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16/01/2019 | FRANCE | N°17-25696

France | France, Cour de cassation, Chambre commerciale, 16 janvier 2019, 17-25696


LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE COMMERCIALE, a rendu l'arrêt suivant :

Sur le moyen unique :

Attendu, selon l'arrêt attaqué (Nîmes, 6 juillet 2017), que M. X..., exerçant l'activité libérale de « conseil en gestion et conseil pour les affaires », a été mis en redressement judiciaire par un jugement du 26 novembre 2015, la société Bruno Y... , en la personne de M. Y..., étant désignée en qualité de mandataire judiciaire ; que la période d'observation expirée le 26 mai 2016 a été renouvelée jusqu'au 26 novembre 2016 pour permettre à M. X... d'élaborer un plan

de redressement ; que par un jugement du 16 janvier 2017, le tribunal a prononcé s...

LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE COMMERCIALE, a rendu l'arrêt suivant :

Sur le moyen unique :

Attendu, selon l'arrêt attaqué (Nîmes, 6 juillet 2017), que M. X..., exerçant l'activité libérale de « conseil en gestion et conseil pour les affaires », a été mis en redressement judiciaire par un jugement du 26 novembre 2015, la société Bruno Y... , en la personne de M. Y..., étant désignée en qualité de mandataire judiciaire ; que la période d'observation expirée le 26 mai 2016 a été renouvelée jusqu'au 26 novembre 2016 pour permettre à M. X... d'élaborer un plan de redressement ; que par un jugement du 16 janvier 2017, le tribunal a prononcé sa liquidation judiciaire en désignant la société Bruno Y... en qualité de liquidateur ;

Attendu que M. X... fait grief à l'arrêt de confirmer cette décision alors, selon le moyen, que le prononcé d'une liquidation judiciaire par conversion d'un redressement judiciaire suppose que le redressement du débiteur soit manifestement impossible ; qu'en affirmant, pour considérer que le redressement du débiteur était manifestement impossible et prononcer sa liquidation judiciaire, que ses prévisions quant à l'évolution de son chiffre d'affaires n'étaient pas confirmées par les commandes réelles qui restaient très modestes quand il était interdit au débiteur d'exercer sa profession en raison du prononcé de la liquidation judiciaire, la cour d'appel a statué par des motifs inopérants, privant sa décision de base légale au regard de l'article L. 640-1, alinéa 1er, du code de commerce ;

Mais attendu que l'arrêt retient, par motifs propres et adoptés, que M. X... ne donne pas d'informations suffisantes sur les clients potentiellement démarchés et le contenu de leurs commandes éventuelles, que son projet de plan de redressement repose, pour partie, sur la vente d'immeubles dont il n'est pas seul propriétaire et dont la cession supposerait, en raison des liens l'unissant aux acquéreurs pressentis, une demande de dérogation du ministère public ainsi que l'autorisation du juge-commissaire et que son estimation du passif à apurer est inférieur au passif réel ; que par ces seuls motifs, abstraction faite de ceux surabondants se référant au caractère modeste des commandes réelles, la cour d'appel a légalement justifié sa décision de prononcer la liquidation judiciaire de M. X... en raison de l'impossibilité manifeste de son redressement ; que le moyen est inopérant ;

PAR CES MOTIFS :

REJETTE le pourvoi ;

Condamne M. X... aux dépens ;

Vu l'article 700 du code de procédure civile, rejette les demandes ;

Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, chambre commerciale, financière et économique, et prononcé par le président en son audience publique du seize janvier deux mille dix-neuf.

MOYEN ANNEXE au présent arrêt :

.

Moyen produit par la SCP Nicolaÿ, de Lanouvelle et Hannotin, avocat aux Conseils, pour M. X....

Il est fait grief à l'arrêt confirmatif attaqué d'avoir ouvert une procédure de liquidation judiciaire sur conversion d'un redressement judiciaire à l'égard de M. Serge X... conformément aux articles L. 640-1 et suivants du code de commerce et celles du décret y afférent et d'avoir, par conséquent, refusé d'homologuer le plan de redressement établi par M. X... ;

