuelles pour se déterminer sur l'octroi de sa garantie ; qu'il est constant que la garantie décennale n'est acquise que pour les secteurs d'activité professionnelle déclarés par l'assuré ; que la compagnie Groupama Grand Est ne saurait cependant se prévaloir, à l'endroit du maître de l'ouvrage, des clauses du contrat d'assurance souscrit par la société Y... auxquelles la commune de Saint Dizier est totalement étrangère comme n'étant pas partie à ce contrat auquel elle n'a jamais eu accès ; que seule l'attestation d'assurance souscrite le 4 février 2002, transmise au maître de l'ouvrage, est donc opposable à celui-ci ; qu'il ressort de l'attestation précitée que la compagnie Groupama couvre les ouvrages de bâtiment énumérés comme suit :- carrelage (B/02) y compris étanchéité des sols, salles de bains, douches, cuisines, - revêtements plastiques épais de technique courante, à l'exclusion des travaux d'étanchéité (B/10), - revêtements souples, plastiques ou textiles (pose) (D/07), - peinture à l'exclusion des revêtements d'imperméabilisation ou d'étanchéité et des revêtements plastiques épais (E/03), - isolation thermique par l'extérieur ou par injection (S/06) - système thermo-revêtement de la société ARTE ; que l'assureur en déduit que l'étanchéité des carrelages ne concerne que les salles de bains, douches et cuisine ; qu'or, si tel était le cas, il y aurait lieu de considérer que l'activité carrelage ne s'applique également qu'aux ouvrages précités, ce qui n'est pas cohérent, la compagnie Groupama ne contestant pas assurer l'activité carrelage du centre nautique de Saint Dizier lequel ne s'apparente ni à une salle de bains, ni à une douche ni encore moins à une cuisine... ; par ailleurs que, comme l'a relevé à juste titre la cour de céans dans son arrêt du 12 avril 2016, concernant un litige opposant la compagnie Groupama à Monsieur Y..., l'activité étanchéité n'est pas implicitement comprise dans l'activité carrelage dès lors qu'il s'agit de deux domaines d'activité parfaitement distincts faisant appel à des matériaux, des procédés techniques ainsi que des savoir-faire différents, susceptibles de faire encourir des responsabilités spécifiques ; qu'ainsi, le contrat d'assurance liant l'assureur à la société Y... excluait expressément toute activité d'étanchéité en ne mentionnant que l'activité carrelage, sans autre précision ; que les travaux d'étanchéité ne figuraient pas au rang des activités garanties en application dudit contrat ; que tel n'est cependant pas le cas des dispositions de l'attestation d'assurance qui n'édictent aucune exclusion spécifique accolant, bien au contraire, au mot "carrelage" la mention "y compris étanchéité des sols", sans exclure expressément les locaux à usage de piscine ni les plages du centre nautique ; que de toute évidence, les termes de cette attestation introduisent une confusion par rapport au libellé du contrat d'assurance à laquelle l'attestation établie le 10 septembre 2007 est venue remédier en excluant, cette fois expressément, les étanchéités des bassins de piscine ; qu'il résulte de l'article 1162 du code civil et qu'il est constant qu'en matière contractuelle, une clause obscure doit s'interpréter en faveur de son bénéficiaire soit, au cas présent, de la commune de Saint Dizier, tiers bénéficiaire de la garantie, et contre la partie qui l'a rédigée ; qu'il est donc loisible de considérer, au vu des énonciations susvisées, qu'en l'absence d'exclusion formelle et au regard des termes utilisés, l'activité étanchéité des sols n'a pas été limitée aux seuls ouvrages cités, à savoir les salles de bains, les douches et cuisines ; que l'attestation d'assurance établie le 4 février 2002 garantit l'activité carrelage dont celle des plages du centre nautique et des piscines, ce qui n'est pas en soi contesté, mais également l'étanchéité telle qu'expressément visée dans la dite attestation, cette activité, au même titre que celle de carrelage, ne pouvant concerner exclusivement les salles de bains, douches et cuisines ; qu'aucune exclusion de garantie ne peut donc être valablement opposée à la commune de Saint Dizier ; qu'en conséquence, la garantie de la compagnie Groupama Grand Est a vocation à s'appliquer, dans sa relation avec la commune de Saint Dizier, à la pose des carrelages et aux travaux d'étanchéité y afférents tels que réalisés par la société Y... sur les plages de piscine ; que le jugement critiqué sera donc confirmé en ses dispositions en ce sens, sans qu'il soit besoin d'examiner plus avant les autres moyens soulevés par les parties ;

