LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE COMMERCIALE, a rendu l'arrêt suivant :
Sur le moyen unique, pris en sa première branche :
Vu l'obligation pour le juge de ne pas dénaturer l'écrit qui lui est soumis ;
Attendu, selon l'arrêt attaqué, que la société Y... BTP a conclu avec la société GE Capital un contrat de crédit-bail portant sur un tracteur acheté le 19 décembre 2005 à la société Etablissements B... ; que Mme Y... a acheté ce tracteur le 24 décembre 2010 ; qu'invoquant des fautes commises par la société SAE matériel lors d'interventions effectuées sur le véhicule pour remédier à des pannes, Mme Y... l'a assignée en indemnisation du coût de la location d'un véhicule de remplacement ; que la société Axa France IARD est intervenue volontairement à l'instance, en qualité d'assureur de la société SAE matériel ;
Attendu que pour rejeter la demande de Mme Y... dans son intégralité, l'arrêt retient que celle-ci ne peut sérieusement justifier avoir acquitté les factures de location dont aucune n'est à son nom par la production de ses seuls relevés bancaires sur lesquels est ajouté de façon manuscrite le nom B... face à des montants en débit au titre de chèques ;
Qu'en statuant ainsi, alors que les factures de location d'un tracteur émises par la société Alpes occasion service et versées aux débats par Mme Y... sont établies au nom de cette dernière, ce qui est de nature à démontrer qu'elle en a personnellement supporté le coût et qu'elle pourrait, au moins pour la période postérieure à la vente du tracteur à son profit, en réclamer directement le remboursement à la société SAE matériel, la cour d'appel, qui a dénaturé les termes clairs et précis de ces documents, a violé le principe susvisé ;
PAR CES MOTIFS, et sans qu'il y ait lieu de statuer sur l'autre grief :
CASSE ET ANNULE, mais seulement en ce que, confirmant le jugement, il rejette la demande de Mme Y... tendant à la condamnation in solidum des sociétés SAE matériel et Axa France IARD au paiement de la somme de 31 616,26 euros à titre de dommages-intérêts au titre du coût de la location d'un véhicule auprès de la société Alpes occasion service pour la période du mois de janvier 2010 au mois de septembre 2011 et en ce qu'il statue sur les dépens et l'application de l'article 700 du code de procédure civile, l'arrêt rendu le 8 juin 2017, entre les parties, par la cour d'appel de Grenoble ; remet, en conséquence, sur ces points, la cause et les parties dans l'état où elles se trouvaient avant ledit arrêt et, pour être fait droit, les renvoie devant la cour d'appel de Chambéry ;
Condamne les sociétés Axa France IARD et SAE matériel aux dépens ;
Vu l'article 700 du code de procédure civile, rejette leur demande et les condamne à payer à Mme Y... la somme globale de 3 000 euros ;
Dit que sur les diligences du procureur général près la Cour de cassation, le présent arrêt sera transmis pour être transcrit en marge ou à la suite de l'arrêt partiellement cassé ;
Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, chambre commerciale, financière et économique, et prononcé par le président en son audience publique du dix-neuf décembre deux mille dix-huit.
MOYEN ANNEXE au présent arrêt :
Moyen produit par la SCP Bernard Hémery, Carole Thomas-Raquin, Martin Le Guerer, avocat aux Conseils, pour Mme Y....
Il est fait grief à l'arrêt confirmatif attaqué d'AVOIR débouté Mme I. Y... de sa demande tendant à la condamnation de la société SAE matériel, in solidum avec la société Axa France iard, à lui payer la somme de 31 616,26 euros à titre de dommages-intérêts pour le coût financier généré par la location d'un autre véhicule auprès de la société Alpes occasion service concernant la période allant du mois de janvier 2010 au mois de septembre 2011.
AUX MOTIFS QUE " Il est constant qu' Isabelle Y... a acquis le véhicule en cause le 24 décembre 2010 au prix de 607,95 euros TTC étant précisé que ce véhicule avait été acheté au prix de 73 661,64 euros TTC en décembre 2005.
L'éventuel état défectueux de ce tracteur ne peut justifier de l'existence d'un préjudice subi par Isabelle Y... et imputable à la SAE matériel suite à la mauvaise réalisation des travaux prétendue compte tenu du coût d'acquisition de ce véhicule.
Par ailleurs, Isabelle Y... ne peut sérieusement justifier avoir acquitté les factures de réparation ou de location litigieuses dont aucune n'est à son nom par la production de ses seuls relevés bancaires sur lesquels est ajouté de façon manuscrite le nom B... face à des montants en débit au titre de chèques.
Elle ne justifie dès lors pas du préjudice allégué à hauteur des différentes factures produites.
La demande d'indemnisation d'Isabelle Y... à l'encontre de la SAE matériel sur le fondement de la responsabilité délictuelle sera également rejetée" (arrêt p. 5).
1°) ALORS QUE le juge ne doit pas dénaturer l'écrit qui lui est soumis ; qu'en énonçant que Mme I. Y... ne pouvait sérieusement avoir acquitté les factures de location litigieuses, dont aucune n'est à son nom par la production de ses seuls relevés bancaires sur lesquels est ajouté de façon manuscrite le nom B... face à des montants en débit au titre de chèque alors que Mme I. Y... avait produit 21 factures établies à son nom par la société Alpes occasion service pour un montant total de 31 616,26 euros avec pour chacune la mention "PAYÉ", la cour d'appel a violé le principe susvisé.
2°) (Subsidiaire) ALORS QUE le préjudice subi par la victime doit être réparé dans son intégralité sans perte ni profit ; qu'en ayant rejeté la demande d'indemnisation de Mme I. Y... des frais de location d'un véhicule de remplacement au motif inopérant qu'elle avait acheté le tracteur le 24 décembre 2010 pour la somme de 607,95 euros, ce tracteur ayant lui-même été acheté au prix de 73 661,64 euros en décembre 2005, la Cour d'appel a violé l'article 1382 du Code civil dans sa rédaction antérieure à l'ordonnance du 10 février 2016.