Aux motifs propres que « La procédure de redressement judiciaire est aux termes de l'article L 631-1 du code de commerce, destinée à permettre la poursuite de l'activité de l'entreprise, le maintien de l'emploi et l'apurement du passif. La procédure de liquidation judiciaire est ouverte, suivant les dispositions de l'article L 640-1 du code de commerce, au débiteur en état de cessation des paiements dont le redressement de l'activité est manifestement impossible. M. X... exerce une activité indépendante. A l'ouverture de la procédure collective, il n'employait aucun salarié. Le passif déclaré s'élève à la somme de 610.467,43 euros. M. X... chiffre le passif à apurer à un montant de 258.005, 59 euros après avoir déduit les sommes suivantes :
- 65.000 euros correspondant à une condamnation au profit de la banque HSBC suivant jugement du 27 janvier 2015 (jugement non produit) prononcé par le tribunal de commerce de Nîmes. M. X... a interjeté appel et l'affaire a été radiée du rôle de la cour par ordonnance du 3 mars 2016 à défaut de diligences des parties pour reprendre l'instance (rg 15/00817). Celle-ci peut encore être reprise.
- la différence entre le montant déclaré par la BNP et celui qui sera « vraisemblablement admis » selon le rapport du mandataire judiciaire, soit 14.690 euros au lieu de 18644,64 euros.
- 283.507,59 euros, montant de la créance déclarée par la BP des Alpes au titre d'une caution solidaire accordée par M. X... en garantie de la dette de la SCI CPSF.
Effectivement, Me Z..., mandataire judiciaire et agissant en qualité de mandataire judiciaire à la liquidation judiciaire de la société SCPF a été autorisé à vendre le bien immobilier de la SCI CPSF à deux acquéreurs désignés, pour un prix de 250.000 euros soit un prix net vendeur de 236.000 euros, lequel a la charge de la commission de l'agence d'un montant de 14.000 euros. Le prix de vente sera à répartir entre les créanciers. Dans l'hypothèse d'une affectation au profit de la BP des Alpes, M. X... ne devrait pas être poursuivi en sa qualité de caution à hauteur du produit de la vente.
Il reste néanmoins le solde de la créance déclarée, non couvert, par le prix de vente de la maison, soit 47507,59 euros sur la somme de 283.507,59 euros. Le passif à apurer sera donc supérieur au passif retenu par M. X..., de façon certaine pour une somme de 47507,59 euros, outre une somme éventuelle de 65.000 euros. Il est constitué pour le surplus et pour l'essentiel d'une dette fiscale pour la CFE 2014 et 2015, de la taxe d'habitation 2012 à 2014 et du redressement d'impôt sur le revenu de 2010 à 2012 et de l'impôt sur le revenu des années 2013 et 2014, ainsi que des cotisations RAM des professions libérales des années 2012 à 2015. Pour apurer ce passif, M. X... compte à hauteur de 23.667 euros sur la vente de parts indivises dans un garage, à sa soeur, et d'un appartement aux parents de sa compagne. Il est fait référence dans le rapport de Me Y... aux deux promesses d'achat. Ce dernier précise qu'il sollicitera une estimation par un tiers, rappelant que ces cessions doivent donner lieu à une saisine du juge commissaire par le procureur de la république. M. X... compte en second lieu sur les revenus de son activité professionnelle. Le compte de résultat de l'exercice 2016 révèle que M. X... a encaissé des recettes pour un montant de 28.400 euros, pour un résultat net imposable de 23.248,52 euros. Selon M. X..., son activité était en sommeil les années précédentes. Il résulte du rapport du mandataire judiciaire du 25 janvier 2016 qu'il a dégagé de son activité un résultat net de 3000 euros en 2013 et 5000 euros en 2014 pour des prestations facturées à la SARL Cévennes confort, dirigée par sa compagne.
M X... n'a pas obtenu la suspension de l'exécution provisoire de plein droit attachée au jugement de liquidation judiciaire en date du 17 janvier 2017. Il bâtit donc son plan de redressement sur un prévisionnel retenant une augmentation régulière de son chiffre d'affaires, de 47.000 euros en 2017 pour un résultat de 35.682 euros, 61.500 en 2018 pour un résultat de 43.971 euros, 63.500 en 2019 pour un résultat de 43.000 euros.
L'appelant verse aux débats les lettres de mission signées pour une durée de 3 ans et conclut pouvoir au mois de juillet 2017 solliciter les acomptes contractuels pour un montant de 19500 euros. Il s'agit des entreprises suivantes :
- Cévennes Confort suivant lettre de mission du 4 mai 2017 pour une somme forfaitaire ht annuelle de 12000 euros (entreprise dirigée par sa compagne) ;
- Erai Export suivant lettre de mission du 4 mai 2017 pour une somme forfaitaire ht annuelle de 24.000 euros ;
- Le royaume du chauffage suivant lettre de mission du 4 mai 2017 pour une somme forfaitaire annuelle de 3000 euros.
Soit un total de 39.000 euros.
M. X... fait état des clients prospectés qui s'engageront sous réserve de l'arrêt qui sera prononcé par la cour de céans mais aucun autre renseignement n'est donné sur ce point. Sa trésorerie était positive de 17687,52 euros (avant encaissement du chèque de 12250 euros destiné au liquidateur judiciaire) au 23 décembre 2016. Il convient également de tenir compte de prélèvements mensuels pour permettre à M. X... de faire face à ses charges de la vie courante.
Le plan proposé par M. X..., et qui n'a pas fait l'objet de refus par les créanciers prévoit le versement de dividendes annuels progressifs de :