Et aux motifs éventuellement pour partie adoptés du jugement confirmé qu'aux termes de l'article L. 124-3 du code des assurances, le tiers lésé dispose d'un droit d'action directe à l'encontre de l'assureur garantissant la responsabilité civile de la personne responsable. L'assureur ne peut payer à un autre que le tiers lésé tout ou partie de la somme due par lui, tant que ce tiers n'a pas été désintéressé jusqu'à concurrence de ladite somme, des conséquences pécuniaires du fait dommageable ayant entraîné la responsabilité de l'assuré ; que selon les dispositions des conditions particulières d'assurance de la police numéro 42046474G-1015, souscrite à compter du 1er janvier 2002 et applicable au litige, les garanties souscrites sont l'activité carrelage, les revêtements plastiques épais de techniques courantes, à l'exclusion des travaux d'étanchéité, les revêtements souples plastiques ou textiles, la peinture à l'exclusion des revêtements d'imperméabilisation ou d'étanchéité et des revêtements plastiques épais et l'isolation thermique par l'extérieur ou par injection ; que le tribunal relève que la société d'assurance Groupama Grand Est ne dépose pas les conditions générales s'appliquant à ce contrat et celles qui font suite à l'avenant du 14 septembre 2007 qui n'est pas applicable au litige ; que l'attestation d'assurance établie le 4 février 2002 inclut dans la garantie de l'activité carrelage, l'étanchéité des sols, salles de bains, douches, cuisine ; que l'assureur ne dépose pas de questionnaire sur le risque assuré permettant de conclure à une dissimulation par la société Y... et compagnie de son activité réelle ; que la mention de l'étanchéité des sols, séparée de celle des salles de bains, douches et cuisine ne permet pas de spécifier que la liste des ouvrages est limitative ; que le cahier des clauses techniques particulières des travaux en cause, porte sur le lot revêtement de sols et muraux carrelés ; que ces éléments d'activité rentrent bien dans celle déclarée à l'assurance, dès lors que les revêtements en cause sont en carrelage ; que selon le cahier des clauses techniques en son paragraphe 02.30, l'imperméabilisation des dalles portes sur les plages situées au-dessus des locaux techniques, sur la pataugeoire extérieure, sur tous les locaux humides situés au-dessus de locaux exploités, sur les douches et sanitaires ; il n'apparaît donc pas que l'étanchéité du bassin de la piscine ait été à la charge de la société Y... ; que les activités périphériques décrites correspondent à des sols carrelés humides soumis régulièrement à l'eau courante ; qu'en conséquence, en l'absence d'exclusion formelle et au regard des termes utilisés par l'attestation d'assurance, le tribunal conclut à la garantie de la société d'assurance Groupama Grand Est ;

1° Alors que nonobstant l'interdiction des clauses d'exclusion autres que celles prévues à l'article A. 243-1 du code des assurances, la garantie de l'assureur, au titre de l'assurance de responsabilité obligatoire des constructeurs, ne concerne que le secteur d'activité professionnelle déclaré par le constructeur assuré ; qu'en retenant, pour retenir la garantie de la compagnie Groupama Grand Est dans sa relation avec la commune de Saint-Dizier, maître de l'ouvrage, que seule était opposable au maître d'ouvrage l'attestation d'assurance, dont les termes introduisaient une confusion au regard du libellé du contrat d'assurance, après avoir pourtant constaté que le contrat d'assurance liant l'assureur à la société Y... excluait expressément toute activité d'étanchéité, la cour d'appel a violé les articles L. 241-1, alinéa 1, et A. 243-1 du code des assurances et l'article 1134, devenu 1103, du code civil ;

2° Alors, en toute hypothèse, que la clause qui définit l'étendue de la garantie souscrite en énumérant certaines circonstances, ou en plaçant hors de son champ les dommages qui n'ont pas été causés dans des conditions qu'elle énumère, n'énonce pas une exclusion de garantie ; qu'en estimant, pour retenir la garantie de la compagnie Groupama Grand Est dans sa relation avec la commune de Saint-Dizier, maître de l'ouvrage, que l'attestation mentionnant l'activité de "carrelage (B/02) y compris étanchéité des sols, salles de bains, douches, cuisines" n'excluait pas expressément les locaux à usage de piscine ni les plages du centre nautique, après avoir pourtant relevé que l'activité étanchéité n'était pas implicitement comprise dans l'activité carrelage, et que les travaux d'étanchéité ne figuraient pas au rang des activités garanties en application du contrat, la cour d'appel a violé les articles L. 113-1 du code des assurances et 1134, alinéa 1er, devenu 1103, du code civil.


Synthèse
Formation : Chambre civile 3
Numéro d'arrêt : 17-27952
Date de la décision : 17/01/2019
Sens de l'arrêt : Rejet
Type d'affaire : Civile

Références :

Décision attaquée : Cour d'appel de Dijon, 05 septembre 2017


Publications
Proposition de citation : Cass. Civ. 3e, 17 jan. 2019, pourvoi n°17-27952


Composition du Tribunal
Président : M. Chauvin (président)
Avocat(s) : SCP Didier et Pinet, SCP Ohl et Vexliard

Origine de la décision
Date de l'import : 15/09/2022
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CCASS:2019:17.27952
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