- 7740,17 euros l'année N +1,
- 12 900,28 euros l'année N + 2, -18 060,40 € l'année N+3,
- 25 800,56 euros l'année N + 4,
- 32 250,70 € les six années restantes soit un total de 258.005,61 euros.
Même s'il convient de tenir compte de l'effet de l'exécution provisoire du jugement de liquidation, les commandes réelles restent très modestes et ne confirment pas, en l'absence d'autres éléments, la possibilité d'une augmentation sensible du chiffre d'affaires tel que retenu dans le prévisionnel de M. X.... Il convient par ailleurs de tenir compte d'un passif à apurer supérieur à celui pris en compte par M. X... pour une somme de 47.507,59 euros. Au regard de l'ensemble de ces éléments, le redressement du débiteur est manifestement impossible car il ne dégagera pas de l'activité professionnelle qu'il entend poursuivre un revenu suffisant, ajouté au prix de vente de l'immobilier pour la somme de 23667 euros, pour faire face à l'apurement du passif. Le jugement entrepris sera par conséquent confirmé en ce qu'il a prononcé la liquidation judiciaire de M. X.... Les dépens resteront à sa charge. »

Et aux motifs éventuellement adoptés que « La procédure de liquidation judiciaire est ouverte, suivant les dispositions de l'article L 640-1 du même code au débiteur dans l'impossibilité de faire face au passif exigible avec son actif disponible et que le redressement de l'activité apparaît manifestement impossible. En l'espèce, les éléments comptables transmis par Monsieur X... font apparaître un chiffre d'affaire au 31 août 2016 d'un montant de 14 350 euros avec un résultat d'un montant de 9513 euros. Ainsi, le prévisionnel sur douze mois établi à la somme de 21053 euros ne semble pas cohérent par rapport au résultat obtenu sur une durée de huit mois. Il convient de constater qu'en tenant compte du prévisionnel, Monsieur X... ne pourra plus respecter les exigences du plan après la 3° année. Par ailleurs, le plan repose pour partie sur la cession de biens immobiliers dont Monsieur X... n'est pas propriétaire en propre et soumise à autorisation du juge commissaire et du ministère public. Enfin, il est poursuivi pour insuffisance d'actifs à hauteur de 3100,73 euros (sic) par Maître A... es qualité de liquidateur du groupe CLAF. Ainsi, il résulte des éléments versés au dossier que le redressement est donc manifestement impossible et la conversion en liquidation judiciaire est inévitable ».

Alors que le prononcé d'une liquidation judiciaire par conversion d'un redressement judiciaire suppose que le redressement du débiteur soit manifestement impossible ; qu'en affirmant, pour considérer que le redressement du débiteur était manifestement impossible et prononcer sa liquidation judiciaire, que ses prévisions quant à l'évolution de son chiffre d'affaires n'étaient pas confirmées par les commandes réelles qui restaient très modestes quand il était interdit au débiteur d'exercer sa profession en raison du prononcé de la liquidation judiciaire, la Cour d'appel a statué par des motifs inopérants, privant sa décision de base légale au regard de l'article L. 640-1, alinéa 1er, du code de commerce.


Synthèse
Formation : Chambre commerciale
Numéro d'arrêt : 17-25696
Date de la décision : 16/01/2019
Sens de l'arrêt : Rejet
Type d'affaire : Commerciale

Références :

Décision attaquée : Cour d'appel de Nîmes, 06 juillet 2017


Publications
Proposition de citation : Cass. Com., 16 jan. 2019, pourvoi n°17-25696


Composition du Tribunal
Président : Mme Mouillard (président)
Avocat(s) : SCP Marc Lévis, SCP Nicolaý, de Lanouvelle et Hannotin

Origine de la décision
Date de l'import : 15/09/2022
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CCASS:2019:17.25696
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